C'est une véritable malédiction. Chaque fois que le Congrès américain s'apprête à se prononcer sur une réforme cruciale, un sénateur démocrate casse sa pipe, mettant en péril le vote du projet de loi qui se joue toujours à un tout petit nombre de voix. Il y a quelques mois, le sénateur Ted Kennedy s'éteignait au moment même où se décidait le sort de la grande réforme de la santé. Lundi, c'est le sénateur de Virginie-Occidentale, Robert Byrd, qui est mort à 92 ans, alors que le Congrès était sur le point de voter une autre réforme importante, celle de Wall Street.
La santé de Byrd, qui en était à son neuvième mandat, était chancelante depuis longtemps, mais sa mort tombe particulièrement mal. Après des mois de négociations intenses, la Chambre des représentants et le Sénat devaient approuver, cette semaine, une refonte du système financier censée éviter une nouvelle crise.
Le président Obama, dans une conférence de presse avant le G20, la semaine dernière, a estimé que les mesures proposées étaient "les plus draconiennes depuis celles crées après la Grande Dépression". Le texte prévoit un renforcement de la surveillance et de l'encadrement des banques. Il octroie davantage de pouvoirs aux régulateurs fédéraux en créant, par exemple, une agence de protection des consommateurs contre les abus des compagnies de cartes de crédit notamment, un organisme pour surveiller le système financier et anticiper les crises, et il impose plus de réglementations aux banques en matière de trading de produits dérivés...
Des tractations en coulisse
La disparition de Robert Byrd, doyen du Sénat, ne devrait pas faire capoter la réforme, mais risque de retarder son passage. Les démocrates sont en effet coincés. Depuis la mort de Ted Kennedy, l'an dernier, ils n'ont plus la fameuse majorité de 60 voix au Sénat qui empêche les républicains de faire de l'obstruction systématique. Sans la voix de Byrd, le Sénat compte 58 démocrates et indépendants. Mais deux sénateurs démocrates, Maria Cantwell et Russ Feingold, ont d'ores et déjà annoncé qu'ils voteraient contre la réforme qu'ils jugent trop laxiste. Pour que le texte ait une chance de passer, il a été, en effet, expurgé de nombre de provisions jugées trop radicales et laisse beaucoup de liberté aux banques. Il ne leur interdit pas, par exemple, le trading de produits dérivés qui ont causé la crise actuelle.
On est donc reparti pour de frénétiques tractations en coulisse. Si les démocrates arrivent à convaincre Cantwell et Feingold de voter pour la réforme, le parti n'aura plus besoin que de deux républicains pour soutenir le projet, ce qui ne semble pas impossible puisqu'au moins trois républicains semblent y être favorables. Dans le cas contraire, ils auront besoin du soutien de quatre républicains, ce qui va demander probablement de nouvelles concessions. À moins que le successeur de Robert Byrd ne soit nommé rapidement. Selon la loi, c'est au gouverneur de l'État, un démocrate, de désigner le remplaçant sans avoir à organiser d'élection. Mais la loi n'impose pas de calendrier. Or le temps presse. Les vacances parlementaires commencent à la fin de la semaine.
mardi 29 juin 2010
La malédiction de Barack Obama
Le président du groupe suisse Swatch est mort
Le président du groupe suisse Swatch, Nicolas Hayek, est mort lundi 28 juin d'un arrêt cardiaque dans les bureaux de l'entreprise qu'il avait hissée au rang de numéro un mondial de l'horlogerie.
"Nicolas G. Hayek, président et administrateur délégué du conseil d'administration du Swatch Group, est décédé aujourd'hui, de manière inattendue, d'un arrêt du cœur alors qu'il travaillait au sein de son entreprise affectionnée", explique le groupe dans un communiqué.
Ce natif de Beyrouth, âgé de 82 ans, était une figure emblématique du monde de l'horlogerie suisse et un des dirigeants helvétiques les plus connus et appréciés au monde. Il était à la tête d'un empire regroupant les marques de luxe Omega, Breguet, Tissot et Blancpain mais aussi des montres plus entrée de gamme, qui disposait de capitaux propres à hauteur de 6 milliards de francs suisses.
