Nos partenaires européens qui observent la campagne électorale française sont médusés. L’hebdomadaire britannique The Economist fait
sa couverture sur une France en plein déni de réalité et parle de la
campagne la plus frivole des pays occidentaux. Force est de donner
raison aux critiques qui nous viennent de toutes parts.
Vous avez, nous disent les observateurs étrangers, deux problèmes
majeurs étroitement liés : un État hypertrophié qui gonfle sa dette et
une économie en perte de compétitivité qui creuse son déficit extérieur.
Regardez-les donc en face !
À gauche, on ignore souverainement ces sujets : la dette, Jean-Luc
Mélenchon, dans sa logique révolutionnaire, ne veut pas la payer, tout
simplement. François Hollande, lui, recule d’un an, à 2017, l’échéance
du retour de nos finances à l’équilibre. Son programme déborde de
dépenses nouvelles non financées comme le recrutement de 60 000
enseignants, les contrats d’avenir. Preuve qu’il sait très bien que rien
ne sera fait pour rétablir l’équilibre des finances publiques, le
candidat socialiste annonce déjà qu’il renégociera avec Angela Merkel le
pacte budgétaire qui nous y contraint.
Sur le terrain de la compétitivité, condition de la
croissance, le déni est encore plus patent : le sujet n’est même pas
abordé. Mélenchon promet, alors que toutes les statistiques montrent que
le coût du travail est plus élevé en France qu’en Allemagne,
d’augmenter le smic, prenant ainsi le risque de voir disparaître des
millions d’emplois peu qualifiés. Hollande, lui, menace de taxer à 75 %
les plus gros revenus et de rétablir l’ancien barème de l’ISF,
évidemment sans le bouclier fiscal. Ce sont ainsi les entrepreneurs qui
réussissent, les vrais créateurs d’emplois, qui quitteront le pays.
Deux facteurs contribuent à la compétitivité : le coût et la quantité
de travail. Les coûts seront grevés par des impôts et des charges
sociales nouveaux tandis que la quantité de travail restera contingentée
: retour du droit au départ à la retraite à 60 ans, maintien des 35
heures et suppression des allégements de charges sur les heures
supplémentaires. Du travail en moins et de l’argent en moins, c’est ce
que nous annoncent Jean-Luc Mélenchon et François Hollande. Est-ce comme
cela que la gauche espère créer davantage de richesses à taxer ?
Pendant ce temps, autour de nous, les Britanniques abaissent la
tranche maximale d’imposition à 45 %. Leur premier ministre, David
Cameron, ne cache pas son objectif : attirer les talents que la France
aura découragés. Les Italiens, gouvernés par Mario Monti, réforment leur
économie à grande vitesse tandis que les Espagnols, conduits par
Mariano Rajoy, serrent les dépenses et bouleversent leur législation du
travail pour permettre aux entreprises de licencier plus facilement et
aux jeunes de s’insérer plus vite dans la vie active.
Même les Grecs, au fond du gouffre, comprennent qu’il est temps de
changer et s’en remettent aux experts du FMI et de la Banque centrale
européenne pour superviser leurs transformations.
Faudra-t-il que la France tombe si bas pour que soient enfin
entreprises les réformes mises en chantier par nos voisins allemands il y
a dix ans déjà ? Les agences de notation, qui scrutent les chances du
pays de rembourser un jour sa dette, nous y ont incités : deux d’entre
elles nous ont maintenu le triple A, la meilleure note, attendant que
les vrais sujets soient enfin abordés, comme ils le sont par-delà les
Pyrénées, les Alpes, la Manche et le Rhin.
Autant il est facile d’adresser aux électeurs des promesses
chimériques, de leur désigner comme boucs émissaires la finance et les
riches, de les bercer d’illusions sur la “démondialisation”, autant il
est difficile de parler vrai, d’indiquer les sacrifices à accomplir pour
remonter la pente sur laquelle nous nous sommes laissé glisser. À la
vérité, ce sont la flexibilité du droit du travail, les contrats à
objectif qui permettraient aux chefs d’entreprise d’aller chercher de
nouvelles commandes, de conserver leurs salariés et d’en embaucher
d’autres, l’esprit libre. Et non pas l’interdiction de licencier que
demande Mélenchon. C’est la formation professionnelle ou encore la
création d’une banque de la jeunesse proposée par Nicolas Sarkozy qui
conduiront les jeunes à trouver de vrais emplois et à s’insérer dans la
vie active, non la création d’emplois jeunes et le perpétuel assistanat
promu par les socialistes. Face à ces réalités se dressent la gauche et
les syndicats pour pérenniser le dangereux statu quo sur lequel ils prospèrent cependant que la France dépérit. Olivier Dassault
vendredi 6 avril 2012
Déni de réalité
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