samedi 17 novembre 2012
L’escalade jusqu’où ?
L'utopie du risque zéro
En 2009, un tremblement de terre avait ravagé les Abruzzes, entraînant la mort de 309 personnes. Il est reproché aux experts de n'avoir pas prévu la catastrophe, d'avoir fourni des informations inexactes, incomplètes et contradictoires sur ces secousses qui se succédaient depuis plusieurs mois et inquiétaient les habitants. Ces scientifiques se montraient même rassurants. Cependant, le drame survient, privant des milliers de personnes de leurs habitations.
On comprend la souffrance des habitants et leur ressentiment. Mais se pose une question : est-il possible de prévoir un tremblement de terre à quelques jours près ? Non, répondent les scientifiques qui estiment, de plus, qu'en Italie ce risque est permanent. Leur condamnation a fait réagir la communauté scientifique et tous les membres de la commission grands risques ont démissionné.
Le président de la commission a estimé qu'un tel verdict, « c'est la mort de la collaboration entre l'État et les scientifiques ». Ceux-ci ne sont plus en mesure de travailler sereinement. Ceux qui seront chargés d'analyser les prévisions de risques seront enclins à multiplier les alarmes à la moindre occasion, semant ainsi la panique dans la population. Or on ne peut ni prévoir ni exclure le risque de séisme...
Non au bouc émissaire
Mais voici qu'en France, ces jours derniers, un problème de même nature est abordé. Il s'agit d'une psychiatre qui se retrouve sur le banc des prévenus. Elle est poursuivie pour homicide involontaire, après un meutre commis par un des ses patients. Le procureur a requis contre elle un an de prison avec sursis. Cinq syndicats de psychiatres la soutiennent car sa responsabilité, à leurs yeux, « apparaît pratiquement nulle » (1). « Les psychiatres ne sont pas des policiers », estiment-ils.
La psychiatrie n'est pas une science exacte. Une condamnation serait une pression qui finirait par transformer les psychiatres en « gardiens de l'ordre public ». On veut désormais que le médecin évalue la dangerosité. Dans ces conditions, « le médecin n'aura donc plus à faire un diagnostic, mais un pronostic », ce qui pousse l'Académie de médecine et le Conseil national des compagnies d'experts en justice à dénoncer « l'utopie du risque zéro ».
C'est bien ce désir de sécurité qui sous-tend ces verdicts et ces réquisitoires. Dans notre monde aseptisé, policé, régulé, organisé, on voudrait se soustraire à tout danger. S'il survient, on recherche aussitôt la cause, ce qui est normal. Mais on va plus loin, en s'efforçant de découvrir l'auteur de l'accident. Il nous faut un coupable. Ce fameux bouc émissaire que l'on peut frapper pour se soulager de sa peur et de sa colère.
Ces drames sont, en effet, des drames affreux. Mais le pire est souvent de se donner bonne conscience et de se rassurer en accusant et en condamnant même ceux qui s'efforcent de veiller pour épargner, autant qu'ils le peuvent, les dangers qui nous menaceront toujours.
"The Economist" contre-attaque
De "l'outrance pour faire vendre du papier", pour Jean-Marc Ayrault, des "caricatures dignes de Charlie Hebdo", pour Arnaud Montebourg, un "temps de retard", pour Laurence Parisot : en France, la une de The Economist, qui fait de la France "une bombe à retardement, au coeur de l'Europe" fait l'unanimité contre elle. Son éditeur Europe,
John Peet, se défend par presse interposée. Jeudi soir, il était sur
les chaînes d'info en continu. Vendredi, il a répondu notamment aux questions du journal gratuit 20 Minutes et aux Echos.fr dans une vidéo.
Encourager la FranceDéjà en mars, l'hebdomadaire de tendance libérale avait alerté ses lecteurs sur une campagne présidentielle "frivole", qui n'abordait pas les vrais sujets. Les dernières décisions de François Hollande, notamment l'annonce d'un crédit d'impôt de 20 milliards d'euros pour les entreprises en fonction de la masse salariale, montrent que la situation est en train de rattraper François Hollande. Encore candidat, le socialiste n'avait pas fait du coût du travail un enjeu de sa campagne, loin de là. Pas une seule fois le mot compétitivité n'était cité dans ses 60 engagements.
Le journal ne titre-t-il pas à contretemps, alors que François Hollande s'attaque au redressement de la compétitivité de l'économie française ou à la réduction de la dépense publique ? "Je suis très heureux qu'on parle du rapport Gallois et du pacte de compétitivité de Monsieur Hollande. [...] Mais parler des réformes, c'est beaucoup facile que d'en faire."
Interrogé sur le fait de savoir si The Economist ne tirait pas sur l'ambulance, John Peet se défend de toute mauvaise intention : "Cette une et cet article ont pour objectif d'encourager la France." Et de rappeler que son journal avait été "bien plus agressif avec l'Italie il y a quelque temps" ou qu'il avait appelé l'Allemagne, "the sick man of Europe" (l'homme malade de l'Europe). C'était il y a dix ans. De bon augure pour la France.
Déjà en mars, l'hebdomadaire de tendance libérale avait alerté ses lecteurs sur une campagne présidentielle "frivole", qui n'abordait pas les vrais sujets. Les dernières décisions de François Hollande, notamment l'annonce d'un crédit d'impôt de 20 milliards d'euros pour les entreprises en fonction de la masse salariale, montrent que la situation est en train de rattraper François Hollande. Encore candidat, le socialiste n'avait pas fait du coût du travail un enjeu de sa campagne, loin de là. Pas une seule fois le mot compétitivité n'était cité dans ses 60 engagements.
Le journal ne titre-t-il pas à contretemps, alors que François Hollande s'attaque au redressement de la compétitivité de l'économie française ou à la réduction de la dépense publique ? "Je suis très heureux qu'on parle du rapport Gallois et du pacte de compétitivité de Monsieur Hollande. [...] Mais parler des réformes, c'est beaucoup facile que d'en faire."
Interrogé sur le fait de savoir si The Economist ne tirait pas sur l'ambulance, John Peet se défend de toute mauvaise intention : "Cette une et cet article ont pour objectif d'encourager la France." Et de rappeler que son journal avait été "bien plus agressif avec l'Italie il y a quelque temps" ou qu'il avait appelé l'Allemagne, "the sick man of Europe" (l'homme malade de l'Europe). C'était il y a dix ans. De bon augure pour la France.
Polémique "The Economist" : la France est-elle vraiment une "bombe à retardement" ?
Après Bild, The Economist. Que le quotidien allemand se demande si la France va devenir la nouvelle Grèce, passe encore.
