« Chaque année depuis 2002 la délinquance recule, c'est incontestable. Mais il y a toujours des attentes de la population. Au-delà des faits de délinquance, la population est attentive au climat de sécurité. Elle souhaite être davantage rassurée. Depuis juillet, nous augmentons la présence de la police ou de la gendarmerie sur la voie publique. Au plan national, nous avions en décembre, par rapport à juillet, 25 % de patrouilles en plus, soit 43 000 patrouilles supplémentaires dans l'agglomération de Lille, le nombre de patrouilles est passé de 1 200 à 1 700 en décembre. »
- Cette augmentation de la présence est-elle conciliable avec la réduction des effectifs qui se poursuit ?
« On n'est pas condamné à l'immobilisme. Mes prédécesseurs comme moi même, nous avons mené des efforts pour restructurer les services, gagner de la disponibilité et de la présence. Nous ne sommes pas au bout du compte. Je prendrai encore des initiatives. Au dernier trimestre 2011, nous avions 4 000 policiers et gendarmes de plus sur le terrain, grâce au recours aux heures supplémentaires, aux réservistes de la police et de la gendarmerie. »
- Votre priorité pour 2012 est la lutte contre les incivilités. Comment comptez-vous les faire reculer ?
« Heureusement, la criminalité et même la délinquance touchent relativement peu de nos concitoyens. En revanche nombre d'entre eux sont confrontés aux incivilités; bousculades, insultes, comportements agressifs...Ce n'est pas du pénal mais c'est la vie quotidienne des gens qui ressentent ces incidents comme des traumatismes. C'est un problème de société. Je veux faire donner à plein les mécanismes qui existent, de médiation sociale ou de prévention. La loi de mars 2007 sur la prévention de la délinquance est diversement appliquée, je dois le dire. Malgré l'obligation légale pour les communes de plus de 50 000 habitants de créer des conseils des droits et des devoirs des familles. Ils ont pour fonction, sous la présidence du maire et avec la participation de l'Education nationale, du parquet, de la police, de rappeler à des comportements socialement normaux des personnes qui s'en écartent, notamment des jeunes. Ca marche très bien et je regrette que des communes par principe, refusent de s'engager dans cette démarche. »
- Martine Aubry déplore un déficit de 400 policiers sur la métropole. Venez-vous annoncer des renforts ?
« Non. Lille ne nécessite pas de renforts. J'y viens pour voir comment fonctionne la police d'agglomération, la politique des patrouilleurs, et aussi la participation des élèves de l'école nationale de police de Roubaix à la sécurité de leur quartier. Cela fonctionne depuis quelques semaines et les habitants sont très satisfaits parce que là aussi cela fait plus de présence sur la voie publique. Les effectifs ça compte, mais ce qui compte d'abord c'est la façon dont on les utilise. La démonstration est faite qu'à Lille aussi, parce qu'on utilise mieux les policiers, la délinquance a reculé de 2,5% en 2011. »
- Après l'affaire du Carlton, quelle est la situation des deux responsables de la police du Nord impliqués ?
« M. Menault qui a été déplacé a demandé à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er février. Quant à M. Lagarde, mis en examen pour proxénétisme aggravé, bien entendu il a été administrativement suspendu. Je conçois que ces malheureux évènements ont créé un trouble dans la police lilloise et au-delà. Mais j'observe que la police elle même a concouru à la mise en cause de M. Lagarde. La police fait le ménage quand c'est nécessaire et elle continue de travailler sans états d'âme. On me dit que la police est morose. Partout où je vais, je vois des gens gonflés à bloc ! »
- Le site « copwatch » dont vous aviez obtenu la fermeture est de nouveau en ligne et met en cause des policiers lillois. Qu'allez vous faire ?
« J'avais obtenu de la justice la fermeture de ce site. Je vais la redemander. Il est extrêmement grave de mettre cause la sécurité de policiers et de leurs familles au motif de dénonciations dont on ne sait pas sur quoi elles reposent. Pour veiller à la déontologie policière, il y a la justice, la hiérarchie, la commission nationale de déontologie de la police. Un site qui incite à la haine à l'égard des policiers est inacceptable. »
- François Hollande a présenté son projet. Sur la sécurité, pensez vous que les socialistes ont changé par rapport à la « naïveté » reconnue en 2002 par Lionel Jospin ?
