vendredi 1 juin 2012
Hollande plus banal que normal
Pour sa première intervention télévisée, le président de la République a
semblé content de lui et de ses premiers pas. Tant mieux !
Faute de pouvoir l'apprécier sur les
actes, et pour cause puisqu'il n'est à l'oeuvre que depuis trois
semaines à peine, c'est sur ses paroles, ses manières d'être, son style
qu'on se voit contraint pour l'instant de limiter le jugement sur le
nouveau président. On apprend peu à peu à le connaître dans son nouveau
statut de chef de l'État, en attendant de l'évaluer dans sa nouvelle
stature, à l'aune des résultats de sa politique. C'est ainsi qu'hier
soir, à la faveur de sa courte intervention sur France 2,
il a livré à l'opinion quelques signes propres à nous éclairer sur sa
psychologie. Des signes en vérité assez minces. Il avait peu à dire, du
fait d'un calendrier qui le place actuellement dans une position de
transition, à quelques jours des élections législatives, et alors qu'il
ignore encore sur quelle majorité parlementaire il pourra s'appuyer.
Sera-t-elle forte, sera-t-elle homogène ? On peut même rêver :
sera-t-elle là ?
Le motif de cette apparition superflue sur les écrans répondait
d'ailleurs au seul souci de peser sur le vote des électeurs, bien
qu'évidemment il s'en soit défendu. Il a appelé en effet les Français à
lui accorder "une majorité large, solide et cohérente" tout en feignant
de se tenir éloigné de cette préoccupation en précisant qu'il n'était
pas le chef de la majorité. Le procédé est classique dans cette
République. Il faut noter cependant que François Hollande
l'utilise de manière plus habile que ses "prédécesseurs". À ce propos,
observons que c'est le mot qu'il utilise constamment pour désigner et
pourfendre Nicolas Sarkozy, qu'il ne cesse d'invoquer, mais dont le nom lui écorche sans doute la bouche.
Cette habileté politique, qu'on a découverte au cours de la campagne,
apparaît décidément comme un trait majeur du caractère de François
Hollande. La mise en scène de l'intervention d'hier soir était
parfaitement réglée. Dans la journée, le Premier ministre avait ouvert
le dialogue social avec les syndicats. Dans la journée également, Jean-Marc Ayrault
avait confirmé l'encadrement des salaires des grands patrons
d'entreprises publiques. Il ne restait plus au président, le soir venu,
qu'à ramasser la mise pour en faire mine de rien un argument de campagne
électorale, en enrobant le cadeau dans un paquet flatteur
d'autosatisfaction sur le rôle éminent de la France et sur le sens des responsabilités de son président.
Là encore l'habileté, mais cette fois un peu trop visible, trop
appuyée. À l'entendre, son avènement est sur le point de bouleverser
l'ordre mondial. Tout juste si en deux semaines il n'a pas convaincu
Obama, ébranlé Merkel, séduit nos partenaires européens et si demain il
ne circonviendra Poutine à propos de la Syrie.
Diantre ! Naïveté ou suffisance ? Croit-il ce qu'il dit ou est-il dans
la posture ? Joue-t-il les importants, obsédé par le fantôme de
Mitterrand, ou a-t-il de réels talents que des années d'ambition
refoulée auraient cachés ? Quelle est sa vérité sous ses airs de
monsieur Tout-le-Monde ? Il dit trop qu'il veut "faire simple", et
qu'est-ce que cela signifie "faire simple" ? Être simple ou faire comme si on l'était ?
Le temps dissipera ces ambiguïtés. Car il est vrai qu'il y a une
ambiguïté Hollande. Assurément de l'intelligence et de l'adresse. Mais
une complexité et une soif de pouvoir inattendues. Tout sauf la
normalité.
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