samedi 27 août 2011
Au revoir et merci, Steve Jobs
L'un des hommages les plus remarqués après l'annonce du départ, jeudi 25 août, de Steve Jobs de son poste de PDG d'Apple pour raisons de santé a été rendu par un homme qui lui a donné beaucoup de fil à retordre : Paul Allen, cofondateur, avec Bill Gates, de Microsoft, éternel rival d'Apple. Paul Allen, qui avait lui-même dû quitter Microsoft dans les années 1980 pour combattre un cancer, a salué en Steve Jobs "l'un des plus grands innovateurs de notre industrie".
Ce ne sont pas les quelque 110 millions d'utilisateurs d'iPhone, ni les 300 millions de paires d'oreilles branchées sur la musique de leur iPod, ni les heureux propriétaires du dernier-né des produits Apple, la tablette iPad, ni même ceux qui ont découvert les joies de la souris reliée à l'ordinateur personnel grâce au premier Macintosh, lancé en 1984, qui le contrediront.
Grand innovateur de la technologie informatique, comme ses deux compatriotes de la Côte ouest Bill Gates et Paul Allen, Steve Jobs a aussi été un génie du marketing et du design, un visionnaire et un révolutionnaire. Il est l'homme qui a tiré d'une technologie complexe et – malgré toute l'agilité de la souris – rébarbative des objets de consommation de masse simples, ludiques, lumineux, et formidablement utiles.
Il est aussi le patron qui a, dans un retournement spectaculaire, sorti de l'ornière à partir de 1997 une entreprise emblématique de la Silicon Valley dont il s'était fait éjecter douze ans plus tôt par des financiers. Cette même entreprise qu'il avait fondée, à l'âge de 21 ans, avec Stephen Wozniak, autre génie de l'informatique, est aujourd'hui, grâce à lui, un colosse financier de 350 milliards de dollars, dont la capitalisation a même dépassé un moment celle du géant pétrolier Exxon.
A tous ces égards, dans la lignée de Thomas Edison ou d'Henry Ford, Steve Jobs symbolise l'excellence de l'innovation américaine et le génie qui a donné ses lettres de noblesse à la Silicon Valley. Avec, aussi, l'arrogance qui caractérise parfois les capitaines d'industrie américains : ses détracteurs lui reprochent un penchant de plus en plus autoritaire et, peut-être accentuée par la maladie, une obsession du contrôle. Sous son impulsion, Apple est devenu un partenaire impitoyable en affaires, profitant au maximum de sa position de supériorité sur le marché.
Nul ne sait encore si l'état de santé de cet homme de 56 ans, atteint d'une forme rare de cancer du pancréas, lui permettra de continuer à inspirer les talentueuses équipes d'Apple. Steve Jobs a conservé le titre de président, et son successeur, Tim Cook, a déjà tenu les rênes de l'entreprise avec succès lors des précédentes absences du PDG. Le charisme et la magie personnelle de Steve Jobs vont, bien sûr, cruellement manquer à la "firme à la pomme".
Mais on peut aussi parier que, en bon chef d'entreprise et se sachant malade depuis huit ans, Steve Jobs a mis en place le dispositif susceptible de perpétuer le succès d'une société qui, à l'ère de la mondialisation, a révolutionné la vie de dizaines de millions de gens à travers la planète.
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