UN GROUPE PEU AFFECTÉ PAR LA CRISE
Le groupe, qui reste discret sur les circonstances du décès, souligne les "immenses services dans le sauvetage de l'industrie horlogère suisse" qu'a rendus M. Hayek, rappelant qu'il avait également largement contribué "à la création et au développement de Swatch Group". Il "a su, avec Swatch Group, concrétiser sa vision d'une entreprise horlogère puissante, créatrice importante de valeur d'origine suisse et de l'établir de manière durable. Il est considéré à juste titre comme un entrepreneur pionnier de ce pays", souligne le communiqué.
Le groupe assure que M. Hayek avait su "garantir également, par des décisions personnelles, que ses idées et ses conceptions subsistent, et que la continuité, aussi bien au niveau de l'actionnariat que du conseil d'administration et de la direction générale, soient assurées". Ce dirigeant emblématique, président du groupe depuis 2006, était toujours très actif dans l'entreprise où son fils, Nick, a pris les fonctions de directeur général en 2003.
Dans son dernier discours prononcé à l'occasion de l'assemblée générale du groupe, M. Hayek avait annoncé que 2010 serait marqué par un nouvel exercice "record", signe de vitalité de l'horloger suisse qui a surmonté la crise financière sans trop de dégâts. "Les quatre premiers mois, janvier à avril 2010, montrent une croissance et un résultat opérationnel forts, des records de ventes presque chaque mois et en conséquence des records des résultats opérationnels", avait précisé M. Hayek.
Réunis lundi 28 juin après-midi, les deux conseils de surveillance du Monde ont voté à la majorité l'entrée en négociation exclusive, et pour trois mois, avec le trio d'investisseurs composé de Pierre Bergé, Xavier Niel et Matthieu Pigasse.
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Cette décision marque une étape décisive dans l'histoire du Monde – le journal et le groupe de presse – et dans le processus de recapitalisation engagé depuis plusieurs mois. Un processus qui se traduira par la prise de contrôle d'un nouvel actionnaire majoritaire, la société des rédacteurs et l'ensemble des sociétés de journalistes et de personnels étant destinés à devenir minoritaires.
Le vote favorable des conseils de surveillance permet ainsi dès aujourd'hui de poursuivre les discussions avec les candidats retenus, sans risque de tensions sur la trésorerie: les investisseurs se sont en effet engagés à mettre très rapidement à la disposition de notre groupe un prêt à hauteur de 10 millions d'euros.
Avant toute chose, il convient de saluer le geste particulièrement élégant de Claude Perdriel, qui, allié avec le groupe espagnol Prisa et l'opérateur Orange, avait construit pour Le Monde une offre à la mesure de son attachement pour notre maison. Si cette candidature n'a finalement pas été choisie, chacun a pu mesurer le sens aigu des intérêts de notre groupe démontré par le fondateur du Nouvel Observateur.
Après avoir annoncé son retrait, Claude Perdriel a apporté son vote au trio Pierre Bergé, Xavier Niel et Matthieu Pigasse, avant de prendre congé de notre conseil. Qu'il trouve à travers ces quelques lignes l'expression de notre reconnaissance pour ce qu'il a apporté au Monde, sans que jamais son esprit d'indépendance soit pris en défaut.
La période qui s'ouvre sera déterminante pour notre avenir. Si le projet présenté par Pierre Bergé, Xavier Niel et Matthieu Pigasse a reçu les plus larges suffrages des salariés (au quotidien, dans les magazines, au Monde interactif) et de la Société des lecteurs, c'est qu'il a nourri l'espoir de voir notre groupe assainir ses finances tout en se donnant les moyens de se développer dans le respect de son identité et de ses valeurs.
Les semaines qui viennent seront mises à profit pour entrer de plain-pied dans la négociation avec nos nouveaux interlocuteurs, de manière la plus constructive et attentive qui soit, afin de transformer les promesses en engagements précis.