Après tout, n'était-ce pas une provocation de tabloïd ? Mais que
l'hebdomadaire britannique, particulièrement lu à Wall Street et à la
City, fasse de l'Hexagone une bombe à retardement au coeur de l'Europe,
là, ça commence à faire beaucoup. D'autant qu'il n'en est pas à son
premier avertissement. Déjà en mars, l'hebdomadaire avait critiqué la
campagne présdientielle des deux candidats avec une "une" inspirée du Déjeuner sur l'herbe de Manet, intitulée La France dans le déni.
Alarmisme
Un tel alarmisme peut paraître surprenant au moment même où la presse célèbre, quasi unanime, "le tournant" - toujours non assumé - de la politique économique de François Hollande. The Economist ne cherche pas à le cacher. "La gauche devrait être plus à même que la droite de persuader les syndicats d'accepter le changement", écrit l'hebdomadaire dans son éditorial. Et d'énumérer les signes encourageants du pouvoir : la promessee d'appliquer peu ou prou les préconisations du rapport Gallois, celle de "faire mieux en dépensant moins" et la volonté de flexibiliser le marché du travail.Mais tout cela reste insuffisant. "Pourquoi le monde de l'entreprise croirait-il en ce gouvernement alors qu'il a déjà fait passer un ensemble de mesures de gauche, dont une taxation maximum de 75 % de l'impôt sur le revenu, l'augmentation des impôts sur les entreprises, le patrimoine, les revenus du capital et les dividendes, une hausse du salaire minimum et le retour partiel sur l'augmentation de l'âge de la retraite ? Pas étonnant que tant de futur chefs d'entreprise parlent de quitter le pays."
Au rayon des faiblesses de la France figure notamment, aux yeux de The Economist, le taux de dépenses publiques rapporté à la richesse nationale. Celles-ci atteignent maintenant 57 % du PIB. La dette publique, elle, a franchi pour la première fois le seuil des 90 %, considéré comme celui à partir duquel les investisseurs réfléchissent à deux fois avant de prêter. Un chiffre cité il y a quelques années encore comme critique par les responsables chargés de placer la dette française sur les marchés...
Réticence à l'intégration européenne
Mais les ratios ne disent pas tout. La compétitivité française est elle aussi menacée, surtout par rapport à l'Allemagne. Le déficit courant n'a cessé de se creuser depuis le léger excédent de 1999 pour atteindre le déficit le plus élevé de toute la zone euro. Les marchés des biens et des services sont trop régulés (taxis, pharmacies, notaires, énergie...), ce qui augmente les coûts. Les riches et les entrepreneurs sont mal vus, regrette The Economist. Qui poursuit sa démonstration : pas une seule entreprise nouvellement apparue n'a intégré le CAC 40 depuis la création de l'indice en 1987. Quant aux licenciements, ils peuvent donner lieu à des procédures judiciaires sans fin, ce qui n'a pas empêché le chômage d'exploser et de dépasser 10 % de la population active. Et malgré tout, les syndicats en appellent à la rue au premier signe de réforme.Alors, bien sûr, The Economist reconnait de nombreux points forts à l'économie française. Ses grandes entreprises, sa capacité à attirer les investisseurs étrangers, ses infrastructures de transport... C'est aussi la première destination touristique au monde.
Mais cela ne suffit plus. Nombreux sont les gouvernements européens qui se sont lancés dans de grandes réformes, aiguillonnés qu'ils étaient par l'ampleur de la crise et par un électorat qui ne voyait pas d'alternative. Aucune de ces conditions n'existe en France. François Hollande et sa campagne électorale y sont pour quelque chose.
Pire, François Hollande "se cache derrière sa serviette" dès qu'il s'agit de discuter d'intégration européenne. N'a-t-il pas fait ratifier à reculons le traité budgétaire européen après avoir promis de le renégocier ? Les Français ne sont pas prêts à abandonner une part de leur souveraineté au profit de l'Europe, estime The Economist. Le chef de l'État doit faire avec un parti profondément divisé entre les partisans du oui au traité constitutionnel européen de 2005 et les partisans du non. Si l'histoire devait bégayer, cela pousserait la monnaie vers "le chaos".
The Economist ne prend pas de gants : "Jusqu'à présent, les investisseurs ont été indulgents avec la France." Mais "tôt ou tard", cela devrait changer car "on ne défie pas longtemps l'économie (...) la crise pourrait frapper dès l'année prochaine". Conclusion : "Il ne reste plus beaucoup de temps à François Hollande pour désamorcer la bombe au coeur de l'Europe."
L’hôpital et la charité
La Grèce, l’Espagne, le Portugal et l’Italie sont à bout de souffle.
Alors, faut-il une nouvelle cible à la spéculation internationale en
quête de profits sur le dos des affaiblis? La France, désignée par la
City de Londres via l’influent hebdomadaire «The Economist» dépeignant,
en spécialiste du «french bashing», notre pays en «homme malade» de
l’Europe, en «bombe à retardement» de la zone euro?
L’affirmation,
très «perfide Albion», est doublement paradoxale. D’abord, parce que la
France, profitant de la vulnérabilité financière des autres, emprunte à
des taux historiquement bas sur les marchés et ferait ainsi des
dizaines de milliards d’économies par rapport aux prévisions. Ensuite,
en regardant le Royaume-Uni en voie de totale paupérisation: c’est
l’hôpital qui se moque de la charité...
Mais peu importe. La
France, apparemment devenue sociale-démocrate face à une Europe
conservatrice et libérale, doit des explications à ses partenaires sur
le bien-fondé de sa politique économique. Pour faire taire des craintes
remuées ici et là, autant par différends idéologiques que par visées
électoralistes nationales.
Or, à en croire les médias allemands,
le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a plutôt bien réussi son voyage à
Berlin. Germanophone, le «petit prof d’allemand» (disent ses
détracteurs hauts-fonctionnaires énarques, d’ailleurs totalement
incompris outre-Rhin) aurait su clairement détailler la politique
française. En insistant sur ce qui rassemble tout en ne la présentant
pas en copie du «modèle allemand»... que la chancelière Merkel semble
vouloir imposer à tout le continent.
Ayrault a-t-il pour autant
convaincu? Au niveau des relations entre Etats, cette question ne se
pose pas. Seule compte la volonté politique ainsi exprimée avec son
impact. Car nos voisins n’ignorent pas que les économies des deux pays
les plus importants de l’UE sont liées. La chute de l’un entraînerait à
plus ou moins longue échéance celle de l’autre, sans même parler
d’autres cruelles évidences comme la fin de l’euro voire celle de
l’Union européenne...
Il était vraiment temps que la France
s’exprime. Elle a recommencé hier par la voix du président Hollande à
Varsovie, dans cette Pologne aux bons chiffres économiques et futur
grand partenaire. Car, malgré les difficultés actuelles, elle veut
rejoindre la zone euro en 2015.
Dans une «Europe à réorienter»,
selon le président de la République, tout peut changer. D’élections en
élections, de crise en crise aussi...
Avis aux détracteurs du libéralisme
Alors que la réalité s'éloigne de plus en plus des idées libérales,
elles ont une influence et une audience croissantes. Pour leurs
détracteurs, les défenseurs de la liberté n'ont pas tort ou raison ; ils
n'ont tout simplement jamais réfléchi réellement aux fondements de
leurs idéaux, forcément simplistes et extrémistes. Ils sont des adolescents, évidemment haineux et utilisant le libéralisme comme prétexte pour mettre en pièces l’État et tous ceux qui comptent sur lui par la même occasion. Chers détracteurs, pour éviter le ridicule, apprenez à nous connaître…
Le vocabulaire libéral permet de mieux se rendre compte du mal qui
les ronge : ils appellent ceux qui vivent aux dépens des autres des parasites, ceux que l’État assiste des assistés, ceux qui veulent mettre en commun les richesses des collectivistes.
Pire : ils valorisent les créateurs de richesse, ceux qui produisent,
innovent, ceux qui ont du talent, et pensent que les empêcher de jouir
des fruits de leur travail au profit de ceux qui ne créent pas, c'est sanctionner les vertueux.
Ils ne veulent pas corriger les injustices de la nature, celles qui
font que certains sont meilleurs que d'autres ; au lieu de cela, ils
pensent qu'on devrait laisser les meilleurs créer et qu'ils sont le
moteur de l'économie et la source du progrès.
Heureusement, Nicole Morgan, professeur de philosophie, est là pour nous rappeler dans un article du Nouvel Observateur que "Ayn
Rand est arrivée à point nommé pour donner une permission prétendument
morale à tous les entrepreneurs de la mondialisation. Ils la vénèrent.
Elle leur apporte une caution "intellectuelle" : les entrepreneurs sont
seuls créateurs de croissance illimitée, agents du bien commun auquel
tendrait l'humanité. Bush, tout imbu des idées ambiantes de Rand,
n'avait cependant pas osé pousser si loin l'appel à la chasse aux
"parasites". Il prônait "le conservatisme compassionnel", qui lui
permettait de se débarrasser du problème en redonnant aux Églises le
pouvoir de gérer la charité. La crise économique a fait monter d'un cran
les ressentiments contre les pauvres, tueurs de croissance, et on est
arrivé à ce manque total d'empathie qu'est la haine. Une haine froide,
qui n'appelle pas à l'extermination violente mais s'organise autour de
cette pseudo-science qu'est l'économie ultralibérale, laquelle, après
avoir été ointe par l’École de Chicago, veut remplacer le champ
politique. C'est le triomphe de l'extrémisme et du simplisme
idéologiques."
Ayn Rand apporte une caution "intellectuelle" et "prétendument
morale" aux méchants libéraux, elle ne peut évidemment pas être une
philosophe. Un philosophe sait bien, lui, que le manque total d'empathie
n'est pas la haine ; mais, par un glissement sémantique fort adroit, il
peut transformer ceux qui pensent qu'il ne faut pas sacrifier les uns
aux dépens des autres en extrémistes, simplistes idéologiques, qui s'organisent autour d'une pseudo-science ultralibérale - autre glissement sémantique, on parle plutôt ici de turbo-proto-méga-giga-
Un philosophe peut également sortir les propos des hommes politiques de leur contexte : "À
côté d'autres, [Romney] fait, certes, figure de modéré. Il a été poussé
vers des positions extrêmes par les "néocons". Mais il reste un
absolutiste de l'idéologie du marché. Dois-je rappeler son cri du cœur
si randien : il n'est pas question de s'occuper des 47% d'assistés
américains surtout s'ils sont électeurs démocrates. Il a exprimé tout
haut le fondement d'une idéologie profondément antinationale qui refuse
de s'occuper de tous les citoyens américains. Seule compte la croissance
en soi. S'il est élu, la vague de dérégulation et de privatisations
deviendra une déferlante."
Ainsi, Romney expliquant pendant sa campagne en comité restreint qu'il était vain de tenter de convaincre les 47% d'Américains
qui perdraient, en cas de victoire, le bénéfice du travail des autres
et voteraient donc démocrate, devient Romney ne voulant pas s'occuper
des pauvres surtout s'ils sont démocrates. À vrai dire, le glissement
pourrait avoir du sens. Pour éviter que les propos ne soient déformés,
soyons clairs : les libéraux refusent de vivre aux dépens d'autrui et
que quiconque vive à leurs dépens. Ils sont contre la redistribution,
contre la mise en commun des ressources, refusent que le besoin des uns
soit une créance sur la vie des autres. Ils ne refusent pas la solidarité, mais souhaitent qu'elle soit consentie.
Peut-être faut-il insister sur un point important d'incompréhension.
Les libéraux sont individualistes, ils pensent que l'individu est
souverain ; ils pensent que chaque individu doit être libre et maître de
sa propre vie, sans empêcher les autres de jouir des droits qu'ils
reconnaissent à chaque être humain : liberté, propriété privée, sûreté.
Ils ne pensent pas que les individus doivent nécessairement vivre seuls
dans les bois sans interagir avec quiconque ; au contraire, ils pensent
que l'échange enrichit et profite à tous, pourvu qu'ils en acceptent les
règles : échanger valeur contre valeur sur la base du consentement
mutuel. Les libéraux pensent que le libéralisme est le système le plus
juste, et c'est pourquoi ils veulent que chacun puisse en jouir. Ils ne
veulent rien imposer aux individus ; ils ne veulent pas seulement jouir
de leur liberté, mais que tous en jouissent.
Mais quand on est Nicole Morgan – je cite, "La haine la sous-tend, le chiffre l’aseptise, l’incompétence la qualifie.", on considère plutôt que "Comme
toute idéologie, elle repose sur des postulats simplistes qu’elle
transforme en vérités irréfutables sous la bannière d’une pseudo-science
: ici l’économie. Comme les idéologies dures, elle véhicule des
émotions fortes qui puisent dans l’inconscient collectif, haine et peur
en tête, punitions à l’appui, intégrismes en sus".
