« C’est une grande avancée pour la République, c’est une victoire collective de l’État de droit. »Mais bien sûr. C’est aussi une déroute en rase campagne de la réflexion individuelle. C’est une défaite de ceux qui pensaient que les gens sont assez intelligents pour se faire une opinion par eux-mêmes. C’est une branlée mémorable de ceux qui croyaient encore les politiciens capables d’indépendance tant est flagrante la soumission d’Orélifilipéti, l’onomatopée attribuée actuellement à la Culture, aux âneries de Valls, elle qui se comporte ici comme une véritable voiture balai du cortège hurlant du ministre de l’Intérieur en chasse contre les nazis d’internet.Par la suite, comme elle était bien lancée et qu’elle devait absolument combler le vide intersidéral de sa pensée par l’émission intempestive de sons en rapport vague avec le contexte, elle a continué en disant (7:00) :« Une idéologie abjecte, le négationnisme, n’a pas de droit de cité dans notre pays. Cet encadrement de la liberté d’expression en y mettant une frontière qui est justement celle de la négation de crimes contre l’humanité, de génocides, a été réaffirmé par le Conseil d’État. »Tiens, après l’antisémitisme, Dieudonné est maintenant négationniste ? Décidément, moins il fait de spectacles, plus il franchit les limites, dirait-on… Et pour sûr, comme le dit Orélifilipéti, il n’y a rien de mieux que l’encadrement de la liberté d’expression parce que chacun sait que trop de liberté d’expression tue la liberté d’expression. D’ailleurs, plus cette liberté est encadrée, et plus les pays sont libres, comme le montrent régulièrement la Chine, Cuba ou la Corée du Nord qui ont trouvé des moyens plus virils encore que ceux que propose l’Onomatopée. Je passe rapidement sur le fait que pour qu’un délit soit caractérisé, il faut encore qu’il soit commis, ce qui me semble difficile pour une décision prise alors que le spectacle n’avait pas encore eu lieu. Du reste, sentant qu’elle entrait sur le terrain glissant de cette fameuse limitation, elle a bien vite expliqué son point de vue (vers 7:50) :« La liberté d’expression je la défends, je la promeus… la liberté de création artistique. Mais là, Dieudonné n’est plus un artiste. Ce n’est ni un artiste, ni un martyr. Il a franchi toutes les limites de ce qui est acceptable dans une société démocratique comme la France, qui a vécu pendant la dernière guerre mondiale des événements tragiques et dramatiques. »Parce qu’Orélifilipéti sait ce qu’est un vrai artiste. Elle le sait très bien puisqu’elle en subventionne des milliers, alors d’abord ! Et elle sait fort bien qu’un artiste, un vrai, un gentil, ça raconte exclusivement des choses qui sont douces aux oreilles du pouvoir. Un artiste, ça ne cherche pas à se mettre à dos les autres, le peuple, en maltraitant une religion par exemple ou en osant un humour impossible avec des thèmes trop lourds de malheur et de signification !Oh. Wait.Oh. Wait.Oh. Wait.Ah oui, je sais, ce n’est pas la même chose parce que vous comprenez… il y a d’un côté les bons artistes humoristes et les mauvais artistes humoristes. Les bons artistes humoristes, ils rigolent certes de tout, mais pas avec tout le monde. Alors ils ont le droit de s’exprimer. Alors qu’en face, les mauvais artistes, là, ils rigolent de tout, hein, mais vraiment de tout, et ils ne le font pas avec tout le monde, si vous voyez ce que je veux dire, hein, n’est-ce pas ? Et c’est pas drôle. Alors que les bons, si.Vous me suivez ? La liberté d’expression, décidément, ce n’est pas pour tout le monde. Il y a un tri.Dès lors, Orélifilipéti n’a pas Free mais elle a quand même tout compris : il faudra poursuivre les octets et les bits de l’internet qui ne sont pas orientés comme il faut. Il faudra donc censurer proprement les images intolérables au nom de la dignité humaineparce que voilà. Oui, vous avez bien lu :« il faut prendre les dispositifs qui sont particuliers au net, et notamment à travers les hébergeurs, pour que cela ne puisse pas se répandre quand il y a des attaques contre la dignité de la personne humaine. »Rassurez-vous : cette petite excroissance de liberté qui vous permettait, jadis, de juger pour vous-même ce qui est ou non visible par vos propres yeux, cette petite tumeur ridicule qui vous autorisait bêtement à cliquer ou non sur une vidéo que vous soupçonniez d’être un peu indigne sur les bords, ne vous inquiétez pas, Orélifilipéti va l’ablater sans attendre. Une petite excision rapide, et il n’y paraîtra plus et vous vous en porterez mieux, parce qu’Orélifilipéti sait, elle, ce qui est digne ou pas (et pas vous, petit coquin).Sentez-vous le scandale qui se cache derrière ces paroles, derrière ce suivisme et cette servilité de