Il n’était que 27 e dans le rang protocolaire du gouvernement. Pas un poids lourd assurément puisque pour prix de sa désertion du camp Villepin, il n’avait obtenu, en mars 2010, qu’un strapontin, et pas le plus glamour ni le plus enviable.
D’ordinaire, reconnaissons-le, le destin d’un modeste secrétaire d’État à la Fonction publique n’empêche pas la nation de dormir. Celui-là s’écrivait «en deuxième division!» raillent volontiers, et fort aimablement ses anciens collègues pour minimiser la portée du congédiement.
Mais la «démission» de Georges Tron a bien plus de poids que le portefeuille qu’il détenait. Elle s’est même déjà installée dans le top 5 des scandales. Ceux dont on se rappelle longtemps après quand l’actualité a fini par tout recouvrir du limon de l’histoire immédiate.
Il y a bien sûr le fond de décor - celui, inédit, de l’affaire Strauss-Kahn - et puis il y a cette extravagante histoire de fétichisme des pieds et de réflexologie plantaire débridée qui aurait dégénéré. Un scénario tellement invraisemblable qu’on n’aurait jamais imaginé l’inventer.
Franchement cette sixième démission d’un ministre en exercice en un an pourrait faire rire si aucune victime ne prétendait avoir souffert des assauts du démissionnaire. Elle fait tout de même désordre car elle crée un vrai malaise dans une société qui vit mal le déficit d’exemplarité de ses élites politiques, exaspérée qu’elle est par le faites-ce-que-je-dis-pas-ce-que-je-fais.
La République irréprochable promise aux Français en 2007 tord son béret entre honte et indignité devant ses propres manquements. A ce rythme, dans quel état arrivera la crédibilité du personnel politique quand s’élancera la campagne ?
On en tremble d’avance, car le feuilleton Strauss-Kahn a, comme il fallait s’y attendre, ouvert la boîte de Pandore.
Il y a fort à parier désormais que d’autres épisodes de ce genre, restés bien enfouis pendant des années, vont maintenant remonter à la surface, délivrés par une parole libérée.
Les affaires Tron et DSK ont ceci de commun que l’une et l’autre ne sont pas des histoires de sexe mais de harcèlement et d’agression.
Pas des histoires de bagatelles clandestines sur lesquelles la presse doit fermer les yeux si elles restent dans le cadre légal, mais de vrais crimes sévèrement punis par la loi. Pas de pudibonderie mais de respect de la personne humaine totalement bafoué par la désinvolture des puissants. On y retrouve, dans la voix de l’accusation, le même abus de pouvoir de celui qui détient l’autorité et le prestige. On y retrouve aussi la même passivité des partis, au courant de comportements limite, et même plus que limite. Ils ont laissé faire par commodité, par indifférence au nom d’un droit à la vie privée qui n’était que le paravent d’une coupable irresponsabilité.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire