L'opticien français, qui quitte son pays pour Londres, s'agace des reproches qui lui sont faits: "Il faut arrêter de dire que les chefs d'entreprises sont des voyous."
Il est fou, Afflelou? Fou... de rage, à en croire ses propos sur RTL ce samedi. L'opticien français Alain Afflelou qui a annoncé son installation prochaine à Londres
"pour deux ou trois ans" a dénoncé samedi "une guerre de tranchées"
livrée selon lui aux entrepreneurs et "ceux qui réussissent"."On est en
train de revenir en 1789: il faut arrêter de dire que les chefs
d'entreprises sont des voleurs, des voyous des gens malhonnêtes", a
estimé l'entrepreneur interrogé sur RTL."Il
n'y a pas que les artistes qui ont le droit d'être considérés: des gens
qui travaillent et en font travailler d'autres, on en a besoin", a-t-il
jugé à propos de l'exil récent de Gérard Depardieu et de la polémique qu'il a suscitée.
A
l'inverse, et même s'il dénonce une "fiscalité injuste et
confiscatoire", Alain Afflelou assure: "Je ne quitterai pas ma
nationalité pour ne pas payer d'impôt".L'opticien part s'installer
Londres à la demande de son actionnaire majoritaire, le fonds
d'investissement britannique Lion Capital, afin d'y développer son
entreprise vers le nord de l'Europe, explique-t-il. Il part "pour deux
ou trois ans" pendant lesquels il continuera de payer ses impôts en
France, a-t-il affirmé samedi. "Je ne cherche pas à jongler: j'ai
toujours payé mes impôts en France même quand j'étais en Suisse: je
paierai en Angleterre ce que je dois payer et en France ce que je dois
payer"."J'ai payé des impôts, j'en paye beaucoup et je n'ai pas à en
rougir. Mais le système en France est extrêmement défavorable pour tous
les chefs d'entreprise et ceux qui cherchent à entreprendre".
Selon
lui, "à partir de maintenant ceux qui sont dans la tranche de 75%"
d'impôt sur le revenu "peuvent dépasser 90% d'imposition: alors, oui on
peut parler de fiscalité confiscatoire puisqu'elle peut nous priver de
l'intégralité de nos revenus du travail".
samedi 22 décembre 2012
Afflelou dénonce une "guerre contre ceux qui réussissent"
2013 année noire, Hollande dramatise
Economie. Le président de la République prédit des mois à venir très difficiles pour les Français.
François Hollande promet certes du mieux plus tard, et dit sa conviction qu’on « va s’en sortir ». Dans des confidences faites la veille au Point, il parie même sur un rebond en 2014… Mais le discours sur les surlendemains qui chantent est remisé. L’optimisme à long terme n’est plus audible, quand le court terme est aussi noir.
Et les mauvaises nouvelles s’accumulent sur l’Elysée. L’échec jeudi de la négociation sur le marché du travail, même provisoire (les partenaires se revoient début janvier), menace de compromettre tout consensus autour des réformes. Le rejet du budget au sénat confirme le manque de fiabilité des alliés écologistes, dont le départ du gouvernement serait très préjudiciable : « Je ne veux pas d’une majorité qui finisse en peau de chagrin, dit-il au Point. J’ai été élu avec une majorité courte ». Enfin l’étau paraît se resserrer sur son ministre du Budget, mis en cause par Mediapart sur son comportement de contribuable : beaucoup plus qu’un ministre, fût-il du Budget, Jérôme Cahuzac est une pièce essentielle dans le dispositif présidentiel, et son orientation résolument social-démocrate, à la Schröder. Que faire ? Tenir. Subir l’impopularité. Et tenter de rassembler. Invité à critiquer la fuite fiscale de Gérard Depardieu, il répond : « Face à la difficulté, je ne veux pas opposer les uns aux autres ». Il le dit sur Europe 1, il le redira sans doute le 31 décembre au soir, à la télévision : « C’est un moment historique pour notre pays, il peut décliner, décrocher, ou poursuivre sa marche en avant ». Les vœux présidentiels seront sans sourire ni cotillon – le bonheur sera dans l’après… Peut-être.
