TOUT EST DIT

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mardi 7 juin 2011

Hambourg, la cité de la peur

Centre de la crise de l'E.coli, la ville allemande vit sous alerte à l'épidémie : le sang se fait rare dans les hôpitaux et les légumes invendus, trop nombreux. "Nous sommes encore en vie" grince une marchande du marché.
La salade disparaît peu à peu de la ville. Les restaurants remplacent la fameuse feuille verte sur le bord de l'assiette par une tranche de melon. C'est désormais le persil qui donne aux sandwiches la touche de couleur qui favorise les ventes. "On n'a plus le droit de mettre de la salade", explique la vendeuse. Même chose pour les tomates: c'est le paprika qui donne du rouge au petit pain au fromage. A l'extérieur de la grande ville, les paysans épandent des palettes entières d'iceberg et de roquette hachée dans les champs pour servir d'engrais. Elles sont revenues du marché invendues.
La bataille des légumes fait rage à Hambourg depuis que le drapeau de l'E.coli flotte sur la métropole. Les produits allemands sont mis en valeur par rapport aux produits étrangers, les salades difficilement vendables sont présentées comme "produit du jour" sur les marchés hebdomadaires. Par exemple celui de Lohbrügge, ce samedi: l'activité bat son plein et les dialogues semblent tirés d'un film catastrophe. "On est toujours vivants", crache une marchande qui vend des légumes locaux. Tout est récolté par le personnel du producteur, personne n'est tombé malade, personne n'est mort, poursuit-elle. C'est une preuve, non ?
Pourtant les concombres, lourds comme du plomb, restent dans leurs cageots. Les clients n'en veulent pas, même s'ils sont quasiment donnés. La pièce coûte quarante centimes, trois pour un euro. A l'étal d'en face, une dame d'un certain âge confie être "très inquiète." Si elle tombe malade, elle racontera que c'est ici qu'elle a fait ses courses, le vendeur est prévenu. Puis elle se fait emballer un petit pot de salade harengs-betteraves-oignons.

Le mot "salade" sonne comme un coup de feu

Tout est sens dessus dessous. Le mot "salade" sonne comme un coup de feu. Voilà qu'il n'est pas bon pour la santé de manger sainement. Le monde a peur des légumes allemands, introduit des contrôles aux importations, comme les Etats-Unis, ou des interdictions comme les Russes. Pour les agriculteurs allemands en revanche, la seule façon de se protéger contre l'E. coli, c'est d'acheter des légumes allemands.
Sur Internet, les maraîchers font vivre une légende qui est déjà dépassée. La page d'accueil des marchés hebdomadaires de Hambourg annonce toujours : "Nous souhaitons vous faire savoir pourquoi vous pouvez – voire pourquoi vous devez – malgré tout acheter des fruits et les légumes frais au marché. L'EHEC a été repéré dans des concombres venant d'Espagne."
Ca doit bien venir de quelque part. C'est comme pour Fukushima, on a le sentiment de ne rien pouvoir voir, ni entendre, ni sentir quoi que ce soit. Il y a quelque chose qui a rendu malade 2 500 personnes en Allemagne. C'est là, alors nous avons peur. Joachim Gauck, l'ancien directeur du Commissariat aux Archives de la Stasi vient même d'attester l'existence d'une véritable "addiction à la peur" chez les Allemands.
Est-ce si surprenant que les gens éprouvent une peur diffuse? Avant-hier, il y avait de la dioxine dans la nourriture pour les animaux, hier une centrale nucléaire a explosé, aujourd'hui c'est une bactérie inconnue des chercheurs sous cette forme qui se répand. Les produits alimentaires voyagent dans le monde entier apparemment sans laisser de traces. Et les gens, toutes les victimes potentielles, ne peuvent qu'éviter les obstacles invisibles. Ils enlèvent la salade des sandwiches, mangent des pizzas sans tomates, achètent au marché des courgettes plutôt que des concombres.

La peur se manifeste de façon subtile

Pour une ville terrorisée, Hambourg a même passé un merveilleux weekend. Les gens se sont promenés par dizaines de milliers dans le centre ville en vêtements d'été, ont rempli les terrasses des cafés, sont allés au restaurant. Personne ne portait de masque, personne ne s'est terré chez soi par crainte de la bactérie tueuse. La peur se manifeste de façon subtile, par exemple dans tous ces petits flacons bleus de désinfectant qui remplacent désormais le savon dans presque toutes les toilettes publiques. Ou dans les temps d'attente dans les centres de don du sang. Celui-ci se fait rare et chacun pourrait  en avoir besoin bientôt. Olaf Scholz, le maire, a appelé la population à donner son sang. La détérioration brutale des fonctions rénales fait partie des effets horribles de la bactérie.
Hambourg est la ville d'Allemagne qui compte le plus de victimes de l'E.coli. Les hôpitaux sont à la limite de leurs capacités, Daniel Bahr, le ministre de la Santé a dû le reconnaître. Le jeune ministre s'est rendu dimanche au CHU d'Eppendorf, à Hambourg, pour "se faire une idée de la prise en charge des malades." Quand des soldats meurent en Afghanistan, le ministre de la Défense se déplace. Quand un train déraille, le ministre des Transports se déplace. Quand une nouvelle épidémie éclate, le ministre de la Santé se déplace. Depuis la visite de Bahr, Hambourg est en quelque sorte officiellement zone sinistrée.
C'est maintenant la réputation de la "perle de l'Alster" qui est en jeu. La bactérie est considérée en ville comme un criminel. La semaine dernière, le chef de la police a proposé de faire appel à des policiers pour rechercher cet ennemi invisible.


Vu de Pologne

Une épidémie de papier

"Comment les riches pays européens n'ont-ils pas pu empêcher cela ?", s'interroge Gazeta Wybrocza à propos de l'infection E.coli dont l'origine reste incertaine. Pour le quotidien polonais, c'est le système fédéral allemand qui est en cause. Tandis que le célèbre Institut Robert Koch (qui relève du ministère fédéral allemand), est la principale institution allemande responsable de la gestion des maladies infectieuses, la protection sanitaire des citoyens relève pour sa part de la responsabilité des Länder. Par conséquent, même si les experts de l'Institut Robert Koch ont été les premiers à déceler la présence d'une bactérie mortelle dans des crudités, le verdict final sur la question ne peut être rendu par l'Institut fédéral pour l'évaluation des risques basé à Berlin, qui relève du ministère de l'Agriculture.
S'il a "admirablement équipé ses laboratoires", l'institut ne peut pas prélever d'échantillons de nourriture suspecte parce que cela est de la prérogative des Länder. "Les cliniques, les institutions sanitaires, les ministères régionaux et fédéraux travaillent tous de leur côté. Un mois est passé et personne n'est encore en charge du problème", critique Thomas Oppermann député de l'opposition social-démocrate. En raison de ce chaos institutionnel, les experts de l'Institut Koch se sont rendus à Hambourg deux semaines seulement après le début de l'épidémie. Or, le temps est un élément déterminant dans ce type de situation. "Pour de nombreux médecins, il est désormais impossible de repérer la source de l'épidémie", souligne le quotidien de Varsovie.