C'est seulement au terme de ces discussions approfondies que nos conseils de surveillance finaliseront les projets d'accord conclus, après l'indispensable consultation des organes représentatifs du personnel.
Au moment où le journalisme vit une profonde mutation, Le Monde ne peut que se réjouir de voir des investisseurs venir lui prêter main-forte afin de réinventer ensemble un modèle éditorial et économique placé sous le double signe de l'indépendance et de l'équilibre financier. Renouveler nos offres et nos contenus en écho avec notre époque, être rentables: notre pérennité est à ce prix.
On n'est jamais assez protégé contre les malheurs du monde. C'est la conviction d'une honorable députée française, Madame Marland-Militello, qui vient de proposer une loi contre un danger dont l'urgence n'échappera à personne : la zoophilie. Certes, la loi punit déjà l'amour des animaux, quand il vire de la vertu au vice. Mais elle ne prévoit rien contre la diffusion des images de cet amour, que notre députée voit proliférer sur Internet. La future loi Marland-Militello comblerait donc cet intolérable vide juridique. Elle permettrait notamment d'imposer aux zoophiles une interdiction de détenir un animal, forme brutale mais judicieuse et sans doute salutaire pour la gent animale d'abstinence forcée. On peut également supposer que cette loi s'appliquera à ceux qui se livrent à des mœurs contre-nature sur les diptères - et là, notre honorable députée peut tout craindre de sa propre loi.
Tout va décidément très vite, en politique. Hier encore, Eric Woerth était un ministre-modèle, sérieux et compétent, le réformateur des retraites, l'homme qui monte vers Matignon. Aujourd'hui, il est au bord de la démission, pris dans la tourmente d'une affaire qui rebondit d'heure en heure, de révélations en démentis… Un vrai roman, cette affaire, tissé de haines familiales, de fortunes colossales et de complots politiques. Du Balzac à l'ère numérique, splendeurs et misères des contribuables mondialisés. L'avenir dira si le ministre a fauté. Pour l'instant il se défend, avec sa tête d'honnête homme plongé dans un bain d'argent dont il n'a rien vu ni rien su. Et il pourfend bien sûr l'opposition, comme s'il ne savait pas qu'en politique, les corbeaux s'envolent toujours de votre propre camp. Demain, Eric Woerth sera politiquement mort ou de nouveau promis à Matignon. Sacré métier.
Nicolas Sarkozy aime les signes d'amitié. Hier, il a écrit au Premier ministre. Certes, il a souvent l'occasion de le rencontrer, mais il y a des choses qu'on dit mieux en prenant sa plume. C'est plus intime. Enfin, en principe. Parce qu'aujourd'hui tout se sait immédiatement. C'est d'ailleurs ce qui s'est passé avec ce courrier. À peine le destinataire avait-il réceptionné les trois pages que leur contenu a été dévoilé. Et il n'y est pas question du temps qu'il fait ou de la démission d'Escalettes. Non, la lettre à François Fillon est super sérieuse. Elle porte sur "le train de vie de l'État". On voit tout de suite le genre. Montesquieu avait, jadis, livré par ce biais ses réflexions persanes et il ne s'était pas trop mal débrouillé. Mais revenons à l'hôte de Matignon. Qu'a-t-il appris en parcourant le pli élyséen ? Eh bien que ça commençait à bien faire. Ces tonnes de pognon public fichu en l'air. Ces profiteurs sans vergogne qui piochent dans l'argent des contribuables. À partir de dorénavant, fini de rigoler. Non seulement la garden-party du 14-Juillet passe à la trappe mais, d'ici 2013, on va supprimer 10 000 véhicules de fonction et 7000 logements du même tonneau. Et ce n'est pas tout. Sous menace de sanctions, les frais privés des ministres devront être payés "sur leurs deniers personnels". Ah ! bon, ça n'était donc pas le cas ? Merci de l'aveu. Et, last but not least, les chasses présidentielles seront "remplacées par de simples battues de régulation". On n'est pas certain de voir la différence, mais la formule fait mouche. Reste une question qu'a dû se poser le Premier ministre. Pourquoi il s'énerve comme ça, le Président ? Oh ! ce n'est pas à cause de l'affaire Woerth. Ni à cause des Blanc, Joyandet, Boutin et compagnie. Aucun d'entre eux n'a quelque chose à se reprocher. C'est la presse qui a tout inventé. Non, si Nicolas Sarkozy a recours aux grands moyens en préconisant soudain les petits, c'est à cause de la crise. Il vient d'en prendre connaissance.