Mécomptes de Noël
Les créanciers, victimes oubliées
Apocalypse
Le monde que nous avons façonné depuis la deuxième moitié du XXe siècle est devenu bien compliqué. De plus, il ne cesse d'évoluer, bousculant nos vies, nos sensibilités, nos manières de voir et d'agir, nos rythmes, nos principes et nos valeurs. Beaucoup de ces « progrès » (?), censés nous faciliter la vie, nous la compliquent.
À peine appris le fonctionnement de tel ou tel instrument, il faut en changer sous la pression de la mode ou du fabricant qui ne répare pas, mais impose le remplacement pour des raisons techniques et commerciales. Souvent, ces innovations sont présentées comme faisant gagner du temps, mais que faisons-nous de ce temps-là ? Faut-il que nous soyons ainsi mis en vibrations stressantes qui nous font perdre quelque peu notre sérénité, altèrent notre jugement et même notre rationalité ?
« L'attracteur »
On finit par se dire que cela ne pourra pas toujours continuer ainsi et qu'un jour la belle machine coincera ou nous explosera dans les mains. Les optimistes n'y pensent pas, mais d'autres se posent des questions. Par exemple, qu'arrivera-t-il si le système électrique disjonctait pour longtemps dans nos modernes sociétés ? L'hiver, beaucoup mourraient de froid. Les transports s'arrêteraient. Les approvisionnements, les stockages deviendraient impossibles et rendraient problématique la vie en ville. Bref, notre fragilité nous apparaîtrait dans toute sa nudité et nous déplorerions notre imprudence et notre légèreté.
Mais d'où vient donc cette idée que le monde pourrait finir en catastrophe ? Nous savons que la Terre mourra dans quelques centaines de millions d'années, asséchée par la brillance croissante de notre soleil. Nous savons que nous pouvons être percutés par un bolide surgi du fond de l'espace. Des espèces ont déjà disparu de notre planète, nous laissant la place à la suite de catastrophes mortelles. Mais nous pourrions bien en être, à notre tour, victimes un jour.
Voilà à quoi songent ceux qui croyaient à l'apocalypse, ces jours derniers. Mais la fin du monde, en définitive, c'est pour chacun de nous la mort, même sans apocalypse. Cela mérite que l'on se prépare à la « grande épreuve », celle qui inévitablement sera la nôtre un jour. Cela incite à réfléchir sur le sens de notre existence. On peut s'interroger sur nos origines, mais aussi sur notre finalité et se demander où va le monde.
Il paraît que de nombreux mathématiciens et physiciens ont constaté que tous les paramètres connus convergent vers un point unique qu'ils appellent « l'attracteur ». Si l'on ne sait pas très bien d'où l'on vient, on peut se demander où, vers quoi et peut-être vers qui conduit cette convergence. Les déçus de l'apocalypse annoncée et les autres aussi ont donc encore du temps pour cela...
Les candidats à l'exil fiscal plus nombreux et aux profils variés
Les candidats français à l'exil fiscal se bousculent aux portes des
agences immobilières internationales et des cabinets d'avocats
spécialisés depuis que le gouvernement a annoncé une série de mesures
pour taxer les grosses fortunes.
L'acteur Gérard Depardieu, le patron de LVMH Bernard Arnault ou encore
le fondateur du groupe lunettier français Alain Afflelou ne sont pas les
seuls à chercher à quitter la France, de nombreux cadres et
entrepreneurs aux profils variés cherchant à les imiter depuis cet été.
"Les impôts sont tout simplement trop élevés", estime l'avocat
fiscaliste parisien Patrick Michaud, qui évoque la nouvelle tranche
d'imposition à 75% pour les revenus annuels supérieurs à un million
d'euros et l'impôt sur la fortune comme raisons invoquées par les
candidats à l'exil fiscal.
En Belgique, par exemple, il n'y a ni ISF, ni taxation des plus-values
mobilières et les droits de succession y sont plus faibles qu'en France,
même si les salariés belges sont beaucoup plus taxés que leur
homologues français.
Philippe Bruneau, président du cercle des fiscalistes français, estime
qu'"aujourd'hui ce n'est pas seulement l'argent qui quitte le pays, ce
sont aussi les cerveaux".