L'aide du FMI à la Grèce implique des décisions dure en Europe

Le FMI a fait savoir mardi que le déblocage de sa part d'une nouvelle tranche d'aide au bénéfice de la Grèce implique que des décisions difficiles soient prises en Europe.
Un haut fonctionnaire grec a déclaré pour sa part que le gouvernement pensait que le Parlement grec se prononcerait d'ici la fin du mois sur son plan d'austérité à moyen terme, lequel constitue une condition primordiale à l'octroi d'une nouvelle aide internationale.
Athènes doit accélérer les privatisations et imposer de nouvelles mesures d'austérité pour pouvoir bénéficier de cette aide, suivant un accord passé vendredi dernier avec le Fonds monétaire international, l'Union européenne et la Banque centrale européenne.
Selon des sources officielles de la zone euro, une proposition portant sur un plan de 80 à 100 milliards d'euros sur trois ans serait prête dans les deux semaines. Mais cette proposition ne résout pas d'importantes questions, telle que la participation du secteur privé.
Selon ces sources, 30 milliards seraient tirés d'un report des échéances de la dette, 25 à 30 milliards seraient apportés par les privatisations grecques et 30 à 40 milliards proviendraient de l'aide internationale proprement dite, à raison d'un tiers pour le FMI et de deux tiers pour le Fonds européen de stabilité financière, comme pour l'Irlande et le Portugal.
Le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires Olli Rehn a dit lundi que le dispositif serait prêt avant le 20 juin, date de la réunion de l'Eurogroupe à Luxembourg. Si tel est le cas, les chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE pourraient adopter le paquet lors de leur sommet de Bruxelles des 23 et 24 juin.
PARTICIPATION VOLONTAIRE
L'Union européenne a encore du pain sur la planche avant que le FMI n'octroie de nouveaux prêts, a dit Bob Traa, représentant du FMI en Grèce.
"Je crois qu'il y a un sommet en Europe, en juin, où il faudra bien prendre le taureau par les cornes. Ils devront prendre certaines décisions; alors nous informerons notre conseil et débourserons l'aide début juillet", a-t-il dit.
L'UE tente de mettre au point un dispositif d'aide à la Grèce pour les années à venir qui prévienne tout défaut et implique le secteur privé.
Il y a un an, l'UE et le FMI mobilisaient une aide de 110 milliards d'euros pour la Grèce. Mais cela supposait que le pays puisse à nouveau emprunter sur les marchés début 2012, ce qui est totalement exclu avec des taux de rendement astronomiques sur le marché de la dette grecque.
La participation volontaire du secteur privé au sauvetage de la Grèce, qui serait l'un des volets de la nouvelle aide, appelée à se substituer à la précédente, soulève bien des questions.
L'une des hypothèses est que les créanciers privés rachètent de nouvelles obligations grecques lorsque celles qu'ils détiennent arriveront à échéance, évitant ainsi à la Grèce l'obligation de débourser des liquidités.
Selon les sources officielles de la zone euro, les investisseurs qui ont investi dans du papier à deux et trois ans pourraient ainsi acheter des titres à sept ans voire plus.
Mais pour l'agence de notation Moody's, le compte n'y est pas. Elle voit mal comment ce report d'échéance pourrait être réellement volontaire de la part du privé et elle y voit un défaut en puissance.
"On a du mal à imaginer, dans les circonstances actuelles, que cela se fasse volontairement", a déclaré à des journalistes Bart Oosterveld, directeur de la division "risque souverain" de Moody's. "Il est plus probable que, de notre point de vue, cela soit considéré comme un événement de crédit."
UNION SACREE
Bob Traa a souligné que le FMI était opposé à une restructuration majeure de la dette du pays en raison des conséquences imprévisibles que cela pourrait avoir pour les pays de la zone euro. Mais il a laissé entendre que le FMI était ouvert à d'autres solutions.
"On peut penser raisonnablement à rallonger les délais de paiement, par exemple des prêts accordés par les partenaires de la zone euro et le FMI parce que nous avons des clauses d'amortissement en fin de programme. C'est une question technique à laquelle nous pouvons réfléchir", a-t-il dit.
La Grèce a déjà obtenu un allongement des délais de remboursement pour le premier programme d'aide et le FMI s'est dit disposé à renouveler la manoeuvre mais pas sans accord préalable avec l'Union européenne.
La dette de la Grèce représente 340 milliards d'euros, soit 150% de son PIB environ et Traa a dit que le temps était compté. "La Grèce est à un point critique et n'a pas de temps à perdre", a-t-il dit.
Concernant la participation du privé au sauvetage grec, la fédération bancaire allemande BDB estime que cela doit être une solution de dernier recours et que pour l'instant elle ne s'impose pas.
Un haut fonctionnaire grec a par ailleurs fait savoir que le gouvernement comptait réduire l'impôt sur les sociétés, une concession à l'opposition, ainsi que la TVA à compter de 2012.
Toutefois, ces mesures ne feraient pas partie du plan économique à moyen terme, a-t-il dit à la presse.
Au sein du Pasok, le Parti socialiste au pouvoir, certains avaient réclamé que chaque partie du plan, qui prévoit pour 6,4 milliards d'euros de nouvelles mesures d'austérité, fasse l'objet de votes séparés.
Voter en bloc permettrait d'éviter que chaque mesure ne soit contestée individuellement. L'UE a appelé à une union sacrée sur ce plan qui couvre une période au-delà des élections prévues en 2013.

La Grèce paie des pensions à des milliers de retraités décédés

C’est une nouvelle bien embarrassante pour la Grèce. Alors que le pays est au bord de la faillite et qu’il doit appliquer un plan de rigueur très serré, la ministre du Travail, Louka Katseli, vient d’annoncer que des retraites continuent d’être versées à des milliers de Grecs décédés depuis longtemps.
Environ 16 millions d’euros de perdus
Elle a annoncé que les autorités enquêtaient pour déterminer si les quelque 9 000 centenaires continuant de toucher leur retraite étaient tous encore vivants. Un croisement de données a permis de déterminer que le versement de leur retraite avait été maintenu à quelque 4 500 fonctionnaires décédés, ce qui représente un montant annuel de plus de 16 millions d’euros.
En Grèce, les citoyens ne signalent pas toujours le décès de leurs proches afin de continuer à toucher leur retraite et les contrôles manquent de rigueur.
Le ministère du Travail doit économiser 8 milliards
Une fraude dont Athènes n’a pas franchement besoin : sa dette s’élève actuellement à plus de 300 milliards d’euros d’actifs publics selon la Banque centrale européenne. Le ministère du Travail doit, à lui seul, économiser huit milliards d’euros entre 2012 et 2015 pour continuer de recevoir les aides de l’Union européenne et du FMI.
Kurt Lauk, président du Conseil économique de la CDU allemande, réticent à donner des fonds à la Grèce a affirmé que cet exemple des retraites « prouve la nécessité d’étudier dans le moindre détail les finances grecques avant de verser le moindre centime d’aide » à Athènes.
« Les ministres des finances de l’Union européenne seraient bien avisés de ne pas laisser ces contrôles aux seuls Grecs », a-t-il ajouté.

Peut-être un référendum en Grèce

Le Premier ministre grec Georges Papandréou n'a pas exclu d'organiser un référendum sur "les grands changements" politiques et économiques que son gouvernement ambitionne pour le pays, mais sans envisager une telle consultation sur la cure d'austérité en cours.

"Je suis prêt à procéder à de grands changements et dans ce cadre on pourrait aussi avoir recours au référendum pour obtenir le plus grand consensus possible (...)", a déclaré M. Papandréou au cours d'une réunion-marathon du conseil des ministres dans la nuit de lundi à mardi.

Il a demandé au ministre de l'Intérieur et de l'Admiministration, Yannis Ragoussis, "d'élaborer les réglementations législatives adéquates qui permettraient d'avoir recours à cet outil démocratique, prévu par la Constitution, en cas de besoin".

Rappelant que M. Papandréou s'était déjà prononcé à plusieurs reprises en faveur du principe référendaire, le porte-parole du gouvernement, Georges Pétalotis, a toutefois précisé mardi qu'un tel recours n'était pas envisagé au sujet du nouveau plan d'austérité 2012-2015 en cours d'adoption sous la pression des créanciers du pays.
La question d'un référendum "ne se pose naturellement pas maintenant", a déclaré M. Pétalotis sur la radio Vima FM.

Pour M. Papandréou, "les changements envisagés" pour le pays vont au-delà du plan de redressement, dicté par l'Union européenne et le Fonds monétaire international en échange de la poursuite de l'aide financière au pays, et concernent tout "le modèle politique et économique" où dominait "le clientélisme".

Le Premier ministre a par ailleurs exclu des élections anticipées d'ici à la fin de son mandat (en 2013), et s'est engagé à respecter l'accord conclu avec les créanciers du pays pour la mise en oeuvre de l'assainissement économique.

"Aujourd'hui, la Grèce subit les répercussions d'une instabilité (financière) générale et cela nous oblige à prendre des décisions difficiles (...), les jours et les semaines qui suivent sont cruciaux", a-t-il dit.

Il a appelé "les députés à voter le programme économique à une forte majorité".
Vendredi, la Grèce et la Troïka (UE-FMI-BCE) ont conclu des négociations pour l'adoption d'un nouveau volet d'économies budgétaires et l'accélération de privatisations en contrepartie d'une nouvelle aide financière de la zone euro au pays.

Depuis lors, la tension sociale ne cesse de monter. Dimanche, le nombre "d'indignés", les manifestants qui campent depuis plus de deux semaines devant le Parlement à Athènes, a atteint plus de 70.000.

Berlin freine le nouveau plan de secours pour la Grèce

Le président de l'Eurogroupe Jean-Claude Juncker a pourtant laissé entendre qu'Athènes allait bénéficier d'une rallonge financière après le premier plan de secours, adopté en mai 2010.

D'intenses négociations sont en cours afin de trouver une solution permettant d'impliquer les créanciers privés dans un nouveau plan d'aide à la Grèce sans déclencher un défaut, a déclaré lundi 6 juin Jean-Claude Juncker devant la commission des Affaires économiques et monétaires du Parlement européen, à Strasbourg.
"Il y a un certain nombre de gouvernements qui pensent ne pas pouvoir obtenir l'adhésion de leur Parlement et de leur population s'il n'y a pas d'implication du secteur privé", a dit le président de l'Eurogroupe. "Avec la BCE, nous travaillons à une formule qui n'entraîne pas un jugement définitif et négatif par les agences de notation et qui n'entraîne pas le constat d'un défaut", a ajouté le Premier ministre luxembourgeois, évoquant des "négociations ardues et ardentes". Le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires, Olli Rehn, qui l'accompagnait, a précisé que cette solution serait trouvée avant le 20 juin, écartant l'hypothèse d'une restructuration de la dette grecque.
"Ce qu'il y a pour le moment ce ne sont pas des engagements, ce sont des opinions", a réagi le porte-parole du gouvernement allemand, toujours très prudent sur le sujet. Berlin est soucieux de ne pas froisser son opinion intérieure, peu encline à venir au secours de la Grèce.

85 milliards d'euros ?

Après avoir reçu l'an dernier 110 milliards d'euros de prêts sur trois ans par le FMI et l'UE, la Grèce devrait obtenir d'ici le mois de juillet une rallonge financière de la part de ses bailleurs de fonds internationaux, en échange d'un nouveau train de mesures d'austérité, pour éviter le défaut de paiement. Selon le journal grec Kathimerini, le nouveau plan de sauvetage de trois ans pour la Grèce, qui ira donc jusqu'en 2014, se montera à 85 milliards d'euros, dont un peu moins de la moitié sera fournie par l'UE et le FMI. L'hebdomadaire allemand Der Spiegel parle jusqu'à 100 milliards d'euros. Pour le quotidien allemand Handelsblatt paru mardi, la décision sur un deuxième plan pourrait toutefois ne pas intervenir avant l'automne, en raison notamment de l'opposition de la Slovaquie.
Après avoir examiné pendant un mois entier la mise en oeuvre par la Grèce du premier plan de sauvetage, les inspecteurs représentant la Commission européenne, le Fonds monétaire international et la Banque centrale européenne ont déclaré vendredi que la Grèce avait accompli des progrès considérables mais qu'il fallait accélérer les réformes structurelles.

