Il y a bien longtemps que les notes du clairon qui sonna l’arrêt des combats se sont perdues dans le vent de l’histoire. Verdun 1916 ou Marignan 1515 se confondent dans les pages jaunies de notre mémoire collective. Une mémoire bien mal en point, à en juger par les sondages qui témoignent d’une méconnaissance grandissante de l’histoire commune, ciment d’une nation.
Pourtant, à en croire les discours officiels, le souvenir est une grande cause nationale. Tourisme mémoriel, lieux ou devoirs de mémoire : toute cette recherche de nos souvenirs perdus est prétexte à colloque. On croirait la France atteinte d’une forme désespérée amnésie nationale, à deux ans de la célébration du centenaire de la Première Guerre mondiale. Les savants multiplient, en vain, les ordonnances : les méninges de Marianne sont en charpie.
Cent ans, c’est si loin, à l’heure de la quête désespérée de la jeunesse éternelle. Les combattants du Vieil-Armand ou du Chemin des Dames ont perdu la leur pour gagner l’éternité des monuments de granit. Ils avaient 18 ou 20 ans quand ils sont tombés au champ d’honneur. Ils auraient aimé vivre. La folie qui a saisi l’Europe en a décidé autrement.
Peut-être aurait-il fallu, à côté des noms de ceux qui furent fauchés par centaines de milliers, ajouter leur âge. Frantz 20 ans, Jules 18 ans : ils avaient l’âge de ceux que leur sacrifice indiffère. Avant d’être alignés comme à la parade dans les cimetières militaires ou mêlés anonymement aux racines des forêts d’Argonne, ils ont aimé, cru qu’ils reviendraient dans leur village pour vieillir tranquillement. Le sort des armes en a décidé autrement.
Le 11 Novembre n’est pas un banal jour férié. C’est l’anniversaire d’une génération à qui on a volé sa jeunesse et qui mérite, au moins, une pensée.
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