Après être revenu sur la «taxe anti-délocalisation» mise en place
par Nicolas Sarkozy, l'exécutif se résout à recourir à une augmentation
de la TVA. La droite savoure déjà ce flagrant délit de revirement.
Les amateurs, tête vide et langue de bois |
L'augmentation de la TVA, financièrement efficace - un point de TVA au taux intermédiaire représente un gain de 1,1 milliard d'euros pour l'État - n'en est pas moins politiquement périlleuse pour le gouvernement. Car elle va à l'encontre de tout ce qui a été dit et répété par les socialistes tout au long de la campagne présidentielle. À l'annonce par Nicolas Sarkozy d'un relèvement de la taxe, le PS n'avait pas hésité à parler de «mesure anti-pouvoir d'achat» et «antisociale». Son argument? La TVA, à l'assiette très large, étant «payée par tous les Français», son relèvement est donc «injuste socialement».
«C'est une machine à réduire le pouvoir d'achat des plus modestes», attaque en janvier Najat Vallaud-Belkacem, alors porte-parole de campagne de François Hollande. Et Martine Aubry de renchérir: «Nicolas Sarkozy a commencé en aidant les plus privilégiés, avec notamment le bouclier fiscal, et il termine en faisant payer les classes populaires et moyennes», lance alors la patronne du PS, dénonçant une «erreur économique et une profonde injustice sociale». Même Manuel Valls, qui s'était prononcé lors de la primaire socialiste pour la mise en place d'une TVA sociale, se résout à dénoncer une mesure «contre-productive», empêchant «toute possibilité de reprise par la consommation».
«L'option TVA est totalement écartée»
Petit à petit, la dénonciation de la «TVA Sarkozy» devient l'un des angles d'attaque favoris de François Hollande contre son adversaire. Le candidat socialiste défend dans son projet de réforme fiscale une fusion de l'impôt sur le revenu et de la CSG et promet de revenir sur la hausse de la TVA, qu'il juge «injuste» et «inconséquente». Ce qu'il fait, une fois élu, dans le cadre du projet de loi de finances rectificatif adopté en juillet. «S'il y avait eu cette augmentation de la TVA telle qu'elle avait été votée, c'était 1,6 point de TVA, 11 milliards d'euros qui étaient prélevés sur les Français, qui aurait affaibli encore la croissance, mis des personnes au chômage, amputé le pouvoir d'achat: je m'y suis refusé», explique-t-il lors de son allocution du 14 Juillet.Mais le nouveau chef de l'État doit rapidement s'atteler à l'épineux dossier de la compétitivité des entreprises. Dès juillet, la Cour des comptes se prononce pour une hausse de la TVA. Suivie en ce sens par Louis Gallois, chargé pendant l'été d'élaborer des mesures permettant de réduire le coût du travail. Mais jusqu'au bout, le gouvernement semble exclure une telle hausse. «L'option TVA est totalement écartée, en l'état il n'y a pas de projet de l'augmenter d'ici à la fin du quinquennat, les choses sont claires», jure en septembre Alain Vidalies, ministre en charge des Relations avec le Parlement. Puis Pierre Moscovici intervient en personne: «Dès lors que nous avons supprimé la TVA sociale, nous n'allons pas la rétablir», jure le patron de Bercy.
Au pied du mur, le gouvernement a finalement choisi de recourir à une hausse modérée de la taxe. Tout l'enjeu pour Jean-Marc Ayrault est désormais d'expliquer que cette «restructuration» de la TVA n'a rien à voir avec l'augmentation voulue par Nicolas Sarkozy. Matignon insiste déjà sur la baisse du taux réduit sur les produits de première nécessité, qui passera de 5,5 à 5%. Suffisant pour faire avaler la pilule à la gauche de la majorité, qui craint un effritement de la consommation? Dans une interview donnée lundi au Figaro, la sénatrice socialiste Marie-Noëlle Lienemann prenait les devants en avertissant qu'une hausse de la TVA entraînerait une réaction «très négative» de l'aile gauche du PS, dont elle fait partie. De son côté, l'UMP se réjouit déjà des contradictions affichées par le gouvernement.
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