Toujours des Mélenchon pour croire que la Révolution est arrivée. Toujours des Aubry pour mélanger les genres. Toujours des Duflot, fortes de leurs misérables 2 % pour hurler leur haine. Hollande a été plus malin qu'eux en se défilant du défilé. Très judicieusement, les syndicats relèguent en fond de cortège ces importuns, soucieux de leur propre intégrité et de leur autonomie, comme cette année encore où l'on a vu le patron de FO, Jean-Claude Mailly, préférer défiler à Tunis, et celui de la CFDT, François Chérèque, condamner la récupération politique de la manifestation.
Il est vrai toutefois que cette tradition d'indépendance connut hier une entorse du fait de l'engagement personnel de Bernard Thibault, patron de la CGT, en faveur de François Hollande. Mais ce ne fut qu'une brèche de plus dans l'unité syndicale. Il est vrai également que la tonalité du défilé fut visiblement plus hostile que d'ordinaire à l'action gouvernementale et à la personne du président de la République. Une tonalité plus politique. Mais Nicolas Sarkozy avait fait ce qu'il fallait : sa référence récente au "vrai" travail, bien que corrigée par la suite, était pour les manifestants un prétexte inespéré (ou espéré) à exprimer leur rejet. Sarkozy eut alors beau jeu de répondre aux dirigeants syndicaux : "Votre rôle n'est pas de défendre une idéologie, mais les travailleurs", ajoutant : "Posez le drapeau rouge et servez la France."
Vocabulaire
La France ! Comme ce mot a résonné avec une insistance particulière au cours de cette campagne ! Certes, c'est d'usage. A-t-on jamais connu une élection sans qu'une référence constante soit faite à la France, à son redressement, à sa force, à son destin, son histoire et sa gloire ? Mais cette fois plus que d'ordinaire, avec des accents particuliers dans la bouche de tous les candidats. On était au-delà de la convenance. Quelque chose de nouveau s'est produit au cours de ces derniers mois : les mots de France, de nation, de patrie, de frontières se sont introduits en force dans le vocabulaire des hommes politiques. Allons plus loin et anticipons.Quoi qu'il en soit du résultat de l'élection présidentielle, elle aura fait un vainqueur : la nation, et un vaincu : la mondialisation. Elle aura rassemblé les Français dans une quasi-unanimité autour de la remise en selle de la première et de la remise en cause de la seconde. Telle est sans doute la leçon majeure que l'on doit tirer de cette longue campagne et de sa conclusion.
Défense
On sait le pourquoi de ce phénomène. Il est l'aboutissement d'une crise, apparue il y a quatre ans, et qui se traduit par un profond remuement de nos certitudes. Elle a affaibli notre pays, comme la plupart de ses voisins européens, elle a révélé nos manques, elle menace notre avenir, elle réveille nos peurs. Il était fatal qu'elle provoquât, au-delà des inquiétudes, la tentation d'un repli sur soi. Cette tentation est sensible dans la totalité des discours et des propositions, quel que soit l'endroit d'où ils viennent. Elle est depuis longtemps le fonds de commerce du Front national. Elle domine la pensée des souverainistes, de gauche et de droite. Mélenchon l'exprime à sa façon. Elle a gagné le MoDem. On en entend l'écho dans les propos de Hollande. Et enfin et surtout, elle marque désormais en permanence la réflexion et le discours de Sarkozy.Repli sur soi est un mot fort. Disons plus justement que la France semble aujourd'hui se resserrer sur elle-même, face à un monde dont elle a du mal à suivre l'évolution, un nouveau monde, et face à une Europe en crise qui n'a pas su s'unir comme il aurait fallu devant l'adversité. Chaque famille politique répond à sa façon, en fonction de son idéologie propre, de sa culture et de ses intérêts, à ces données externes, mais toutes le font dans une attitude de défense et de résistance, en invoquant le même principe d'identité et de souveraineté. Ce phénomène, que la présente campagne a révélé, est capable de dominer la politique française au cours du quinquennat qui vient.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire