Le ministre des Finances Pierre Moscovici a assuré mardi que l'endettement de la France allait "atteindre un maximum" avant de "décroître", insistant sur l'ardoise laissée par les précédentes majorités.
Le concept de maximum ne pourrait être plus simplement expliqué : avant lui, ça monte ; et après lui, ça descend. Bravo Pierre, un bon point ; au moment où la courbe de l'endettement atteint son maximum, la pente de sa tangente est nulle — comme la croissance française, par exemple, ou
les hommes politiques qui ont conduit ce pays à cette situation. Pour les alcooliques comme pour les politiciens, vivre 40 ans à crédit laisse une jolie ardoise.
Pierre Moscovici a raison : ses prédécesseurs sont responsables du niveau de la dette au moment où lui et son équipe ont pris leurs fonctions. Il serait juste et bon qu'ils soient tenus pour responsable de leur bilan. Mais cela signifie également que lui et son équipe seront responsables du bilan, notamment du niveau d'endettement qu'ils laisseront en partant ; espérons qu'il en prenne la mesure. Selon ses dires, il est tout à fait conscient de la nécessité de réduire le déficit, et il se veut rassurant.
"Ce que je reproche au papier du Figaro, ce n'est pas d'avoir cité un chiffre spectaculaire (...), c'est de laisser penser que la signature de la France serait menacée : elle ne l'est pas", a-t-il poursuivi, jugeant également que "là où Le Figaro se trompe, c'est que la France fait des réformes qui permettent justement de réduire le déficit structurel".
Si ses deux propositions sont aussi vraies l'une que l'autre, les créanciers de la France devraient être inquiets à double titre : parce que l’État n'a engagé aucune des nécessaires réformes, ayant du mal à instaurer
les mesures les plus superficielles.
Que les créanciers de la France se rassurent toutefois : la France en tant que telle n'a pas de signature. L’État français en a une,
des centaines même qui, toutes, valident unanimement des budgets en déficit et souscrivent des prêts auxquels ils ne comprennent rien. Les exceptions existent, évidemment. Mais dans la plupart des cas, du plus mafieux président de conseil général au voyou patron d'un office HLM, en passant par le plus minuscule adjoint au maire, tous engagent des dépenses et souscrivent des prêts au nom des autres. Au nom de chaque Français, plus exactement, et de pas mal d'Européens qui viendront peut-être à notre secours quand la spoliation des Français ne suffira plus.
En résumé, le taux d'endettement de la France grimperait à 95,1% du PIB, fin 2014. D'où 1950 milliards d'euros pour la dette... C'est l'origine de cette facture "théorique" d'un peu plus de 30.000 euros par Français. [...] C'est là que je me suis mis à réfléchir. Oui, les gars, ça m'arrive... Pourquoi accepterions nous les uns et les autres, et même simplement théoriquement, de valider ce calcul ?Pourquoi avalerions-nous, comme ça, le principe de cette division, une fiction politico-médiatique, du montant de la dette par TOUS les Français ?
S'il s’arrêtait là, le beau Guy serait loin d'avoir tort : rien n'engage réellement les Français quand l’État s'engage en leur nom. Mais il ne pouvait pas en rester là ; pour lui, certains ont plus de responsabilité dans le remboursement de cette dette.
Ne devrait-on pas établir une hiérarchie, une échelle ? Demander enfin vraiment plus d'argent à ceux qui en gagnent beaucoup, beaucoup plus ? Allez taper (oui taper) dans les dividendes indécents de certains actionnaires ? Du côté des "parachutes dorés" et autres avantages qu'on feint de dénoncer, sans jamais les effleurer ? Chez ceux (particuliers, entreprises) qui s'"oublient" du côté de l'impôt ? "Mon adversaire... c'est le monde de la finance" qu'il disait... Tu parles... Parce qu'il n'y a pas que des fauchés et des endettés dans notre pays !
On l'oublie trop souvent : les riches en France sont, jusque-là, épargnés par un impôt pas du tout progressif ; le capital est très peu taxé, l'entrepreneuriat toujours plus tentant ; d'immondes porcs capitalistes soufflent la fumée de leurs cigares aux visages des mendiants que l'absence totale de redistributions, subventions et largesses étatiques laisse sans aucun moyen de subsistance alors que les Français plus aisés n'avaient pas payé pour leur éducation gratuite.
