Nicolas Sarkozy, chacun a pu le remarquer, traverse un moment difficile. A cause de ses histoires de famille qui provoquent des effets désastreux sur son image mais aussi en coïncidence, sur le fond, à cause d'une sortie de crise qui impose un douloureux changement de cap.
Nous avons connu, dans les premiers mois, le libéral de la « rupture », puis le dirigiste de la crise ; devrait venir le « rigoriste » de la post-crise. Et cette troisième transmutation, qui va devenir indispensable au fur et à mesure que la reprise se confirme au cours de 2010, représente une considérable difficulté personnelle. La rigueur représente tout ce qu'il déteste !
La période des réformes avait laissé entrevoir un Nicolas Sarkozy ambigu, plus motivé par le « changement pour le changement » que par l'imposition à la France de médecines libérales. Le président gaulliste, un jour sur deux mal à l'aise dans l'étoffe libérale, fut vite critiqué pour manquer de cap d'ensemble et pour la superficialité de ses réformes. Sitôt engagées, elles semblaient laissées en plan, inabouties. Même si le bilan chiffré reste à faire, retenons de cette phase Sarkozy I une conséquence économique : les réformes n'ont pas été conduites assez loin pour que la « croissance potentielle » du pays s'en trouve véritablement améliorée.
La crise a mis fin à l'ambiguïté. Elle a « révélé » Nicolas Sarkozy au sens où elle a autorisé sa nature bonapartiste à s'exprimer légitimement, sur la scène nationale et, plus valorisant encore, sur la scène internationale. L'homme des batailles s'est trouvé au plaisir des commandes ; il pouvait voir tout, décider de tout, manifester son volontarisme en tout (lire « Retombées de la crise », Alain Duhamel et Marcel Gauchet, in « Le Débat », n° 156, septembre-octobre 2009).
Plan de sauvetage des banques, plan de relance puis G20 : cette phase Sarkozy II a été riche de succès. Sur les choix : la France a judicieusement porté ses efforts sur les entreprises, refusant les traditionnelles mais inappropriées « relances de la consommation » ou hausses du SMIC. Une bonne entente a été trouvée avec les syndicats pour écarter les surenchères gauchistes : c'est une première que l'on ne salue pas assez, 2009 efface les grèves de 1995. En revanche, le débat interne au gouvernement sur la taille de la relance n'a pas été tranché : sous l'influence de Bercy et de Matignon, la France a trouvé suffisant d'injecter des dépenses publiques à hauteur de 1,5 % de son PIB seulement, contre 3,7 % en Allemagne ou 3,9 % en Grande-Bretagne (chiffres du FMI). Avec raison, elle s'en est tenue à 30 milliards, dont 20 en 2009 et 10 à venir en 2010. Mais cette victoire n'a été que provisoire : Nicolas Sarkozy a relancé la relance en annonçant le « grand emprunt » dans son discours au congrès de Versailles en juin dernier. Ses 30 milliards (selon Michel Rocard) s'ajouteront aux 30 précédents. Puis, tout au plaisir de sa phase II, il a fait préparer un budget 2010 de couleurs keynésiéno-bonapartiste : le déficit n'importe pas, on verra plus tard. Et la France est le seul pays à n'avoir pas encore prévu de chemin de retour à l'équilibre.
Cette phase II va s'achever à son tour, le débat sur la suivante s'est ouvert au sein de la majorité. Comme le FMI et la Commission européenne ont averti que la reprise n'était pas si solide qu'on puisse déjà abattre la toile et retirer les soutiens publics, le président trouve là un premier argument pour attendre. Il en trouve un deuxième dans l'« utilité » des dépenses. Le grand emprunt et la réforme de la taxe professionnelle sont supposés créer des « chocs de compétitivité ». La stratégie est de « préparer l'avenir », d'investir pour que la croissance potentielle du pays regagne le 0,5 point que la crise lui a fait perdre (la faisant retomber de 1,7 % environ à 1,2 %).
On objectera que les réformes bien conduites auraient déjà dû apporter ce 0,5 point de compétitivité. Pourquoi ne pas les avoir achevées ? Et surtout que l'état des comptes est tel que même un surcroît de croissance n'empêchera plus la dette de s'alourdir. La rigueur va s'imposer durement et le plus tôt fera le moins mal. « Cette politique a toujours échoué », se défend Nicolas Sarkozy. On comprend surtout qu'il va repousser, au-delà du raisonnable, l'entrée dans la réalité honnie d'un bonapartisme sans moyens.