Ayn Rand, cette auteur démoniaque qui va jusqu'à faire de l'égoïsme une éthique, a dit :
"Je ne suis pas en premier lieu une partisane du capitalisme,
mais de l'égoïsme ; et je ne suis pas en premier lieu une partisane de
l'égoïsme, mais de la raison. Si on accepte la suprématie de la raison
et qu'on l'applique de manière cohérente, tout le reste en découle. Cela
– la suprématie de la raison – était, est et sera l'objet principal de
mon travail, et l'essence de l'objectivisme." (Ayn Rand, "The
Objectivist"). L'appel à des "émotions fortes qui puisent dans l'inconscient collectif" aurait pu être plus explicite…
Le libéralisme repose sur des postulats, comme toute philosophie,
comme toute morale, comme toute éthique ; et comme tous postulats, la
suite du raisonnement procède d'eux. On peut les réfuter. Cela suppose
simplement d'avoir le courage d'affirmer qu'initier la violence peut
être moral, que la propriété privée est sans fondements, qu'on peut
légitimement sacrifier les uns au service des autres, qu'il est plus
juste de choisir pour les individus que les laisser décider pour
eux-mêmes, que créer quelque chose ou le posséder donnent moins de
droits dessus qu'en avoir besoin. Cela suppose d'accepter que l'homme ne
doit pas être libre de se fixer ses propres buts mais être contraint de
poursuivre ceux qu'on chercherait à lui imposer, de force s'il le faut.
Cela suppose d'accepter que nous soyons tous maîtres ou esclaves,
peut-être les deux à la fois, plutôt que libres. C'est ce que semble
souhaiter Nicole Morgan. Mais vous ?
Cliché 2 – Le libéralisme est anglo-saxon
Cliché 3 – Le libéralisme, c’est la droite de la droite
Cliché 4 – Le libéralisme, c’est le chaos
Cliché 5 – Le libéralisme, c’est la loi de la jungle
Cliché 6 – Le libéralisme, l’Homme réduit à l’homoeconomicus
Cliché 7 – Le libéralisme, c’est l’absence de valeurs morales
Cliché 8 – Le libéralisme s’oppose aux droits de l’homme
Cliché 9 – Le libéralisme, c’est la propriété contre les pauvres
Cliché 10 – Le libéralisme, ce n’est pas la liberté réelle
Cliché 11 – Le libéralisme, c’est le relativisme
Cliché 12 – Le libéralisme, c’est l’absence de justice sociale
Cliché 13 – Le libéralisme, c’est l’égoïsme
Cliché 14 – Le libéralisme, c’est l’anarchie
Cliché 15 – Le libéralisme, c’est l’absence de démocratie
Cliché 16 – Le libéralisme c’est la logique comptable agrégée
Cliché 17 – Le libéralisme pousse à la restriction
Cliché 18 – Le libéralisme, c’est des prix sans liens avec la valeur
Cliché 19 – Le libéralisme, c’est la fin d’un salaire minimal
Cliché 20 – Le libéralisme, c’est les échanges au profit des puissants
Cliché 21 – Le libéralisme, c’est la mondialisation
Cliché 22 – Le libéralisme, c’est la concurrence pure et parfaite
Cliché 23 – Le libéralisme, c’est la tromperie commerciale
Cliché 24 – Le libéralisme, c’est la vie sacrifiée à des profits
Cliché 25 – Le libéralisme, c’est le chômage ou l’exploitation
Cliché 26 – Le libéralisme, c’est la pollution sans limites
Cliché 27 – Le libéralisme, la spéculation contre la monnaie
Cliché 28 – Le libéralisme, c’est la hausse des prix
Cliché 29 – Le libéralisme, c’est l’argent fou
Cliché 30 – Le libéralisme, c’est le pouvoir à la finance et aux banques
Cliché 31 – Le libéralisme, c’est les diktats de la banque centrale
Cliché 32 – Le libéralisme, c’est le capitalisme sauvage
Cliché 33 – Le libéralisme, c’est les taux d’usuriers
Cliché 34 – Le libéralisme est responsable de la crise
Cliché 35 – Le libéralisme, c’est l’absence de solidarité santé
Cliché 36 – Le libéralisme, c’est la marchandisation de la culture
La zone euro est officiellement entrée en récession
La zone euro est entrée officiellement en récession au troisième
trimestre 2012, pour la deuxième fois en trois ans, selon l’office
européen de statistiques Eurostat.
Ce qui est bien avec cette crise qui n’en finit pas, c’est que l’on a
de quoi rigoler tous les jours… ou presque. Tenez, hier par exemple, on
nous expliquait que l’Europe est rentrée en récession, comme on le
craignait et qu’on est en plein « double dip »… ou dit en français, en
récession en W. En clair : croissance, récession, puis grâce aux plans
de relance encore un peu de croissance, puis grâce aux plans de rigueur
beaucoup de récession…
Mais faisons appel quelques secondes à notre mémoire. C’était il y a 4
ans. Lheman Brothers venait de faire faillite et, disons-le, c’était le
bazar. Grands débats entre les économistes repris à la une de tous les
canards. Quelle situation allions-nous connaître ? Comme les lecteurs
sont forcément des crétins, pour leur mâcher le travail on leur a mis
une lettre en face de chaque scénario.
On avait le scénario du V. Tout s’effondre mais après ça repart.
Évidemment, à l’époque, il ne fallait pas s’inquiéter, c’était
évidemment ce qui allait se passer, c’était une crise mais après la
pluie vient le beau temps, c’est bien connu.
On avait le scénario du W. Terrible le W. Il fallait à tout prix éviter le W. Comprenez-moi bien : le W, c’est récession, croissance, puis on croyait s’en être sortis et hop, un coup de Trafalgar (sans doute à cause des Anglais) et on repartait en récession. Alors ça, c’est absolument affreux pour le moral des foules. Donc pour la lettre W, on vous rassurait bien comme il fallait. Non, rien à craindre, c’est peu probable, presque aucun risque, pensez donc avec tous les plans de relance que l’on fait et Nicolas Sarkozy aux G20 comme sauveur du monde, franchement « même pas peur ». Or, il était évident que nous aurions droit à la lettre W. Eh oui, c’est assez logique lorsque l’on y réfléchit.