"L'âge moyen a beaucoup baissé, et beaucoup de jeunes gens qui ont créé
des entreprises en France vendent pour en créer d'autres ailleurs",
a-t-il déclaré à Reuters.
"Nous enregistrons effectivement beaucoup plus de demandes qu'avant mais
tous ne franchissent pas le pas", confie un avocat fiscaliste à Lyon
qui a requis l'anonymat.
"Une minorité seulement concrétise finalement ce projet de départ, mais
ils sont quand même plus nombreux qu'avant à quitter la France", observe
cet avocat.
SPÉCIFICITÉS SELON LES PROFILS ET LES PAYS
Dans les bureaux suisses de Barnes, groupe international spécialisé dans
l'immobilier haut de gamme, 68 clients se sont présentés depuis cet
été, et huit ventes ont déjà été réalisées. En Belgique, l'agence a
rencontré 34 clients depuis trois mois, dont sept qui ont loué des
appartements en urgence à Bruxelles.
A Londres, la demande serait telle que le Lycée français n'accepterait
plus d'inscriptions. Interrogé par Reuters, le Lycée français de Londres
a dit "ne pas avoir le droit de communiquer" sur le sujet.
"Cela illustre le niveau d'inquiétude des gens, qui sont prêts à partir
avec leur famille et rescolariser leurs enfants en plein milieu
d'année", estime Thibault de Saint Vincent, président de Barnes.
Agents immobiliers et fiscalistes relèvent de vraies spécificités dans
les demandes des candidats à l'exil selon leurs profils, leurs besoins
et les pays d'accueil.
"A New York et à Londres, ce sont des cadres supérieurs ou des
entrepreneurs avec un profil plutôt financier. En Suisse, ce sont des
retraités et des rentiers. En Belgique, on va retrouver des
entrepreneurs ayant vendu leur société et souhaitant développer des
projets ou désireux de poursuivre leur activité en France en prenant le
Thalys tous les jours", note Thibault de Saint Vincent.
"Il y a également les petits entrepreneurs dans les services de
proximité tels que la restauration ou la coiffure, qui vendent leurs
activités en France avec le projet de redémarrer leur entreprise
ailleurs. On retrouve davantage ce type à Miami, au Canada ou en
Israël", ajoute le président de Barnes.
"S'INTÉRESSER PLUTÔT À LA FRAUDE FISCALE"
La fiscalité ne constitue cependant pas la seule motivation à l'exil,
l'intervention du gouvernement dans la gestion de sociétés privées étant
également mal perçue, remarquent des fiscalistes et des agents
immobiliers.
Le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg avait défendu
l'idée d'une nationalisation temporaire du site ArcelorMittal de
Florange et le gouvernement chercherait à intervenir dans le dossier
Alcatel-Lucent, suite à l'accord de crédit conclu par l'équipementier
télécoms avec Crédit suisse et Goldman Sachs.
L'exil d'entrepreneurs n'est pas sans conséquences économiques - en plus
des pertes de recettes fiscales consécutives à leur non imposition en
France - et sociales puisque ces derniers disposent d'un pouvoir d'achat
supérieur à la moyenne et emploient du personnel de maison.
En réponse à cet exil, le ministre délégué au Budget Jérôme Cahuzac a
suggéré l'idée de taxer en France les expatriés français qui bénéficient
d'une imposition plus clémente.
"Je ne suis pas certain que cette idée passe très bien à Bruxelles ou
auprès des autorités des autres pays européens", a dit à Reuters un
expatrié français de 36 ans travaillant dans le conseil et installé à
Londres.
"En outre, je pense qu'il devrait s'intéresser davantage à la fraude et à
l'évasion fiscales plutôt qu'aux expatriés partant en toute légalité.
Je me suis laissé dire que certains possédaient des comptes bancaires
cachés en Suisse..."
Affaire Depardieu: et si on quittait la France parce qu'elle est devenue détestable?
Gérard Depardieu va s'installer en Belgique, comme d'autres, nombreux dit-on. Pour échapper au fisc? Pas seulement, pas surtout, s'énerve le chroniqueur, David Abiker, qui a du mal à trouver à la France des circonstances atténuantes.