ERIC LE BOUCHER EST DIRECTEUR DE LA REDACTION D'« ENJEUX-LES ECHOS ».
Nicolas Sarkozy, chacun a pu le remarquer, traverse un moment difficile. A cause de ses histoires de famille qui provoquent des effets désastreux sur son image mais aussi en coïncidence, sur le fond, à cause d'une sortie de crise qui impose un douloureux changement de cap.
Nous avons connu, dans les premiers mois, le libéral de la « rupture », puis le dirigiste de la crise ; devrait venir le « rigoriste » de la post-crise. Et cette troisième transmutation, qui va devenir indispensable au fur et à mesure que la reprise se confirme au cours de 2010, représente une considérable difficulté personnelle. La rigueur représente tout ce qu'il déteste !
La période des réformes avait laissé entrevoir un Nicolas Sarkozy ambigu, plus motivé par le « changement pour le changement » que par l'imposition à la France de médecines libérales. Le président gaulliste, un jour sur deux mal à l'aise dans l'étoffe libérale, fut vite critiqué pour manquer de cap d'ensemble et pour la superficialité de ses réformes. Sitôt engagées, elles semblaient laissées en plan, inabouties. Même si le bilan chiffré reste à faire, retenons de cette phase Sarkozy I une conséquence économique : les réformes n'ont pas été conduites assez loin pour que la « croissance potentielle » du pays s'en trouve véritablement améliorée.
La crise a mis fin à l'ambiguïté. Elle a « révélé » Nicolas Sarkozy au sens où elle a autorisé sa nature bonapartiste à s'exprimer légitimement, sur la scène nationale et, plus valorisant encore, sur la scène internationale. L'homme des batailles s'est trouvé au plaisir des commandes ; il pouvait voir tout, décider de tout, manifester son volontarisme en tout (lire « Retombées de la crise », Alain Duhamel et Marcel Gauchet, in « Le Débat », n° 156, septembre-octobre 2009).
Plan de sauvetage des banques, plan de relance puis G20 : cette phase Sarkozy II a été riche de succès. Sur les choix : la France a judicieusement porté ses efforts sur les entreprises, refusant les traditionnelles mais inappropriées « relances de la consommation » ou hausses du SMIC. Une bonne entente a été trouvée avec les syndicats pour écarter les surenchères gauchistes : c'est une première que l'on ne salue pas assez, 2009 efface les grèves de 1995. En revanche, le débat interne au gouvernement sur la taille de la relance n'a pas été tranché : sous l'influence de Bercy et de Matignon, la France a trouvé suffisant d'injecter des dépenses publiques à hauteur de 1,5 % de son PIB seulement, contre 3,7 % en Allemagne ou 3,9 % en Grande-Bretagne (chiffres du FMI). Avec raison, elle s'en est tenue à 30 milliards, dont 20 en 2009 et 10 à venir en 2010. Mais cette victoire n'a été que provisoire : Nicolas Sarkozy a relancé la relance en annonçant le « grand emprunt » dans son discours au congrès de Versailles en juin dernier. Ses 30 milliards (selon Michel Rocard) s'ajouteront aux 30 précédents. Puis, tout au plaisir de sa phase II, il a fait préparer un budget 2010 de couleurs keynésiéno-bonapartiste : le déficit n'importe pas, on verra plus tard. Et la France est le seul pays à n'avoir pas encore prévu de chemin de retour à l'équilibre.
Cette phase II va s'achever à son tour, le débat sur la suivante s'est ouvert au sein de la majorité. Comme le FMI et la Commission européenne ont averti que la reprise n'était pas si solide qu'on puisse déjà abattre la toile et retirer les soutiens publics, le président trouve là un premier argument pour attendre. Il en trouve un deuxième dans l'« utilité » des dépenses. Le grand emprunt et la réforme de la taxe professionnelle sont supposés créer des « chocs de compétitivité ». La stratégie est de « préparer l'avenir », d'investir pour que la croissance potentielle du pays regagne le 0,5 point que la crise lui a fait perdre (la faisant retomber de 1,7 % environ à 1,2 %).
On objectera que les réformes bien conduites auraient déjà dû apporter ce 0,5 point de compétitivité. Pourquoi ne pas les avoir achevées ? Et surtout que l'état des comptes est tel que même un surcroît de croissance n'empêchera plus la dette de s'alourdir. La rigueur va s'imposer durement et le plus tôt fera le moins mal. « Cette politique a toujours échoué », se défend Nicolas Sarkozy. On comprend surtout qu'il va repousser, au-delà du raisonnable, l'entrée dans la réalité honnie d'un bonapartisme sans moyens.
ERIC LE BOUCHER EST DIRECTEUR DE LA REDACTION D'« ENJEUX-LES ECHOS ».
Nicolas Sarkozy, chacun a pu le remarquer, traverse un moment difficile. A cause de ses histoires de famille qui provoquent des effets désastreux sur son image mais aussi en coïncidence, sur le fond, à cause d'une sortie de crise qui impose un douloureux changement de cap.
Nous avons connu, dans les premiers mois, le libéral de la « rupture », puis le dirigiste de la crise ; devrait venir le « rigoriste » de la post-crise. Et cette troisième transmutation, qui va devenir indispensable au fur et à mesure que la reprise se confirme au cours de 2010, représente une considérable difficulté personnelle. La rigueur représente tout ce qu'il déteste !
La période des réformes avait laissé entrevoir un Nicolas Sarkozy ambigu, plus motivé par le « changement pour le changement » que par l'imposition à la France de médecines libérales. Le président gaulliste, un jour sur deux mal à l'aise dans l'étoffe libérale, fut vite critiqué pour manquer de cap d'ensemble et pour la superficialité de ses réformes. Sitôt engagées, elles semblaient laissées en plan, inabouties. Même si le bilan chiffré reste à faire, retenons de cette phase Sarkozy I une conséquence économique : les réformes n'ont pas été conduites assez loin pour que la « croissance potentielle » du pays s'en trouve véritablement améliorée.
La crise a mis fin à l'ambiguïté. Elle a « révélé » Nicolas Sarkozy au sens où elle a autorisé sa nature bonapartiste à s'exprimer légitimement, sur la scène nationale et, plus valorisant encore, sur la scène internationale. L'homme des batailles s'est trouvé au plaisir des commandes ; il pouvait voir tout, décider de tout, manifester son volontarisme en tout (lire « Retombées de la crise », Alain Duhamel et Marcel Gauchet, in « Le Débat », n° 156, septembre-octobre 2009).
Plan de sauvetage des banques, plan de relance puis G20 : cette phase Sarkozy II a été riche de succès. Sur les choix : la France a judicieusement porté ses efforts sur les entreprises, refusant les traditionnelles mais inappropriées « relances de la consommation » ou hausses du SMIC. Une bonne entente a été trouvée avec les syndicats pour écarter les surenchères gauchistes : c'est une première que l'on ne salue pas assez, 2009 efface les grèves de 1995. En revanche, le débat interne au gouvernement sur la taille de la relance n'a pas été tranché : sous l'influence de Bercy et de Matignon, la France a trouvé suffisant d'injecter des dépenses publiques à hauteur de 1,5 % de son PIB seulement, contre 3,7 % en Allemagne ou 3,9 % en Grande-Bretagne (chiffres du FMI). Avec raison, elle s'en est tenue à 30 milliards, dont 20 en 2009 et 10 à venir en 2010. Mais cette victoire n'a été que provisoire : Nicolas Sarkozy a relancé la relance en annonçant le « grand emprunt » dans son discours au congrès de Versailles en juin dernier. Ses 30 milliards (selon Michel Rocard) s'ajouteront aux 30 précédents. Puis, tout au plaisir de sa phase II, il a fait préparer un budget 2010 de couleurs keynésiéno-bonapartiste : le déficit n'importe pas, on verra plus tard. Et la France est le seul pays à n'avoir pas encore prévu de chemin de retour à l'équilibre.
Cette phase II va s'achever à son tour, le débat sur la suivante s'est ouvert au sein de la majorité. Comme le FMI et la Commission européenne ont averti que la reprise n'était pas si solide qu'on puisse déjà abattre la toile et retirer les soutiens publics, le président trouve là un premier argument pour attendre. Il en trouve un deuxième dans l'« utilité » des dépenses. Le grand emprunt et la réforme de la taxe professionnelle sont supposés créer des « chocs de compétitivité ». La stratégie est de « préparer l'avenir », d'investir pour que la croissance potentielle du pays regagne le 0,5 point que la crise lui a fait perdre (la faisant retomber de 1,7 % environ à 1,2 %).
