Les exploitants forestiers l'adorent, les chercheurs de champignons le détestent : le douglas. Sous ce sapin, devenu le roi des forêts limousines, impossible ou presque de trouver du cèpe.
Laurent Cipolat, grossiste en champignons du côté de Neuvic, en haute Corrèze, ne s'en cache pas : il n'aime pas particulièrement le douglas. Ce sapin, originaire du Canada, qui, depuis la tempête de 1999, a investi massivement les forêts limousines.
« Si on continue comme ça, le cèpe va disparaître, prophétise-t-il. Ce qui a fait le cèpe en Corrèze, c'est l'épicéa et rien d'autre ». Le grossiste a vite fait ses calculs. « Sous des épicéas, vous avez cinq fois plus de cèpes que sous les hêtres. Sous les douglas, c'est très simple : il n'y a rien ».
Le problème est d'ordre génétique. Alors que le cèpe file le parfait amour avec l'épicéa, il refuse toujours de nouer la moindre relation avec le sapin américain. « La mycorhize ne se fait pas, constate Michel Ardiller, président de la Société mycologique du Limousin. La mycorhize, c'est la symbiose entre le champignon et les racines de l'arbre. Pour qu'il y ait reproduction, il faut qu'il y ait association ».
"Y a pas photo"
Quand le mycologue parle biodiversité, l'exploitant forestier répond rentabilité. Bernard Tissandier, propriétaire et exploitant basé à Faux-Mazuras, en Creuse, le dit tout net. « La cueillette des champignons », ce n'est pas son problème.
Cet adepte du douglas rappelle que la forêt limousine est avant tout « une forêt de production ». « Il faut savoir que l'épicéa n'est pas un arbre qu'on peut utiliser pour une charpente même si certains le font. Avec le douglas, on a un meilleur rapport qualité\prix. Il n'y a pas photo. » (...)
Fataliste, Laurent Cipolat n'hésite pas à se tourner vers d'autres marchés. « On a fait venir du cèpe des Vosges et des Ardennes où il y a eu une grosse pousse. S'il y a de moins en moins de champignons, j'irai me fournir à l'étranger. Pour l'instant, la Corrèze fait encore référence en matière de cèpe. Dans vingt ans, ce n'est pas sûr. »
Avec la Creuse et la Corrèze, la Haute-Loire est l’un des départements les plus productifs en cèpes. Son atout : disposer d’une forêt composée à plus de 75 % de résineux.
jeudi 23 septembre 2010
Les cèpes menacés par le douglas, roi des forêts
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