TOUT EST DIT

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dimanche 29 avril 2012

Le trou noir de la campagne


Plutôt que d'évoquer les sujets qui font mal, on a préféré, pour l'instant, celui qui fait peur : la présence persistante du Front national.
Avant le premier tour, la planète tournait autour de Jean-Luc Mélenchon avant le second, elle tourne autour de Marine Le Pen, tandis que les enjeux politiques de cette élection disparaissent dans un trou noir.
Passant de 5 à 15 % dans les sondages, l'ancien socialiste était devenu le champion de la « vraie gauche », celui qui terrasserait l'hydre lepéniste à deux têtes. On louait dans les salons et les bureaux son talent d'orateur, sa vision politique. Il réconciliait les milieux populaires avec la gauche. Il faisait revenir au bercail la classe ouvrière, en rangs serrés derrière le drapeau rouge. La République sociale retrouvait ses enfants.
On vit au soir du premier tour qu'il n'en était rien. Le candidat du Front de gauche faisait certes un beau score, revigorant l'électorat communiste, radicalisant une frange de l'électorat socialiste, mais aussi en siphonnant les voix des deux - faibles - candidats d'extrême gauche, et celle de la très décalée candidate écologiste. Le total des voix de la gauche de la gauche ne battait pas de record.
Il reste que Jean-Luc Mélenchon entretenait le buzz et la rumeur, à défaut de bruit et de fureur.
L'opinion, complice des médias et des autres candidats, préférait les accents nostalgiques du chantre d'une gauche radicale à l'examen, moins lyrique et plus ingrat, des enjeux du prochain quinquennat.
Le phénomène Mélenchon arrangeait un Nicolas Sarkozy comptant sur lui pour réduire le score de son adversaire principal au premier tour, mais aussi un François Hollande favori des sondages qui ne voulait surtout pas dissiper le charme, ni promettre plus qu'il n'en fallait.
On n'a donc pas parlé, ou du bout des lèvres, de la difficile équation que devra résoudre le futur président, à savoir réduire les dépenses publiques pour ne pas creuser la dette, mais sans faire sombrer le pays dans la récession ni des efforts à produire pour restaurer la compétitivité de nos entreprises sans laquelle la croissance ne reviendra pas.
On a refusé d'examiner par quelles idées neuves on pourrait réduire le chômage de masse et les inégalités entre générations. On a quasiment passé sous silence la situation, piteuse, de notre balance commerciale.
On n'a parlé de l'Europe que pour la caricaturer. On a évoqué la mondialisation, au pire comme le mal absolu de l'époque, au mieux comme un mal nécessaire.
On ne s'est pas posé la question du rôle de la France en Europe et de l'Europe dans le monde.
C'était avant le premier tour, et on a récidivé juste avant le second.
Plutôt que d'évoquer les sujets qui font mal, on a préféré, pour l'instant, celui qui fait peur : la présence persistante du Front national dans le paysage politique français. 

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