Y'a une lettre qui a dû se perdre.
Copé veut «sortir de la logique des 35 heures»
Le président de Génération France a lancé lundi ses propositions pour «travailler plus en travaillant mieux».
En 2007, le «travailler plus pour gagner plus» avait fait la fortune électorale du candidat Sarkozy. Crise oblige, il devra trouver autre chose s'il se représente en 2012. Convaincu que le président sortant a «naturellement» vocation à briguer un second mandat, et déterminé à jouer un rôle clef dans sa campagne, Jean-François Copé lui a proposé lundi un nouveau slogan: «Travailler plus en travaillant mieux.»
C'est dans le cadre d'un forum de son club, Génération France, que le patron des députés UMP a versé cette contribution au futur débat présidentiel. Il s'était déjà livré à cet exercice en avril, sous l'intitulé: «Dette et déficits publics: on ne peut plus continuer comme ça!» Il s'est d'ailleurs félicité lundi que Nicolas Sarkozy n'ait pas attendu 2012 pour reprendre à son compte certaines de ses idées, comme le coup de rabot sur les niches fiscales et sur les budgets des ministères.
Les propositions de ce deuxième forum vont-elles soulever le même enthousiasme à l'Élysée? Copé a introduit la soirée en affirmant: «Travailler moins, c'est impossible. Travailler plus, c'est inévitable». Conclusion logique, selon lui: «Travailler mieux, c'est indispensable!» Pour y parvenir, il suggère de «changer notre rapport au travail», en faisant par exemple dépendre une partie des primes des cadres du jugement que les «encadrés» portent sur eux. Cette pratique, dite «évaluation à 360°», existe déjà dans certaines entreprises françaises et est courante aux États-Unis.
Pour Copé, la pénibilité doit également être abordée dans le cadre du réexamen du «rapport au travail», et non pas «compensée à la fin de la vie professionnelle» à la faveur de la réforme des retraites. Son approche diverge sur ce point de celle du gouvernement, qui a intégré la pénibilité dans ses négociations sur les retraites avec les syndicats.
Mais c'est sur la durée du travail que le décalage entre les propositions de Génération France et la position de l'exécutif est le plus flagrant. Jean-François Copé a affirmé lundi vouloir «sortir de la logique des 35 heures». Selon lui, en se contentant en 2007 de défiscaliser les heures supplémentaires, le gouvernement a infligé une «double peine» au pays: «L'État paie pour que les Français travaillent moins et en même temps pour qu'ils travaillent plus», « les allégements de charges pour compenser les 35 heures, plus les exonérations liées aux heures supplémentaires coûtant entre 15 et 20 milliards par an».
Pour sortir de ce système «perdant-perdant», il souhaite qu'un «relèvement progressif» de la durée du travail soit «négocié par les partenaires sociaux» au niveau des branches et des entreprises dans le privé. Dans le public, il faudrait, selon lui, «repasser progressivement à 39 heures». «Si les partenaires sociaux refusent de se saisir de la question, ajoute-t-il, il faudra que l'État prenne ses responsabilités et augmente progressivement la durée du travail». Avant d'aborder cette question, Copé préconise de s'attaquer au coût du travail en basculant «une partie des cotisations salariales et patronales sur la CSG», la CSG étant fusionnée avec l'impôt sur le revenu pour que «chacun participe à la solidarité à la hauteur de ses revenus». Faire «payer tout le monde et pas seulement ceux qui bossent», puis demander à «ceux qui bossent» de travailler davantage? Il n'est pas sûr que Nicolas Sarkozy soit preneur d'un programme aussi ambitieux.