Reprenons les étapes. 2007-2008, crise, récession, effondrement économique mondial sur des niveaux de dettes très élevés. 2009-2011, énormes plans de relance partout à travers le monde financés avec de l’argent que nous n’avons pas, c’est-à-dire encore plein de nouvelles dettes. Manque de chance, malgré tout cela, la croissance ne repart pas (ce qui était visible depuis très longtemps), mais le niveau de dettes devient insoutenable (ce qui, là aussi, était visible depuis très longtemps). Donc 2012-2013, nécessité soit de faire marcher la planche à billets et de casser les monnaies, soit de faire des plans de rigueur. Résultat, l’Europe replonge en récession et le reste du monde va globalement suivre. Conséquence : c’est le W, qui n’avait aucune chance de se produire, qui vient de l’emporter… Sans blague. Je suis surpris. Mais je pense que l’on va vous expliquer, que « l’on ne pouvait pas savoir »… Évidemment.
La zone euro est officiellement entrée en récession au 3e trimestre
Donc, sachez-le, la zone euro est entrée officiellement en récession au troisième trimestre 2012, pour la deuxième fois en trois ans, selon l’office européen de statistiques Eurostat. Le produit intérieur brut a reculé de 0,1% au 3e trimestre, après s’être déjà replié de 0,2% au trimestre précédent. Une période de récession est constatée lorsque le PIB se contracte pendant deux trimestres consécutifs. Après la crise financière de 2008, la zone euro était tombée en récession et avait renoué avec la croissance au troisième trimestre 2009.
« L’activité économique de la zone euro est désormais à environ – 2,5% de son niveau d’avant crise », estime Martin Van Vliet, de la banque ING. Les chiffres publiés jeudi confirment, selon lui, le scénario de « récession en double creux » (« double dip recession ») que craignaient les marchés depuis des mois. L’économiste ne voit pas l’horizon s’éclaircir et table sur une récession plus profonde au quatrième trimestre 2012.
Sur un an, le PIB européen a enregistré une baisse de 0,6% au troisième trimestre 2012, contre – 0,4% au trimestre précédent. En Allemagne, le PIB a progressé de seulement 0,2%, marquant un nouveau léger ralentissement de la première économie européenne. L’Allemagne commence donc clairement à voir ses chiffres macroéconomiques impactés par la récession chez ses voisins européens dont elle reste fondamentalement très dépendante. « La vague de récession qui touche les pays du Sud commence à contaminer ceux du noyau dur [les plus solides de la zone euro, NDLR] », souligne M. Van Vliet, rappelant que l’activité s’est contractée de 0,1% en Autriche et de 1,1% aux Pays-Bas.
L’inflation a par ailleurs ralenti en octobre sur un an, à 2,5% contre 2,6% en septembre, selon Eurostat dans sa deuxième estimation de cet indicateur, bien qu’elle continue de dépasser pour le 23e mois consécutif le seuil de 2% établi par la Banque centrale européenne, mais elle s’en rapproche alors qu’elle était de 3% il y a un an. Cela signifie, là encore, que le danger déflationniste est très loin d’avoir disparu et que ce sujet devrait même revenir au premier plan durant l’année 2013.
De son côté, la BCE maintient depuis l’été son taux directeur inchangé à 0,75 %, un niveau historiquement bas, preuve qu’elle ne craint pas le retour à une hausse des prix et que sa priorité est plutôt la relance de l’économie.
Attaque de la finance contre la France
Dans les mois qui viennent, quelle pourrait être l’action
nuisible des « spéculateurs », de la « finance folle, mondialisée et
dérégulée » ?
Monsieur Dupond, après une longue carrière d’exploitation
capitaliste, a réussi à se constituer une épargne pour améliorer
l’ordinaire une fois l’âge légal de la retraite passé ou, le cas
échéant, pour survivre des fois que l’État ait fait faillite d’ici-là.
Comme il est patriote, Monsieur Dupond décide d’aider l’État français à
se financer en plaçant ces économies sur l’OAT 2,25% 25 octobre 2022,
obligation émise pour de vrai le 31 octobre dernier [1].
Il faut dire que des emprunts d’État, il y en a. C’est la maladie
classique des social-démocraties : elles sont en permanence tiraillées
entre cette part de leur électorat qui réclame des services publics gratuits
(i.e. financés par l’impôt) et ceux de leurs électeurs qui rechignent à
raquer pour les autres. Du coup, afin d’assurer la réélection de
l’équipe en place et une fois les trésors du génie fiscal épuisés, la
social-démocratie se met à créer des dettes. Mieux encore, elle a même
trouvé un moyen de justifier scientifiquement ses penchants
clientélistes grâce à John Maynard Keynes : créer du déficit et de la
dette, c’est une politique de croissance™, et donc c’est bien ; gérer son budget sainement, c’est de l’austérité™, et donc c’est mal.
Bref. Le 31 octobre 2012, Monsieur Dupond achète pour 100 euros
(multipliez ce chiffre et les suivants comme bon vous semble) d’OAT
2,25% 25 octobre 2022 en vertu de quoi, l’État s’engage à lui verser
2,25 euros d’intérêts par an pour chacune des 10 prochaines années et à
lui rembourser ses 100 euros en octobre 2022. Naturellement, ces
intérêts seront fiscalisés soit au taux du prélèvement libératoire de
24%, soit au barème progressif de l’impôt sur le revenu et devront
également être amputés de 15,5% de prélèvements sociaux : ce qui
signifie que l’État pourrait récupérer jusqu’à 39,5% des intérêts qu’il
paye à Monsieur Dupond via son administration fiscale.
Il est important de noter qu’à ce stade, du point de vue de l’État,
l’opération est définitivement bouclée : quoiqu’il arrive, il dispose
désormais de 100 euros qui lui coûteront 1,36 euros par an (2,25 euros
d’intérêts dont il récupère 89 centimes sous forme de taxes) et qu’il
devra rembourser à Monsieur Dupond en octobre 2022 [2].
Évidemment, dix ans c’est long et il est tout à fait possible que
Monsieur Dupond ait finalement besoin de son argent entretemps. Fort
heureusement pour lui, les obligations ont ceci de pratique qu’elles se
revendent au marché de l’occasion – i.e. le marché secondaire par opposition au marché primaire sur lequel Monsieur Dupond a prêté de l’argent à l’État. Tous le problème est de savoir à quel prix.
Par exemple, en octobre 2015, notre obligation à 10 ans sera devenue
une obligation à 7 ans et il est tout à fait possible que le niveau des
taux d’intérêt à 7 ans à cette date ne soit pas de 2,25% mais de 3%. Du
coup, pour refourguer son obligation, Monsieur Dupond sera obligé de
baisser son prix de vente de manière à ce que les 2,25 euros d’intérêts
annuels payés par l’État permettent à l’acquéreur d’obtenir un rendement
de 3% (sinon, bien sûr, il ira voir ailleurs). En l’occurrence,
Monsieur Dupond devra vendre son obligation à 95,3 euros et donc subir
une perte en capital de 4,7%.
