Après un mois de polémiques qui ont atteint le sommet de l'Etat, Nicolas Sarkozy espérait, ce lundi soir sur France 2, parvenir à mettre un point final à l'affaire Bettencourt-Woerth et recentrer le débat sur les «problèmes de fond», à commencer par la réforme des retraites.
Pour sa première prestation en direct depuis le 25 janvier, le chef de l'Etat a été interrogé un peu plus d'une heure par David Pujadas, sur une terrasse des jardins de l'Elysée. Installé face à Nicolas Sarkozy, une table les séparant, le journaliste de France 2 a débuté l'entretien par le feuilleton Bettencourt, qui atteint de plein fouet le ministre du Travail, Eric Woerth, en charge de la réforme emblématique des retraites.
Voici les principales déclarations du chef de l'Etat :
«Eric Woerth sera le ministre qui défendra» la réforme des retraites. «Eric Woerth est un homme honnête, c'est un homme compétent, c'est un homme qui a toute ma confiance et celle du Premier ministre», a immédiat souligné le chef de l'Etat. «Il sera donc le ministre qui défendra cette réforme si nécessaire des retraites selon le calendrier qui était prévu».
Sarkozy mis en cause dans l'affaire Bettencourt : «Une honte». Emprunt d'une colère froide, Nicolas Sarkozy a jugé que c'était «une honte» de l'avoir accusé d'avoir «ramassé des enveloppes» d'argent chez Liliane Bettencourt, comme l'avait rapporté le site Médiapart citant des premières déclarations, démenties ensuite, de l'ex-comptable de la patronne de l'Oréal. Pour symbole de son honnêteté, il a rappelé : «Le seul président qui a fait rentrer la Cour des comptes à l'Elysée, c'est moi ! Et j'ai voulu nommer un député de l'opposition comme président» au décès de Philippe Séguin.
«Mon conseil, c'est plutôt que (Woerth) abandonne» ses fonctions de trésorier UMP. En revanche, pour couper court à toute polémique, il a «conseillé» à son ministre du Travail de quitter ses fonctions de trésorier de l'UMP afin qu'il se consacre «exclusivement» à la réforme des retraites. «Je lui ai dit que je souhaitais qu'il se consacre exclusivement à cette importante réforme des retraites, que son honneur maintenant était lavé, que les soupçons étaient levés, et que mon conseil c'est plutôt qu'il abandonne cette responsabilité de trésorier», a-t-il dit.
«Si j'avais été un homme d'argent, j'aurais fait une autre carrière». A ses détracteurs, le chef de l'Etat rétorque qu'il aurait fait «une autre carrière» s'il avait été «un homme d'argent», comme certains de ses opposants le dépeignent. «Qu'est-ce que c'est, depuis quelques semaines, que cette attitude vis à vis de l'argent ?», s'est-il interrogé. «J'entends des gens qui disent leur détestation de l'argent. Mon Dieu ! Je me méfie autant des gens qui idolâtrent l'argent que des gens qui le détestent. Cela revient aux mêmes choses. C'est un rapport malsain», a-t-il lancé.
Pas de remaniement avant la rentrée. Malgré les appels pressants de la gauche et de plusieurs ténors de sa propre majorité, Nicolas Sarkozy a confirmé que le remaniement ministériel aurait lieu en octobre après la réforme des retraites, ajoutant que ceux qui préconisaient une «équipe resserrée» avaient «raison».
«La retraite, je dis : les 62 ans, on n'y touche pas». Appelant à cesser de «perdre du temps avec la calomnie pour nous concentrer sur l'essentiel», le président a abordé dans le détail le sujet des retraites. Il a réaffirmé qu'il n'accepterait pas de revenir sur le recul de l'âge de départ à la retraite à 62 ans ni sur l'alignement des cotisations retraites public-privé : «La retraite (à) 62 ans, on n'y touche pas.» En revanche, il s'est dit ouvert sur le reste.
