François Hollande a annoncé que les dispositifs en
faveur de l'investissement dans les PME ne seront pas réduits. Un
mensonge repris pieusement par tous les grands médias. Explications.
François Hollande a surpris son monde vendredi, lors d’un forum de
chefs d’entreprises au cours duquel il était invité à remettre le Prix
de « l’Audace Créatrice » à la société Hologram Industries. Dans son
discours, le Président de la République a annoncé que « tous les dispositifs qui existent aujourd’hui en faveur de l’investissement dans les PME seront maintenus durant le quinquennat ». Instantanément,
tous nos commentateurs se sont écriés qui au miracle, qui à la
révélation, affirmant que le bon sens, le pragmatisme, la prise de
conscience des réalités économiques avaient enfin touché notre
« normal » Président. Ainsi avez-vous pu lire dans votre quotidien
préféré (quel qu’il soit, puisque tous ont repris cette information) que
l’ISF-PME qui permet de bénéficier d’une réduction d’impôt de 50%
(initialement 75%) sur son ISF pour la part investie au capital d’une
PME de moins de cinq ans était maintenu, de même que le dispositif
Madelin, qui offre lui une réduction d’impôt sur le revenu de 25%.
De même, nos éternels optimistes, toujours prompts à s’emballer, ont
sauté sur une phrase du Président à cette même manifestation « Peut-être sera-t-il choisi le cadre du PEA, pour les PME, de façon à ce qu’un cadre fiscal puisse être approprié »
pour extrapoler et imaginer que le plafond du PEA-PME (réellement à
l’étude) puisse être augmenté à 200 000 ou 300 000€ (contre 132 000 dans
le PEA actuel). Sans vouloir jouer en permanence les rabat-joies, je me
permettrai de rappeler à tout ce petit monde que toutes ces
exonérations d’impôts seront comptabilisées, dans l’état actuel du
projet gouvernemental, dans le plafond des 10 000€ de « niche fiscale »
autorisées par foyer fiscal et par an…. Voilà voilà, ça calme déjà
sérieusement les passions….
De toute évidence, il s’agit plus d’effets d’annonces visant à
contrecarrer les déplorables mesures prises à l’encontre des petites et
très petites entreprises depuis le début de ce mandat que d’une
véritable politique de relance de l’activité des PME/TPE. En fait, notre
Président n’a pas compris, mais comment le pourrait-il, ni lui ni aucun
de ses ministres n’a jamais connu une entreprise, que ce dont les
créateurs d’entreprises, les innovateurs ont besoin, ce ne sont pas des
niches fiscales, des avantages, des réductions, une collecte étatisée
des capitaux et encore moins une banque publique d’investissement. Ce
dont ils ont besoin, c’est de liberté. Ce dont ils ont besoin, c’est de
moins de contrainte administrative, de moins de prélèvements
obligatoires, de moins de réglementation. Ce dont ils ont besoin, c’est
de plus de considération, de plus de reconnaissance et non d’être
balancés à la vindicte populaire comme des malfrats qui auraient volé le
petit supplément de niveau de vie que réussit à acquérir la minorité
d’entre eux sortie triomphante du parcours semé d’embûches de la
création.
Pas de pseudo cadeaux fiscaux (qui au terme seront de toute manière
payés et toujours par les mêmes), pas de blabla, de la liberté et de
l’amour… Vous verrez, ça fonctionnera beaucoup mieux !
lundi 24 septembre 2012
Investissement dans les PME : le mensonge de Hollande
Avec une vraie rigueur budgétaire, l'état Grec serait à l'équilibre
Magie de l'internet : c'est lorsqu'on s'y attend le moins qu'on tombe
sur des billets fort instructifs. Et c'est avec gourmandise que je vous
propose celui de Nikos Tsafos
sur son pays, la Grèce. En se penchant sur les sacrifices que son
gouvernement a mis en place, et en évaluant la charge portée par le
secteur privé et le secteur public, il aboutit à des conclusions bien
polémiques.
On se souvient qu'il y a quelques mois, je relatais dans ce billet
les chiffres fournis par Véronique de Rugy sur l'évolution des dépenses
des gouvernements de la zone euro, sur les dernières années. Le
graphique était alors sans ambiguïté : l'austérité n'était pas flagrante
du tout, et pour certains pays, les dépenses avaient continué à
augmenter benoîtement. Depuis, la situation générale en Europe s'est
encore dégradée avec l'Espagne et, dans une certaine mesure, l'Italie,
qui ont rejoint la Grèce dans la farandole douteuse des pays en faillite
ou quasi-faillite.
Si l'on s'en tient aux journaux, l'austérité frappe durement ces pays
et même la France qui patauge maintenant dans un chômage de masse et
des dérapages budgétaires catastrophiques, suite à un changement
maintenant (ou quelque chose comme ça). Et force est de constater que
pour toute une frange de population en Europe, les temps actuels sont
particulièrement durs. Cependant, la fameuse austérité, elle, n'est
toujours pas en place.
Et c'est ce curieux décalage entre ce qu'on observe (une population
appauvrie, un chômage en hausse et une misère qui s'installe) et ce
qu'on peut voir dans les chiffres des dépenses gouvernementales
qu'explique fort bien les calculs de Nikos Tsafos. Constatant lui-même
que l’État grec manquait cruellement d'argent, il a cherché par le
détail à comprendre qui, finalement, supportait le plus le coût
maintenant exorbitant de l'austérité dont tout le monde parle.
Surprise (modérée) : c'est, encore et toujours, le secteur privé qui
se prend l'essentiel du fardeau. Ce qui est franchement scandaleux :
répartir l'effort à faire de façon équitable entre le secteur public et
le privé est ce que le gouvernement pourrait faire de mieux. Non
seulement, cela améliorerait grandement sa crédibilité auprès d'un
peuple qui suffoque sous les taxes et impôts servant à payer des
salaires publics généreux (si cela vous rappelle un autre pays, c'est
normal), mais cette décision amènerait aussi des bénéfices économiques
notoires, comme le montre le tableau suivant :
Certes, il faut tenir compte du fait que les chiffres du secteur public grec sont pour le moins opaque. Cependant, on peut noter que le secteur public a réduit la voilure de 56.000 postes entre 2009 et 2011 (soit 7,8% de décroissance, ligne 1). Dans le même temps, l'emploi en Grèce a chuté de 544.000 poste, soit 12,2% (ligne 2). Si l'on soustrait les emplois publics de l'emploi total, on peut conclure que le secteur privé a subi une chute de l'emploi de 13%. Ceci s'ajoute aux coûts du travail qui ont aussi considérablement chuté de 18,5% (lignes 4 et 5).
Dans le même temps (d'après les données Eurostat, ligne 6), le gouvernement grec a réduit sa masse salariale de 15,9%, de 31 milliards d'euros à 26. Si l'on rapporte cette chute au nombre de salariés, cela représente une baisse des salaires de 8,8% (ligne 7). Cependant, et c'est là où cela devient très intéressant, si l'on applique la même baisse de 18,5% que dans le privé, les salaires dans le public auraient été, en moyenne et par personne, 4000€ plus bas.
Si l'on met ces éléments ensemble, on peut estimer que si le nombre de salariés du secteur public avait diminué de la même façon que les salariés du privé, la masse salariale aurait fondu de 19,9%. Et si elle avait diminué en accord avec tout le reste de l'économie, cette même masse aurait diminué de 28,4%.
Autrement dit, si le secteur public s'était pris la crise avec la même force que le secteur privé, le gouvernement aurait dépensé 3,9 milliards d'euros en moins en 2011 (c'est-à-dire 22.2 milliards au lieu des 26.1 effectivement dépensés). Le déficit primaire grec s'établissant alors à 4.6 milliards d'euros, le gouvernement aurait frôlé l'équilibre en 2011. Un autre façon de voir les choses, c'est de constater que les taxes et impôts ont augmenté jusqu'à ajouter 2.3 milliards d'euros dans les caisses entre 2009 et 2011 ; avec un alignement du public sur le privé, les taxes et impôts auraient pu rester les mêmes qu'en 2009 et le gouvernement aurait tout de même dégagé 1.6 milliards d'euros de trésorerie supplémentaire.
(L'ensemble des sources de ces chiffres est disponible à partir du billet de Tsafos)
Ici, on en revient à cette constatation déjà effectuée dans d'autres pays, en d'autres temps, et dans d'autres billets : la rigueur, ça marche. L'austérité, ça donne des résultat.