Et si la France était devenu un pays tout simplement détestable?
Je sais ça n'est pas bien de dire les choses de cette façon, je n'oserais pas le dire sur Europe1, j'aurais peur, je n'assumerais pas. Alors je le dis ici. Dans cette intimité là.
Une réflexion presque intime en partage.
Voilà
cette intuition: je suis sûr qu'on ne quitte pas la France pour des
raisons fiscales. Je crois qu'on quitte la France parce qu'on a les
moyens et surtout l'envie d'aller voir ailleurs si elle n'y est pas. Si
elle n'y est plus.
Je crois qu'on quitte la France parce qu'on ne la supporte plus.
Et je crois que la France est devenue insupportable.
Et c'est parce que je ne fais que croire que je m'exprime ici. Pas ailleurs. C'est trop important.
Et
notre France n'est pas insupportable qu'aux riches, elle est
insupportable à ses habitants, à commencer par les plus pauvres.
Quiconque est en bonne santé mentale dans ce pays a des rêves et des envies d'ailleurs. Il y a deux mois, le manifeste Barrez-vous sonnait déjà le tocsin. Deux ans avant ce texte, j'avais réalisé cette interview du sociologue Louis Chauvel,
spécialiste de l'appauvrissement d'une génération et qui donnait à la
jeunesse pauvre et désargentée le conseil suivant: partez à l'étranger!
Il n'y a pas un sociologue dans ce pays qui ne constate la bunkerisation
des classes sociales, l'étanchéité croissante des couches de la
société, le blocage des mécanismes de promotion individuelle et
collective.
La France est devenu un pays détestable car tous les
indicateurs, mêmes les plus insolites, montrent que les Français ne se
supportent plus les uns les autres.
Dans la longue liste des
symptômes, la fiscalité qui frappe les riches me paraît secondaire, même
si pour certains nantis, elle est déterminante. Mais il y en a
d'autres. On peut citer en vrac:
- la préférence
institutionnalisée pour le chômage qui exclut de facto les plus jeunes,
les plus vieux, les femmes et les étrangers, pour ne reposer que sur une
base très étroite, à savoir l'homme blanc de 25 à 45 ans;
-
l'incapacité à intégrer les étrangers tout en revendiquant un modèle
exemplaire d'intégration, les derniers chiffres le montrent, la France
terre des droits de l'homme, terre d'asile, terre d'accueil est nulle en matière d'intégration;
- la plus forte consommation au monde d'anxiolytiques et d'antidépresseurs;
- le cynisme qui fait partout office de prêt à penser, de prêt à blaguer;
-
la pire des réputations touristiques des Français quand ils se
déplacent et des Français quand ils reçoivent et il suffit pour s'en
convaincre de jeter un oeil à la dernière étude sur l'hospitalité
parisienne;
- des partis populistes qui réalisent aux élections des scores élevés;
-
des partis de gouvernement incapables d'affirmer leur modèle de
gouvernance et qui embrayent le pas de la démagogie avec à ma gauche les 75% et à ma droite le pain au chocolat;
- des partis de gouvernement ayant chacun donné l'exemple d'élections truqués et non démocratiques pour choisir leurs dirigeants;
-
des conflits larvés de génération avec une critique ridicule de la
génération Y par la génération X elle-même pleine de rancune à l'égard
de la génération qui a fait mai 68;
- une détestation des
religions qui confine à la suspicion tant il est avéré que tout ce que
ce pays compte de vrais religieux lui est bien plus socialement utile
qu'il n'est néfaste à la réalisation du pacte républicain;
- une
confiscation politique, démagogique et professionnalisée du débat public
par les associations de tous horizons qui ont fait des poursuites
judiciaires un moyen d'existence et de promotion politique et sociale de
leurs membres;
- une utilisation abusive du principe de
précaution dans tous les domaines de la vie collective doublée d'un
culte du risque zéro sclérosant, débilitant, infantilisant;,
-
une crise syndicale qui n'a jamais été aussi forte: crise de la
représentation d'une part, crise des idées de l'autres. Les négociations
sur le travail le montreront dans quelques jours, elle prouveront
surtout que les syndicats patronaux comme les syndicats de salariés sont
surtout soucieux de garantir leur survie dans un système en bout de
course;
- une crise économique majeure que la France n'est pas le
seul pays à subir mais qu'elle est sans doute le seul pays à combattre
avec des idées et des outils qui datent d'un autre siècle;
- une
crise enfin de la représentation médiatique qui dresse le portrait d'une
société toujours plus individualiste, où l'exhibition des douleurs
intimes et non plus collectives est devenu depuis le milieu des années
80 le véritable gasoil du marché publicitaire, y compris dans le secteur
public, paradoxalement.
