mercredi 23 juin 2010
Les adieux forcés de Guillon et Porte à France Inter
L'humoriste a signé sa dernière chronique mercredi matin. Jean-Luc Hees, patron de Radio France, annonce qu'il ne remplacera pas le «petit tyran» à cette tranche. Didier Porte est également licencié de l'antenne.
«Allez Mesdames et Messieurs, dernière chronique de Stéphanie Guillon, on en profite à fond c'est la dernière !» Tel un saltimbanque alpaguant son public, l'humoriste a annoncé mercredi haut et fort son départ.
Son remerciement se tramait depuis longtemps : déjà en juin 2009, le doute planait sur la reconduite de sa pastille d'humour. Mais le sursis n'a duré qu'un an. Dans une interview au monde.fr, le patron de Radio France, Jean-Luc Hees, a définitivement déclaré Stéphane Guillon persona non grata. «Si l'humour se résume à l'insulte, je ne peux le tolérer pour les autres mais également pour moi. Quel patron d'une grande entreprise accepterait de se faire insulter par un de ses salariés sans le sanctionner ?» Guillon avait à de nombreuses reprises étrillé la politique menée par Jean-Luc Hees et Philippe Val, qu'il accusait d'être inféodés à Nicolas Sarkozy.
«Liquidation totale des humoristes»
L'audience enviable de Guillon n'a pas suffi à le rendre indéboulonnable. La sanction était au contraire indispensable pour Hees, vexé de s'être fait «cracher dessus en direct.» «Je ne m'appelle pas Raymond Domenech», a-t-il lâché dans l'interview.
Fidèle à sa ligne, Guillon qualifie la décision de «politique» et dénonce la «liquidation totale des humoristes» sur les ondes de la station. La suppression de l'interlude humoristique glissé dans la matinale d'Inter est en effet actée : «Il n'y aura pas de remplaçants», a prévenu Hees, ni de changements d'horaire. Ce mercredi matin, une deuxième tête est tombée, celle de Didier Porte, pour qui fait le billet d'humeur à charge sur Nicolas Sarkozy a marqué le début des hostilités avec la direction de la station.
Pour l'amuseur public, «ce petit dérapage sur Villepin et Sarkozy reste un prétexte.» La vraie raison selon lui est plus obscure : «Je sais que Christian Estrosi a récemment écrit à la présidence pour se plaindre d'une de mes chroniques. Je veux pas jouer les martyrs politiques mais ça me semble disproportionné. J'ai l'impression qu'on fait le ménage à deux ans des présidentielles», a-t-il commenté.
Quant à Guillon, les relations tumultueuses qu'il entretenait avec sa hiérarchie étaient un secret de polichinelle. En cause notamment, les sorties bien connues de l'agitateur radiophonique qui avaient placé la direction en porte-à-faux vis-à-vis de certains hommes politiques : la chronique sur la libido prétendument débridée de Strauss-Kahn ou le portrait au vitriol d'Eric Besson restent dans les annales de la provocation signée Guillon.
Alors que son confrère Didier Porte s'était dans un premier temps vu offrir une solution de repli au Fou du Roi, Stéphane Guillon a été radié sans jamais voir l'ombre d'une bouée de sauvetage. Et l'humoriste de clore le chapitre d'Inter la gorge serrée : «Merci à tous du fond du cœur, vous allez me manquer». Les «quatre millions d'oreilles» qui se réveillaient chaque matin avec le trublion vont peut-être aussi regretter cette tranche d'insolence.
Ireland, stung by France's World Cup denial, launches sombrero-topped fiesta over Mexico win
Ever since Thierry Henry's unpunished hand ball helped deny Ireland its spot on soccer's grandest stage, Ireland has been awaiting its moment of retribution — and is cheering every misstep as France stumbles to the brink of World Cup failure.
Thursday night's 2-0 victory by Mexico over the French inspired Dubliners to don sombreros, down tequila shots and mull whether it's possible to construct a few Henry pinatas in time for France's final group match Tuesday against the World Cup hosts, South Africa.
Even commentators for the Irish state broadcasters RTE covering the France-Mexico match got in the mood, wearing their own sombreros — and wondering aloud why Ireland hadn't managed to defeat the disorganized French during last November's infamous home-and-away playoff.
Points techniques pour les principales devises
Une nouvelle vague d'inquiétude vient ravager le secteur bancaire : Crédit Agricole a déclaré hier qu'il serait nécessaire de déprécier sa participation dans Emporiki Bank of Greece de 400 millions d'euros. En effet, selon la banque française sa succursale pourrait réaliser une perte pouvant atteindre 750 millions d'euros sur l'exercice 2010. De plus, les investisseurs ont constaté que la reprise du logement américain était au point mort, avec un indice des ventes de logements existants sorti très nettement inférieur au consensus. Un contexte de marché tendu qui s'est fait ressentir expressément sur le marché des changes : les cambistes se sont en effet tournés de nouveau vers les actifs plus sûrs. L'euro s'échange actuellement à 110,80 ¥ alors que le cross eurjpy se positionnait au-dessus des 113 ¥ deux séances auparavant.
Le yen s'est ainsi apprécié de plus de 2% face à l'euro. La monnaie unique a dévissé à 1,2245 $ pendant la séance asiatique, alors que l'euro semblait se ressaisir vers les 1.2315$ quelques heures auparavant. Le dollar effectue une troisième glissade d'affilée face au yen pour s'établir à 90.40 ¥. Le point bas de la séance se situe à 90.31 ¥.
Hier, la livre sterling aura été la devise la plus suivie par les cambistes, alors que le chancelier de l'Échiquier George Osborne prononçait son discours sur les réductions budgétaires britanniques. Fitch avait annoncé le 8 juin que le Royaume-Uni devait faire face à un défi budgétaire considérable, mais il semblerait que les dires et mesures prises par G. Osborne s'inscrivent dans une mouvance rassurante au regard du regain d'intérêt pour la livre sterling face à ses devises de contrepartie. La livre sterling a atteint un point haut hebdomadaire contre l'euro, à 0.8367 gbp.
Saxo Banque
C'est fini et mal fini ! Dans la confusion morale et technique qui aura été la marque du chaotique parcours de la France en Afrique du Sud, même l'honneur n'est pas sauf. Mais comment pouvait-il en être autrement au bout de tant d'incohérence de comportement et d'inconsistance d'un fond tactique indigent, indigne de joueurs de ce niveau et du sphinx de pacotille qui leur a servi d'entraîneur dans une compétition où même leur qualification était immorale. Cette défaite qui fait saigner nos amertumes déroule le tapis rouge pour Laurent Blanc. Mais de grâce n'en faisons pas un génie par avance et par comparaison. Sa fin bordelaise et ses propos parfois « doménéchiens » doivent inspirer la réserve.
Un but en trois matches, derniers d'une poule annoncée facile, la spirale infernale de la désillusion? Le calvaire jusqu'à l'hallali qui ne manquera pas de sonner le fiasco d'une génération bleue de mercenaires fragiles et hors de la réalité qui les entoure. Casqués d'oreillettes, murés dans un silence arrogant, ils n'ont à aucun moment entrouvert la fenêtre de l'enthousiasme et de l'espoir, jamais ils n'ont été une équipe. La France n'avait rien à faire là, elle l'a prouvé en étant absente de ses matches et en ne mouillant jamais le maillot.
Cet échec est celui de l'individualisme de vedettes qu'on a juxtaposé en leur versant des cachets et qui ne pouvant offrir un football de qualité ont cherché à exister dans le spectacle médiocre d'une mutinerie dont ils n'avaient même pas le talent. La déception est immense chez les supporteurs qui aspiraient à vibrer dans une communion collective et qui n'ont eu droit qu'au mépris de gosses trop gâtés à qui on n'a rien appris.