Naturellement, le raisonnement symétrique est également vrai : si, en
octobre 2015, Monsieur Dupond cherche à revendre son obligation alors
que les taux à 7 ans sont à 1,5%, il réalisera une plus-value d’environ 5
euros par rapport à ses 100 euros initiaux (et devra au passage
s’acquitter de 34,5% d’impôts sur ce montant). De ce qui précède, le
lecteur est invité à retenir deux choses. Règle numéro 1 : d’une manière
générale, dire que les taux des obligations montent est strictement
équivalent à dire que leur prix baisse (et inversement) ; c’est le même
phénomène vu d’un angle différent. Règle numéro 2 : du point de vue du
débiteur – ici l’État – rien ne change ; que les taux ou les prix
montent ou baissent, il continue à payer ce qui était prévu au départ.
Or, voilà qu’en octobre 2015, le gouvernement français s’apprête à
clôturer son 40ème exercice fiscal en déficit d’affilée. Les caisses
sont vides, les entreprises et les contribuables mettent la clé sous la
porte ou fuient vers des cieux plus cléments, le chômage et les
prestations publiques qu’il implique explosent… Bref, l’État français
est en quasi-faillite : on ne sait pas encore s’il répudiera
unilatéralement tout ou partie de sa dette ou s’il se contentera de
revenir au franc pour le dévaluer (et donc rembourser en monnaie de
singe, ce qui revient au même) ; ce qui semble de plus en plus probable,
c’est que les créanciers de l’État risquent de passer à l’essoreuse.
Du point de vue de Monsieur Dupond, naturellement, c’est un gros
problème : non seulement il pressent que sa retraite par répartition a
déjà été répartie dans d’autres poches que les siennes mais, en plus, il
comprend parfaitement que les fameux marchés financiers, c’est lui.
Monsieur Dupond a beau faire habituellement preuve d’un flegme à toute
épreuve, les hurlements de panique de Madame Dupond ne l’y aident pas.
Alors Monsieur Dupond cherche à vendre son obligation ; quitte à la
brader, quitte à perdre la moitié de ses économies : il préfère ça à la
ruine totale.
Seulement voilà, la situation financière de l’État n’est un secret
pour personne et déjà, les créanciers – la caisse de retraite de
Monsieur Durand, la compagnie d’assurance qui gère le contrat
d’assurance-vie de Monsieur Michel, le fonds d’investissement sur lequel
Monsieur Leblanc a placé son épargne – se précipitent pour se
débarrasser de leurs titres. Du coup, les prix s’effondrent et les taux
s’envolent. C’est à ce stade que la cavalerie des agences de notation,
toujours en retard de trois plombes depuis qu’elle est devenue une
annexe du régulateur, arrive et dégrade la note souveraine de la France.
Bien sûr, personne ne les croit mais les quelques investisseurs qui
n’avaient pas encore cédé à la panique se voient maintenant contraints
par la loi de liquider leurs positions.
Sur le marché obligataire, c’est O.K. Coral. Les derniers
investisseurs craquent et réalisent des pertes énormes en cédant leurs
obligations alors que seuls quelques hedge funds acceptent
encore de les racheter à des prix dérisoires. Plusieurs compagnies
d’assurance ont déjà fait faillite et la plupart des régimes de retraite
complémentaire sont aux abois tandis que plus aucune entreprise
française – sans parler des banques – n’arrive à emprunter un centime
sur les marchés.
Alors que Monsieur Dupond réalise à peine qu’une vie de travail vient
de partir en fumée, les politiciens, dûment relayés par les médias,
défilent devant les caméras de télévision pour expliquer à quel point
cette « attaque contre la France » est intolérable, pour dénoncer
l’action nuisible des « spéculateurs », pour vouer aux gémonies la «
finance folle, mondialisée et dérégulée. » Mais rassurez-vous : ce
scénario apocalyptique n’est que pure fiction.
- Cette émission obligataire a permis à l’État d’emprunter 4,4 milliards d’euros sur 10 ans à un taux moyen de 2,22%. ↩
- L’État s’est engagé à rembourser 100 euros mais n’a jamais précisé ce que sera la valeur de ces 100 euros… D’où les velléités d’une part croissante de nos politiciens à remettre la main sur la planche à billets. ↩
Carla Bruni-Sarkozy : « Il est naturel de redistribuer un peu de ce qu’on a eu »
L’ancienne première dame de France préside ce week-end la vente des vins des Hospices de Beaune, la plus grande vente de charité au monde. À la tête de sa fondation, elle continue d’œuvrer pour l’accès à la culture et à l’éducation et à mettre en place des programmes contre l’illettrisme.
Avez-vous hésité avant d’accepter de présider la vente des vins des hospices de Beaune ?
Cette invitation est un grand honneur pour moi et pour la fondation, je n’ai pas du tout hésité.
Qu’attendez-vous de cette vente ? A quoi vont servir les recettes qui vont aller à votre fondation ?
J’espère qu’elle sera un succès pour les Hospices de Beaune qui accomplissent un travail remarquable. Les fonds qui seront levés au profit de la fondation seront utilisés en priorité pour nos programmes de lutte contre l’illettrisme et de lutte contre la grande exclusion.
Vous militez pour l’accès à la culture et à l’éducation pour tous. Ce droit est-il menacé en temps de crise ?
Je crains que certaines aides, en particulier au milieu associatif, se voient réduites et c’est bien dommage car ce droit est encore plus fondamental en période de crise. La crise crée de la précarité, qui elle-même fait naître le sentiment d’exclusion. La culture et l’éducation peuvent justement y remédier car elles tissent du lien social, du lien à l’autre. J’ai la conviction que ce lien, si fragile, est essentiel à l’être humain. C’est pourquoi notre travail, en apportant ce qui peut sembler superficiel, touche en réalité à ce qui est indispensable.
Que vous a apporté le fait de vous occuper des autres à travers votre fondation ?
Créer la fondation était pour moi la meilleure façon de donner du sens et de l’utilité à ma position. Rediriger l’attention parfois démesurée dont je faisais l’objet vers les autres était essentiel à mes yeux. Ne pas le faire m’aurait paru absurde. Et quand on a eu de la chance dans la vie, il me semble naturel de redistribuer un peu de ce qu’on a eu. Avoir la possibilité de le faire réellement est une grande satisfaction.
Quelle est votre plus grande fierté ?