Je pourrais comme ça aligner le
catalogue dépressif de ces maux bien de chez nous, je m'en tiens
précisément aux symptômes qui traduisent non pas le malaise, mais le
malheur, la dégringolade psychologique, l'incapacité à refonder le
contrat social, le vivre ensemble et la bienveillance collective.
Dans
cette République-là, la parole politique est d'autant plus anxiogène
qu'elle est fondée sur un mensonge permanent, un mensonge de bonne foi,
hélas.
On invoque une égalité dont la dynamique ne fonctionne pas.
On évoque une exception française qui n'existe pas.
On fonde la loi sur des principes que l'on ne respecte pas.
On traite la jeunesse avec une hypocrisie, une condescendance et une démagogie qu'elle ne nous pardonnera pas.
Voilà
pourquoi si j'étais riche ou si j'avais 20 ans, moi aussi je quitterais
la France. Je la quitterais avec rancoeur, avec amertume, avec des
larmes, comme on quitte une personne qu'on aime et qu'on déteste à la
fois, mais je la quitterais quand même, pour me sauver, avec tout
l'égoïsme et toute l'énergie du désespoir, et faute de la quitter
vraiment, je la quitterais dans ma tête et c'est bien ce que chacun de
nous essaie de faire chaque jour pour tenter de l'aimer encore.
Et
qu'on ne me serve pas l'argument "minable" et patriotique de la
solidarité. C'est un argument donneur de leçon, mal fichu, un argument
de sergent recruteur.
Personne n'aime son pays.
Personne
n'est amoureux d'un passeport à part quelques doux dingues en rupture.
Je n'ai jamais rencontré de ma vie quelqu'un qui avait l'amour du pays,
quelqu'un qui me dise, j'aime la France.
En revanche...
Je
n'ai rencontré que des gens bien. Tous formidables. Je ne connais pas
de Français détestables méritant l'indignité nationale et pour
paraphraser le chanteur, je n'en connais que de fragiles. Mais croyez
moi quand je croise un patriote étiqueté, je change de trottoir. L'amour
du pays c'est ce qui reste avant les premiers coups de canon.
L'amour du pays c'est pour 14-18 ou 1998, c'est pour justifier les morts ou supporter les buts.
La
France est devenue un pays insupportable parce qu'elle ne se supporte
plus, parce qu'elle est fatiguée de se mentir, parce qu'elle n'aime ni
ses jeunes, ni ses vieux, ni ses hommes, ni ses femmes et qu'elle est devenue incapable de pardonner à un artiste, elle qui du temps de la Renaissance les faisait venir de l'Europe entière.
La
France est devenue insupportable parce qu'elle est tout simplement
malheureuse, malheureuse comme une personne qui vous fait peine.
Partir
de France aujourd'hui, ce n'est certainement pas une déchéance, ou un
passage à l'acte fou, c'est juste un rêve sain, un rêve de Brésil, un
rêve d'ailleurs dans une Europe plombée où d'autres nations, d'ailleurs,
réussissent mieux que nous à se réinventer, à gérer le vieillissement,
l'éducation, le travail, le partage, l'effort, les retraites. Partir de
France, c'est certes un privilège de riche, mais c'est aussi une
alternative pour les plus jeunes. Le même Louis Chauvel
me disait dans l'entretien cité plus haut qu'il est préférable d'être
jeune dans un Canada en crise plutôt que dans une France en croissance,
c'est dire.
Alors pourquoi aimerait-on ce pays? Dont l'Etat surendetté donne des leçons de gestion à ses citoyens qui n'en peuvent plus?