Mais cette austérité là ne cogne pas systématiquement sur la classe moyenne, et doit commencer d'abord dans le giron de l’État, dans le secteur public. Elle impose, finalement, que les rentiers d'un systèmes soient remis à leur place. Elle impose que tous fassent des efforts, et ce "tous" couvre autant les retraités et les chômeurs que les actifs, et les actifs du public autant que ceux du privé.
On l'a "découvert" il y a quelques jours : tout l'appareil d'état est gangréné de myriades d'agences, commissions et autres institutions dont les noms et acronymes se disputent le ridicule pour toucher le plus vite possible le plus gros budget. Aucune de ces agences n'a été touchée par l'austérité et le serrage de ceinture gouvernemental.
Et si, pour équilibrer, la rigueur passait par là ? Si elle touchait, enfin, ces milliers d'agences hétéroclites, multiples, inutiles pour la plupart, et créées pour répondre à un besoin pressant de poste pour des petits copains ? Si l'austérité et surtout son application les concernait un peu ?
Et si le changement, c'était ça ?
Cabinets ministériels : aucune expérience du privé
Une enquête montre que sur la centaine de membres des
cabinets du président et du premier ministre, moins de 10% ont une
expérience du privé. Les énarques représentent plus de la moitié des
bataillons.
À l’heure où notre Président découvre (enfin !) la « gravité
exceptionnelle de la crise » et où la presse l’exhorte à se réveiller, à
agir en homme responsable et à prendre des décisions concrètes, on se
demande ce qu’ont fait ces trois derniers mois les 40 conseillers qui
composent son cabinet. Idem pour Jean-Marc Ayrault et ses 54
collaborateurs.
Ce sont pourtant ces personnes qui doivent assister les hommes à la
tête de l’État dans leurs choix et s’assurer de la cohérence de la
politique menée avec les ministères concernés. Les récents « couacs » et
problèmes de communication ne plaident pas à leur avantage.
Plus précisément, sur les 8 collaborateurs les plus proches de François Hollande, 6 ont fait l’ENA et deux d’entre eux sont des amis de sa promotion « Voltaire ». Un seul a travaillé dans le secteur privé. Sur les 40 personnes qui composent son cabinet, près de la moitié sont passés par la prestigieuse école. En proportion, le cabinet de Jean-Marc Ayrault est moins gourmand en énarques (38%), mais tout aussi peu enclin à engager des collaborateurs venant de l’entreprise.
Cette faible concentration du privé est une triste réalité. 7,5% du cabinet de François Hollande en vient. Et moins de 10% dans le cabinet de Jean-Marc Ayrault, si l’on soustrait les quelques journalistes de carrière qui l’ont rejoint. À part quelques stages en entreprises, les conseillers les plus proches du pouvoir ne semblent pas très familiers avec ce concept – du moins en pratique –, point commun inhérent à la technocratie française, et ce, quelles que soient les appartenances politiques. Ainsi, il est très surprenant d’apprendre que Pierre Bachelier-Iltis, conseiller technique aux affaires industrielles auprès du Premier ministre, n’est jamais passé par l’entreprise et a consacré sa carrière à l’administration. Aussi brillant soit-il, cette méconnaissance de l’industrie nous semble être un handicap à ce poste, un peu comme si vous étiez plombier et qu’on vous demandait d’être électricien. Les compétences théoriques ne suffisent pas.
Londres prépare (aussi) sa banque publique pour les PME
Le gouvernement britannique va allouer 1,25 milliard d'euros à une
nouvelle banque qui devra aider les PME à financer leurs projets.
A l'instar de la France, avec la Banque Publique d’Investissement (BPI),
la Grande-Bretagne s'apprête à créer une nouvelle banque publique
destinée à aider les petites entreprises à obtenir des crédits pour leur
développement. Le montant que souhaite consacrer le gouvernement
britannique à ce projet est néanmoins assez modeste : 1 milliard de
livres, soit 1,25 milliard d'euros.
La dénomination de cette nouvelle institution n’a pas encore été
décidée. Seule certitude, la banque opérera sur le marché de gros et
soutiendra l'offre de prêt et de capital de long-terme à destination de
petites entreprises à travers des établissements bancaires et financiers
existants.