« D'abord quand M. Hollande annonce des créations d'emplois, dans l'éducation comme dans la police ou la justice, il faut qu'il s'explique sur le financement. S'il s'agit de redéploiement, sur quelles administrations va-t-il prélever ces effectifs ? Ce serait intéressant qu'il le dise. Si ce n'est pas du redéploiement, c'est de la dépense publique qui s'ajoute à bien d'autres annonces de dépenses. Son projet, c'est plus de dépenses donc plus d'impôts. Quant à savoir si le PS est plus crédible sur la sécurité ? J'ai entendu M. Hollande dire avec beaucoup de détermination au Bourget qu'il allait pourchasser les voyous. Mais cette belle intention est-elle accompagnée de moyens pour la mettre en œuvre ? J'observe que dans le même mouvement, M. Hollande veut des sanctions et propose de supprimer les peines planchers et les peines de sûreté. J'ai aussi noté que Mme Lebranchu s'opposait à la création de 30 000 nouvelles places de prison annoncées par le président. Il faut exécuter les peines mais on enlève les moyens ! Comprenne qui pourra »
- François Hollande propose des zones de sécurité prioritaire
« Qu'est ce ça veut dire ? Qu'il y aurait une France à deux vitesses en matière de sécurité ? Notre politique c'est d'améliorer la sécurité partout, dans les quartiers difficiles comme dans les villes moins difficiles, dans les villes comme dans les villages. Il préconise aussi le retour de la police de proximité »
- Depuis 2007, n'êtes vous pas revenus à la police de proximité, sous d'autres appellations ?
« Pas du tout. La police de proximité a été un total échec. Les patrouilleurs, c'est une police de présence et d'intervention. La police de proximité avait un nom très sympathique, mais la réalité a été l'explosion de la délinquance entre 1997 et 2002, avec 620 000 délits et crimes supplémentaires. Plusieurs rapports ont analysé les raisons de cet échec : une police qui ne travaille pas la nuit ; qui privilégie la qualité des relations avec la population par rapport à sa fonction répressive. La police doit avoir une fonction de prévention, de dissuasion et de répression. Les patrouilleurs assument la totalité de ces fonctions. En matière de police, je pense que fondamentalement, les socialistes ne peuvent pas être efficaces. Je suis sûr que s'ils parvenaient au pouvoir nous aurions à nouveau une forte dégradation de la sécurité dans le pays. Et je pèse mes mots en le disant. »
- Comment en êtes vous aussi sûr ?
« Parce que pour les responsables socialistes – et Mme Aubry l'a dit de façon très explicite – l'insécurité vient, je cite, de la violence de la société. Cela veut dire qu'on excuse d'une certaine façon les délinquants. Et si on se met dans cette posture, on ne peut être efficace parce qu'on se limite forcément dans les moyens à mettre en œuvre. On arrive ainsi à cette aberration incroyable d'un parti qui par la voix de beaucoup de ses représentants, continue à regretter la mise en place des grands fichiers de police scientifique comme le fichier des empreintes génétiques qui permet tous les jours d'arrêter des criminels. »
- Vous êtes un proche du président. A-t-il un moral de vaincu comme on a pu le lire ?
« Ah non, il a un moral d'acier et une totale détermination. Quand on l'entend, on n'a aucun doute sur une prochaine déclaration de candidature. Il n'a pas non plus de doute sur sa réélection. »
- Après le lancement de la campagne de François Hollande, ne doit-il pas entrer dans l'arène plus vite que prévu ?
« La France vit une période difficile, le chômage augmente, les turbulences financières nous menacent encore. S'il était candidat, il n'aurait plus la légitimité politique pour faire ce qu'il a annoncé après le sommet social et ce qu'il va annoncer ce dimanche soir. La situation du pays nécessite des réponses urgentes. Il est du devoir du président et du gouvernement de ne pas attendre l'après législatives pour agir. » •
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