TOUT EST DIT

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dimanche 25 août 2013

Retraites : pourquoi le gouvernement hésite à augmenter la CSG


Jean-Marc Ayrault reçoit lundi et mardi les partenaires sociaux pour leur présenter les grandes lignes de la réforme des retraites. Le patronat et les syndicats ont déjà dit leur opposition à une hausse de la CSG.

Augmentera, augmentera pas? Recourir à la CSG pour combler une partie du déficit des retraites apparaît comme une piste "cohérente" pour le gouvernement, mais il devra mettre les formes pour le faire accepter, en plein débat sur un "ras-le-bol" fiscal des Français.
Instaurée en 1991 pour principalement financer l'assurance maladie, la contribution sociale généralisée (CSG) était de 1,1% à sa création. Son taux a progressivement été relevé pour atteindre 7,5% pour les salaires, 6,6% pour les pensions de retraites et 6,2% pour les allocations chômage.
Un grand vide dans la tête 
La ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine, la dernière au sein de l’exécutif à évoquer son éventuelle hausse, a déclaré mardi que cette option avait "sa cohérence". Tout en précisant que les décisions n'étaient "pas prises".
De récentes informations de presse, jamais démenties, avaient fait état d'un possible relèvement de 0,2 à 0,5 point, pour combler une partie du déficit des retraites, qui va dépasser les 20 milliards d'euros d'ici à 2020, tous régimes confondus.
Il est vrai que l'augmentation de la CSG permettrait d'approvisionner immédiatement les caisses, à l'inverse des autres mesures à l'étude, comme l'allongement de la durée de cotisation. Une hausse de 0,2 point apporterait 2,4 milliards d'euros, et jusqu'à 6,1 milliards si le gouvernement la relève de 0,5 point.
Mais le Premier ministre, qui reçoit lundi et mardi les partenaires sociaux pour leur présenter les grandes lignes de cette complexe réforme des retraites, devra faire preuve de pédagogie: le patronat et les syndicats ont déjà dit leur opposition à une hausse de la CSG.
"Extraordinairement dangereux politiquement"
"Les recettes de la CSG doivent être attribuées en priorité à la santé et à la perte d’autonomie. Pour les retraites, l’augmentation modérée des cotisations des entreprises et des salariés est plus logique", a dit dans une interview au JDD Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, qui va ouvrir le calendrier des ultimes concertations à Matignon.
La CFTC va aussi faire entendre sa voix. "Lors des premières concertations, cette piste (d'une hausse de la CSG) n'avait pas paru intéresser le gouvernement. Je pense que le Medef a fait pression. Nous ne sommes pas sûrs que ce soit la bonne réponse et sans doute ne l'appuierons-nous pas lundi lorsque nous verrons le gouvernement", a déclaré Pascale Coton, la numéro deux de ce syndicat.
Pourtant, le principal syndicat patronal, qui réclame plutôt une augmentation de la durée des cotisations à 43 ans (contre 41,5 actuellement) et de l'âge légal de départ à la retraite à 63 ans (contre 62) n'y est pas favorable. "Ce serait une très mauvaise idée d'utiliser les impôts, la CSG, d'augmenter les cotisations sociales ou patronales car on réduirait la compétitivité de nos entreprises", dit Pierre Gattaz, le patron du Medef.
Pour le secrétaire général de Force ouvrière (FO), Jean-Claude Mailly, le financement des retraites des métiers pénibles doit passer par "une cotisation employeur" et non par une augmentation de cette contribution.
L'exercice s'avère d'autant plus compliqué pour le gouvernement que le contexte ne s'y prête pas. Le ministre de l'Economie Pierre Moscovici vient lui-même d'évoquer "un ras-le-bol fiscal des Français". Les prélèvements obligatoires (impôts, cotisations sociales, taxes locales), à 46,3% du produit intérieur brut en 2013, ont atteint un record.
Et la facture devrait s'alourdir avec la hausse de la TVA à partir de janvier et peut-être l'instauration d'une "contribution climat énergie", annoncée à la surprise générale jeudi.
Olli Rehn invite la France à cesser d'augmenter les impôts
Dans les rangs de la majorité, certains font également entendre leur désaccord. Le député PS Jean-Marie Le Guen, spécialiste des questions de santé publique, s'est dit "très réticent". "C'est extraordinairement dangereux politiquement et socialement de donner priorité aux retraites par rapport à l'assurance maladie".
Le groupe écologiste à l'Assemblée nationale, le MoDem ou le Parti de gauche sont aussi contre, quand des économistes plaident pour une "pause fiscale". Bruxelles aussi met son grain de sel. Pour le commissaire européen aux Affaires économiques Olli Rehn, la France doit "absolument" éviter d'augmenter les impôts. Si elle devait s'y trouver contrainte, le gouvernement pourrait, "à la rigueur", recourir à une fiscalité écologique.

La capricieuse météo des inégalités

La capricieuse météo des inégalités


Qui, des plus riches et des plus pauvres, pâtit le plus de la crise ? Explications. 

Les vacances d'été sont devenues l'un des rares moments de l'année où la France d'"en haut" et celle d'"en bas" ont encore l'occasion de se côtoyer. Au hasard, par exemple, d'une rencontre à la terrasse du café du port. Les ports de plaisance n'ont pas seulement été créés, pour reprendre la définition de Philippe Bouvard, "pour que les navigateurs qui ne prennent jamais la mer rencontrent les vacanciers qui n'ont pas de bateau". Ils ont aussi été inventés pour que les classes modestes et moyennes puissent approcher de très près, sur les quais, l'hyper-richesse et les yachts à plusieurs millions d'euros. Pour qu'elles prennent en pleine face les inégalités de revenus.

Du côté de celles-ci, les dernières nouvelles ne sont pas bonnes. Elles se creusent à nouveau, et fortement, à peu près partout dans le monde. Au début de la crise financière, les riches avaient terriblement souffert. Entre 2007 et 2009, les revenus des 1 % d'Américains les plus riches avaient chuté de 36 %, contre 11,6 % pour les 99 % restants. Mais depuis 2010, grâce au rebond des marchés boursiers, les choses se sont bien arrangées pour eux. Contrairement à ce qui s'était passé dans les années 30, où le revenu des super-riches s'était durablement effondré avec pour conséquence une réduction très forte des inégalités. En France, par exemple, la part des revenus perçue par le centième de la population le plus riche était passée de 15,4 % en 1935 à 8,9 % en 1950.
Rien de tel aujourd'hui. En 2010, dernière année recensée pour l'ensemble des pays de l'OCDE, le revenu moyen des 10 % les plus riches représentait 9,5 fois celui des 10 % les plus pauvres. Plus qu'avant la crise (9 fois) et bien plus que dans les années 90 (8 fois) et dans les années 80 (7 fois). Sans surprise, les pays scandinaves restent les pays les plus égalitaires au monde, avec un ratio de 5 au Danemark, les plus inégalitaires étant le Mexique et le Chili (près de 30). La France occupe une position intermédiaire, avec un rapport de 7,2 (6,6 en 2005). Après être restées stables pendant vingt ans, les inégalités de revenu progressent depuis le milieu des années 2000. Entre 2008 et 2010, le niveau de vie des 10 % de Français les plus pauvres a baissé en moyenne de 250 euros alors que celui des 10 % les plus riches a augmenté de 1 700 euros.
C'est toutefois en Chine que les inégalités ont le plus progressé au cours des dernières années. Le coefficient de Gini (égal en théorie à 0 quand tous les revenus sont égaux, égal à 1 en cas d'inégalité absolue, quand une seule personne capte tous les revenus) s'y est établi à 0,61 en 2010, un niveau particulièrement élevé. De quoi préoccuper les économistes et les dirigeants chinois, mais pas du tout le patron du groupe Wahaha, Zong Qinghou, l'homme le plus riche du pays, qui tient un raisonnement simple : "Si tout le monde était plus riche, la société deviendrait harmonieuse et plus confortable. Si nous instaurions l'égalitarisme, tout le monde ne mangerait pas à sa faim." Il faut aller en Chine communiste pour entendre des discours ultralibéraux aussi décomplexés.
L'idée selon laquelle les inégalités serviraient d'aiguillon à la croissance n'est toutefois pas confirmée par les recherches historiques. Lesquelles, a contrario, n'indiquent pas non plus que les inégalités pénalisent fortement la croissance. "Malgré d'abondants travaux sur les liens entre l'inégalité et la croissance, les données empiriques ne sont pas concluantes", résument les experts de l'OCDE. On observe des périodes de forte croissance avec une nette réduction des inégalités ou au contraire avec une progression sensible des inégalités (comme durant les Trente Glorieuses, qui furent aussi les Trente Inégalitaires), d'autres sans croissance avec baisse des inégalités (années 30) ou au contraire avec hausse des inégalités (comme aujourd'hui).
Les économistes ont en revanche mis en évidence au cours des dernières années un lien très intéressant : le creusement des inégalités favorise les crises financières dans la mesure où il détériore l'équilibre global épargne-investissement, avec des classes populaires et moyennes qui s'endettent massivement pour faire face à la stagnation de leurs revenus et maintenir leur niveau de vie. Marianne Bertrand et Adair Morse, de l'université de Chicago, sont allés encore plus loin. Ils ont établi qu'avant la crise, aux États-Unis, les régions où les ménages à hauts revenus dépensaient le plus étaient aussi celles où les ménages aux revenus inférieurs dépensaient le plus. Leur explication ? De façon inconsciente, les "pauvres" semblent influencés par le comportement de consommation des "riches" qu'ils côtoient et cherchent à l'imiter.
Peut-être alors faudrait-il introduire, comme pour l'inflation, la notion d'"inégalité ressentie". Qui, aujourd'hui, se nourrit chaque jour de la publication détaillée, dans les journaux, des rémunérations des patrons du CAC 40, des salaires des footballeurs ou de la liste des plus grosses fortunes du pays. De quoi donner envie de faire la révolution ou de commander une coupe de champagne à la terrasse du café du port.