Une échéance importante en juillet

Comme Jean-Claude Trichet, président de la Banque centrale européenne (BCE) Jean-Claude Juncker a estimé lundi qu'Athènes avait fait des progrès dans l'exécution de son programmes d'ajustement budgétaire. "Le gouvernement grec est en bonne voie pour remplir ses objectifs budgétaires pour 2011", a-t-il dit aux eurodéputés, tout en prévenant que le programme de privatisations de 50 milliards d'euros avancé par les autorités grecques ne résoudrait pas tous les problèmes du pays.
Le ministre grec des Finances George Papaconstantinou a prévenu qu'Athènes serait incapable de remplir ses obligations à partir de la mi-juillet si le gouvernement n'obtenait pas la prochaine tranche de prêt de 12 milliards d'euros dans le cadre du premier plan de sauvetage de l'UE et du FMI, qui devait à l'origine être débloquée le 29 juin.
Mardi, la ministre grecque de l'Emploi, Louka Katselli, a relancé le débat sur les aberrations du système fiscal grec en citant plusieurs exemples: "J'ai la déclaration sous les yeux, ce couple déclare 19.300 euros par an et paie 9 euros d'impôts par an", a-t-elle détaillé, avant  de présenter le cas d'un couple "possédant un villa de 300 m2, une résidence secondaire de 200 m2, deux voitures, une piscine et un voilier". "Ils déclarent 58.000 euros de revenus annuels, et paient 7.800 euros".

Le marathon judiciaire de DSK

Dans l'affaire DSK, dominaient jusqu'à présent l'incrédulité, un buzz sans pareil provoqué par l'inculpation pour crimes sexuels d'un des hommes les plus influents au monde et des images chocs, rares mais tournant en boucle. Elle est désormais entrée dans une autre dimension, son implacable réalité judiciaire. L'audience d'hier préfigure une longue épreuve où tout pourra se passer à tout moment, y compris une négociation entre les parties. Une audience technique, éclair, sans surprise. DSK ayant confirmé qu'il plaiderait non coupable, seule façon d'éviter éventuellement la prison, la voie à un procès public est tracée. Contraint au silence par le système judiciaire américain, la défense va pouvoir prendre connaissance des éléments à charge et tenter de sortir de cette phase de présomption de culpabilité dans laquelle DSK était confiné. Classiquement, une affaire de viol marque la confrontation entre deux récits, parole contre parole. Le face-à-face opposera certes l'ex-patron du FMI à une femme de ménage noire. Un autre bras-de-fer l'attend pourtant avec un procureur démocrate, intransigeant, sensible à la cause des femmes, qui aura à cœur de convaincre tous les jurés. La défense de DSK, elle, va s'attacher à instiller le doute sur la plaignante, à jeter le discrédit sur sa déposition, et à transférer sur elle la pression médiatique de son célèbrissime client. La bataille de l'opinion est lancée, le décor posé, les acteurs en place. Les stratégies - relation sexuelle consentie contre « lutte des classes » - vont pouvoir se dévoiler. Aucun rebondissement n'est à exclure. Désormais tous les coups sont permis.

Une histoire américaine

Ce fut un moment triste. L’instantané amer d’un destin brisé. Pendant une vingtaine de secondes, les éléments de l’affaire judiciaire, maintes fois tournés et retournés, s’effacèrent brusquement. Il n’y eut plus que la marche pathétique de ce couple gravissant sous les huées les marches du palais de justice de South Manhattan quand il rêvait de monter sous les vivats celles du palais de l’Élysée.

Il n’y eut plus que ces deux personnages marqués par une épreuve rédhibitoire, cassés, défaits, et leurs mâchoires crispées qui tentaient maladroitement de sourire sans vraiment y parvenir. Comme si, par quelque sortilège maudit, ces antihéros avaient vieilli de dix ans en un mois.

Ce fut une séquence hollywoodienne où la vie est plus sombre que le cinéma. Ici, la lumière ne se rallumera pas : le réel n’offre pas de sursis. On quitte l’audience mais la séance, illimitée, continue avec cet inimaginable scénario d’un ex-directeur du FMI poursuivi pour viol.

Et une immense impression de gâchis qui assaillent les spectateurs. Pour l’agresseur présumé, qui a tout perdu. Et pour sa victime présumée, irrémédiablement abîmée par ce 14 mai tragique où une violence inattendue a ravagé sa confiance dans l’existence. La suite de la procédure n’y changera rien : il n’y aura pas de gagnant dans ce procès.

Ce fut le début d’une histoire américaine dont les protagonistes vont s’affronter dans un combat de prétoire où, rituellement, le pays règle ses comptes avec lui-même.

Peu importe que Dominique Strauss-Kahn soit français et favori pour la présidentielle. Ce qu’il incarne désormais c’est le pouvoir, l’argent, la puissance quand son accusatrice, guinéenne, représente, elle, la pauvreté du Bronx, l’effort, et la promesse de l’Amérique.

Ce fut le premier round d’un choc dont les coups échappent aux deux acteurs principaux. Un match de juristes où le droit, exigeant et pointilleux, se retrouve parfois en adversaire de la justice à force d’éviter l’injustice.

Aux États-Unis, l’image, pour le meilleur et pour le pire, est souvent une arbitre de la conscience des douze jurés, surtout dans un dossier où rôdera le doute juridique puisque l’absence de consentement de la plaignante, avancé par un camp, sera aussi difficile à prouver que son consentement, plaidé par l’autre.

Ce fut le premier point d’une partie imprévisible, marqué par l’inconnue femme de chambre guinéenne. Par impact visuel.

D’un côté, un duo de défenseurs masculins, sûr de lui, dont on sait qu’à coup de millions de dollars, il fera tout pour discréditer le témoignage de l’accusation.

De l’autre, un avocat, noir, qui ramène les faits à leur évocation la plus simple, et le tandem mixte du procureur appuyé par les « shame on you » lancés à DSK sous des centaines de caméras par des femmes de chambre solidaires de leur collègue. Une efficacité médiatique dévastatrice.

Le ring new-yorkais

Deux mots et pas de commentaires. « Non coupable. » « Not guilty. » Dominique Strauss-Kahn a rejeté hier - c'était prévu - les accusations de crimes sexuels portées contre lui par une femme de chambre dont, officiellement, le procureur n'a toujours pas révélé l'identité.;

Désormais, les dés judiciaires sont lancés. L'ancien patron du FMI a choisi la longue marche vers un procès afin de laver, dit-il, son honneur. À moins qu'en cours de route il ne se ravise et plaide la moins grave des culpabilités possibles. Aux États-Unis, on peut à tout moment négocier une peine raisonnable.

Hier, cette audience brève, mais surmédiatisée, fut un parfait non-événement. Aucune information nouvelle, sinon la date d'un prochain rendez-vous au tribunal. Mais dans une telle affaire, tout fait événement. Tout est matière à récit car, à l'image des séries télévisées et des meilleurs thrillers, le feuilleton doit être nourri et relancé en permanence.

On n'en a donc pas fini avec l'affaire DSK, ses faux scoops, ses véritables désinformations. Dans ce combat sans merci, s'affrontent non pas un présumé coupable et une présumée victime, vérités contre vérités, mais un procureur agissant au nom de l'État de New York et un avocat agissant, chèrement, au nom de son client. Cyrus Vance Jr contre Benjamin Brafman. Un éminent procureur démocrate contre une star du barreau new-yorkais.

L'enceinte de justice est en réalité un ring. Car elle est tout de même étrange, cette justice américaine. D'entrée, elle livre un accusé hagard, épuisé, menotté, au pilori médiatique. Elle « séquestre » la victime, cachée sous un drap blanc. Elle contraint les deux au silence. Et elle suscite alors un gigantesque café du commerce via les réseaux interconnectés, des forums où l'on déblatère sur des faits et gestes qui restent dissimulés. Secret défense pour l'un. Mise au secret pour l'autre.

Effets collatéraux en France. Les médias bruissent de rumeurs. Des corbeaux surgissent sur des plateaux télévisés. Tout et n'importe quoi se déverse dans la corne d'abondance d'émissions dopées à l'audience. Tout est glauque dans ce spectacle organisé pour et par les caméras. Dans ces conditions, la justice peut-elle s'exercer malgré tout et, finalement, sereinement ? C'est ce dont les juristes américains veulent nous persuader. Nous aurions tort de nous en tenir à nos premières impressions. Certes, disent-ils, cette justice est dans un premier temps sans merci, mais la balance se rétablit ensuite en faveur de la défense.

Et que fait-on de la vérité ? Cette machine judiciaire américaine, hypermédiatisée, broie en réalité et l'accusé et la victime. Égalité pour tous en effet. Mais seuls les riches, les puissants, peuvent espérer y survivre. La justice française, certes, broie elle aussi des vies et des réputations. Elle peut être aveugle et impitoyable. Elle couve parfois la rumeur - la terrible affaire Alègre à Toulouse. Elle jette en prison des innocents - l'affaire d'Outreau. Mais la comparaison s'arrête là. Elle semble malgré tout beaucoup plus respectueuse de la dignité des personnes et de la présomption de véracité des faits.

Dans les allées du pouvoir, on a longtemps été inspiré par le système accusatoire. Apparition du plaider-coupable. Place aux caméras dans les tribunaux. Mort annoncée du juge d'instruction. Aux procureurs, tous les pouvoirs ! Parions que l'affaire DSK va désormais modérer ces ardeurs pro-américaines.

Aides à la Grèce : l'Allemagne met les points sur les "i"

Un pas en avant, un pas en arrière. Alors que le Premier ministre luxembourgeois et président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, avait dit, au nom de la zone euro, s'attendre à "un financement supplémentaire accordé à la Grèce en échange de conditions strictes", l'Allemagne a apporté ce lundi un cinglant démenti.

C'est un recadrage en règle que l'Allemagne a infligé ce lundi à Jean-Claude Juncker, le président de l'Eurogroupe. Alors que ses déclarations, vendredi soir, sur un probable deuxième plan d'aide à la Grèce pour lui éviter la banqueroute avaient été interprétées comme un engagement des Européens à soutenir une nouvelle fois Athènes, le porte-parole du gouvernement allemand a freiné ce lundi des quatre fers.
"Ce qu'il y a pour le moment ce ne sont pas des engagements, ce sont des opinions", a-t-il déclaré lors du point presse hebdomadaire. "Des paiements allemands doivent être décidés par des autorités allemandes, et c'est comme cela dans tous les pays". Et voilà Jean-Claude Juncker cordialement invité, en langage diplomatique, à tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de s'exprimer.
Berlin, qui s'est déjà fait prier l'an dernier pour participer à un premier plan d'aide à la Grèce, refuse d'évoquer un nouveau geste tant que la mission d'experts de la Troïka, composée de représentants de l'Union européenne (UE), du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque centrale européenne (BCE), n'a pas rendu ses conclusions. Selon le porte-parole du gouvernement d'Angela Merkel, la remise de ce rapport maintes fois retardé devrait avoir lieu mercredi.
Un long chemin avant l'adoption du second plan d'aide
La confusion diplomatique européenne s'explique par le fait que même si le rapport n'a pas encore été remis, Jean-Claude Juncker et le Premier ministre grec Georges Papandréou ont communiqué dès vendredi, dans l'espoir de rassurer les marchés, sur l'accord qui aurait découlé des discussions entre la Troïka et le gouvernement grec. En contrepartie du déblocage de la cinquième tranche (12 milliards d'euros) du plan d'aide de 110 milliards d'euros accordé en 2010, et d'un accord pour un second plan d'aide dont le montant serait compris entre 60 et 85 milliards d'euros (et même jusqu'à 100 milliards d'euros selon l'hebdomadaire allemand Der Spiegel), la Grèce s'engagerait à adopter un énième plan de rigueur. L'objectif : économiser 6,4 milliards d'euros supplémentaires pour assainir les finances de l'Etat.
Mais comme on se plaît à le rappeler à Berlin, le chemin est encore long avant d'adopter un nouveau plan d'aide. Pour la Grèce, tout d'abord, qui doit, selon une condition imposée par l'Allemagne, adopter le nouveau plan d'austérité 2011-2014. Mais il faut pour cela que le Conseil des ministres vote le projet  - ce devrait être le cas ce mardi - puis que le Parlement l'adopte. Or, les obstacles sont nombreux.
La colère de la rue, notamment sous la bannière du mouvement spontané des Indignés, s'amplifie, si bien que les Athéniens n'hésitent plus à interpeller leurs dirigeants, accusés de s'aplatir devant les exigences de la Troïka dont la rigueur imposée aggraverait les chances du pays de sortir de la crise. De plus, des dissensions apparaissent au Pasok, le parti socialiste au pouvoir, qui ne détient qu'une courte majorité au Parlement. Jeudi dernier, seize députés du Pasok ont envoyé une lettre au Premier ministre Papandréou, en lui demandant d'accorder plus de temps pour débattre sur les mesures du plan d'austérité. Ils lui ont également reproché de ne pas avoir demandé une évaluation sur l'incapacité du pays à se remettre dans le droit chemin en 2010.
La menace des parlements nationaux
L'adoption d'un second plan d'aide international doit également être validé, pour certains pays de la zone euro comme l'Allemagne, la Suède ou la Finlande, par le Parlement national. Or, la montée des populismes et les réticences de ces pays à débloquer de l'argent pour venir en aide aux pays en situation économique difficile pourraient encore compliquer la situation.
Si l'Allemagne, en exigeant la participation de créanciers privés dans le futur plan d'aide, a montré sa volonté de participer au sauvetage du pays, il n'est pas question de brûler les étapes.

Petite leçon de démocratie fatiguée

A Tunis, une journaliste du Volkskrant a assisté à une scène étonnante: des jeunes "indignés" espagnols manifestaient devant leur ambassade. De leur dialogue avec les Tunisiens émerge une réflexion sur nos systèmes politiques. 

"La démocratie, c’est plus que le simple droit de vote", explique une manifestante espagnole à un passant tunisien. Elle lui donne un tract. "L'Espagne n’est une démocratie que de nom, car la loi électorale favorise les grands partis. Une démocratie formelle n’est pas une vraie démocratie, cela ne suffit pas." Le jeune Tunisien acquiesce d’un hochement de tête hésitant, et commence à lire le tract.
C’est un rassemblement étonnant que cette manifestation devant l’ambassade d’Espagne de Tunis. Le dernier dimanche de mai, une cinquantaine d’Espagnols (soit presque 10 % du nombre total d’Espagnols en Tunisie) a montré sa solidarité avec les "indignados", qui occupent depuis des semaines les places espagnoles. Etonnant, car dans un pays où des milliers de citoyens ont mis récemment leur vie en péril pour la démocratie, ils laissent entendre que cette démocratie n’est pas aussi formidable que cela.
Le passant tunisien, un employé de 23 ans du club de tennis voisin, contemple les manifestants d’un regard rêveur. Ils ont des djembés, ils font de la musique et ils dansent. "C’est plus une fête qu’une manifestation", commente-t-il d’un ton un peu jaloux. "Si nous avions manifesté de cette manière, Ben Ali serait toujours au pouvoir."
Il dit comprendre les réclamations des Espagnols au sujet de la loi électorale. Mais pour conclure au bout du compte : "Si nous pouvions obtenir une démocratie à l’espagnole, je serais déjà très satisfait."

Tout, plutôt qu'une dictature

Il veut bien les accepter, ces défauts et ces excès de la démocratie. La loi électorale déloyale et la domination des grands partis. Les petits jeux politiques et les combines. Les surenchères et la rhétorique populiste. Le troc électoral lors des élections sénatoriales au suffrage indirect, pour ne citer qu’un exemple. Le manque de politiciens ayant des perspectives au-delà des prochaines élections.
Il n'est pas encore bien conscient de cela, mais il veut bien le prendre en plus. Tout plutôt qu’une dictature. Comme le disait déjà Churchill : de toutes les formes de gouvernement, la démocratie est la moins mauvaise.
Enfin bon, il disait cela il y a 54 ans. Ce qui m’amène à cette réflexion: pourquoi sommes-nous restés coincés au niveau de cette forme de gouvernement la moins mauvaise? Pourquoi nous n’y apporterions pas des changements ou au moins des améliorations? Car les occupants de places espagnoles ne sont pas les seuls à indiquer que la démocratie a besoin d’une remise en état: dans le reste de l’Europe également la progression du populisme, les votes de protestation et le fossé croissant entre le citoyen et la politique pointent du doigt les défauts de la construction démocratique.
Il est compréhensible que les Tunisiens s’accommodent de ces défauts démocratiques après 50 ans de dictature. Mais après les révolutions arabes, les citoyens européens peuvent bien se réveiller à leur tour: pourquoi n’essayons-nous pas de remédier à ces défauts? Pourquoi ne prenons-nous pas plus soin d’un régime politique qui est manifestement tellement précieux que des citoyens arabes sont prêts à y sacrifier leur vie?
La jeunesse espagnole semble être la première à s’être réveillée. Ses actions font l’objet de nombreuses critiques, en partie justifiées. Les jeunes n'ont pas d'objectif précis, ils ne proposent pas d’alternatives concrètes et sont parfois un peu trop ludiques. Mais ils symbolisent une question pertinente: n’est-il pas temps, maintenant que l’on a échangé la dictature contre la démocratie en Tunisie et en Égypte, d’échanger notre propre démocratie contre une version améliorée?



Contexte

La colère de la “génération sacrifiée”

Si les manifestants de la Puerta del Sol à Madrid et les jeunes Grecs qui manifestent chaque soir à Athènes ne sont pas des millions , "ce mouvement lancé mi-mai en Espagne, dont quelques jeunes Portugais avaient posé la première pierre en mars, est d'abord un cri générationnel que nos élites politiques et économiques auraient tort d'ignorer", écrit le site d'actualités français Mediapart.
Pour le journal en ligne, le mouvement  se nourrit du désastre social des moins de 30 ans en Europe, de cette "génération sacrifiée" dont le taux de chômage a augmenté deux fois plus vite que celui des adultes dans les 34 pays de l'OCDE et plus particulièrement dans les pays du Sud de l'Europe.
Cette contestation transnationale (d'ores et déjà bien plus mobilisatrice que bien des euro-manifestations organisées par la Confédération européenne des syndicats) n'est pas seulement une réponse à la crise. La mobilisation des Indignés, aussi brouillonne soit-elle, est d'abord l'expression d'une colère générationnelle.
Colère contre le capitalisme, quand il conduit des Etats à privilégier le sauvetage des banques et non l'avenir de ses concitoyens (les plus jeunes en particulier) et désarme les politiques, transformés en pantins sans marge de manœuvre et condamnés à mener une seule et même politique.
Colère contre des systèmes sociaux qui, dans les pays du sud de l'Europe (y compris en France), protègent beaucoup les insiders, les travailleurs ou fonctionnaires en contrat à durée indéterminée, bénéficiaires des régimes d'assurance sociale. Et rejettent à leur marge les outsiders, les pas qualifiés, les précaires, les plus jeunes, livrés à eux-mêmes ou à l'aumône de leurs parents, pour lequels il ne reste «que des miettes» de l'Etat-providence, selon le sociologue
Louis Chauvel.
Colère contre des systèmes politiques craintifs et tournés sur eux-mêmes, hermétiques à la société civile et à son foisonnement. Fureur de voir que le personnel politique est si déconnecté de la société qu'il est censé représenter parce que trop vieux, trop unanimement blanc, trop issu des milieux favorisés, trop masculin.
Colère, enfin, contre des syndicats jugés trop conciliants avec le pouvoir, et obnibulés par la défense des intérêts de leur clientèle – elle aussi plutôt âgée, plutôt blanche, plutôt du secteur public.