Un homme politique, à qui je souhaitais bon courage, me faisait récemment cette réponse : « Ce n'est pas le courage qui manque, mais le temps ! » On peut le comprendre. Mille sollicitations, mille obligations à honorer, un emploi du temps surchargé : comme beaucoup d'autres, il n'a pas une minute à perdre. Et comme le nombre des minutes dans une journée n'est guère compressible, la formule consiste à rendre plus dense le contenu de chacune d'elles par une accélération de la vitesse d'exécution.
Hartmut Rosa, qui consacre un ouvrage savant (1) à ce phénomène, rapporte des constatations très intéressantes. On savait, par exemple, que le débit de paroles à la radio et à la télévision avait augmenté ; on découvre que cela concerne aussi les hommes politiques dont la vitesse du discours a doublé en cinquante ans. C'est le rythme de la vie qui s'emballe, sur un mode à la fois plus concentré et plus haché. De trente secondes en 1971, la durée des spots publicitaires est passée à cinq secondes, la succession des images augmentant, là comme dans les films, de manière considérable, un phénomène aggravé par le zapping pratiqué en moyenne toutes les 2,7 secondes. D'où la « speedomanie » ambiante.
Vive le speed reading (lecture accélérée et souvent de plusieurs textes de front), le speed dating (recherche de partenaires dans des rencontres dont le temps est minuté) ! La possibilité est même offerte, aux États-Unis, de rendre visite aux défunts et de leur laisser un mot sans quitter le siège de sa voiture ! Et, comble de la vitesse, dans les restaurants, le quick et le fast ne l'étant plus suffisamment, un établissement japonais a inventé la formule du repas payé au temps passé. Règle du jeu : engloutir le maximum de nourriture dans le minimum de temps. On n'ose imaginer le spectacle !
Bien entendu, l'économie n'échappe pas à l'accélération : celle des transactions financières qui peuvent se jouer au centième de seconde ; celle du rythme de changement des dirigeants dans les entreprises (tous les six ans au lieu de huit ans en 2000). Cause : des résultats désormais appréciés trimestriellement, ce qui les maintient sur un siège constamment éjectable.
Le plus grave est que cette frénésie de vitesse a colonisé le temps libre. Au point que, là aussi, domine le sentiment de ne pouvoir s'arrêter de courir sur un tapis roulant ensorcelé. Conséquence : ce temps qui devrait servir à se refaire, à se recentrer, se recueillir, se trouve aspiré et déchiqueté par une tornade d'activités, souvent creuses et onéreuses.
À l'heure où la retraite est en débat, formulons un voeu : celui de voir un grand nombre de retraités cesser de se déclarer « surmenés ». Comme s'il y avait scrupule à s'arracher à l'emprise du travail, à entrer dans un tempo associant lenteur, attention, admiration : trois piliers d'une nouvelle sagesse dont nous avons tant besoin. Les seniors pourraient contribuer décisivement au freinage d'urgence qui s'impose, à la constitution d'« oasis de décélération » où les activités retrouveraient leur place, selon leur juste importance et leur potentiel d'humanité. Ils seraient alors, à leur manière, des prophètes.
(1) Accélération. Une critique sociale du temps (La Découverte). Voir aussi Jean-Louis Servan-Schreiber, Trop vite, Albin Michel.