Que c'est loin 1998 et sa victoire black, blanc, beur. En douze années on est passé de l'espoir d'une société d'échange et de partage au triomphe de l'individualisme et du sauve-qui-peut. Peut-être cette déconfiture n'est-elle que le symptôme de la crise culturelle d'une société qui ne se reconnaît plus comme société. Qu'au moins dans un ultime sursaut de pudeur on nous épargne les déballages et les pleurnicheries tardives de la ministre. L'heure des comptes et du courage a sonné.
DANIEL RUIZ
Les Bleus, chronique d'une merde annoncée
Pour ne pas dire pire… La défaite des Bleus face à l'Afrique du Sud est en effet le résultat de plusieurs années de travail acharné venant de nombreux acteurs. En voici le récit.
D’un tocard, les meilleurs entraîneurs n’ont jamais fait un pur-sang. Et quand l’entraîneur est lui-même un canasson à bout de souffle, plus personne ne franchit les obstacles. Même les plus modestes comme celui que représentait cet après-midi les Bafana Bafana sur la pelouse du Free Stadium de Bloemfontein. La rencontre a bien failli s’intituler: et un, et deux et trois et quatre zéro… Et, somme toute, abandonner au pays hôte une sorte de passe droit vers les seizièmes de finale aurait constitué une forme de panache.
Mais même cela, les Bleus n’en ont pas été capables. De bout en bout, ils seront restés fidèles à la vision initiale laissée aux Sud-Africains dans le hall de l’aéroport de George, quelques jours avant la cérémonie d’ouverture: une escouade de morveux boudeurs, fermés, cadenassés derrières leurs baladeurs, handicapés du sourire et de la gentillesse face à un comité d’accueil chaleureux et enthousiaste.
A peu près, à la même époque, toutes les autres équipes consacraient un peu de temps à se faire aimer, qui au zoo de Johannesburg, qui sur la Table Mountain du Cap, signant ici ou là des autographes, et surtout multipliant les déclarations d’amour envers l’Afrique du Sud. Qui a entendu un seul tricolore exprimer sa satisfaction de se trouver dans un pays dit émergent, ayant payé cher, et peut être un peu trop d’ailleurs (voir la chronique de Bernard Maris ) le droit d’accueillir le deuxième plus gros événement planétaire ? Le réponse positive à cette question donne droit à un abonnement gratuit d’un an au bulletin de la Fédération française de football FFF)…
ON ne change pas une équipe qui perd
Il y a quelques années Libération avait rebaptisé un (mauvais) film de Francesco Rosi « Chronique d’une merde annoncée ». Il convient parfaitement pour résumer la lente descente aux enfers de cette équipe, amorcée après le Mondial de 2006 et surtout le fiasco de l’Euro 2008. C’est à cette époque que les cadres de la FFF élaborent la nouvelle stratégie du football tricolore : on ne change pas une équipe qui perd. C’est absurde mais c’est ainsi et il faut évidemment se demander pourquoi.
Dans le cas de Raymond Domenech, ce n’est pas très difficile à comprendre : la garantie d’un salaire annuel plus que confortable même si inférieur à celui des entraîneurs de grands clubs. Mais pas que. Dans l’exercice de ses fonctions l’ancien défenseur lyonnais est un vindicatif. Avec les journalistes du moins, ses meilleurs ennemis depuis toujours. Durer, coûte que coûte, aura été son bras d’honneur à la presse. Et à ceux qui ont toujours douté de ses capacités. Avec ma foi quelque raison. On évoque souvent sa faiblesse technique, la pauvreté de ses schémas tactiques : ils ne sont que la conséquence de son impuissance humaine à créer ce qu’il est convenu d’appeler banalement un « esprit d’équipe ».