Capitaux privés en renfort
"Nous avons besoin d'une banque publique britannique dont le bilan soit équilibré et disposant d'une capacité rapide d'expansion de ses prêts aux producteurs, aux exportateurs et aux compagnies à forte croissante qui font fonctionner notre économie", a déclaré le ministre, lors d'une réunion du parti libéral-démocrate dont il est membre, à Brighton, dans le sud de l'Angleterre.
"De nombreuses nouvelles entreprises prometteuses, ne peuvent tout simplement pas obtenir les prêts dont elles ont besoin pour se développer dans un temps raisonnable. Nous allons aider à arranger cela", a ajouté son cabinet.
50 milliards de livres de prêts aux PME
Plus tôt ce mois-ci, Vince Cable avait annoncé qu'une telle institution pourrait être lancée à travers une nouvelle génération de banques dont le gouvernement a encouragé le développement dans le but d'augmenter la concurrence parmi les prêteurs.
Le niveau d'engagement du gouvernement est important au regard des 50 milliards de livres (63 milliards d'euros) de prêts aux petites entreprises en suspens en Grande-Bretagne, selon les conseillers du cabinet, qui précisent que la nouvelle banque pourrait être opérationnelle sous 12 à 18 mois.
Le groupe de lobbying de la Chambre de commerce britannique a salué le niveau des fonds de cette nouvelle banque disant qu'elle permettrait aux "nouvelles entreprises et à celles en croissance d'avoir accès au capital de la même manière qu'en Allemagne, en Corée du Sud et aux États-Unis".
Ainsi, malgré leurs réserves, les Allemands n'ont pas empêché la Banque centrale européenne d'accroître ses interventions pour faire baisser les taux d'intérêts dans les pays les plus endettés de la zone euro. L'Espagne et l'Italie ont pu ramener les taux auxquels leur État emprunte sur les marchés, de plus de 7 % à près de 5 %. Cette baisse est considérable, même si elle ne règle pas tous les problèmes. Naturellement, cela suppose que les États demandeurs fassent des efforts pour assainir leurs comptes. C'est précisément ce qu'ils font en ratifiant le traité de consolidation des finances publiques qui prévoit le respect d'une « règle d'or » imposant d'équilibrer les dépenses et les recettes publiques. Ce traité devait subir deux épreuves décisives : en Allemagne, celle de la Cour constitutionnelle qui vient de donner son feu vert ; en France, celle du Parlement qui sera saisi, au début octobre.
François Hollande a évolué favorablement sur le sujet. Il ne demande plus la renégociation du traité comme il l'avait dit lors de la campagne électorale. Il se contente de le compléter par des recherches, avec ses partenaires, sur les moyens de soutenir la croissance économique sans remettre en cause la rigueur. Joignant le geste à la parole, il présente, pour l'année prochaine, un budget d'austérité, ce qui ne va pas sans provoquer des remous à la « gauche de la gauche ».
Éclairer les peuples
Dans le même temps, la zone euro précise le fonctionnement du « Mécanisme européen de solidarité » qui ouvre un fonds de 500 milliards d'euros - dont l'Allemagne apporte la plus forte contribution - pour aider les États ou les banques en difficulté.
Toutes ces procédures juridiques et tous ces mécanismes financiers restent quelque peu obscurs pour les opinions publiques. C'est moins spectaculaire que la faillite d'une grande banque ou l'abaissement de la cote de confiance d'un État. Mais c'est tout à fait fondamental et le rôle des pouvoirs publics, comme des moyens d'information, est d'éclairer les peuples sur ces questions. Nous vivons au XXIe siècle, dans des sociétés complexes avec des mécanismes fragiles. Raison de plus pour que les leaders d'opinion assurent leurs responsabilités et ne brouillent pas les esprits avec des slogans simplistes ou des querelles secondaires.
L'Europe est en train de franchir une étape supplémentaire sur le chemin de son unité. Ce pas en avant ne ramène pas la croissance ni ne fait disparaître le chômage du jour au lendemain. Mais il ouvre un chemin pour qu'une initiative politique de grande ampleur redonne l'espoir aux peuples européens dans les prochains mois. Que les hommes d'État s'y préparent et nous y préparent.
