Pour éviter les querelles d'egos, Jean-François Copé installe un
comité de campagne élargi à toutes les sensibilités. Et renvoie le débat
de la ligne politique à l'après-législatives. Un attelage subtil et
précaire.
C'est fou le nombre de synonymes au mot "unité" que l'on peut trouver un
lendemain de défaite présidentielle : "rassemblement", "collégialité",
"union", "ligne commune". Sans oublier la formule : "Ce qui nous
rassemble est infiniment plus important que ce qui nous divise." Il faut
dire que, pour en dénicher autant, l'UMP avait réuni toutes ses têtes
pensantes lors d'un bureau politique exceptionnel. Des dizaines de
parlementaires, de jeunes loups (Wauquiez, Apparu, Le Maire,...),
d'anciennes gloires de la droite (Balladur, Toubon,...) et des stars de
maintenant (Juppé, Fillon,...). Avec tout cela, difficile de ne pas
croire que le parti est effectivement complètement uni pour attaquer la
bataille législative.
Pourtant, le discours officiel, bâti dans le béton armé, montre déjà
quelques craquelures. Deux questions interrogent les cadres de
l'ancienne majorité, et manque de chance, elles touchent aux deux points
essentiels d'une campagne : quelle ligne politique suit-on et qui mène
la campagne?
Un chef, quelques chefs ou plein de chefs ?
Entouré de François Fillon à sa droite, et de Jean-Pierre Raffarin à sa gauche, Jean-François Copé a placé entre parenthèses la réponse à la seconde question. "Pas de querelle d'egos" jusqu'aux législatives. Il faut tenir cinq semaines. Pour contenter toutes les sensibilités, le patron du parti a donc décidé de mettre en place le plus rapidement possible -jeudi matin- un "comité stratégique de campagne". Une quarantaine de membres, dont les anciens Premiers ministres, les anciens numéros 1 de l'UMP, le président de l'Assemblée, l'ancien président du Sénat, les secrétaires généraux adjoints, les délégués généraux,...C'est donc "une équipe collégiale" qui mènera la campagne, comme s'en sont félicités François Baroin, Xavier Bertrand ou Eric Ciotti. Reste à définir l'étendue de la collégialité. Pour Laurent Wauquiez, "il n'y aura pas de guerre des chefs, tout simplement parce qu'il n'y a pas de chef". François Fillon voit, lui, une poignée de "rassembleurs", dont Copé, Juppé et Raffarin (et certainement lui-même). Enfin, Christian Estrosi entretient le flou, partagé entre son ancienne aversion pour le leader de l'UMP et sa récente réconciliation avec ce dernier: "Il faut respecter la légitimité de la direction et la diversité des courants de pensée." Hors catégorie, on ajoutera Yves Albarello, député de Seine-et-Marne, pour qui les choses sont très claires: "Le chef, c'est Copé."
Une ligne politique, quelques lignes politiques ou plein de lignes politiques?
Quant à la ligne politique, la situation est un peu plus limpide, ce
qui ne veut pas dire qu'elle est logique. "On ne va pas changer de ligne
parce que nous avons connu un échec", clame Jean Leonetti. C'est vrai
pourquoi changer une stratégie qui perd. En réalité, l'UMP n'a surtout pas le temps de tout revoir. "Pour l'instant, nous avons un combat à mener dans un mois", résume Benoist Apparu. Et puis, les législatives permettent à chacun de prendre ses distances avec des éléments du programme UMP, disons, gênants. "C'est un scrutin moins binaire, où l'on peut s'exprimer de manière plus diverse", juge Michel Piron, député du Maine-et-Loire. "Les problèmes sont différents entre la Bretagne et la région parisienne. La ligne politique est la même pour toute la France, mais pas les préoccupations", explique le radical Jean Leonetti.
Là encore, Jean-François Copé a tout prévu. Après le comité de campagne élargi à toutes les sensibilités, il propose un "cadre", qui s'adaptera aux "plates-formes" programmatiques de chaque candidat. Un cadre, qui tient en trois points : un pilier régalien (sécurité et immigration), un pilier économique ("courage et pragmatisme") et enfin, un pilier social ("générosité et responsabilité"). Libre au candidat ensuite d'assaisonner comme il le souhaite.
Reste à faire tourner cette complexe machine. "Nous allons mettre tout cela en forme", avance Copé. Tic-tac. Tic-tac. Il reste trente-trois jours avant que les Français ne retournent dans l'isoloir.
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