Il
faudrait être frappadingue pour ne pas avoir envie de partir. Il faut
être un immense pervers pour imaginer que le monde n'est pas plus
séduisant au dehors que la vieille France au dedans, il faut être un
gardien de prison pour faire passer un évadé, un expatrié, un immigré de
France, fut-il l'exaspérant Depardieu, pour un coupable, pour un salaud, pour un traître.
Riche ou pauvre, celui qui se sauve nous raconte souvent une histoire que nous ne voulons pas entendre.
Ces visionnaires qui ont fait mieux que les Mayas
Economistes, écrivains ou journalistes, ils ont anticipé de façon étonnante -et parfois involontaire- la situation économique actuelle. Florilège.
Mieux que les Mayas, qui ont -à en croire les exégètes de leur calendrier annoncé la fin du monde pour le 21 décembre 2012, d'autres esprits éclairés ont su décrire avec une indubitable prescience ces maux qui minent la société du 21e siècle. Ils sont économistes, journalistes, écrivains, chefs d'entreprise, voire dirigeants politiques. Et quand on relit leurs écrits, on est saisi par leur caractère visionnaire. Souvent involontaires mais toujours frappantes, ces "prévisions" accréditent la thèse selon laquelle l'économie n'est qu'un éternel recommencement. "Cela montre que certains aujourd'hui n'ont rien inventé", remarque malicieusement l'économiste Jean-Marc Daniel, qui a aidé Challenges à débusquer certaines de ces concordances à plusieurs décennies d'écart.
Voir notre diaporama "Ils l'avaient prévu avant tout le monde..."
La crise, certains l'ont prédite avec quelques années d'avance, comme l'économiste Nouriel Roubini, surnommé "Dr Doom" ('Docteur Catastrophe") pour ses prévisions pessimistes. En 2006, dans un discours prononcé au FMI, il annonçait la crise des subprimes et la récession qui s'ensuivrait. De son côté, Milton Friedman, chef de file des économistes monétaristes, prévoyait dès 2001 la crise de l'euro en dénonçant les rigidités de la monnaie unique: "Si de la flexibilité n’est pas réintroduite, les membres de la zone euro connaîtront une série de chocs asymétriques, de graves difficultés économiques émergeront, qui créeront une conflictualité politique." Exactement le scénario qui se déroule sous nos yeux.
"Les Chinois fabriqueront bientôt tous les produits à meilleur marché que les blancs"
Mais certaines prédictions datent de bien plus longtemps. A l'heure de la peur des délocalisations et de la promotion du "made in France", on pourrait se reprocher de n'avoir pas anticipé ce que Jacques Novicow écrivait dès 1897 dans Le Péril jaune: "Les Chinois, les Hindous, les nègres se contentant d'un faible salaire, fabriqueront bientôt tous les produits à meilleur marché que les blancs; alors personne ne voudra plus acheter les articles des blancs.
Au-delà des prédictions, l'histoire économique est faite de flagrantes similitudes. Ainsi, le mouvement des "pigeons", ces entrepreneurs qui ont fait reculer le gouvernement sur les plus-values de cession en octobre, n'est que la réplique moderne d'une forme de contestation patronale bien éprouvée. Claude-Joseph Gignoux, qui présidait l'ancêtre du Medef en 1937, ne disposait pas de Twitter pour mener la contestation, mais il n'en a pas moins mobilisé les patrons pour défendre leurs intérêts face à la politique du Front populaire. Il a notamment publié un petit livre intitulé Patrons, soyez des patrons! dans lequel il appelait les chefs d'entreprise à défendre "le rôle qui est le vôtre, celui de l’organisateur de la production, qui court des risques et qui doit, pour cela, exercer une autorité effective".
Quant à la reculade de François Hollande face aux "pigeons", elle rappelle furieusement ce discours radiophonique de Léon Blum, le 13 février 1937, dans lequel le président du Conseil annonce une pause dans les réformes du Front populaire. Quelques semaines plus tard, il explique même au Parlement vouloir lutter contre le "préjugé défavorable du capital". Un numéro d'équilibre délicat.
