mercredi 16 mai 2012
Justice et rassemblement
Passer de candidat élu par une moitié du pays à président de tout un
peuple : tel est le sens d’une investiture. François Hollande lui même,
faisant ses adieux aux socialistes, a confirmé, lundi, qu’il ne
participerait plus à aucune réunion partisane. Jean-Louis Debré, le
président du Conseil constitutionnel, l’a solennellement rappelé, hier
matin, à l’Élysée : le président élu représente l’ensemble des Français.
L’exercice
vaut pour les Français eux-mêmes qui vont devoir changer de regard pour
la septième fois de la Ve République. Quel que fut leur vote, ils
auront à faire du candidat d’un camp leur président. Les électeurs de
gauche devront accepter que leur favori privilégie l’intérêt général sur
leurs propres attentes. Ceux de droite devront essuyer leurs regrets et
admettre qu’un homme différent incarne la France.
Pour que se
produise cette alchimie, dont la France divisée a tant besoin, il faut
des mots, des symboles et des actes. Nos institutions y aident
grandement : malgré la folie d’hier, et la pluie, la solennité
nécessaire du protocole et ce parcours des lieux parisiens de l’Histoire
offrent aux yeux du monde l’image d’une exemplarité démocratique.
Les
mots, dignes, François Hollande les a eus : impartialité, justice,
unité, apaisement, rassemblement, sobriété ont émaillé son discours
d’investiture. L’exercice aurait été parfait s’il avait eu l’élégance
d’une petite reconnaissance à l’égard de Nicolas Sarkozy, à qui il s’est
contenté d’adresser des voeux pour sa nouvelle vie.
Les
symboles, eux, sautent aux yeux : Marie Curie pour saluer l’intégration,
la science et ce que le brassage peut avoir de plus heureux ; Jules
Ferry pour confirmer son attachement à la liberté de conscience et sa
priorité pour la jeunesse ; et puis aussi les bains de foule…
Mais
c’est à travers les actes que se construira – ou pas – la
réconciliation. L’état social et financier de la France et de l’Europe
est très dégradé. Sans justice dans l’effort et sans une intelligente
combinaison entre rigueur et relance, le redressement ne sera pas
possible.
Créditons le président Hollande d’une réelle volonté de
transformer les aigreurs destructrices, attisées par la campagne, en
énergies créatrices. Il n’y a pas d’avenir à cultiver les oppositions
entre clans, partis, religions, classes. Voyons en son complice
Jean-Marc Ayrault, le député maire de Nantes nommé à Matignon, un
mélange intéressant de détermination, de consensus et d’ancrage
territorial.
À court terme, on comprend que ce Fillon de gauche,
fin connaisseur des rouages parlementaires et de la carte politique, est
un atout pour gagner la bataille des législatives, sans laquelle
François Hollande s’enliserait dans la cohabitation. La nomination d’un
germanophile et germanophone sécurisera la relation franco-allemande.
Car
les actes, c’est aussi en Europe qu’il va falloir en poser, et vite.
Avec la poussée des sociaux démocrates allemands, avec une évolution du
rapport de forces politique, avec des Grecs obligés de retourner aux
urnes, s’engage une négociation intéressante entre Angela Merkel et le
président français, fraîchement légitimé. On a dit de François Hollande,
à la tête du PS, qu’il était l’homme de la synthèse. Beaucoup attendent
qu’il le soit à la tête de l’État et, qui sait, en Europe.
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