Dans quelques mois, quand on se retournera sur cette campagne présidentielle, cette dernière semaine de janvier apparaîtra comme un moment décisif. Les jours, peut-être, où l’élection a basculé.
Ce matin, peut-on écrire que François Hollande a fait le plus difficile? Il a résisté au petit trou d’air qu’il a connu et à nouveau creusé l’écart dans les sondages, il a manifestement convaincu à la tribune du Bourget, et hier soir, il s’est plutôt bien sorti du piège des Paroles et des Actes, la grande émission politique dont il était l’invité sur France 2. Il était favori, et le voilà installé dans la posture de futur président, à commencer par la majorité de droite qui l’attaque comme s’il était déjà au pouvoir.
Cette position enviable est en vérité très inconfortable et lui laisse fort peu de marge de manœuvre. Étrange campagne, en vérité, où son intérêt est d’être le plus lisse possible. Son programme en 60 mesures ressemble à l’horloge de son éventuel mandat. Lent et discret, comme un tic-tac tranquille qui rythmera son mandat en fond sonore. La retenue comptable qui a caractérisé la présentation de ses grandes priorités a singulièrement contrasté avec la geste flamboyante de dimanche dernier. A travers ce plan de vol plutôt modeste, le candidat des socialistes a mis cartes sur table toute la distance qu’il voulait prendre avec le programme du PS. Rien de très spectaculaire, rien qui puisse vraiment donner prise à une polémique embarrassante. Rien qui choque. Rien qui chagrine. Rien qui provoque. Une classique perspective sociale-démocrate qui trace un chemin modeste à travers une réorientation de la fiscalité. D’une certaine façon, il a réduit les angles de sa caricature. Évitant de prêter le flanc, il oblige ses adversaires de droite à le prendre d’assaut, et dans ce type de séquence, sa placidité est un atout.
Le duel avec Alain Juppé a, sur ce point, été révélateur. Le ministre des Affaires étrangères a été brillant, comme à son habitude, mais il n’a pas eu d’autre choix que de jouer le rôle du professeur jusqu’à commettre l’erreur de moquer assez grossièrement la témérité supposée de son adversaire face aux Chinois. Il n’est pas sûr que la méthode soit efficace, tant cette éternelle condescendance n’a jamais vraiment réussi à la droite.
François Hollande a préféré esquiver comme si tout cela était de peu d’importance. A-t-il voulu signifier que sa pratique du pouvoir serait, en définitive, plus importante que ses réformes?
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