Et que dire de La Grève, ce roman publié en 1957 par l'auteure américaine ultralibérale Ayn Rand, dans lequel des entrepreneurs mènent une fronde en se retirant dans un endroit secret pour montrer le délitement de la société en leur absence. Clairement dirigé contre la social-démocratie interventionniste, l'ouvrage a suscité un vif regain d'intérêt depuis le début de la crise aux Etats-Unis (c'est l'une des influences revendiquées de l'ex-candidat républicain à la vice-présidence Paul Ryan) et a été traduit en français l'année dernière.
The Economist tape sur la France depuis... 1851
Autre répétition amusante de l'actualité économique: l'attitude de l'hebdomadaire britannique The Economist à l'égard de la France. Si les polémiques se sont multipliées ces derniers mois, du fait de couvertures dénonçant "la France dans le déni" ou "la bombe à retardement" que serait l'Hexagone, le dénigrement ne date pas d'hier. En décembre 1851, après le coup d'Etat du futur Napoléon III, The Economist qualifiait la France de pays "inapte au compromis" dans un éditorial récemment exhumé par Jean-Marc Daniel sur BFM Business. Le journal jugeait par ailleurs la mentalité française "excitable, volatile, superficielle, exagérément logique", d'où le besoin de régime fort auquel répondra le Second Empire.
On pourrait multiplier les exemples. Les plus ambitieux remonteront jusqu'aux prophéties de Nostradamus. Charly Samson, auteur du livre Le véritable Nostradamus, soutient de façon très sérieuse que le médecin du 16e siècle avait prévu la crise actuelle, notamment à travers ce quatrain: "Le grand crédit d’or et d’argent l’abondance / Aveuglera par libide d’honneur / Cogneu sera l’adultère l’offense / Qui parviendra à son grand déshonneur." Il est facile de voir dans "le grand crédit d'or et d'argent" la dette dont "l'abondance aveuglera" et provoquera le "grand déshonneur". Plutôt que les Mayas, aurions-nous dû écouter Nostradamus?
Mais qui est le nouveau propriétaire de la Bourse de Paris ?
InterContinental Exchange (ICE) achète pour 8,2 milliards de dollars NYSE Euronext, propriétaire de la Bourse de Paris. ICE, qui contrôle notamment le marché du brent, a été créé en 2000.
Un projet qui avait finalement été empêché par la Commission européenne qui craignait une trop grande concentration du marché. "En refusant de nous rencontrer, le conseil de NYSE Euronext ignore ses obligations vis-à-vis de ses actionnaires", avait alors raillé Jeffrey Sprecher, le PDG d’Intercontinental Exchange, pour signaler que l’offre conjointe avec le Nasdaq était financièrement plus attractive. Mais cette fois, l’opération devrait être conclue, puisque le conseil de NYSE Euronext l’a approuvé.
Le Liffe en ligne de mire
Créé en 2000, le groupe américain ICE a grandi très vite grâce à de nombreuses acquisitions aux Etats-Unis mais aussi par le rachat en 2001 du principal marché européen de l'énergie, l'International Petroleum Exchange (IPE) de Londres, où est coté le brent, le brut extrait de la mer du Nord, référence des cours pétroliers en Europe. Le chiffre d’affaires d’ICE était de 1,3 milliards de dollars en 2011 pour 510 millions de résultat net. Le groupe affiche une capitalisation boursière (9,3 milliards de dollars) déjà deux fois plus importante que celle de NYSE Euronext.
Le groupe propose cette fois 8,2 milliards de dollars pour son OPA (contre 11 milliards l’an dernier), un prix qui offrirait une prime de 37% aux actionnaires de NYSE-Euronext. Si l’offre se confirmait et aboutissait, sans doute au second semestre 2013, ICE mettrait enfin la main sur la pépite qu’il lorgne depuis longtemps au sein d’Euronext: le Liffe, le numéro deux européen des marchés dérivés. Les marchés primaires n’étant pas le cœur de métier d’ICE, il n’est pas à exclure que le groupe américain revende ensuite une partie de sa proie pour financer l’opération. ICE a d’ailleurs d’ores et déjà annoncé une possible mise en Bourse d’Euronext, dont dépend la Bourse de Paris, sur un marché européen continental.