jeudi 27 septembre 2012
Payer plus pour aller à l'université
Le récent débat sur l'introduction de frais de scolarité pour les
étudiants des classes préparatoires aux grandes écoles a relancé la
question plus générale du financement des études supérieures en France.
En Europe, à l'exception de la Grande-Bretagne et des Pays-Bas, les
frais d'inscription sont généralement peu élevés. La France s'inscrit
dans cette tradition : un étudiant paie 181 € annuels pour la licence,
250 € pour le master, auxquels s'ajoutent 207 € de couverture maladie.
Ces coûts sont majorés dans les grandes écoles : 500 € dans les écoles
publiques d'ingénieurs et considérablement plus dans les écoles de
commerce régies par un statut privé. La scolarité à HEC s'élève ainsi à
environ 12 000 € par an, ce qui n'a plus rien à voir.
En France comme ailleurs, faire des études supérieures nécessite bien
entendu aussi de se loger, de se nourrir, et d'acheter des livres. En
moyenne, 45 % du budget d'un étudiant français est actuellement consacré
à son logement. Certes, il y a les bourses. Mais ces sommes versées par
l'État aux étudiants issus des familles les plus modestes sont faibles
en France, comparées aux Pays-Bas ou à la Norvège. Elles représentent,
au maximum, 4 600 € par an, ce qui est insuffisant pour vivre et étudier
sans ressources supplémentaires, comme celles que procure un travail à
temps partiel.
Dès lors, il n'est pas étonnant que les syndicats d'étudiants
défendent la gratuité de l'enseignement supérieur. Cette revendication
reçoit un écho positif au sein de la société française, qui trouve
légitime que seul l'État finance les universités. Conséquence pour les
présidents d'université : ils ne peuvent pas vraiment compter sur la
contribution financière des étudiants pour améliorer l'enseignement et
la recherche, ou envisager des aides supplémentaires aux plus méritants.
Il est plus que jamais nécessaire de réfléchir, en France, au rapport
entre financement de l'enseignement supérieur et justice sociale.
Revenons au cas des classes préparatoires : si 30 % des élèves qui y
suivent des études sont boursiers, un certain nombre proviennent aussi
de familles privilégiées dont on sait qu'elles encouragent souvent leurs
enfants à préparer les grandes écoles. Il ne serait donc nullement
injuste que ces étudiants contribuent, comme les autres, au financement
de leur scolarité.
Plus généralement, il est tout à fait possible de penser à des frais
de scolarité modulables en fonction des revenus de chacun. C'est le
système qu'applique Sciences Po. Son avantage est de faire contribuer
les familles qui le peuvent, tout en offrant des bourses dignes de ce
nom aux étudiants les plus modestes, bien entendu exonérés de frais de
scolarité. À ce propos, les droits élevés que pratiquent les universités
privées américaines sont souvent pointés du doigt en France. On oublie
que ces mêmes universités pratiquent une redistribution sous forme de
bourses conséquentes aux étudiants brillants les plus modestes.
Il n'est donc pas impossible d'envisager des frais de scolarité plus
élevés dans les universités, pour en accroître les ressources, tout en
préservant le principe ¯ essentiel dans une société démocratique ¯ de la
justice sociale. Ce sujet mérite d'être débattu sans manichéisme. Les
Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche, qu'a initiées la
ministre en charge de ces questions, en sont une belle occasion.
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