Aimé Jacquet y était arrivé. Avec, il est vrai, pour cadres de l’équipe, des joueurs matures, pas des saints ni des philanthropes, mais encore un tantinet sensibles aux notions même très diffuses de « respect », de « hiérarchie », de « collectif ». Avec le départ des Deschamps, des Blanc et de quelques autres, Raymond Domenech s’est retrouvé assez vite à la tête d’une collection d’individus plus que d’un collectif, des garçons roulant avant tout pour eux-mêmes, et leur « clan », d’autant plus fascinés par l’argent facile et le bling-bling que personne au plus haut niveau de la FFF n’a jamais songé à le leur reprocher. Avec eux, Domenech s’est révélé un faux dur, alternant des mesures vexatoires pas toujours bien inspirées avant de céder devant les menaces des uns, les caprices des autres, les coup de gueules et les diktats. C’est ce qui s’est passé tout au long de cette triste campagne d’hiver austral. Un exemple parmi tant d’autres mais un des plus significatifs : Ribery voulait la peau de Gourcuff, trop beau, trop bien éduqué, à son goût et aussi celui d’Anelka, comme l’a évoqué dans ces mêmes colonnes David Desgouilles. Trop « blanc » aussi peut-être. Domenech l’a lui a accordée. Ce qui n’a pas empêché même Ribery d’agresser le meneur de jeu bordelais dans l’avion qui les ramenait de l’infamante défaite contre les Mexicains à Polokwane. Le rachat bien tardif du coach n’aura même pas permis à Gourcuff de monter son talent à Bloemfontein, comme si son coup de coude involontaire synonyme d’expulsion, signait l’absolue déconfiture de tout ce qui peut sortir de la maudite marmite bleue.
Tout le reste aura été à l’avenant. Jusqu’aux manœuvres de Zinedine Zidane pour placer ses potes et humilier un entraîneur qu’il n’a jamais aimé. Voilà quatre ans que l’ancien dieu du football français a quitté l’équipe nationale pour se consacrer pleinement à sa grande passion : la pub et l’argent. Or c’est bien la seule valeur que la plupart des joueurs envoyés en Afrique du sud auront partagée.
Le temps des (règlements de) comptes arrive. Problème : qui aura la légitimité pour préparer le futur. Une grande partie de la FFF devrait normalement dégager si l’on se trouvait dans un pays ayant encore le sens du bien public. Il faudra aussi s’attaquer au corporatisme effréné de la direction technique nationale, d’un Aimé Jacquet qui aura usé de toute son influence et de ses réseaux en faveur de son ancien joueur et élève Domenech. Quitte à le soutenir presque jusqu’au bout dans l’erreur malgré la certitude d’une inéluctable catastrophe.
Il faudrait aussi mener un procès politique et moral sur l’état d’une société au bord de la rupture éthique si l’on veut réellement saisir la nature de la triste danse offerte par les Bleus en Afrique du Sud. A l’heure de l’affaire Woerth, et de toutes celles qui ont précédé, c’est un peu compliqué…
« Ça ne se fait pas. » L’expression était couramment employée autrefois. Elle paraît aujourd’hui désuète. Il faudrait pourtant en redécouvrir la sagesse. Que signifie-t-elle ? Il y a des choses qui sont légales mais qui ne sont pas appropriées. Parce qu’elles peuvent choquer, parce qu’elles peuvent faire naître un soupçon de malhonnêteté.
L’actualité politique, ces derniers temps, en a donné plusieurs exemples. Le cumul entre une rémunération publique et une retraite de parlementaire, dans le cas de Christine Boutin. Des frais hôteliers ou cigariers pour Rama Yade ou Christian Blanc. Et désormais, s’agissant d’Éric Woerth et son épouse, Florence Woerth, la question qu’a pu poser, jusqu’à une date récente, la coexistence entre leurs activités respectives de ministre de tutelle de l’administration fiscale et de gestionnaire de fortune.
Le problème est que la frontière entre ce qui est convenable et ce qui ne l’est pas est difficile à fixer. Il n’y a que des cas d’espèce. Cette frontière peut changer avec le temps, les circonstances. Elle ne se situe pas tout à fait au même endroit selon les personnes. Si le cas de Christine Boutin a choqué, c’est parce que son cumul de rémunérations est apparu en contradiction avec son engagement marqué en faveur des catégories sociales les plus vulnérables. Rama Yade, elle, avait précédemment stigmatisé les dépenses d’hébergement de l’équipe de France de football en Afrique du Sud. Éric Woerth a marqué son passage à Bercy par un discours rigoureux à l’égard de l’évasion fiscale.