«Il faut cesser cette marche folle de l'augmentation d'impôts». Interrogé sur sa politique de réduction des déficits, le chef de l'Etat s'est refusé à employer ce terme «connoté en France», lui préférant l'adjectif «rigoureux». «Le mot rigueur, ça veut dire baisser les salaires, je ne le ferai pas, augmenter les impôts, je ne le ferai pas». «De tous les pays du monde, la France est celui qui taxe le plus les contribuables. La fiscalisation sur les plus riches est la plus importante», a-t-il martelé. «Ce qui ne me fait pas peur, c'est le mot rigoureux (...) Rigoureux ça veut dire qu'on revient à l'équilibre (des comptes publics, ndlr), je le ferai», a ajouté le chef de l'Etat, réaffirmant l'engagement de la France à ramener son déficit public à 3% du produit intérieur brut (PIB) en 2013, ce qui revient à un effort d'économies d'environ 100 milliards d'euros en trois ans.
Niches fiscales : «Nous avons décidé d'essayer de trouver 10% d'économies». Le gouvernement travaille encore à la réduction des niches fiscales sur lesquelles il souhaite «trouver 10% d'économies» mais les exonérations pour les emplois à domiciles ou les aides à la personne seront globalement préservées, a indiquéNicolas Sarkozy. En revanche, il a annoncé la modification du dispositif par lequel l'Etat prend en charge les cotisations sociales sur les bas salaires qui ne prendra plus en compte les 13e mois, comme c'est le cas actuellement.
Défense du bouclier fiscal... et de Liliane Bettencourt Quid du bouclier fiscal, notamment mis en cause dans l'affaire Bettencourt ? Pas question de le supprimer. «En France, le bouclier fiscal, ça signifie que personne ne paye plus de 50 % de son revenu. Si en France, on n'a plus personne ou investir et dépenser ?» a lancé le chef de l'Etat. Interrogé sur l'intérêt de maintenir ce dispositif contesté, qui permet à un contribuable de ne pas payer plus de 50% de ce qu'il gagne en impôts, le chef de l'Etat a évoqué le cas de Liliane Bettencourt, qui «paye plusieurs millions d'euros d'impôts par mois». «Mme Bettencourt, qui est propriétaire de L'Oréal, je souhaite qu'elle reste propriétaire de L'Oréal et que L'Oréal - 17 milliards de chiffre d'affaires, 64 000 employés - ne parte pas dans un autre pays», a expliqué Nicolas Sarkozy. «Parce qu'à ce moment, qui le paierait ? (...) c'est les employés qui perdraient leur emploi», a estimé le président de la République.
Mineurs délinquants : «Appliquer la suppression des allocations sociales avec fermeté». «Nous avons décidé avec le ministre de l'intérieur de faire de la Seine-Saint-Denis une priorité. Je souhaite impliquer la responsabilité pénale des parents et appliquer la suppression des allocations sociales avec fermeté. Nous allons créer en outre une vingtaine d'établissements de réinsertion pour lutter contre les décrochages scolaires. J'ai demandé qu'on constitue un fichier pour que tout jeune qui sort de l'école à 16 ans, ne le fasse pas sans formation, ni travail.»
«Le visage désastreux» des Bleus. Interrogé sur le fait de savoir pourquoi il avait reçu Thierry Henry à son retour du Mondial le 24 juin, jour de mobilisation syndicale contre la réforme des retraites, Sarkozy a confirmé que c'est bien Thierry Henry qui avait demandé à le voir. «Pourquoi j'ai reçu Thierry Henry ? Il a porté le maillot de l'équipe de France 124 fois, dignement. Il a été le joueur qui a marqué le plus de buts pour l'équipe de France. Ca compte», a-t-il dit. Quant au «visage donné par l'équipe de France en Afrique du Sud... désastreux. J'ai dit : les responsables doivent partir. Ils sont partis. Ne les accablons pas. Les joueurs ne doivent pas toucher de primes. Ils n'ont pas touché de primes», a poursuivi le chef de l'Etat.
mardi 13 juillet 2010
Sarkozy renouvelle sa confiance à Woerth et reste ferme sur les retraites
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