vendredi 12 juillet 2013
La confrontation finale approche
Pour la première fois depuis quatre ans, les dirigeants européens entament la saison estivale sans la crainte de trouver la zone euro en ruine à leur retour. Mais, dans les mois à venir, de nouvelles réalités politiques, sociales et financières mettront une fois de plus à l’épreuve les compétences de l’UE en matière de gestion de crise.
A un mois de leurs traditionnelles vacances d’août, les dirigeants européens aimeraient sans doute, pour la première fois depuis quatre ans, profiter du soleil sans avoir à redouter un cataclysme imminent dans la zone euro. Les événements survenus la semaine dernière donnent quelques raisons d’être optimistes.
Après la crise qui a éclaté au Portugal la se
maine dernière, avec la démission du ministre des Finances, il n’aura fallu que sept jours aux dirigeants du pays pour reprendre la maîtrise de la situation et calmer les marchés financiers. En Grèce – un pays qui, comme le Portugal, vit sous perfusion de l’aide internationale – les prêteurs trouvent le moyen de maintenir ouvert le robinet des aides d’urgence à destination d’Athènes en échange de réformes (certes encore inachevées).
Plus globalement, l’entrée de la Croatie dans l’UE, la décision d’entamer des pourparlers d’adhésion avec la Serbie et l’acceptation de la requête de la Lettonie d’intégrer la zone euro illustrent l’attrait que continue d’exercer l’unité européenne. Enfin, les derniers indices des directeurs d’achat, qui donnent une idée des perspectives du secteur privé, n’avaient pas été aussi favorables depuis mars 2012. L’Europe devrait sortir de l’ornière de la récession dans le courant du second semestre de cette année.
Aussi encourageants soient-ils, ces signes n’apportent aucune preuve tangible d’un quelconque affaiblissement de la crise, laquelle entre simplement dans une nouvelle phase. Les douze mois à venir apporteront leur lot de défis sur la scène politique, sociale et sur les marchés financiers qui, une fois de plus, mettront à l’épreuve les compétences de l’UE en matière de gestion de crise.
Pour commencer, les reprises se dérouleront dans des conditions de crédit disparates. Privées de financements abordables, les entreprises italiennes, portugaises et espagnoles sont systématiquement désavantagées par rapport à leurs rivales autrichiennes et allemandes. De quoi décrédibiliser les prétendus avantages de la monnaie unique et empêcher le secteur privé de juguler le chômage de masse dans le sud de l’Europe.
Dans le même temps, le cadre conceptuel de la stratégie anticrise européenne demeurera inchangé – donner de l’argent aux mauvais élèves en échange de tourment, d’une auto-critique et de promesses de réformes vertueuses. A cet égard, peu importe que les élections législatives allemandes du 22 septembre voient l’avènement d’un gouvernement de centre-gauche, de centre-droit, ou d’une grande coalition. Aucun parti traditionnel allemand ne semble désireux de rétablir l’équilibre économique de la zone euro en puisant dans l’actuel excédent de la balance des opérations courantes de l’Allemagne pour redresser la conjoncture dans le sud de l’Europe.
L’idéal d’unité sera mis à rude épreuve lors des élections européennes du mois de mai, qui ouvriront la voie à la désignation des remplaçants de José Manuel Barroso à la tête de la Commission européenne et d’Herman Van Rompuy à celle du Conseil européen – le club des dirigeants nationaux. Il faut s’attendre à un accroissement du soutien en faveur des partis populistes, contestataires et europhobes.
Dans l’avenir proche, le climat politique s’annonce glacial pour ceux qui appellent de leurs vœux des initiatives ambitieuses en matière d’intégration, comme la mutualisation de la dette ou la création d’une union bancaire assortie d’un système de garantie commune des dépôts. En témoigne un communiqué néerlandais datant du mois dernier, déclarant que l’ère d’une "union sans cesse plus étroite" dans l’ensemble des domaines d’action était révolue. La fragilité de l’esprit de solidarité européen transparaît également dans les termes employés lors de la passe d’armes qui a opposé José Manuel Barroso et le gouvernement français ces dernières semaines.
Ce sont là plus que de simples signes annonciateurs. L’Europe aura besoin d’un véritable esprit d’équipe pour adopter ce qui prend la forme d’une nouvelle vague d’aides financières à l’appui des pays renfloués. Prenons l’exemple des programmes de sauvetage triennaux en faveur de l’Irlande et du Portugal, qui arriveront respectivement à échéance en décembre 2013 et juin 2014. Les dirigeants européens espéraient les clôturer à temps et produire ainsi la preuve d’une gestion de crise irréprochable. Or, les difficultés que rencontre l’Irlande pour sortir de la récession montrent qu’un retour en douceur sur les marchés de capitaux privés n’est en rien garanti.
Au Portugal, la crise gouvernementale a mis au jour les limites de la tolérance politique et publique face à l’austérité. Il est peu probable que le pays puisse se passer des plans de sauvetage à l’heure actuelle, à l’heure où la dette publique frise les 130 % du produit intérieur brut, où une croissance économique digne de ce nom n’est pas en vue et où près d’un travailleur sur cinq est sans emploi. Dans le même temps, rares sont les experts qui estiment que la Grèce pourra faire l’économie d’une nouvelle restructuration de sa dette.
Depuis le premier sauvetage de la République hellénique en mai 2010, l’hostilité politique des pays créanciers à l’égard du sauvetage des pays débiteurs n’a cessé de croître. Or, la patience de ces derniers face à l’austérité arrive à bout. C’est sur cet affrontement vénéneux que s’ouvrira le dernier acte de la crise de la zone euro.
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