C'est juré-craché, la « rigueur », ce mot indécent, ne figure pas dans le vocabulaire du gouvernement ! Et, la main sur le coeur, les impôts n'augmenteront pas. Il faudra seulement consentir à un « effort financier » ! Car pour tenir ses engagements européens brutalement réveillés par la crise de l'euro, la France va réduire son déficit public en le ramenant de 8% du PIB cette année à 3% en 2013. Ou, plus prosaïquement, le pays doit trouver 100 milliards d'euros en trois ans... Depuis quelques semaines, les ministres se succèdent, la langue embarrassée dans les circonvolutions, pour expliquer cet « effort » exigé des Français. En ajoutant un peu de baume dans la mesure où l'Etat donnerait l'exemple en réduisant ses frais de fonctionnement dont les multiples frais de prestige, en taillant encore dans la fonction publique, ou en se désengageant ici et là. A voir ! Et si c'est vrai, il faut espérer que de nouvelles charges ne seront pas transférées aux collectivités territoriales... également invitées à sabrer dans leurs budgets « petits fours » et voitures de service. Mais pas de poudre aux yeux ! C'est le citoyen qui paiera le plus gros de la facture. Par les coupes sociales. Par les nouvelles conditions liées aux retraites. Par la chasse aux « niches fiscales » qui ne concerne pas seulement les contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu (un Français sur deux). Coûtant bien plus que ne rapporte cet impôt sur le revenu (49 milliards), ces quelque 500 « niches » grèveraient les recettes publiques de 75 milliards . Officiellement, il est question d'en supprimer certaines et de « raboter » les autres à hauteur de 10% pour un bénéfice escompté de 10 milliards sur deux ans. Cet « effort » sera à fournir par tous les contribuables directs et indirects (par la TVA), entreprises comprises. Il se traduira par un nouveau prélèvement très inégalement réparti sur un grand nombre de petites « niches » (l'abattement lié aux frais d'« emploi à domicile », par exemple pour la garde des enfants)... et quelques véritables « immeubles » par la taille : la TVA à 5,5% dans la restauration, la TVA réduite pour les travaux dans les logements, la prime pour l'emploi, les avantages liés à l'assurance-vie, aux économies d'énergie, aux investissements locatifs, etc... Même en admettant, dans une hypothèse haute, que l'« opération niches », liée à d'autres « petites » recettes, rapportera 20 milliards en trois ans, manqueront toujours 80 milliards pour atteindre l'objectif des 100 milliards de réduction des déficits. Ou environ 27 milliards d'économies budgétaires par an. Qui est assez naïf pour croire que l'Etat sera parcimonieux à ce point ? Il fera comme d'habitude, en puisant dans chaque porte-monnaie. Le débat sur les niches fiscales n'est que l'arbre qui cache la forêt. Celle des mauvaises surprises...
Yves Calvi rejoint la matinale de RTL
Le journaliste Yves Calvi va rejoindre la matinale de RTL à partir du 23 août pour une interview de cinq à six minutes d'une personnalité-clé de la journée, a annoncé RTL lundi 28 juin. Son émission, "L'homme du jour", se déroulera du lundi au vendredi à 8 h 15.
Auparavant, cette case de la grille de RTL était occupée par des reportages. Yves Calvi a débuté sa carrière à Radio France Internationale (RFI) en 1986, avant de rejoindre France Info en 1987. De 1990 à 1992, il participe à la création et au lancement de Télé Lyon métropole (TLM), puis devient présentateur à RMC en 1994 et à LCI (1994-1996). Ensuite, il rejoint pour près de dix ans Europe 1, dans un magazine matinal.
Depuis 2001, il anime tous les jours "C dans l'air" sur France 5, une émission de décryptage de l'actualité, ainsi que l'émission politique "Mots croisés" sur France 2, depuis 2005.
Sauver l’Espagne ? 10 fois plus cher que la Grèce
“Une faillite de l’Espagne provoquerait la chute de l’euro et probablement celle de l’Union européenne”, a commenté l’ancien président du gouvernement espagnol, José María Aznar, lors de son passage à Paris le 2 juin, au Center of Political and Foreign Affairs. Alors que l’UE a mobilisé 80 milliards d’euros pour venir en aide à la Grèce, des économistes estiment qu’il en faudrait 10 fois plus en cas de défaillance de l’Espagne, soit 800 milliards d’euros.