Impôts : l'assommoir hollandais

Pierre Moscovici, par ailleurs excellent homme, manie l'humour involontaire avec une placidité déconcertante. Sans esquisser le moindre sourire, il se dit très sensible "au ras-le-bol fiscal des Français". Et promet - croix de bois croix de fer, si je mens je vais en enfer - une stabilisation des prélèvements obligatoires à partir de 2015. Les promesses n'engageant que ceux qui les écoutent, selon la célèbre formule d'Henri Queuille, il y a peu de chance pour que le contribuable se sente véritablement rassuré par ces bonnes paroles. Alors que les décomptes d'impôts pleuvent ces jours-ci comme feuilles mortes un jour maussade d'automne, les Français mesurent l'ampleur des énormes sacrifices qu'ils devront consentir,nolens volens. Le gel des barèmes et la réduction du quotient familial frappent les familles de plein fouet. Surtout si elles ont le mauvais goût de gagner correctement leur vie, de ne pas être à la charge de la collectivité et d'avoir engendré plus de deux enfants.

Oui, cherchez l'erreur...c'est lui !!

Il faut, bien sûr, rétablir le plus rapidement possible l'équilibre des comptes publics. Mais la seule méthode qui vienne à l'esprit du gouvernement est d'une simplicité biblique : alourdir encore un peu plus la pression fiscale. Au risque de tuer la reprise, de plomber les entreprises, de tuer l'initiative individuelle, d'étouffer la consommation. "Trop d'impôt tue l'impôt" répètent à satiété depuis la nuit des temps tous les fiscalistes. Ce que le bon peuple traduit par un prosaïque : "On ne tond pas un oeuf."

La Cour des comptes sonne l'alarme

Il existe évidemment un autre paramètre sur lequel pourrait agir le gouvernement et que pratiquent communément les ménages : alléger drastiquement les dépenses. C'est d'ailleurs ce que préconise la Cour des comptes, qui n'est pas un repaire de dangereux réactionnaires libéraux. Mais cela supposerait de diminuer le nombre de fonctionnaires, de réviser le statut de la fonction publique. Nous avons, en France, environ 5,5 millions de fonctionnaires. Et sans doute davantage si l'on y ajoute tous ceux (hors chômeurs) qui sont indirectement rétribués grâce à l'argent des contribuables. Soit environ 90 fonctionnaires pour 1 000 habitants. En Allemagne, le ratio est de 50. Nos voisins d'outre-Rhin sont-ils moins bien administrés ? La sécurité est-elle moins bien assurée ? L'enseignement est-il d'un niveau inférieur ? Les rues de Berlin ne sont pas, que l'on sache, un coupe-gorge. Les Allemands n'ont même pas la chance d'avoir chez eux une cité aussi exotique que Marseille où les différends se règlent à coup de kalachnikov. Dans le dernier classement de Shanghai, leurs universités sont devant les nôtres (38 dans le top 500 contre 20 pour la France).
Cherchez 

l'erreur...