Dans cette dictature de l’immédiateté qui constitue notre quotidien, il ne saurait évidemment plus être question de « laisser du temps au temps ». L’époque et la pression économique exigent des réponses aux effets immédiats. Et quelques reniements aussi.
En chute libre dans les sondages, confronté aux premiers tiraillements avec ses alliés, accusé d’immobilisme et même piégé par son slogan de campagne, François Hollande s’apprête à apporter un premier lot de réponses concrètes. Ce qui n’ira pas sans reniements.
Côté réponses, il s’agira de détailler le plan de recouvrement des quelque 20 milliards d’impôts supplémentaires annoncés. Avant d’expliquer où et comment seront réalisées les 10 milliards d’euros d’économies qui devraient permettre de faire le joint.
Chacun sait évidemment que ces réponses-là ne suffiront pas. Sauf à taxer trop lourdement les entreprises, ce qui serait contre-productif au-delà d’un certain seuil et en totale contradiction avec la politique affichée de réduction des coûts du travail. Ou à s’attaquer aux classes moyennes et prendre le risque de plomber un peu plus encore les déjà maigres espoirs de croissance.
Il faudra donc bien, malgré les démentis, s’asseoir sur quelques promesses de campagne. Le maintien du gel du barème de l’impôt sur le revenu a déjà donné le ton. Et ouvert la voie à l’augmentation d’autres contributions comme la CSG, la TVA ou l’établissement d’une fiscalité « verte ».
Tout cela rappelle étrangement la « TVA sociale » imaginée par Nicolas Sarkozy, enterrée en grande pompe cet été par François Hollande et qui pourrait refaire son apparition sous une autre forme. Un peu maquillée, un peu arrangée pour faire passer la pilule bien sûr.
Pierre Moscovici dément que tout cela figure au budget 2 013. Il faudra donc sérieusement surveiller le correctif budgétaire qui suivra car on peut vivre sous la dictature de l’immédiateté et avoir un œil sur le calendrier.
Sévèrement malmené dans les sondages, voici que le conseil fédéral d'Europe-Ecologie-Les Verts, l'une des composantes de sa majorité s'oppose à la ratification du traité budgétaire européen. Bref, ça tangue à gauche et même si les députés et les sénateurs écologistes ne sont pas tenus de voter comme leur mouvement le recommande, le chef de l'État est agacé. Il mesure le risque d'être fragilisé devant ses partenaires parce que sa majorité n'est pas unanime sur un dossier essentiel à la préservation de l'euro et à la relance de l'Union européenne.
Même si Daniel Cohn-Bendit fustige les psychorigides de sa famille d'idées dont par prudence il se met en retrait, le Président mesure les dégâts que la gauche de la gauche provoque à force de parasiter ou de tacler ses choix et ses postures. Si pour le philosophe Michel Serres, « la véritable autorité est celle qui grandit l'autre », ce ne sont pas les caprices d'écolos gâtés et de bobos gauchisants qui vont faire d'aboyeurs prétentieux des sages acteurs responsables de la transition écologiste.
François Hollande qui veut être jugé sur ses résultats plutôt que sur des sondages et les ruades de Verts complexés par le rose dominant, se doit à la fois de maintenir le cap et de faire diversion. Il a engagé la parole de la France devant les partenaires européens mais il peut dans le même temps envoyer ses lieutenants au front pour répéter à qui veut bien l'entendre, qu'on ne peut pas réparer en quelques mois ce que la droite a mis dix ans à détruire.
À force de dire que le pays a perdu dix ans parce que les Français n'ont alors pas fait confiance à la gauche par les urnes est commode mais n'est pas un moyen de défense durable. Parce que la gauche a désormais tous les pouvoirs et que les citoyens attendent des signes authentiques d'une volonté de redressement qui restent difficilement perceptibles. La crise et l'ampleur de ses conséquences sociales concentrent toute l'attention. L'alternance n'a en rien calmé sa puissance de nuisances et ses conséquences sur le moral des ménages. Créer la confiance avec un tel scénario sociétal est un défi que le Président a l'impératif devoir de relever.
On se souvient de la polémique préélectorale qu'avait provoquée un ministre en déclarant que « les civilisations ne se valent pas ». Comme il n'existe pas d'instrument capable de mesurer la valeur d'une civilisation, le jugement ne se fonde sur rien d'autre qu'une opinion, qui repose elle-même sur la connaissance intime qu'on a de sa propre culture et sur l'ignorance de celle des autres. Le fanatisme consiste à pousser ce penchant trop habituel jusqu'à l'absurde.
