La France aura le plus grand mal à tenir l'objectif d'un déficit public réduit à 3 % l'an prochain. À politique inchangée, le FMI attend déjà que Paris viole le contrat collectif, avec un déficit de 3,9 % en 2013.
La Commission européenne dévoile vendredi matin ses prévisions pour 2012 et 2013, et tout porte à croire que l'horizon s'assombrit dans l'Euroland, avec une fragile exception allemande: récession ou croissance en berne, chômage en hausse, recettes fiscales déprimées. Pour les capitales qui veulent tenir les 3 %, cela signifie mécaniquement la rigueur, davantage de coupes et plus d'impôts.
À politique inchangée, le FMI attend déjà que Paris viole le contrat collectif, avec un déficit de 3,9 % en 2013. Le président élu promet à ses interlocuteurs européens de tenir les 3 % et de contrôler la dette. Les chiffres de l'UE vont le contraindre à dire comment, en même temps qu'il reviendrait sur l'âge de la retraite et relancerait l'embauche de fonctionnaires.
Le calendrier des 3 % est distinct du traité budgétaire inspiré par Angela Merkel. Il a été arrêté au sommet dès 2009, deuxième année de la crise financière. C'était un signal clair que les règles de bonne gestion ne seraient plus transgressées. Avec l'espoir aussi que, quatre ans plus tard, l'Europe et l'euro seraient sortis du bois. La récession et les retombées électorales de l'austérité viennent bouleverser le tableau.
La France, partie de très haut avec un déficit de 7,5 % du PIB en 2009, figure aussi parmi les pays qui ont le moins bien engagé leur atterrissage: 5,3 % en 2012, c'est-à-dire plus près de l'Espagne, du Portugal ou de la Grèce que de l'Allemagne (1 %), ou de l'Italie (2,1 %) d'après les prévisions de l'UE à l'automne. Avec Nicolas Sarkozy, «Paris a suivi une des trajectoires les plus faciles», reconnaît un haut responsable européen. La marche paraît d'autant plus haute à l'arrivée de François Hollande: il lui faudrait économiser l'équivalent de 2 points de PIB, soit 40 milliards d'euros, malgré les promesses électorales.
Bon et mauvais déficit
Le dilemme n'est pas propre à la France. Le gouvernement néerlandais de Mark Rutte, l'un des plus proches alliés de la chancelière en matière d'orthodoxie, a chuté le mois dernier sur un nouveau tour de vis budgétaire pour tenir les 3 %. Lui aussi conservateur, l'Espagnol Mariano Rajoy s'est fait tordre le bras à Bruxelles pour revenir dans les clous, malgré la récession. L'Allemagne est opposée à tout faux-fuyant et, au prix d'une solide langue de bois du nord au sud, l'objectif européen reste officiellement inchangé.Une discrète discussion s'est pourtant engagée au plus haut niveau de l'UE pour jouer d'une façon ou d'une autre avec le fameux pourcentage. Hors du Vieux Continent, Christine Lagarde, directrice générale du FMI, et Timothy Geithner, secrétaire américain au Trésor, multiplient les appels pour que l'UE diffère certaines coupes budgétaires, afin de ne pas tuer dans l'œuf toute reprise de l'activité.
Les dernières prévisions européennes pourraient pousser la controverse au grand jour. Repris mezzo voce à Bruxelles, l'Italien Mario Monti propose déjà d'élargir la cible en «sortant» du calcul les investissements publics d'avenir, ce qui revient à distinguer entre bon et mauvais déficit. La Commission et d'autres responsables proposent, eux, de reculer la ligne d'arrivée, mais seulement pour les plus mal en point: «Il n'est pas raisonnable d'exiger plus de sacrifices à un pays qui comme l'Espagne subit 23 % de chômage et ne dispose d'aucune réserve de croissance, confie en privé l'un des chefs de file de l'euro. La Grèce entre dans la même catégorie.» Apparemment pas la France, sauf si elle devait se ranger du côté des faillis…
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