Au risque de paraître imiter Nicolas Sarkozy à Benghazi, François Hollande devait se rendre à Tombouctou. Il n'a pas traîné...
"Et Tombouctou, c'est pour quand?" L'insistance mise par le Président de la République, durant plusieurs jours, pour avoir une réponse à cette question montrait bien qu'il avait un projet et une impatience en tête: aller à Tombouctou, ville emblématique et désormais symbole de la reconquête territoriale et idéologique du Mali.
Si j'ose dire, c'est de bonne guerre. Il faut exploiter à chaud les réussites. Face à une opinion nationale en quête d'autorité politique et en manque de fierté patriotique, François Hollande ne pouvait rêver mieux. Et même si c'en n'est pas le but, l'occupation de l'espace médiatique offre l'avantage de relativiser les problèmes quotidiens et d'oublier les gaffes et les divisions autour du mariage gay. Deux jours durant, on va donc avoir des images en continu rendant hommage à la France et à son pacifique président mué, contre toute attente, en chef de guerre.
Depuis le début, cette affaire, que des mauvais joueurs qualifiaient d'improvisée, est en réalité millimétrée, autant sur le plan médiatique que militaire. Pour autant, ce voyage présente des risques, pour François Hollande.
Physiques et personnels, d'abord: les conditions de sécurité à Tombouctou, sans comparaison avec Benghazi, ne peuvent pas écarter l'acte isolé d'un djihadiste infiltré. D'autre part, et le souvenir libyen est là pour nous le rappeler, le plus difficile n'est pas toujours la phase militaire. François Hollande ne commettra pas l'erreur d'aller crier victoire à Tombouctou, mais son message se retournerait contre lui si la reconstruction d'un Mali souverain et démocratique n'était pas le résultat durable de l'opération.
Demain, François Hollande sera plus acclamé en Afrique qu'en France. Ce sera la retombée d'une audace qui n'est pas sans danger!
Extrait de De l'abandon au mépris, Seuil.