Le travail accompli ! En trois ans, la petite équipe de la fondation a réalisé un travail formidable. Quatre services pédiatriques pour enfants atteints de polyhandicap ont été équipés en matériel ludo-éducatif, plus de 2 000 lycéens issus de milieux défavorisés ont été accompagnés dans la préparation d’études supérieures et plus de 200 ont reçu une bourse d’études, plusieurs centaines d’adultes réapprennent à lire et écrire grâce aux ateliers que nous finançons… Tous ces résultats concrets, l’impact positif de nos actions dans la vie des personnes que nous accompagnons, voilà ma plus grande fierté.
Vous avez contribué à mettre en lumière le problème de l’illettrisme en France. Est-il désormais moins tabou ?
Il y a des progrès, le tabou est un peu levé et les gens commencent à réaliser que ce sont plus de trois millions de Français qui ont des difficultés pour lire, écrire et compter. Mais le chemin est encore long… Ce problème est encore douloureusement vécu par ceux qui en souffrent et très mal compris par les autres. C’est pourquoi en plus de l’aide que nous voulons continuer à apporter sur le terrain, nous espérons trouver les moyens d’informer et communiquer le plus possible sur le sujet.
Le fait que vous ne soyez plus Première dame est-il un avantage pour votre fondation ?
Mon implication reste identique. La seule chose qui diffère c’est que maintenant je vais pouvoir utiliser plus librement mon image au profit de la fondation.
Comptez-vous acheter du vin ce week-end ? Êtes-vous une amatrice de grands vins de Bourgogne ?
J’apprécie beaucoup de boire un verre de bon vin, un Puligny-Montrachet par exemple. Mais je bois peu et je ne m’y connais pas assez, je le regrette, pour savoir acheter et choisir parmi ces grands vins.
Cette Une de The Economist qu'on ne veut pas comprendre
Il faut être Montebourg pour comparer The Economist à Charlie Hebdo.
Et il faut des dirigeants de ce piètre acabit pour hausser des épaules
ou s'agacer du dossier que l'hebdomadaire économique anglo-saxon
consacre cette semaine à la France, au lieu d'en prendre attentivement
connaissance et d'en tirer les éventuelles conclusions qui s'imposent,
notamment sur le plan politique.
On peut comprendre, lorsqu'on voit la photo d'illustration de la Une
de cette semaine, pourquoi tant Ayrault que Montebourg se sont agacés de
l'aspect volontairement provocateur qu'a choisi The Economist
pour faire passer son message ; décrire ainsi, en pleine page, la France
comme la bombe à retardement de l'Europe, c'est, à n'en pas douter, une
méthode efficace pour attirer l'attention, le buzz comme on dit de nos
jours, et provoquer une belle polémique qui n'a pas fini d'enfler en
France. Certains se demandent même si l'hebdomadaire économique ne
cherche pas là à camoufler les errements de sa propre patrie,
l'Angleterre, durement touchée par la crise, en focalisant ses lecteurs
sur les problèmes français. Mais ce serait une bien pauvre réaction que
de s'arrêter là et ne pas aller lire le contenu des analyses qu'on nous
propose ainsi, aussi corrosif soit le packaging qui les entoure...
En effet, lorsque The Economist constate la position
centrale et proéminente de la France, avec l'Allemagne, au cœur de
l'Europe et de la Zone Euro, il ne fait ici que répéter ce que tout le
monde sait déjà : tout, dans la construction européenne et dans la mise
en place de la monnaie unique montre que les dirigeants français se sont
démenés pour arriver à cette position, depuis Mitterrand et Chirac
jusqu'aux agitations cosmétiques de Sarkozy et à la soumission molle de
Hollande. Et pour le moment, la France s'en tire honorablement puisqu'à
lire les pages que The Economist lui consacre, le pays s'en
sort ni trop mal (et évite le sort douloureux de l'Espagne, l'Italie ou
le Portugal, sans parler de la Grèce) ni trop bien (comme les pays du
Nord à l'instar de la Finlande ou de l'Allemagne).
Mais cette situation tient en fait d'un mélange de deux extrêmes
opposés : d'un côté, ses taux d'emprunts sont faibles, très faibles
mêmes, probablement pas loin d'un record tant il semblerait que les gens
se réfugient dans l'achat de bons allemands ET français, ce qui ne
lasse pas de surprendre l'observateur averti. Le pays dispose aussi, et
c'est connu, d'infrastructures de communication et de télécommunications
d'excellente qualité, en plus d'une position géographique très
favorable. Et de l'autre côté, ses chiffres macroéconomiques,
franchement mauvais, sa croissance anémique voire négative, sa
compétitivité de plus en plus mauvaise, et les directions générales
consternantes impulsées par un nouveau gouvernement, qui apparaît tout
sauf maître de la situation, laissent plus de place à l'effroi qu'au
rêve. De telles différences s'assemblent pour donner un constat lové
douillettement dans la médiocrité, la moyenne, le milieu, l'entre-deux.
En fait de cœur de l'Europe, la France en est le ventre mou presque
revendiqué, assumé.
Et pour The Economist, la crise n'a fait que révéler cet
état des choses, notamment, par l'absence de dévaluation possible, en
laissant les politiciens sombrer dans la dépense publique qui a explosé,
à 57% du PIB, la plus forte en Europe.
Source Wikipedia, Eurostat
The Economist va cependant plus loin : puisque Hollande a,
au travers du PS, tous les leviers du pays, il pourrait en profiter pour
lancer de vraies réformes structurelles. Mais l'hebdomadaire ne peut
s'empêcher de noter ce que je remarque régulièrement
: l'optimisme de façade du président masque mal sa faible motivation
devant la tâche à accomplir, et son aussi faible crédibilité. Après
tout, les entreprises savent à quoi s'en tenir sur le plan fiscal, et ce
n'est pas joli joli. Le constat de cette absence de prise de conscience
et du problème à bras-le-corps est d'ailleurs résumé dans cette phrase
cruelle mais juste :
"European governments that have undertaken big reforms have done so because there was a deep sense of crisis, because voters believed there was no alternative and because political leaders had the conviction that change was unavoidable. None of this describes Mr Hollande or France."Eh oui : le seul changement fut celui du nom du chef de l’État, mais ni sa politique actuelle, flirtant amoureusement avec une rage taxatoire rarement vue dans ce pays, ni le fond jacobin et centralisateur de ses mesures interventionnistes ne changent par rapport aux précédents présidents. Ici, la critique de The Economist fait d'autant plus mal qu'elle tape juste lorsqu'il décrit le PS comme passéiste et hostile au capitalisme. L'hebdomadaire note aussi que le dernier politicien à avoir fait les frais de ses analyses, en juin 2011, était Berlusconi, jugé incapable de réforme du pays et... débarqué dans les six mois suivants.
