Avant les législatives de dimanche, le premier ministre et le président jouent la modestie face à leurs partisans.
Les deux membres de l'exécutif ont répondu trois heures durant aux questions d'un groupe de deux cents supporteurs réunis dans un quartier branché de la capitale. Comme à l'habitude, les participants avaient été sélectionnés par le parti pour leur humeur docile: un militaire bardé de médailles qui célèbre les vertus de sa «grande patrie», un médecin qui avait ausculté devant les télévisions l'épaule de Poutine, démise lors d'une séance de judo, la lauréate 2011 d'un concours de beauté… Une assistance trop révérencieuse pour être sincère, et qui avait reçu pour consigne de célébrer les mérites du couple Poutine-Medvedev.
Signes d'impatience
Mais ce dernier n'a pas été dupe des louanges. «Votre salaire n'est pas vraiment hors normes», a fait remarquer le chef du Kremlin à un chirurgien qui se félicitait de gagner, grâce à l'État… 19.000 roubles par mois (450 euros). «Grâce aux nouvelles salles d'opérations de notre clinique, nous travaillons dans des conditions très confortables et, chaque année, la qualité de nos diagnostics progresse», a insisté le praticien. Peu convaincu, Poutine a jugé que le système de santé russe «ne répondait pas toujours aux standards modernes».À son tour, une habitante de Nijnyi Novgorod, dont l'habitation a disparu dans les incendies de l'été 2010, a qualifié les deux chefs d'État de «magiciens». Grâce à vous, a-t-elle ajouté, «je vis dans une maison bien chauffée». «Mais les autres problèmes ont-ils été résolus?», a demandé Poutine, obligeant son interlocutrice à changer de partition pour avouer que, faute de fosses sceptiques adéquates, les eaux usées des maisons gouvernementales sont aujourd'hui évacuées par camion… Le premier ministre est théoriquement informé de ces malfaçons : en septembre 2010, il avait fait installer une caméra dans son bureau pour suivre en direct l'avancement des travaux.
À plusieurs reprises, face à ces discours convenus, les deux hommes ont manifesté des signes d'impatience. Depuis quelques semaines, Vladimir Poutine, dont la cote de popularité subit un effritement, reproche au parti Russie unie de placer le pouvoir exécutif sous couveuse, tout comme les anciens dirigeants soviétiques reprochaient à leur entourage de leur «cacher la réalité du pays». «Russie unie n'est pas toujours à la hauteur et ne réagit pas forcément de manière adéquate», a déclaré le premier ministre, lors du congrès de la formation, dimanche. Le président du parti à la Douma, Boris Gryzlov, terne apparatchik, pourrait être prochainement démis de ses fonctions.
«Depuis l'URSS, le conservatisme règne en politique, déplore le cinéaste Fiodor Bondartchouk, membre de Russie unie. Nous n'avons aucune culture du débat, qui n'a cours que sur Internet. Or, comme l'a montré le printemps arabe, on ne peut pas en faire l'économie.»
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