la minustre derrière celui de l’Intérieur ? Comprenez-vous ce qu’il y a d’aberrant à ce qu’une ministre de la Culture dégoise ainsi avec tant de décontraction d’incroyables ignominies ?Car elle, ministre de la Culture, devrait se battre pour le droit d’expression. Mais non.Le ministère de la Culture qui se bat pour la censure, pour la limitation explicite du droit d’expression, ça ne se retrouve que dans les régimes totalitaires ou fascistes. Oui, le constat est là, implacable, sans la moindre ambiguïté : lorsque la Culture s’empresse d’intervenir pour dire ce qu’on a le droit de lire, d’écrire, de voir, d’entendre, c’est qu’on n’est plus dans la culture, mais dans la propagande.Entendons-nous bien : que le ministère de l’Intérieur fasse cette immondice ne surprend finalement pas ; c’est l’aboutissement triste et banal d’un travail de répression et de contrôle des foules auquel aboutit inévitablement un pouvoir faible qui devient policier, quasiment par obligation. Il est méprisable, mais il s’inscrit malheureusement dans la logique de ce à quoi ce ministère sert habituellement. En revanche, dès lors que ce même travail est entrepris avec application par le ministère de la Culture, on sombre effectivement dans ce que le pouvoir fait de pire : la manipulation ouverte de l’information, la censure instituée non par désir de contrôle des foules (rôle d’une police de la pensée, se plaçant a posteriori) mais comme nécessité pour l’éduquer (rôle d’une formation des esprits, se plaçant a priori).Je le dis ici : ce pays sombre doucement mais sûrement dans un fascisme qui se cachera derrière tous les pédonazis de l’internet, qui se travestira derrière les pages les plus veloutées de l’antifascisme, qui se parera des beaux discours de la sécurisation d’Internet contre les hordes du Mal, protéiformes et toujours désignées par un gouvernemaman bien renseigné, qui pavera notre enfer de ses meilleures intentions.Filippetti s’est mise à aboyer servilement derrière un gouvernement dont le ministre de l’Intérieur s’est laissé piéger dans une procédure judiciaire délétère et suicidaire ; ce faisant, elle a emboîté le pas de Valls dans une démarche qui ne pourra conduire le pays qu’à la catastrophe ou la risée ou les deux. Car ou bien nos deux ministres en perdition intellectuelle se rendent compte de la dérive consternante qu’ils ont entraînée, et le rétropédalage promet d’être épique et projettera le pays dans des sommets de ridicule, ou bien ils persistent, s’enfoncent et emmènent tout le monde avec eux vers des contrées malheureusement très connues et pas du tout bisou.Regardez où va le pays, où ces buses néfastes nous emmènent, ouvrez les yeux : le petit chemin qui sent de moins en moins la noisette termine dans un gouffre.
mercredi 15 janvier 2014
Filippetti, le fascisme à la portée des caniches
Parce que maintenant, en France, le Politiquement Sain, Propre et Bon a gagné, parce qu’il doit absolument écraser de sa botte virile les petits cancrelats qui ne sont ni bons, ni sains, parce que nos élites savent maintenant ce qui est bon pour le peuple et qu’ils en ont assez que ce dernier s’avachisse dans des savoirs alternatifs, interlopes, ou douteux, et parce que la censure a posteriori ne suffit plus, Filippetti, la piètre excuse en charge du Ministère de la Culture, a décidé de sortir de son silence.
Elle n’aurait peut-être pas dû ; après tout, un doute sur ses motivations intellectuelles pouvait subsister tant qu’elle conservait le silence (et puis, lorsque sa mâchoire est fermée et ses cordes vocales à l’arrêt, rien n’empêche d’imaginer qu’un cerveau fait du crawl entre ses deux oreilles). Mais elle n’a pas pu s’en empêcher. La trop forte pression de paroles idiotes et d’inepties politiques, conjuguée à des concepts rhétoriques mal maîtrisés qui ont fait catalyseur, le tout dans la chaleur torride d’une actualité grotesque auront provoqué une véritable explosion de n’importe quoi bruyant au cours d’une émission télé sur BFTM-TV dont la vidéo, disponible ci-dessous, ne laisse aucun doute sur ce qui s’est produit dans ce studio.
C’est ainsi que vers 6:18, on entend nettement la pauvrette déclarer en évoquant l’interdiction des spectacles quenelliers, je cite en allant me chercher l’éosine pour mes oreilles qui saignent :
L’ENNEMI INTÉRIEUR
L’ENNEMI INTÉRIEUR
Enfin, diront tous ceux qui attendaient de François Hollande qu’il clarifie son action, dans un sens ou dans un autre. Le président, hier, n’a pas paru effrayé par les mots « social-démocrate ». Il les a même revendiqués. Il a reconnu s’être rallié à la politique de l’offre. Il a confirmé que la réduction de la dépense publique n’épargnerait aucune des composantes qui y concourent.
