vendredi 10 juin 2011
Agriculture banalisée
Nicolas Sarkozy a semé avec modération, hier, les aides aux agriculteurs victimes de la sécheresse. Il ne pouvait guère faire plus. Les finances de l’État sont à peu près aussi asséchées que les cultures de nos champs. Les agriculteurs devront donc se contenter de reports d’échéances et d’exonérations de taxes. À voir les mines dubitatives de certains éleveurs qui assistaient à la table ronde à laquelle participait le chef de l’État, ses propositions n’ont pas convaincu tout le monde. C’était à craindre. La situation de l’élevage est si critique que ceux qui en vivent attendent le miracle qui les empêchera de disparaître.
Des troupeaux ont déjà été abattus par leurs éleveurs incapables de les nourrir sans se ruiner. Et, comme souvent en matière agricole, une catastrophe en déclenche une autre : les prix de la viande risquent de s’effondrer sous le poids des bêtes sacrifiées. Déjà sous le coup des calamités naturelles, les paysans se seraient bien passés de la crise sanitaire née en Allemagne. Les producteurs de concombres en sont réduits à jeter leur production et à crier à leur tour « au secours ! »
Cette accumulation de catastrophes naturelles et sanitaires fragilise un secteur qui a beaucoup perdu de son prestige. Il est bien loin le temps où Sully, ministre du bon roi Henri IV, proclamait fièrement que « labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France ». Quand l’Europe a mis en place sa politique agricole commune, elle s’inscrivait dans cette continuité. Les Européens devaient bénéficier d’une agriculture nourricière, si possible capable d’enrichir la Communauté.
Aujourd’hui, les agriculteurs sont accusés de coûter trop cher aux budgets nationaux et communautaires. Les consommateurs regardent valser les étiquettes et tremblent à chaque crise alimentaire. Dans une société fortement urbanisée, l’agriculture est devenue un secteur économique comme un autre. La reconnaissance du ventre n’est même plus de mise dans un monde où la pomme chilienne est moins chère au supermarché que sa cousine de Normandie. Le désespoir des éleveurs peint en noir le folklore du Salon de l’Agriculture. Les paysans ne sont pas des magiciens qui produisent des petits animaux beaux comme des peluches. Ils ont besoin de vivre pour nous nourrir.
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