vendredi 12 juillet 2013
Roms : le bras de fer des maires avec l‘État
Roms : le bras de fer des maires avec l‘État
Comme tous les étés, le problème resurgit. Et de plus en plus épineux au fur et à mesure des années. Gens du voyage et roms (les premiers sont français, les autres pas) se déplacent en nombre et occupent illégalement des centaines de terrains communaux et privés. Sans qu’ils soit aisé de leur signifier de les quitter…
Le maire de Guérande est allé jusqu‘à démissionner… Le geste mérite d‘être souligné tant il marque le désarroi des élus et l’absence de soutien étatique sur un contexte qui s’aggrave. Depuis dimanche, plus de 150 caravanes se sont installées sur les terrains de football de la ville. Sur cette côte atlantique qui voit venir chaque été ces grands rassemblements religieux, les municipalités s’entendent pour accueillir les pèlerins à tour de rôle. Mais ces derniers n’ont pas trouvé optimal le terrain qui leur était destiné à Herbignac. Ils sont donc revenus à Guérande, comme l’année précédente…
Pour le député-maire UMP Christophe Priou, c’est « un des pires problèmes que les maires de la presqu‘île ont à gérer ». Et pourtant, ces collectivités locales sont à jour de leurs obligations en matière de terrains d’accueil. Ce dernier a envoyé sa lettre de démission au préfet dès le lendemain.
Et ses adjoints ont choisi de démissionner aussi de leur fonction exécutive. Résultat : mardi, la justice a réagi et rendu une ordonnance d’expulsion pour vendredi matin. Et l’appui de la force publique sera sans doute accordé à la commune. Christophe Priou a un délai d’un mois pour revenir sur sa démission.
Estrosi et Jean-Marie Le Pen
Christian Estrosi, maire UMP de Nice, a parlé sur le même ton, dimanche, au cours du « Grand Rendez-Vous Europe1/i-Télé/Le Parisien ». en proposant carrément un « mode d’emploi » pour évacuer les gens du voyage installés illégalement. « J’appelle les maires de France à la révolte » a-t-il lancé. Il a fait référence notamment à un groupe d’une centaine de caravanes qu’il a réussi à faire quitter la semaine dernière d’un terrain de rugby qu’il occupait sans autorisation. Et a rapporté le discours tenu à un autre groupe encore sur place.
« J’en ai maté d’autres, je vous materai. » « La première chose que je fais, c’est vous mettre des caméras partout pour surveiller vos faits et gestes dans les quelques heures qui viennent », leur aurait-il dit. « On va noter ceux qui rentrent, ceux qui sortent, à quelle minute, à quel moment et ce que vous allez faire partout, partout dans la ville, dans la métropole, etc. Je vais relever les plaques d’immatriculation les unes après les autres »... Il a ajouté qu’il allait faire un référé devant le tribunal à titre conservatoire « pour pouvoir saisir les véhicules, vous savez ces belles et grosses voitures avec lesquelles ils tirent leurs belles et grosses caravanes pour lesquelles il faudrait parfois aux Français toute une vie pour pouvoir se payer les mêmes »...
Des paroles qui ont fait du grabuge ! Et qui lui ont valu l’ire de la gauche estimant que, par ces mots « imbéciles et dangereux », Christian Estrosi cherchait à « faire plus dur que le FN » en vue des élections municipales de 2014 ! Manuel Valls a dénoncé, d’un ton grave, ces propos qui « sont l‘émanation d’une politique passée qui a fait du mal à la France, celle de l’amalgame et de la stigmatisation ». On voit. L’association de défense des gens du voyage France Liberté Voyage a carrément déposé plainte lundi auprès du procureur de Nice pour diffamation publique, incitation à la discrimination et à la haine raciale.
Ce qui pend au nez de Jean-Marie Le Pen, qui avait déclaré quelques jours auparavant, à Nice où il était venu soutenir la candidature de Marie-Christine Arnautu pour les municipales de 2014 : « Vous avez quelques soucis, paraît-il, avec quelques centaines de Roms qui ont dans la ville une présence urticante et disons odorante »...
La grogne monte
Quelques soucis qui sont ceux de beaucoup dans toute la France. A Montévrain, en Seine-et-Marne, fin mai, le maire avait même fait appel à ses administrés via Facebook, réclamant un soutien « physique », pour empêcher des gens du voyage d’accéder à un terrain. Alors qu’il voulait pour sa part « assurer la sécurité des citoyens », il s’est vu opposer une plainte pour « abus de pouvoir » parce qu’il aurait constitué « une milice » ! Un mois plus tard, à Frangy, en Haute-Savoie, l’adjoint au maire, Frédéric Darlot, se faisait hospitaliser pour une fracture au nez après avoir été frappé par des gens du voyage qui cherchaient à s’installer sur une aire de loisirs de la commune, en frappant à coups de masse sur les poteaux qui en barraient l’entrée… A Maulette, dans les Yvelines, les agriculteurs sont allés jusqu‘à répandre du lisier tout autour d’un campement illégal qui leur volait leur terrain de culture…
La grogne monte. Y compris chez les paysans, sur les nerfs, face aux vols dans les campagnes. Victimes de vols d’animaux, d’engins, de gasoil, de cuivre et même de clôtures, certains en sont venus à faire des rondes pour tenter de surprendre les malfaiteurs mais beaucoup se sentent impuissants face à ce fléau difficile à éradiquer. Il y a un an, une note de la Direction centrale de la police judiciaire montrait que la délinquance des Roms avait progressé de 69% et même de 100% pour les mineurs. Et ils sont vingt mille, en France, dont un tiers d’enfants, installés dans quatre cents campements informels.
Le problème prend de l’ampleur. Sans que pourtant les démantèlements et les expulsions ne cessent.
Cette semaine seulement, 50 Roms expulsés d’un squat à Lyon, 60 virés de leur campement à Deuil-la-Barre dans le Val-d’Oise et 20 à Ris-Orangis en Essonne. Au troisième trimestre 2012, le nombre de personnes évacuées s’élevait à 1 582 ; aujourd’hui, à la fin du deuxième trimestre, il s’élève à 5 482. La France continue donc d‘être largement stigmatisée. Le dernier rapport du Collectif national droits de l’Homme Romeurope critique le traitement réservé aux Roms, dénonçant une situation qui se dégrade. Mardi, la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) a enfoncé le clou, fustigeant le nombre insuffisant d’aires d’hébergement en France, le manque d’enseignants dans les classes d‘élèves non francophones… Un comble.
Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault doit se déplacer aujourd’hui en Roumanie pour conforter les échanges économiques. Sans doute évoquera-t-il le sujet qui devient brûlant.
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