Traité européen : psychodrame chez Europe Ecologie- Les Verts
Un conseil fédéral "dramatiquement nul"
Daniel Cohn-Bendit, député européen EELV, a pour sa part tenu des propos très sévères contre son parti, affirmant même suspendre sa participation à EELV en raison de son "incohérence totale" sur le traité budgétaire européen. "Voter contre le traité et pour le budget, c'est n'importe quoi", a-t-il expliqué. Daniel Cohn-Bendit a estimé que le conseil fédéral d'Europe Ecologie-Les Verts, qui s'est prononcé samedi contre le traité budgétaire européen, et a recommandé à ses parlementaires de le rejeter, avait été "dramatiquement nul".
"La cohérence, pas leur problème"
"La cohérence, c'est pas leur problème". Si l'on vote contre le traité, par cohérence il faut voter contre le budget, et donc sortir du gouvernement", a-t-il conclu. "Entre Europe Ecologie et moi maintenant, c'est une histoire terminée", a-t-il déclaré sur i-Télé, expliquant ne pas vouloir cautionner cette dérive politique". "Ils veulent le beurre, l'argent du beurre et les beaux yeux de la fermière", mais "pas sa cotisation".
Hollande joue avec le feu
Dans sa volonté d’éviter à tout prix un affrontement sur le
traité budgétaire, le chef de l'Etat prend le risque d’une crise de
confiance majeure. Pour faire adopter Maastricht, voilà vingt ans,
Mitterrand, lui, avait osé le référendum !
En politique, la fuite est rarement une solution. Surtout dans le
cadre de cette Ve République hyper présidentialisée par l’institution du
quinquennat, qui laisse peu de chances au chef de l’État d’échapper,
quoi qu’il fasse, à ses responsabilités. En déployant des trésors
d’ingéniosité pour banaliser l’adoption du traité budgétaire européen –
sous la forme d’un projet de loi ordinaire, présenté ce mercredi en
Conseil des ministres et dont les parlementaires discuteront entre un
texte sur la tarification de l’énergie (le 1er octobre) et un autre sur
la régulation économique de l’outre-mer, quelques jours plus tard – ,
François Hollande pourrait bien aboutir à l’inverse de l’effet recherché
: montrer avec éclat ce qu’il veut cacher !
Et cette dissimulation n’est pas mince : son ralliement à
l’orthodoxie budgétaire européenne qu’il reprochait tant à Nicolas
Sarkozy d’épouser pour “rassurer les marchés” ! Le Parti communiste et
le Front de gauche, réunis dimanche dernier à La Courneuve pour la Fête
de l’Humanité, ne s’y sont pas trompés : « Nous disons à François
Hollande : “Ne mettez pas la France dans cette camisole.” Nous disons
aux parlementaires de gauche : “Vous n’êtes pas là pour accepter cela.” », s’enflammait le secrétaire national du PC, Pierre Laurent, tandis que Jean-Luc Mélenchon posait en boucle la même question : « Dix ministres socialistes au Medef ! Combien ici ? »
D’un point de vue de stricte logique, comment leur donner tort ?
N’est-ce pas pour s’assurer de bons reports de voix au second tour de
l’élection présidentielle que François Hollande avait déclaré si fort la
guerre à la finance, son “seul ennemi”, puis promis de “re-négocier” le
Pacte budgétaire signé, en mars 2012, par Angela Merkel et Nicolas
Sarkozy ? Et n’est-ce pas pour éviter un vote punitif de l’extrême
gauche aux législatives qu’il s’était bien gardé d’ouvrir le dossier
avant le 18 juin au matin ?
Cette fois, il ne peut plus reculer : la chancelière le presse de
faire ratifier l’engagement pris par Nicolas Sarkozy, qu’elle tient pour
la parole de la France. Fort de la décision du Conseil constitutionnel
qui, le 9 août dernier, a estimé que les transferts de souveraineté
inhérents au nouveau traité n’étaient pas différents, par essence, des
contraintes déjà imposées par ceux de Maastricht (1993), Amsterdam
(1997) et Lisbonne (2007), pour l’application desquels la Constitution
fut déjà réformée, le chef de l’État a cru judicieux de se faufiler
entre les mailles du calendrier législatif pour faire adopter le texte
avec un minimum de publicité.
