Quel est le point commun à ces éminences du clergé
médiatique que sont Christophe Barbier, Nicolas Beytout, Dominique Seux,
François Lenglet, Jean- Marc Vittori, Franz-Olivier Giesbert, Erik
Izraelewicz, Eric Le Boucher, Yves de Kerdrel et consorts ? Nonobstant
leurs différences, ils ont fait du « coût du travail » leur cible
unique.
Nos Excellences ne prennent
du rapport Gallois que ce qui les intéresse pour fonder le raisonnement
suivant : si la France va mal (et c’est le cas), si son industrie s’est
rabougrie (et c’est la réalité), si elle exporte moins (et cela ne se
discute pas), c’est parce que le travail coûte trop cher. En vertu de
quoi, une économie massive sur les « charges » (qui sont la partie du
salaire consacrée aux cotisations sociales ) devrait remettre la machine
en marche et la faire repartir comme par miracle. Amen.
On entend cette petite musique du matin au soir, sans que personne
parmi les membres du chœur susdit s’interroge le moins du monde sur les
carences d’un tel raisonnement. S’il suffisait de baisser les charges
pour relancer les investissements industriels, cela se saurait puisque
c’est déjà le système en vogue pour les bas salaires. Si la
compétitivité était indexée sur le faible niveau des salaires, la Grèce,
l’Espagne et le Portugal devraient figurer dans le top du top. Si les
cadeaux aux entreprises sans contre partie permettaient de stimuler le
made in France, Arnaud Montebourg serait le premier à brûler un cierge
pour fêter l’événement.
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Un autre donneur de leçon |
Les hauts
dignitaires de l’Eglise médiatique ne rentrent pas dans ce genre de
considérations. Le coût du travail est leur nouveau mantra, et nul ne
les fera dévier de leur mission évangélisatrice. Habitués à se tromper,
ils persistent et signent. Tout comme ils étaient pour le traité de
Maastricht en 1992, pour le traité européen en 2005, pour le nouveau
traité européen signé par François Hollande, ils sont pour la version «
coût du travail » du choc de compétitivité, notion imposée dans le débat
public par les tenants de l’orthodoxie néolibérale grâce aux
tergiversations d’un PS qui ne sait plus sur quel pied idéologique
danser.
Les maîtres à (bien) penser
ne parlent jamais du coût du capital, du coût des dividendes, du coût de
la rente, du coût des délocalisations, du coût des fuites de capitaux,
du coût des placements financiers, ou même du coût de la niche fiscale
dont ils bénéficient en tant que journalistes. En revanche, le coût du
travail salarié, cela les révulse au plus haut point, et ils n’hésitent
pas à monter en prêche pour appeler les malheureux à se sacrifier en
place publique. Au passage, ils en oublient les voix iconoclastes
faisant remarquer qu’il ne faut pas mettre dans le même panier grandes
et petites entreprises, et que la compétitivité dépend aussi de l’effort
de recherche, de l’innovation, du financement des banques ou du
patriotisme industriel, sans lequel nul ne peut résister aux
conséquences de la mondialisation sauvage. Pour la nouvelle cléricature,
ces considérations impies sont vouées au grand bûcher de l’Inquisition.
Quelqu’un a dit : « La difficulté n’est pas de comprendre les idées nouvelles, mais d’échapper aux idées anciennes. » Il s’appelait Keynes. Encore un hérétique.
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