TOUT EST DIT

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mardi 13 novembre 2012

Hollande, les "néoracistes" et nous 


 
Où est l'Histoire ? Elle est partout, ces temps-ci. À l'heure où nous écrivons ces lignes, nous ne connaissons pas les résultats des élections américaines, mais peu importe, parce qu'elle est aussi en train de se faire, ces jours-ci, dans notre cher et vieux pays.
Dans "La tyrannie du statu quo", un livre écrit avec son épouse, Rose, le Prix Nobel d'économie Milton Friedman expliquait naguère qu'après leur arrivée au pouvoir les grands dirigeants n'ont que cent jours pour réformer. Il donnait en exemple Roosevelt, Reagan, Mitterrand et Thatcher, qui ont transformé leur pays à la hussarde. Passé le délai de trois mois, notait-il, les conservatismes et les politicailleries reprennent toujours le dessus, les gouvernants s'engluent.
François Hollande est au pouvoir depuis six mois. Il a perdu beaucoup de temps, mais il n'a pas encore perdu la partie. Il lui reste quelques semaines pour devenir l'homme d'État qui aura redressé la France. À une condition : qu'il prenne le chemin difficile déjà emprunté par d'autres sociaux-démocrates comme le chancelier Gerhard Schröder en Allemagne ou le Premier ministre Göran Persson en Suède, qui, grâce à une politique de débourbage, ont remis debout leurs pays respectifs.
Alors qu'ils infligeaient des remèdes de cheval à leurs concitoyens, dans les années 2000, ces deux hommes ont essuyé bien plus de lazzis que Jean-Marc Ayrault. Aujourd'hui, ils sont vénérés parce qu'ils ont eu le courage d'en finir avec les corporatismes et les lâchetés qui mettaient leur modèle en péril. Un jour, il faudra bien qu'un homme d'État français, au lieu de se contenter d'assommer le pays de taxes et d'impôts, taille, coupe et tranche dans la graisse, la gélatine et les corsets qui étouffent notre économie. François Hollande peut être celui-là et entrer dans l'Histoire. À condition qu'il force sa nature, oublie ses calculs politiques, se fiche de plaire à son parti et rompe dès maintenant avec trente ans de bêtises et de cynisme. Il n'a pas d'autre choix s'il veut que la France reste un pilier de l'Europe au lieu d'en devenir l'un de ses boulets.
Sinon, après avoir fait quelques ronds dans l'eau qu'il aura à peine effleurée de petits coups d'aile, il n'aura été qu'un oiseau de passage, comme certains de ses prédécesseurs.
Où sont les "néoracistes" ? Si l'on en juge par les réactions qu'a provoquées notre une de la semaine dernière, consacrée à "Cet islam sans gêne", il n'y a plus de doute : notre pays est affligé d'une nouvelle engeance aveugle et sourde, mais, hélas, pas muette.
Elle prolifère sur la Toile, dans les médias et l'intelligentsia, du moins dans celle qui a cessé de penser depuis la chute du mur de Berlin. Elle fonctionne au réflexe conditionné et ne sort de sa naphtaline que pour des indignations sélectives qui nous ramènent au temps de Panurge, son idéologue officiel. Elle n'avance qu'en meute et ne s'exprime qu'en choeur.
Son cogito : "Je m'insurge, donc je suis. " Ou bien, plus consternant encore : "Je twitte, donc je suis." Il a suffi que nous mettions le focus sur une fraction de l'islam, comme l'indique sans ambiguïté, sur notre couverture, l'adjectif démonstratif "cet", pour que nous fussions aussitôt accusés de racisme anti-arabe ou anti-noir. Les bouffons ! Ils font preuve d'un insondable mépris envers ces collectivités humaines pour les réduire aux dérives marginales d'une religion dont on n'a pas omis de dire, dans ce journal, le respect qu'on lui devait.
Il est permis de secouer comme un cocotier le haut clergé catholique, pape compris, de fouiller dans ses poubelles pédophiles ou de se gausser, non sans raison, des excès des born again américains, mais, devant cet islam sans gêne qui nous occupe, il faut rester le doigt sur la couture du pantalon. Passez votre chemin, de préférence en fermant les yeux ; sinon, vous stigmatisez, et c'est interdit.
Or la vocation du journalisme, s'il en a une, n'est-elle pas de déterrer, d'exposer, de démasquer, donc de stigmatiser ? Nos flics idéologiques n'ont pas compris cela. Ils n'ont pas compris non plus qu'ils confondent les peuples et les religions. Nul ne dira jamais que tous les Américains sont mormons, tous les Allemands, luthériens ou tous les Britanniques, anglicans. Ou inversement. En revanche, il faudrait que tous les Arabes et tous les Noirs soient musulmans, appartenant de surcroît au courant revendicatif et minoritaire que nous décrivions dans notre numéro.
Nos marchands d'anathèmes montrent ainsi leur vrai visage. Ce sont des "néoracistes", il n'y a pas d'autres mots pour les qualifier. Ils ne le font pas exprès, bien sûr, mais par peur, suivisme ou paresse, ils enferment, comme les colonialistes d'antan, des populations entières dans une identité religieuse qu'on peut être en droit de considérer comme simplificatrice ou caricaturale. Tels sont les effets de l'ignorance et de la condescendance.
Honte à ces "néoracistes" !

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