La première erreur psychologique de son quinquennat ? Si l’on peut
discuter à l’infini des nuances juridiques existant entre les 3 % de
déficit autorisés par le traité de Maastricht et les 3 % institués par
le Pacte budgétaire, c’est politiquement que la différence saute aux
yeux : dans le premier cas, le contrôle des institutions européennes sur
les budgets nationaux ne s’exerçait qu’a posteriori (avec amendes possibles à la clé) ; dans le second, c’est a priori que
Bruxelles prend les rênes de nos finances, en imposant éventuellement
ses arbitrages aux parlements nationaux élus. Des instances dont la
raison d’être, depuis qu’elles existent en Occident (la boulê
athénienne, le sénat romain et même les cours souveraines sous l’Ancien
Régime), est précisément de consentir l’impôt ! La politique se jouant
sur les symboles, était-il possible d’escamoter celui-ci sans dommage
pour l’exercice de la démocratie ?
Jamais l’opinion française n’a été autant eurosceptique
En 1992, François Mitterrand ne s’était pas posé longtemps la
question, s’agissant de la ratification du traité de Maastricht. Ni
Jacques Chirac, en 2005, pour le projet de Constitution européenne
préparé par Valéry Giscard d’Estaing. Comme François Hollande
aujourd’hui, l’un et l’autre avaient le choix entre la lettre et
l’esprit des institutions : la première n’exigeait qu’un vote conforme
de l’Assemblée nationale et du Sénat suivi de leur réunion en Congrès,
le second un référendum. Tous deux choisirent le référendum, pour
qu’aucun doute ne subsiste sur la légitimité de leur décision : ce fut
“oui” pour Maastricht et, treize ans plus tard, “non” pour la
Constitution Giscard.
De ce point de vue, François Hollande est donc plus proche de Nicolas
Sarkozy (qui fit voter le traité de Lisbonne par le Parlement plutôt
que de prendre le risque d’un nouveau référendum) que de Mitterrand et
de Chirac, dont ce même Hollande se dit pourtant l’héritier à des degrés
divers. Ce qui, certes, est parfaitement son droit, mais risque de lui
attirer, ici et maintenant, un procès en escamotage de promesses dont il
se serait bien passé.
Quoi qu’on pense de la méthode retenue par Nicolas Sarkozy, celui-ci,
de fait, ne s’était nullement engagé à refaire voter le peuple sur la
Constitution européenne. Seulement à lui substituer un “traité
simplifié” qui serait adopté par les deux Chambres dans la foulée de
l’alternance de 2007. Or, non seulement Hollande n’a nullement renégocié
le traité légué par Sarkozy, mais il l’impose à son camp presque
clandestinement !
L’ennui, c’est que cette initiative tombe au plus mauvais moment pour
lui : jamais l’opinion française n’a été plus eurosceptique
qu’aujourd’hui. Et notamment dans les milieux populaires, censés
constituer le ciment électoral de la gauche ! Il n’est, pour s’en
persuader, que de prendre connaissance du grand sondage effectué par
l’Ifop pour le Figaro du 17 septembre, à l’approche du vingtième
anniversaire du traité de Maastricht : 67 % des Français (62 % des
électeurs de Hollande ; 51 % de ceux de Sarkozy) estiment que, depuis
1992, l’Europe a pris une “mauvaise direction”. Pire : si les personnes
interrogées devaient ratifier le même traité, ce n’est pas 51 % qui
voteraient oui, mais seulement 36 %, le non l’emportant par 64 %, dont
55 % d’électeurs de gauche et 54 % de droite ! Surtout, à la question
“compte tenu de la crise actuelle, au fond de vous même, que
souhaitez-vous ? ”, 51 % des électeurs de gauche et 59 % des électeurs
de droite se prononcent pour “moins d’intégration européenne et des
politiques budgétaires propres à chaque État”… Une demande partagée par
69 % des ouvriers et 75 % des employés, catégories pour lesquelles
l’essentiel réside manifestement ailleurs que dans le mariage
homosexuel, l’ouverture de “salles de shoot” pour toxicomanes ou le
droit de vote des étrangers !