dimanche 27 mai 2012
Confiance ou réprobation
La probable et prochaine suppression des tribunaux correctionnels pour
mineurs suscite une vive polémique. Ils avaient été créés par la
précédente majorité où l'on estimait que les jeunes d'aujourd'hui sont
fort différents de ceux de l'après-guerre. On les estime plus violents,
moins raisonnables, etc. Tout cela est peut-être vrai, encore
faudrait-il se livrer à des études plus poussées que de simples
impressions pour connaître la véritable réalité...
C'est en tout cas l'ordonnance de 1945 qui avait été remise en cause
sur le traitement des jeunes délinquants par la justice. Ce point de
l'ordonnance avait une origine bien particulière. L'ancien
vice-président du Conseil et garde des Sceaux, Pierre-Henri Teitgen,
visitant une prison juste après la guerre, alors que lui-même avait été
incarcéré par les nazis, avait exigé que soit ouverte une porte
soigneusement close, trouvée sur son passage. Sa surprise fut grande de
découvrir alors de très jeunes adolescents entassés dans un lieu
totalement insalubre. On avait voulu dissimuler ce fait au ministre. Son
indignation le poussa à faire modifier totalement les règles concernant
la manière dont étaient jugés et condamnés les adolescents.
Il faut se souvenir de ce qu'étaient alors ce que l'on appelait les
maisons de correction. Il faut se souvenir des révoltes violentes qui
les ébranlaient de loin en loin, comme ce fut le cas pour celle de
Belle-Ile, en août 1934, reconnue ensuite comme un véritable bagne. Les
explications et les révélations du journal L'Ouest-Eclair (1)
font frémir. Nous n'en sommes plus là, heureusement, mais croit-on que
la répression pure et simple puisse réellement impressionner les jeunes
et les faire « rentrer dans l'ordre » ? On sait, au contraire, que souvent elle ne fait qu'augmenter la violence en retour.
Mieux encadrer, créer de nouveaux liens
Pour autant, on ne peut éluder les problèmes posés en ce domaine. Ils
sont difficiles. Autrefois, le service militaire était une étape dans
la vie favorisant l'insertion des jeunes dans la société. Ils
découvraient alors, s'ils ne l'avaient découvert plus tôt, ce qu'était
une organisation sociale, une autorité, même si le service militaire
présentait aussi bien des inconvénients.
On s'aperçoit qu'aujourd'hui il existe une sorte de vide : d'abord,
bien sûr, le manque de travail qui rend l'insertion beaucoup plus
difficile, mais aussi l'insuffisance de l'encadrement des jeunes
délinquants qui permettrait de moins les sanctionner et de mieux les
éduquer ou rééduquer. Nous connaissons tous des rétablissements
spectaculaires de jeunes après tel stage, tel voyage à l'étranger, telle
participation à des travaux d'intérêt général, etc. Voilà ce qu'il faut
multiplier, comme il faut multiplier aussi les centres éducatifs fermés
pour mineurs délinquants. S'il y avait eu une place à Nantes, un garçon
de 13 ans, récidiviste, ne serait pas mort en se jetant dans la Loire
pour échapper à la police.
Si, donc, on en revient à un système moins répressif, il faut
impérativement développer les capacités éducatives en personnels
compétents et en moyens. On sait le prix d'un tel effort, mais cela
coûtera moins cher que de voir se multiplier les désastreuses dérives.
Ainsi, des liens nouveaux pourront être recréés entre les jeunes et
cette société qu'ils méconnaissent ou rejettent et qui, parfois, hélas,
leur renvoie mépris et réprobation.
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