"À majorité incohérente, politique incohérente"

"À majorité incohérente, politique incohérente"

Pour Philippe Tesson, le président est indifférent aux critiques et à la sanction populaire, grâce à "une majorité parlementaire suffisante pour durer".

Rien n'y fait. La réalité reste toujours plus forte que les bonnes intentions, que les résolutions. Depuis qu'il est au pouvoir, François Hollande suit une route cahotante, hérissée d'obstacles qu'il peine à vaincre et que la plupart du temps il contourne. Sa résistance aux déconvenues est impressionnante. Singulier syndrome : plus on reçoit de coups, mieux on les encaisse. Il oppose au sort une confiance en soi, une certitude confondantes, indifférent à la sanction populaire. 
Il n'a fallu que quelques semaines après son accession au pouvoir pour que son crédit plonge au plus bas. Depuis, il stagne. Dans les premiers temps, on mettait ce marasme sur le compte de l'inexpérience. Il est devenu quasiment structurel. Paradoxalement, de cette faiblesse Hollande fait une force. Qu'importe qu'on n'ait avec soi qu'un Français sur quatre si l'on dispose d'une majorité parlementaire suffisante pour durer, si l'on a en face de soi une opposition médiocre et si l'on sait montrer qu'on fait ce qu'on peut, si l'on sait jouer sur la crédulité du peuple, par exemple en promettant le bonheur à l'échéance de 2025 quand on ne sait même pas assurer le quotidien en 2013.

Majorité arithmétique mais incohérente

Ce mélange de bonne volonté, de rouerie et de pragmatisme laborieux tient lieu de politique. Bien malin celui qui saurait définir celle-ci précisément ! Elle emprunte à la plupart des modèles mis en oeuvre dans les démocraties occidentales depuis plus d'un demi-siècle. Elle se veut socialiste, mais qu'est-ce que le socialisme aujourd'hui, que sont devenus et le mot et la chose ? Il n'y a qu'une seule ligne de gauche, disent-ils. Oui, mais quelle ligne ? À défaut de l'avoir tracée, Hollande a réuni dans sa majorité et dans son gouvernement des sensibilités diverses, idéologiquement opposées, chacune revendiquant son appartenance à la gauche selon sa culture, son histoire et son intérêt propres, et dont l'addition est le reflet d'une majorité arithmétique, mais incohérente. 
Comment la politique du gouvernement issue de cette majorité pourrait-elle ne pas être elle-même incohérente ? En quelques jours, la preuve éclatante, caricaturale même, de cette incohérence vient d'être apportée, sur le problème tant de l'insécurité que de l'immigration, du statut des autoentrepreneurs, etc., à la veille de la discussion de la réforme des retraites, objet attendu d'un cafouillage interne.

Approximation politique

Cela dure depuis seize mois. Déjà le quart du mandat. Le pire est qu'on s'y est habitué. Qu'a-t-on opposé à ce désordre idéologique, à cette approximation politique ? À gauche, la déception n'a pas éteint l'espoir, par obstination idéologique. À droite, la raillerie, l'ironie, l'humeur, au mieux l'indignation ont tenu lieu de réaction, à défaut d'une opposition organisée. C'est un scandale de voir aujourd'hui l'UMP plus soucieuse de procéder à l'inventaire du mandat Sarkozy que de préparer une alternative au mandat Hollande. 
C'est dans ce climat détestable que s'ouvre l'année politique. On promet à François Hollande et à son gouvernement une rentrée difficile. Allons donc ! Le président a montré l'efficacité de son élasticité. Il saura gérer au mieux de son intérêt quotidien, et dans l'objectif de sa durée, les intérêts successifs, alternatifs et contradictoires de chacun de ses alliés d'opportunité. Tout le monde y trouvera son compte, les Taubira et les Valls, les Duflot et les Moscovici, et les autres. La droite ? Elle est inoffensive. Quelle droite ? La seule inconnue de l'équation politique : le Front national.