Les cafouillages de Hollande
En vérité, c'est, semble-t-il, la crainte du principe même de choc qui va inviter le président de la République à des choix modérés, autant dans le fond (les mesures) que dans la forme (le calendrier). Comme si les solutions radicales n'étaient pas dans sa nature, comme si elles lui faisaient peur. Il s'agirait d'une difficulté à exercer son autorité ou d'une absence même d'autorité, cachée sous toute une série d'alibis : le moment n'est pas venu, les Français ne comprendraient pas que je tranche dans le sens que préconise le patronat, le temps viendra, procédons par étapes... On connaît ce type d'argumentation. Mais c'est commettre une double erreur.
La première : déjà les Français ne comprennent pas, déjà il est trop tard. On a le sentiment que François Hollande ne mesure pas exactement l'état de l'opinion. Les fautes de communication qui se succèdent aujourd'hui ne sont-elles pas le signe d'une surdité à la voix du peuple ? Le président croit que le jugement porté sur lui par les Français est moins présent et moins fort dans l'esprit public que le souvenir laissé par Sarkozy. Il se trompe. Il oublie qu'il est là depuis six mois. C'est lui, Hollande, que la France évalue sur ses actes, c'est lui dont elle s'étonne qu'il ait encore si peu fait, alors qu'il avait tant promis. C'est lui qui cafouille, ce n'est pas la droite, ce n'est pas le destin, ce ne sont pas les autres.
Un gâchis
La deuxième erreur procède visiblement d'un bizarre rapport au temps. Cet homme-là considère qu'il a le temps parce qu'il a la durée. Pourtant, il a en main tous les éléments qui lui permettent de mesurer l'urgence des problèmes. Il a autour de lui une meute d'experts, toute l'énarchie réunie. Nous, nous ne sommes pas des experts. Mais nous connaissons la valeur des chiffres et des statistiques, nous comprenons le sens des analyses, la réalité de la vie. Tout ce que nous lisons, ce que nous apprenons sur la situation de la France, venu de la plume ou de la bouche de personnalités incontestables, de gauche ou de droite, ne résonne plus qu'en termes de déclin, de recul, de perte, de rétrogradation, de menace, de catastrophe. Tout ce que nous voyons de la vie ne se traduit plus qu'en termes d'inquiétude, d'angoisse, d'appauvrissement.Et, en réponse, que fait-il, lui, que font-ils, eux ? Ils attendent un rapport sur la compétitivité pour annoncer qu'ils n'en tiendront pas compte et qu'ils en édulcoreront le contenu pour en étaler sur deux ou trois ans la mise en oeuvre. Il y a une dizaine d'années, une situation comparable, toutes choses égales, s'est présentée à l'Allemagne. Sans attendre, Schröder, qui était pourtant de la famille socialiste, prit les mesures conformes à ce que préconisait le patronat allemand. On connaît le résultat.
Tout ce gâchis pourquoi ? Parce que la gauche, avec ses vieux tropismes et ses utopies mitées. Parce que le socialisme, avec ses misérables rapports de force internes. Parce que la justice et l'égalité. Parce que la mollesse et la démagogie. Parce que les riches... Au fait, écoutons l'un d'entre eux, Marc de Lacharrière, peu suspect d'incivisme : "Est-ce que le président se rend compte que la France est un des seuls pays où un entrepreneur doit prendre 100 % des risques pour laisser au final à ses enfants entre 15 et 17 % de la richesse qu'il a produite ? Nos entreprises intermédiaires ont les niveaux de profit les plus faibles d'Europe. Si Hollande ne comprend pas cela..." Hollande ne comprendra pas cela. Que n'a-t-il jamais produit ?
Que n'a-t-il jamais entrepris ? Que n'a-t-il jamais risqué ?
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