Il faut dire que la situation économique de l’Espagne est particulièrement inquiétante. Fin 2009, le déficit budgétaire atteignait 11,2% du PIB, le troisième plus élevé de l’UE ! Pour inverser cette tendance, le gouvernement de M. Zapatero, fortement fragilisé, s’est engagé à le réduire à 3% du PIB en 2013. Pour atteindre cet objectif, des mesures d’austérité ont été adoptées de justesse par le Parlement. Celles-ci prévoient d’économiser 15 milliards d’euros en 2010 et en 2011, mais avec une grogne sociale en perspective. Ainsi, les salaires des fonctionnaires vont baisser de 5% cette année et seront gelés l’an prochain, une taxe sur les plus riches est en préparation et le “chèque bébé” de 2 500 euros va être supprimé.
Néanmoins, la rigueur n’est pas forcément salvatrice. Le gouvernement a revu à la baisse ses prévisions de croissance à 1,3% en 2011 et à 2,5% en 2012 (contre 1,8 et 2,9%). Pour 2010, le PIB devrait reculer de 0,3%. Cette annonce n’a pas tardé à avoir des répercussions sur l’Espagne. En effet, quelques heures plus tard (le 28 mai vers 19 heures), Fitch a dégradé sa note financière, à AA+, contre AAA précédemment.
Conséquence : l’écart de rendement des obligations souveraines espagnoles se creuse par rapport au Bund allemand, alourdissant encore plus les finances du pays. Or près de 32 milliards d’euros de dette publique arrivent à échéance au mois de juillet…
Chômage et endettement privé inquiétants
Malgré la plus forte baisse mensuelle du taux de chômage au mois de mai (1,8%) depuis cinq ans, le nombre de sans-emploi reste très élevé. En effet, avec 4,06 millions de chômeurs, soit 19,7% de la population active, l’Espagne détient le record de la zone euro. Les autorités prévoient un chômage supérieur à 19% cette année, de mauvais augure pour la consommation et le moral des ménages, qui a dégringolé en mai. Pour enrayer cette spirale, une réforme du marché du travail doit être entreprise, car un fossé sépare les CDI, ultra-protégés, et les CDD, précaires. Le gouvernement souhaite agir d’ici le 16 juin sur ce dossier, avec ou sans l’accord des syndicats. Des grèves et des manifestations sont d’ores et déjà programmées pour protester contre cette réforme.
Par ailleurs, d’après le chef des députés socialistes, José Antonio Alonso, l’endettement privé (banques, entreprises, ménages) représenterait 178% du PIB. “Le fort endettement des entreprises et des ménages est concentré dans le secteur du logement”, insiste l’OCDE. Un tel niveau est dangereux pour la croissance, surtout avec un chômage qui devrait rester élevé dans les années à venir (16% estimés en 2013).
Les banques plombent la Bourse
Avec l’avènement de la crise économique, l’Espagne a été confrontée à une explosion de la bulle immobilière, qui s’est formée dans les années 2000. Durant cette période, les banques ont prêté tous azimuts, mais, avec la chute des prix de la pierre, les créances douteuses se sont accumulées dans les bilans des banques. Le FMI a récemment recommandé une consolidation du secteur bancaire, surtout pour les caisses d’épargne régionales. Celles-ci sont très exposées au marché immobilier. C’est pourquoi la Banque d’Espagne les incite à fusionner, afin de les rendre plus solides. La deuxième banque régionale du pays, Caja Madrid, serait sur le point de demander une aide publique de 2,5 à 3 milliards d’euros. S&P l’a d’ailleurs placée sous surveillance négative, estimant que sa rentabilité allait diminuer, en raison de fortes provisions pour créances douteuses. Avec un secteur bancaire fragilisé, un fort taux de chômage et un endettement important, la Bourse a été particulièrement pénalisée.
En effet, l’indice phare de la Bourse de Madrid, l’Ibex 35, a dévissé de près de 24% depuis le 15 avril. Les valeurs bancaires ont souffert de la défiance des investisseurs.