Le cas de Florence et Éric Woerth est certainement plus cornélien que d’autres. Florence Woerth est une professionnelle reconnue de la gestion de capitaux. Devait-elle sacrifier sa carrière à celle de son conjoint ? Il y avait là un véritable cas de conscience. Mais encore faut-il souligner que la question se posait tout autant à l’autre membre du couple. Faisons crédit à l’un et à l’autre de leur complète honnêteté. Mais, à l’évidence, ils n’ont pas pris une bonne décision car ils n’ont pas perçu que « ça ne se fait pas ».
Ce n'est que du foot. Du très mauvais football joué par de mauvais garçons, conduits par un mélange d'imbéciles, d'incompétents et d'irresponsables. Mais que du football... Déjà, certains veulent confondre les deux Nicolas, Sarkozy et Anelka, pour ouvrir le procès de la France bling-bling. C'est donner beaucoup d'importance à ces tristes pantins, que de juger l'état de la France à l'aune de leurs performances. Souvenons-nous aussi de 1998, de l'euphorie de la France « black-blanc-beur », qui ne dura pas plus d'un été. Alors n'en faisons pas trop : nos Bleus ont été nuls et archi-nuls, nous en sommes tristes et un peu humiliés, mais un triomphe n'aurait pas donné de boulot aux chômeurs. Dès aujourd'hui, des milliers de gamins vont retaper dans un ballon, tandis que leurs parents s'inquiéteront pour leurs retraites. Et puis la Coupe du monde continue, avec de vraies équipes…
C'était quoi, au juste, ce truc bizarre qu'on regardait à la télé hier après-midi ? Vu de loin, c'est vrai, ça ressemblait un peu à un match de foot. Il y avait un terrain vert avec des traits blancs. Des personnages grouillants assemblés dans ce qui pouvait, à la rigueur, passer pour des tribunes. Mais c'est tout. Sans doute, aurait-il fallu une mise en garde comme au cinéma. Toute similitude avec une activité connue ne peut être que fortuite. Non, ce qui se déroulait là devant nos yeux appartenait à un autre univers. Bien malin qui aurait pu le définir. Certes, cela revêtait bien des allures de sport. Mais depuis les épisodes aussi affligeants que grotesques des jours précédents, les repères habituels n'existaient plus. C'était quelque chose comme une vulgaire parodie à laquelle nous assistions. Avec, face à l'équipe bien réelle des "Bafana Bafana", onze, puis bientôt dix intermittents d'un mauvais spectacle payés abyssalement plus cher que des chirurgiens, des infirmières, des gens "utiles". Certains commentateurs employaient encore les mots "compétition" et "honneur". Autant de notions et de vocables qui sonnaient faux. L'équipe de Raymond Domenech, cette bande à Bonnot d'un ballon qui ne tourne pas rond, gesticulait à vide. Pas tellement à cause des actions menées. Car il y a tout de même eu, ultime sursaut, ce but de Malouda à la soixante-dixième minute. Mais parce que, de toute façon, le cœur n'y était plus. Ni celui des joueurs déshumanisés. Ni le nôtre, meurtri, abusé, shooté. C'est fini. On ne nous y reprendra plus avec le mirage de cet opium du peuple qui soudain nous étouffe. Combien de temps tiendra cette résolution ? Le cyclisme a pu renaître des cendres du dopage. Il n'est pas dit que demain le foot ne tente pas de se refaire une virginité. Qu'importe, le seul qui nous intéresse, ne se pratique plus désormais que dans les cours de récréation. Avec les tournois de copains, les vignettes Panini et l'unique bleu qui vaille. Celui de nos enfances éternelles, à jamais championnes du monde de la vraie vie.