"Les gouvernements européens qui ont entrepris des grandes réformes l'ont fait parce qu'existait un sentiment profond de crise, parce que les électeurs croyaient en l'absence d'alternative et parce que les politiciens avaient la conviction qu'un changement était inévitable. Rien de tout cela ne décrit M. Hollande ou la France."
Sa conclusion, parfaitement en ligne avec ce que j'écrivais il y a quelques jours, rappelle que si Hollande refuse encore de faire les réformes, la réalité économique, indéboulonnable, se rappellera à lui de façon brutale (et pas plus tard que l'année prochaine).
En définitive, si l'on passe sur une couverture provocante (mais habituelle), The Economist propose une vision lucide de la France et en dresse un état des lieux que le président français aurait tout intérêt à considérer autrement que comme un simple persiflage d'un magazine de la perfide Albion, notre meilleure ennemie. Compte tenu de l'accueil et de la capacité de prise de recul de nos dirigeants, tout ceci ne sera à l'évidence suivi d'aucun effet salvateur.
Conférence de presse de Hollande: le tournant, quel tournant?
François Hollande ne veut avouer aucun virage. Ce qu'il fait serait en cohérence avec sa campagne. En réalité, les deux piliers de sa politique économique, la baisse des charges fiscales des entreprises et la négociation sur l'emploi n'étaient pas à son menu.
Le but de la conférence de presse n'était pas d'annoncer des mesures nouvelles, mais de mettre en cohérence celles qui sont déjà connues. Le président était très attendu car les sujets désormais au centre de son action n'étaient pas à son programme. Cette évidence, François Hollande n'a pas voulu l'assumer. Pas de tournant, pas de virage.
La réorientation de l'Europe, le redressement des finances publiques et
celui de l'appareil productif, tel était son projet; telle est son
action, a-t-il dit en substance.
Tournant dans l'analyse, tournant dans les solutions. Quand, en juillet, le président de la République commence à poser le problème, il pense qu'il y répondra par une hausse de la CSG, venant compenser la baisse des charges des entreprises. Il a fini par adopter le même remède que Nicolas Sarkozy, la hausse de la TVA. Il a beau parler de "refonte des taux", le résultat que les Français ressentiront à partir du 1er janvier 2014, c'est que la TVA va s'alourdir de plus de 6 milliards d'euros.
Le deuxième sujet, la négociation sur l'emploi n'était pas, elle non plus, au programme du candidat. Donner plus de flexibilité aux employeurs n'est pas un thème très porté par la gauche, mais François Hollande la rend plus digeste pour son camp en choisissant une méthode valorisante pour la social-démocratie, celle du dialogue social. C'est par la négociation que patronat et syndicats devraient aboutir au résultat souhaité. François Hollande a fortement prié les intéressés de s'entendre sur ce point. Un échec l'obligerait à légiférer et à affronter sa majorité sur ce thème.
Les autres enjeux de la loi
(et des manifs)
Jean-Marc Ayrault dénonce "l'outrance" de "The Economist"
Dans sa dernière édition, le magazine britannique désigne la France comme une "bombe à retardement".
Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a dénoncé jeudi soir "l'outrance" du magazine britannique The Economist, qui qualifie la France de "bombe à retardement au coeur de l'Europe" à la une de sa dernière édition.
Dans son édition du 17 novembre, The Economist publie un dossier spécial de 14 pages sur la France sous le titre "La bombe à retardement au sein de l'Europe" avec pour illustration sept baguettes de pain ceintes d'un ruban bleu-blanc-rouge, telles des bâtons de dynamite, et reliées à une mèche allumée.
"Ce sont des caricatures dignes de Charlie Hebdo", a réagi Arnaud Montebourg sur Europe 1.
"Franchement, The Economist ne s'est jamais distingué par son sens de la modération. C'est le Charlie Hebdo de La City", a-t-il ajouté sans plus de commentaires.
Dans l'édition de vendredi du Financial Times, le ministre de l'Economie et des Finances, Pierre Moscovici, souligne sans citer The Economist que "la France n'est pas l'homme malade de l'Europe".
"La France reste la cinquième puissance économique mondiale en pleine possession de ses ressources mais qui doit retrouver sa compétitivité", ajoute-t-il.
Il déplore une entreprise de "French bashing" (littéralement, de "dénigrement de la France") qu'il juge "absurde et infondée".
La France "n'applique pas les mêmes réformes que l'Espagne ou l'Italie car nous ne sommes pas dans la même situation, nous n'avons pas les mêmes faiblesses. Nous allons donc réformer le pays 'à la française' (en français dans le texte) avec les mesures les plus ambitieuses qu'aucun gouvernement (français) ait encore appliqué", plaide le ministre de l'Economie.
"QUELQUE CHOSE DE JUSTE"
"Nous serons jugés sur les résultats, mais condamner un gouvernement qui réforme parce que ses prédécesseurs ne l'ont pas fait, ce n'est pas simplement injuste, c'est erroné. Nous ferons ce qui est nécessaire, nous ferons ce qu'on attend de nous", poursuit Pierre Moscovici.
"Nous sommes en train de construire une nouvelle économie française. Nous avons besoin d'un peu de temps", conclut-il.
Jeudi, en marge d'un déplacement à Berlin, Jean-Marc Ayrault avait dénoncé "l'outrance" de The Economist "pour faire vendre du papier". La France, avait ajouté le Premier ministre français sur i>Télé, n'est pas du tout "impressionnée".
La présidente du Medef, Laurence Parisot, a déploré pour sa part vendredi une Une et un titre "tout à fait exagérés" mais a estimé que cette couverture provocatrice recouvrait "quelque chose de juste".
"La France est au coeur de l'Europe. Si la France s'effondre, c'est toute l'Europe qui s'effondre", a-t-elle jugé sur RMC Info et BFM TV.
"En réalité, The Economist a un temps de retard, parce que tout son dossier a été conçu avant le rapport Gallois et les premières décisions du gouvernement en faveur de la compétitivité de notre pays", a ajouté la représentante du patronat français.
La France, son économie où le poids de l'Etat reste important, et les réticences de ses responsables politiques à se lancer dans de grandes réformes structurelles sont des cibles récurrentes du très libéral The Economist.
Il avait déjà frappé fort lors de la dernière campagne présidentielle avec un article consacré à "La France en déni, l'élection la plus frileuse d'Occident", pour critiquer ensuite un pays "léthargique et non réformé qui pourrait bien se retrouver au centre de la prochaine crise de l'euro."
The Economist avait affiché avant le vote sa préférence pour Nicolas Sarkozy afin de barrer la route au "plutôt dangereux M. Hollande."