Grèce:le premier ministre n'exclut pas un référendum sur les mesures d'austérité

Le premier ministre de la Grèce, George Papandréou, a fait savoir lundi qu'il songeait à organiser un référendum sur de nouvelles mesures d'austérité, essentielles pour assurer au pays le versement du plan d'aide international mais vivement contestée par des milliers de manifestants.
M. Papandréou a affirmé à ses ministres, au cours d'une réunion qui durait depuis plus de sept heures, qu'il était prêt à tenir une telle consultation publique afin d'obtenir «un possible consensus ou un avis» sur les changements majeurs proposés.
Le leader des socialistes a tenté de calmer l'opposition au plan d'austérité au sein même de son parti, de même qu'auprès de la population — frustrée par une année de mesures des plus sévères qui ne fournissent toutefois pas les résultats escomptés.
Des milliers de protestataires ont manifesté pacifiquement devant le Parlement à Athènes tous les soirs, depuis près de deux semaines. La colère des Grecs a augmenté alors que le gouvernement s'engageait dans de nouvelles coupes des dépenses et hausses d'impôts.
M. Papandréou a demandé au ministère de l'Intérieur de mettre en place les conditions législatives nécessaires pour permettre la tenue d'un référendum, «s'il est nécessaire».
Les nouveaux plans du gouvernement grec prévoient des mesures correctives de l'ordre de 9,34 milliards $ cette année et d'un accord de 32,11 milliards $ d'ici 2015. Ces mesures sont conditionnelles au versement de l'aide de 160,56 milliards $, prévues dans le plan d'aide de l'an dernier du Fonds monétaire international (FMI) et d'autres pays européens. L'administration Papandréou met également de l'avant une ambitieuse privatisation de 72,98 milliards $.
La Grèce semblerait toutefois avoir besoin d'autres fonds pour combler un fossé financier l'an prochain et afin d'éviter des défauts de paiement.
La semaine dernière, des responsables de l'Union Européenne et du FMI ont indiqué que la Grèce devrait recevoir une nouvelle tranche d'aide de 17,52 milliards $ au début du mois de juillet, si les mesures d'austérité en place sont jugées satisfaisantes. Une décision finale en ce sens sera prise plus tard en juin.
M. Papandréou doit toutefois composer avec l'opposition de certains de ses députés. La semaine dernière, 16 socialistes ont signé une lettre demandant un débat en bonne et due forme sur les mesures avant qu'elles ne soient adoptées.

LEAD 1-La Grèce peut éviter la restructuration-Trichet

* La crise de la dette n'est pas une crise de l'euro-Trichet
* Pas de nécessité de restructurer la dette de la Grèce

MONTREAL, 6 juin (Reuters) - Il faudra des mesures de surveillance budgétaire plus strictes que celles qui sont actuellement discutées pour éviter de nouvelles crises budgétaires à l'avenir, a déclaré lundi Jean-Claude Trichet, président de la Banque centrale européenne (BCE).
S'exprimant lors d'une conférence à Montréal, il a ajouté que la crise de la dette que vit actuellement la zone euro n'est pas une crise de la monnaie unique, estimant que les difficultés trouvent leur source dans une surveillance déficiente des politiques économiques menées par les membres de la zone euro.
Jean-Claude Trichet a ainsi estimé que la Grèce ne s'était pas bien comportée par le passé en matière de politique budgétaire tout en ajoutant qu'il y avait eu de très sensibles améliorations ces derniers temps.
Aux yeux du président de la BCE, il n'y a pas de nécessité de restructuration de la dette grecque, même si, poursuit-il, le pays ne pourra pas faire l'économie d'un ajustement budgétaire.
Jean-Claude Trichet a estimé que le recours à une restructuration de la dette grecque - solution que bon nombre d'analystes financiers jugent inéluctable - n'est pas approprié tant que le pays s'en tient à son programme de réformes annoncé, exhortant notamment Athènes à mener un processus de privatisations crédible et rigoureux.
La Grèce recevra vraisemblablement une aide financière, venant s'ajouter au plan de 110 milliards d'euros défini en mai 2010, afin d'éviter que le pays ne fasse défaut sur sa dette. (voir [ID:nLDE7521IQ])
"Les difficultés auxquelles l'Europe doit faire face aujourd'hui n'est pas une crise de l'euro. Elles ne sont pas symptomatiques d'une crise dans l'union monétaire", a dit Jean-Claude Trichet.
Il a noté que le travail entrepris pour muscler le pacte de stabilité et de croissance de la zone euro, avec un accent particulier mis sur les déficits et la dette, était un "pas dans la bonne direction", tout en estimant qu'il n'allait pas assez loin.
"Le conseil des gouverneurs de la BCE s'inquiète du fait que les réformes de gouvernance économique actuellement en négociations ne sont pas suffisamment ambitieuses pour corriger la faiblesse structurelle de la gouvernance budgétaire et, plus largement, la gouvernance macro-économique de la zone euro", a poursuivi Jean-Claude Trichet.
Le président de la Banque centrale européenne (BCE) a également dit avoir constaté ces derniers des risques haussiers pour la stabilité des prix à moyen terme.
La BCE annoncera jeudi sa décision mensuelle de politique monétaire. Les économistes s'attendent à un statu quo en matière de taux.
(Louise Egan et Claire Sibonney, Benoit Van Overstraeten pour le service français)

A quoi ressemblera la future Libye "démocratisée" après la chute de Kadhafi ?

Même les plus chauds partisans de l’audacieuse intervention occidentale doivent se poser la question et étudier tous les scénarios possibles. Eric Denécé, directeur du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R), dépeint de façon assez crue mais réaliste la composition de l’actuel Conseil national de transition (CNT) libyen : « 20 à 25 % de démocrates, un quart d’islamistes, un quart de partisans de la monarchie Senoussis, eux aussi proches de l’islam radical, et un quatrième quart d’anciens partisans de Kadhafi. » Commençons par le scénario le plus agréable : les jeunes rebelles « facebookiens » libéraux (liés au Front national du salut de la Libye, FNSL, basé aux Etats-Unis) et leurs alliés possibles – ex-Kadhafistes laïques, alliance Amazigh (Berbères, jadis opprimés sous Kadhafi), Union des femmes libyennes (UFL, fondée en 1983), Alliance des tribus du sud et de Syrte – remportent les futures élections de l’après-Kadhafi. Mais pour le moment, ces forces, qui pourraient certes voir leurs rangs grossir si Kadhafi était rapidement délogé par la coalition occidentale, ne représentent pas plus de 30 %. La plus puissante opposition est pour le moment représentée par les tribus et surtout par la puissante confrérie religieuse des Senoussi. Représenté notamment par l’Union constitutionnelle libyenne (UCL), ce bloc « islamo-conservateur », qui revendique depuis longtemps la réislamisation du pays et a toujours combattu les idées socialistes et laïques de Kadhafi exprimées dans son « Petit Livre vert », pourrait s’allier électoralement aux islamistes proches des Frères musulmans égyptiens et du Groupement islamique (al Jamaa al-islamiyya). Bien que se disant « pro-occidentale » et « modérée », cette force représente déjà 50 % des électeurs possibles. Mais en cas d’alliance avec les islamistes salafistes plus radicaux et plus anti-occidentaux (15 %), elle pourrait atteindre jusqu’à 65 % des voix en cas d’élections rapides… Pour résumer, l’hypothèse d’un gouvernement islamique et tribal opposé à toute laïcité paraît très probable. La vraie victoire finale sera donc remportée par ceux qui occuperont le plus vite le terrain. Or l’opposition laïque pro-occidentale est déjà combattue à l’intérieur du CNT par les forces tribales confrériques et islamistes. Pour obtenir un « retour démocratique sur investissement militaire », l’Occident devra conditionner les importantes aides octroyées au CNT au respect de certaines valeurs et à l’organisation d’élections non précipitées qui laisseront le temps aux libéraux de rattraper leur retard par rapport aux islamistes, lesquels quadrillent le terrain avec leurs alliés tribaux. L’exemple tunisien doit servir de leçon : en organisant trop vite des élections dans un pays où l’opposition démocratique libérale fut longtemps inexistante, la mise risque d’être emportée par les islamistes, de loin les plus structurés et entraînés.