Le politiquement correct a ses limites : les icônes de la France « black, blanc, beur » donneraient dans un communautarisme larvé, dépeint sans trop d’aménité par une presse sportive que l’on peut difficilement taxer de racisme ; chez les « Bleus », il y aurait les « Blacks » et les autres, trop « blancs » ou bien élevés, pour faire face aux caïds. Les « beurs » ? Domenech les aurait tous virés pour faire plaisir aux premiers ! Au-delà des fleurs de rhétorique contre nature que l’on se jette au museau dans les vestiaires, la description publique d’un tel contexte est franchement haïssable. Le « buzz » a du coup un peu occulté « l’appel du 19 juin » de ce grand flandrin de Villepin. Lui, qui dans sa détestation pour Nicolas Sarkozy use de tous les artifices de la démagogie pour se forger, à l’antique, un destin de tribun de la plèbe ; allant même jusqu’à draguer « les banlieues » dans l’espoir de capitaliser sur leur détestation supposée pour l’homme du « karcher »…
Villepin a exhibé des « beurs », des « blacks » et des « blancs » lors de son meeting, halle Freyssinet, histoire de montrer à quel point il était « peuple » et non point « people ». Au lendemain de son show, plus de 8.000 Parisiens d’origine asiatique, résidents du quartier de Belleville, manifestaient pour se plaindre de l’insécurité. Sur RFI, un témoin déclarait : « Il y a trop de gens qui sont agressés par des Arabes… ». Libération a décrit des incidents « entre une cinquantaine de jeunes manifestants et de jeunes extérieurs au cortège, d’origine maghrébine et africaine ». On n’y a pas vu de Villepin Solidaire, quant à la République, elle était représentée par les CRS… Communautarisme, superstitions et discriminations, positives ou chromatiques, sont la négation de la République.
Quelle différence y a-t-il entre un Christian Blanc qui se fait offrir 12 000 euros de cigares par l’État et Franck Ribéry qui paie 1 500 euros pour qu’on s’occupe de son cigare ? Entre des ministres qui affrètent des avions privés pour convenances personnelles et des joueurs qui affrètent des jets pour aller faire la bringue ? Entre un chef de l’État qui dit « casse-toi pauvre con » à un citoyen et un joueur qui dit « sale fils de pute, va te faire enculer » à son entraîneur ? Pas une grande différence, serait-on tenté de dire, ils représentent tous la France. J’ajouterai une nuance, de taille après tout : ce que fait le gouvernement est encore plus grave, car il le fait avec notre pognon.
C'était hélas écrit ! L'équipe de France a pris ses cliques, et quelques claques de plus, avant de préparer son retour, toute honte bue. Mais le feuilleton n'est pas fini. L'heure est aux explications. On veut savoir ce qui s'est passé à Knysna ce week-end. Pour l'instant on ne connaît qu'une partie du psychodrame. Or une vérité partielle n'est pas la vérité. Il faudra toutefois que les révélations attendues soient de taille XXL pour absoudre les joueurs de l'accusation de sabotage, voire de crime contre la nation ! En ce moment, taper à coups de gourdin sur les joueurs de l'équipe de France est ce qu'il y a de plus facile. Tout le monde s'y met, ça occupe l'espace et ça défoule : autant il est grisant de participer à la victoire, autant personne ne veut épouser la défaite ! Quelle que soit la lumière qui sera jetée sur cette triste période, il est probable que la vérité sera finalement toute bête. Cet échec est d'abord une histoire de stars millionnaires de 24 ou 25 ans, une histoire de gamins grandis trop vite, loin des vrais problèmes. Des jeunes à l'ego démesuré rassemblés pendant des mois dans un environnement claustrophobique. Luxueux mais claustrophobique. Où chaque parole, chaque attitude prenait des proportions exagérées. Les Bleus ont perdu contact avec la réalité. Le foot a parfois des airs de Loft Story. Une histoire de manipulation psychologique. C'est avec Raymond Domenech, et déjà un peu Roger Lemerre, que l'équipe de France s'est retranchée dans ce monde parallèle et paranoïaque. Un monde où les joueurs sont intouchables. Où les gardes du corps et les chargés de presse sont érigés en remparts. Où chacun se prend pour le vrai gardien du temple. Où les agents et "conseils" en tout genre dictent les discours à tenir par textos interposés. De l'artificiel en barre vendu pour de l'or en barre. Le grand ménage est indispensable. Il faut tout reconstruire, revenir aux fondamentaux. En arrivant à la tête de la sélection, Laurent Blanc et le probable successeur de Jean-Pierre Escalettes, lequel n'a guère d'autre choix que de démissionner, auront un premier geste tout simple à faire : ouvrir la fenêtre. Car le grand air est la meilleure des médications pour redonner des couleurs à un groupe qui, comme l'équipe de France, s'est évanoui.
