lundi 29 octobre 2012
Cris d'alarme contre les dénis français
Les sonneurs de tocsin doivent choisir leur moment.
Celui que
l'on traverse actuellement, avec la crise de l'Europe et le
désenchantement français, se prête hélas trop bien à faire retentir leur
écho. Les deux cris d'alarme que poussent Nicolas Baverez et Sophie
Pedder ne seront donc pas pris à la légère. Les lecteurs du Point
le savent bien : Baverez s'acharne depuis vingt ans à prédire le déclin
français si une prise de conscience collective et une réaction
énergique ne se produisent pas. Les faits lui donnent raison et son
pessimisme foncier trouve chaque année plus de confirmation. Avec Réveillez-vous !
(1), il récidive impérieusement, brandissant une panoplie d'arguments
peu contestables. La France s'enfonce, c'est un fait. Elle rétrograde à
tous les classements mondiaux, qu'il s'agisse de la compétitivité (six
places perdues en deux ans), de la marge des entreprises, du coût du
travail (supérieur de 10 % à celui de l'Allemagne, alors qu'il lui était
inférieur de 15 % en 2000), de la part des exportations françaises dans
le commerce mondial ou du poids des dépenses publiques.
Pour
reconstruire, Nicolas Baverez veut une nouvelle architecture d'ensemble.
Il a une obsession : que surtout la France ne reproduise pas les
erreurs catastrophiques des années 30, qu'elle écarte l'impasse de la
déflation pour mettre en place au contraire une politique de reflation à
l'allemande. Fallait-il pour autant invoquer un Munich intellectuel et
moral, asséner que la France se trouve au seuil de la guerre civile ? Le
disciple distingué, savant et clairvoyant de Raymond Aron perd ici la
mesure de son maître. L'essayiste ne résiste pas assez aux facilités du
polémiste.
Sophie Pedder, correspondante à Paris du prestigieux The Economist, choisit plutôt les armes de l'enquêtrice pour aboutir à un diagnostic, dans Le déni français
(2), qui arrive par des moyens différents à des conclusions proches de
celles de Nicolas Baverez. Son oeil anglo-saxon, sa méthode empirique
donnent une force impressionnante à son sombre verdict. Un État obèse
(emplois publics deux fois plus nombreux qu'en Allemagne), une
efficacité des dépenses publiques qui nous situe au 56e rang mondial, un
taux d'absentéisme abusif, cinq années de plus à la retraite que les
Allemands, un Code du travail archaïque : Sophie Pedder n'omet cependant
pas nos atouts et, ayant exploré nos provinces, juge les Français plus
lucides que leurs dirigeants. Des nuances bienvenues qui donnent du
crédit à sa thèse.
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