Après avoir invité chacun à prendre sa part de ce « compromis social » et listé les « contreparties » exigées pour l’emploi, mettant de fait le Medef devant ses responsabilités, le chef de l’État a dit ne pas douter du soutien de sa majorité. Au point que Jean-Marc Ayrault lui posera la question de confiance à l’Assemblée au printemps, alors que la suppression annoncée des cotisations familiales des entreprises ne manquera pas de bousculer la gauche.
Afin que la France avance d’ici 2017, le président a précisé le calendrier de ces réformes. Quand l’avenir de Valérie Trierweiler a été évoqué, il a aussi promis d’apporter des réponses avant sa visite à Washington en février. En son corps public comme en son corps privé, François Hollande s’est voulu maître du temps et se réapproprier son destin. S’il veut bien arrêter d’être son propre ennemi de l’intérieur, pourquoi pas…
Le grand dégoût
Le grand dégoût
Sur les ondes, nous n’entendons plus qu’un refrain depuis 3 jours: "c’est une affaire privée". Et nous franchouillards, bien plus intelligents que les autres comme chacun sait, notamment que les Américains, les Anglais et les Allemands, nous ne nous intéressons pas à la vie privée des dirigeants! D’ailleurs (dernière trouvaille médiatique), n’est-ce pas la faute des services de sécurité qui protègent si mal le président? Et toute la classe dirigeante, de l’extrême droite à l’extrême gauche, en passant par le centriste Alain Juppé, à l’unisson, solidaire, se cale sur ce discours, piquants érigées comme un hérisson. Mais non! Ce n’est pas le problème! On est bien d’accord: chacun fait strictement ce qu’il veut avec sa vie. Nous ne sommes en aucun cas dans une logique puritaine. Le problème, c’est le grand écart entre "la France d’en haut", cette espèce de cour monarchique dégénérée et la "France d’en bas" qui trime pour s’en sortir. Un sondage CEVIPOF du 13 juin (réalisée avant l’affaire) le souligne: 87% des Français estiment que les hommes politiques ne se préoccupent pas des "gens comme eux". 11% font confiance aux partis politiques. La politique inspire du dégoût à 31% des Français et à 36% de la méfiance. Alors quoi? Moi dans mes activités d’enseignement universitaire, à Créteil, je vois des jeunes filles et garçons, de 20 à 25 ans, de toutes origines, faut-il le préciser, qui bossent 8 heures par jour pour des stages rémunérés 1/3 du SMIC, et traversent toute la région parisienne dans les transports en commun surpeuplés, sales et dangereux pour venir suivre les cours du soir et tenter de se faire une place dans la société. Et pendant ce temps, le roi et sa cour s’amusent. Oubli de l’intérêt public au profit du culte de l’ego. Et la démocratie, la politique, la République s’effondrent dans l’indifférence générale, au profit d’un climat d’anarchie, de nihilisme,de chaos, de montée de la haine et des extrêmes. Le problème, mesdames et messieurs, il est là bien entendu! On a compris que les politiques n’allaient pas changer le monde, ni la vie. Qu’ils se montrent dignes des électeurs, dignes des citoyens, c’est vraiment le minimum…
Une social-démocratie sous condition suspensive
Une social-démocratie sous condition suspensive
L’exercice lui va comme un gant, et le propos liminaire de sa conférence de presse semblait déterminé : oui, François Hollande, après 20 mois d’atermoiements, avait décidé de s’engager clairement pour les entreprises et de les mettre « au premier rang de la mobilisation » pour la croissance et pour l’emploi.
Magnifique. Tellement beau que c’est là qu’aurait dû s’arrêter le discours du chef de l’Etat. On aurait pu alors croire que sa conversion –imaginons-la sincère- se traduirait en actes, qu’il allait vigoureusement redimensionner l’Etat, fusionner des départements et supprimer des régions, effondrer le coût du travail, tailler dans les dépenses sociales et les missions de la puissance publique. On aurait pu se convaincre que ses nombreuses promesses antérieures de baisse des dépenses publiques et de pause fiscale, jusqu’ici restées lettre morte, allaient enfin prendre corps. Que le Pacte de responsabilité avec les entreprises serait un pacte de confiance.
Mais non, c’était trop simple, trop net, trop brutal. Et la confiance dans les entreprises devait avoir des limites, devait être encadrée, soupesée, contrôlée. Attention, pas à la légère, non : par un « Observatoire des contreparties », un petit bijou assurément, une merveille de technocratie et une trouvaille en termes de simplification, chacun en conviendra. Ainsi donc, les baisses de charges allaient être soumises à des quotas de créations d’emplois.
Cet exercice de social-démocratie sous condition suspensive peut-il fonctionner ? C’est douteux. Comme l’a très justement expliqué François Hollande, il ne peut y avoir de retour de la croissance sans investissement, et pas de reprise de l’investissement sans confiance. La confiance est à la base de toute décision économique, de toute création d ‘emploi. La confiance, c’est justement ce que refuse encore a priori François Hollande aux entreprises.
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