Le calendrier était idéal : Éric Woerth, que certains imaginent déjà à Matignon, dévoilerait la réforme des retraites et son cortège de sacrifices après la victoire des Bleus sur cette modeste équipe mexicaine. Le gouvernement l'adopterait en Conseil des ministres, la veille du 14 juillet et des départs en vacances. Une commission parlementaire, fermée à la presse, en fixerait les détails au coeur de l'été. Le Parlement en débattrait juste avant que la France ne prenne, à l'automne, la prestigieuse présidence du G20...
Patatras ! Le naufrage d'une équipe de football, aux salaires indécents, ne divertit plus la mauvaise humeur des Français. L'opinion, que les sondages disaient ouverte à la réforme, refuse le report de l'âge légal à 62 ans. Les vuvuzelas des syndicatsréunis menacent d'envahir la rue. L'opposition promet de fairedurer le plaisir parlementaire dans l'espoir d'une rentrée chaude.
Bref, la France n'est plus tout à fait le pays exemplaire qui anticipe, dribble les problèmes, met l'adversaire hors-jeu, domine le jeu européen. Les mau-vaises nouvelles ayant pour habitude de voler en escadrille, voici que les ministres multiplient les gaffes.
Rama Yade, donneuse de leçon, trébuche sur le seuil doré de sa chambre d'hôtel en Afrique du Sud. Christian Blanc fait payer, par milliers d'euros, ses cigares par le ministère de la Région capitale. Christine Boutin obtient une consolation, à durée très déterminée, de 9 500 € par mois. Quelques ministres en prennent à leur aise dans les appartements de la République. D'autres cumulent, sans état d'âme, leurs émoluments avec une retraite.
Jusqu'au très sérieux Éric Woerth, ex-ministre du Budget devenu l'avocat de la délicate réforme des retraites, qui n'a pas anticipé que la gestion fiscale, par son épouse, de la première fortune de France, pourrait déclencher un orage politique.
Quel rapport entre le football, les ministres et les retraites ? Très simple : au moment où les Français, surtout les plus modestes, surtout ceux qui ont travaillé tôt et dur, doivent se serrer la ceinture pour sauver les retraites, leurs plus prestigieux représentants multiplient les signes d'appartenance à l'équipe des privilégiés.
Les Bleus, Rama Yade, Christine Boutin ou Éric Woerth, dans des registres différents, semblent vivre dans une bulle qui les rend sourds à l'impact de leurs messages sur une opinion très réceptive. On trouvera toutes les bonnes raisons du monde, tous les arguments pour expliquer tel choix, pour plaider l'intégrité, pour s'en prendre à ceux qui hurlent avec les loups. C'est oublier que le propre de ceux, politiques ou sportifs, qui représentent la France, est de respecter un devoir d'exemplarité si l'on veut empêcher les amalgames, les généralisations et les affirmations sans preuve.
En ces temps difficiles, il faut décupler de précaution, de transparence et d'équité. Faute de quoi, on s'expose aux pires dérives. Ça commence par des lynchages verbaux. Ça continue avec un oubli des règles dont s'exonèrent ceux qui en sont normalement les gardiens. Ça finit par l'affaiblissement général de notre collectif, par le rejet de l'élite démocratique dont tout système a besoin. Cette élite dont la défaillance, en sport comme en politique, est la cause de tous les Waterloo.
(*) politique.blogs.ouest-france.fr