Guy Birenbaum n'oublie pas que les dividendes et avantages dans le privé sont parfois indécents, mais oublie étrangement de rappeler que les hommes politiques et journalistes bénéficient d'avantages fiscaux colossaux et que, du côté de l'égalité de tous devant la loi et devant l'impôt, ils sont oubliés à leur avantage. Il lance
de petites piques aux hommes politiques, pour les taquiner en bon camarade, mais bon, il ne faudrait pas aller trop loin et cracher dans une soupe aussi bonne : les exilés fiscaux de l'intérieur ont tout intérêt à blâmer ceux de l'extérieur plutôt que risquer que soient mis en cause les avantages dont eux-mêmes bénéficient.
Heureusement, comme Pierre Moscovici le rappelle, nous n'aurons pas besoin d'en arriver là ; la dette va être progressivement remboursée. On va commencer par réduire le déficit
en 2013, pardon 2014.
Le ministre a rappelé que le déficit structurel, c'est-à-dire hors aléa de conjoncture, allait être réduit d'un point en 2014 après 1,7 en 2013. "Ce gouvernement mène une politique résolue de réduction des déficits nominaux, c'est les chiffres absolus, et les déficits structurels, ceux qui sont indépendants de la croissance", a-t-il affirmé.
Dans son édition de mardi, Le Figaro affirme que le taux d'endettement de la France devrait grimper au niveau record de 95,1 % du PIB du pays fin 2014, soit environ 1 950 milliards d'euros. Selon ses informations, le projet de loi de finances pour 2014 qui sera présenté le 25 septembre montrera qu'après avoir atteint 93,4 % du PIB en 2013, la dette de la France en représentera jusqu'à 95,1 % fin 2014, soit une ardoise de 30 000 euros par Français. Un tel plafond constituerait un record, bien supérieur au taux de 94,3 % avancé au printemps par Paris dans le programme de stabilité transmis à la Commission européenne.
Le déficit structurel, le gouvernement s'en charge. Et l'autre, celui qui monte, après tout, ce n'est pas son problème : c'est de la faute de la croissance, qui va revenir de toute façon, et du chômage, dont on va inverser la courbe. Compte tenu de la précision millimétrique des outils de mesure de la création de richesse, et de la croissance, il est évident qu'on peut calculer au dixième le déficit structurel et anticiper sa baisse, avec confiance. Tout en se trompant de 17 milliards sur le niveau d'endettement en toute décontraction.
Mais dans la mesure où la croissance ne va pas bondir et que la dépense publique ne va pas plonger, il faudra soit renoncer à la pause fiscale, soit renoncer à réduire les déficits, et très vraisemblablement aux deux : la démonstration par le gouvernement actuel de la véracité de
la courbe de Laffer vaut au moins un prix Nobel.
Les questions que chaque Français devrait se poser ne sont pas de savoir si les autres doivent payer ; cela fait 40 ans qu'à cette question, une majorité répond oui, avec les conséquences que l'on sait. En revanche, chaque Français doit se demander s'il pense que la dette engagée par l’État français l'engage, individuellement, comme garant. À moins d'avoir signé un contrat le stipulant, par exemple un contrat social, les Français n'ont pas d'engagement solidaire. Ceux qui veulent payer sont libres de le faire ; les autres sont libres de ne pas le faire.
La question qui vient ensuite, c'est de savoir comment ils peuvent éviter de payer ce qu'ils n'ont pas à payer. Nombreux sont les Français qui voudraient quitter le navire collectiviste sur lequel on les a embarqués de force ;
ils peuvent le faire. Rien ne les contraint à rester en France ; ils peuvent partir s'ils le souhaitent, et
feraient bien de préparer leur départ. La monnaie unique qu'on leur impose les rend solidaires de fait des autres et soumis aux décisions d'une banque centrale pas vraiment indépendante ;
vive les métaux précieux.
Et s'ils veulent, en plus de se mettre autant que faire se peut à l'abri, changer les choses, c'est sur le champ de bataille des idées qu'ils doivent mener la lutte. En privant l’État d'une partie de ses ressources – leur richesse – ils peuvent contribuer à faire rétrécir son périmètre pour laisser la place à l'initiative privée. Ils peuvent aussi mettre leurs ressources à profit ; leur temps, leur argent, leur effort, leur créativité peuvent contribuer à la liberté. Les libéraux croient en l'initiative privée ; ceux qui le souhaitent peuvent, par exemple, contribuer au développement et à
la diffusion des idées de Contrepoints et de ses partenaires.