"Les révolutions arabes ne sont que des coups d'Etat militaires masqués"

De retour d'une mission d'étude en Tunisie, en Egypte et en Libye, Eric Denécé, directeur du Centre français de recherche sur le renseignement (Cf2R), ancien du renseignement livre une lecture nuancée des événements du début d'année. Sans nier les aspirations des populations, il relativise l'ampleur du changement des équipes dirigeantes. Un prélude à de grandes déceptions.
 Quelle lecture faites-vous du « printemps arabe » ?
Il y a dans ces pays une réelle aspiration à plus de liberté, mais pas nécessairement à plus de démocratie. Par ailleurs, je ne crois pas à la spontanéité de ces « révolutions », qui étaient en préparation depuis plusieurs années. Dès 2007-2008, des conférences organisées sous l'égide d'ONG américaines, comme Freedom House, l'International Republican Institute ou Canvas, et où étaient présents la plupart des blogueurs et des leaders de ces mouvements, ont instillé le germe de la démocratie, créant un contexte favorable aux révolutions. Le processus était le même que celui qui a précédé le démantèlement de l'URSS, la Révolution serbe, la Révolution orange en Ukraine ou encore celle des Roses en Géorgie.
Mais pourquoi ont-elles éclaté en 2011 ?
Des contestations populaires ou étudiantes dans les pays arabes se produisent régulièrement, mais elles sont à chaque fois réprimées par l'armée et la police. Pour la première fois, l'armée s'est désolidarisée de la police, en refusant de réprimer les soulèvements en Tunisie comme en Égypte, et les mouvements ont été observés par la presse internationale. Mais surtout, dans la semaine précédant les événements, les plus hauts représentants des armées de Tunisie comme d'Égypte se sont rendus à Washington, qui assure l'essentiel du financement de l'armée, pour obtenir le feu vert des États-Unis à un renversement des dirigeants. Ils ne supportaient plus la prédation des clans au pouvoir.
Ces révoltes seraient donc des coups d'État militaires prenant le visage de mouvements démocratiques spontanés ? Les manifestants de la place Tahrir n'avaient pourtant pas l'air manipulés ?
En êtes-vous si sûre ? Il est tout de même étonnant que dans ce pays où existent un militantisme islamiste et un net sentiment anti-israélien, aucun slogan anti-israélien ne soit apparu pendant les manifestations. C'est bien l'indice d'une « révolution » sérieusement encadrée. Quant à la « nouvelle équipe » au Caire, elle comprend le chef d'état-major de l'armée ainsi que l'ancien chef du service des renseignements, et s'est immédiatement engagée à respecter les accords internationaux signés, notamment les accords de Camp David auxquels est hostile une large partie de la population.
Et en Tunisie ?
Le ras-le-bol face face à l'avidité du clan Trabelsi était profond et touchait l'ensemble de la population confrontée à des difficultés économiques croissantes jusqu'aux entrepreneurs, dont beaucoup devaient « céder » des parts entières de leur business pour ne pas être inquiétés. C'est pour cela que des manifestations se sont produites dans toutes les villes du pays. La révolte y a été plus populaire et plus profonde qu'en Égypte, où les événements se sont, pour l'essentiel, limités à la place Tahrir. Mais comme au Caire, le nouveau gouvernement de Tunis comprend en majorité des collaborateurs de l'ex-président Ben Ali. Dans les deux cas, tout s'est passé comme si les jeunes générations avaient décidé de « faire sauter le bouchon » qui empêchait leur accès au pouvoir, sans changer fondamentalement le système ou le régime. L'imminence d'un coup d'État militaire était évoquée depuis dix-huit mois en Tunisie. Aussi n'est-il pas approprié de parler de « révolution ». L'Iran, en 1979, et l'URSS, en 1991, ont connu de vraies révolutions. Tout y a changé : les hommes, les institutions, les rapports internes, les relations internationales, etc.
Rien de tel dans les événements récents. Il s'agit d'un renouvellement des classes dirigeantes qui ont, avec l'accord de Washington, organisé des coups d'État « en douceur », en profitant d'une vague de contestation populaire qu'elles ont intelligemment exploitée. Ainsi, leur arrivée aux affaires bénéficie extérieurement d'une grande légitimité et donne le sentiment d'une rupture profonde avec le régime précédent. La situation est en réalité bien différente. D'ailleurs, pour Washington, c'est un « changement dans la continuité » modifiant peu l'équilibre régional, ce qui est étonnant pour des révolutions. Washington encourage et appuie les armées d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient pour qu'elles évoluent vers un rôle « à la turque » : c'est-à-dire qu'elles n'occupent pas le pouvoir - sauf cas de force majeure - mais soient les garantes de la stabilité du pays contre l'islamisme, qu'elles contribuent à la stabilité régionale et qu'elles ne manifestent pas d'hostilité réelle à l'égard d'Israël.
Comment lisez-vous la situation actuelle ?
Beaucoup de problèmes risquent de surgir : dans les deux pays, un fossé inédit est apparu entre l'armée, qui sort grandie des événements, et la police, qui a longtemps assumé la répression des manifestants. Les forces de l'ordre - surtout en Tunisie - en sont sorties profondément désorganisées. On pourrait voir une recrudescence de la criminalité nuisant à l'équilibre intérieur. Enfin, très vite, une partie de la population va réaliser qu'elle a été flouée. D'où de possibles chocs en retour et une reprise des émeutes. Nous en voyons peut-être déjà quelques signes avant-coureurs à travers les manifestations populaires qui semblent reprendre ici et là. Enfin, les islamistes se sont pour l'instant montrés plutôt discrets. Mais jusqu'à quand ?