On objectera que les réformes bien conduites auraient déjà dû apporter ce 0,5 point de compétitivité. Pourquoi ne pas les avoir achevées ? Et surtout que l'état des comptes est tel que même un surcroît de croissance n'empêchera plus la dette de s'alourdir. La rigueur va s'imposer durement et le plus tôt fera le moins mal. « Cette politique a toujours échoué », se défend Nicolas Sarkozy. On comprend surtout qu'il va repousser, au-delà du raisonnable, l'entrée dans la réalité honnie d'un bonapartisme sans moyens.
ERIC LE BOUCHER EST DIRECTEUR DE LA REDACTION D'« ENJEUX-LES ECHOS ».
Nicolas Sarkozy, chacun a pu le remarquer, traverse un moment difficile. A cause de ses histoires de famille qui provoquent des effets désastreux sur son image mais aussi en coïncidence, sur le fond, à cause d'une sortie de crise qui impose un douloureux changement de cap.
Nous avons connu, dans les premiers mois, le libéral de la « rupture », puis le dirigiste de la crise ; devrait venir le « rigoriste » de la post-crise. Et cette troisième transmutation, qui va devenir indispensable au fur et à mesure que la reprise se confirme au cours de 2010, représente une considérable difficulté personnelle. La rigueur représente tout ce qu'il déteste !
La période des réformes avait laissé entrevoir un Nicolas Sarkozy ambigu, plus motivé par le « changement pour le changement » que par l'imposition à la France de médecines libérales. Le président gaulliste, un jour sur deux mal à l'aise dans l'étoffe libérale, fut vite critiqué pour manquer de cap d'ensemble et pour la superficialité de ses réformes. Sitôt engagées, elles semblaient laissées en plan, inabouties. Même si le bilan chiffré reste à faire, retenons de cette phase Sarkozy I une conséquence économique : les réformes n'ont pas été conduites assez loin pour que la « croissance potentielle » du pays s'en trouve véritablement améliorée.
La crise a mis fin à l'ambiguïté. Elle a « révélé » Nicolas Sarkozy au sens où elle a autorisé sa nature bonapartiste à s'exprimer légitimement, sur la scène nationale et, plus valorisant encore, sur la scène internationale. L'homme des batailles s'est trouvé au plaisir des commandes ; il pouvait voir tout, décider de tout, manifester son volontarisme en tout (lire « Retombées de la crise », Alain Duhamel et Marcel Gauchet, in « Le Débat », n° 156, septembre-octobre 2009).
Plan de sauvetage des banques, plan de relance puis G20 : cette phase Sarkozy II a été riche de succès. Sur les choix : la France a judicieusement porté ses efforts sur les entreprises, refusant les traditionnelles mais inappropriées « relances de la consommation » ou hausses du SMIC. Une bonne entente a été trouvée avec les syndicats pour écarter les surenchères gauchistes : c'est une première que l'on ne salue pas assez, 2009 efface les grèves de 1995. En revanche, le débat interne au gouvernement sur la taille de la relance n'a pas été tranché : sous l'influence de Bercy et de Matignon, la France a trouvé suffisant d'injecter des dépenses publiques à hauteur de 1,5 % de son PIB seulement, contre 3,7 % en Allemagne ou 3,9 % en Grande-Bretagne (chiffres du FMI). Avec raison, elle s'en est tenue à 30 milliards, dont 20 en 2009 et 10 à venir en 2010. Mais cette victoire n'a été que provisoire : Nicolas Sarkozy a relancé la relance en annonçant le « grand emprunt » dans son discours au congrès de Versailles en juin dernier. Ses 30 milliards (selon Michel Rocard) s'ajouteront aux 30 précédents. Puis, tout au plaisir de sa phase II, il a fait préparer un budget 2010 de couleurs keynésiéno-bonapartiste : le déficit n'importe pas, on verra plus tard. Et la France est le seul pays à n'avoir pas encore prévu de chemin de retour à l'équilibre.
Cette phase II va s'achever à son tour, le débat sur la suivante s'est ouvert au sein de la majorité. Comme le FMI et la Commission européenne ont averti que la reprise n'était pas si solide qu'on puisse déjà abattre la toile et retirer les soutiens publics, le président trouve là un premier argument pour attendre. Il en trouve un deuxième dans l'« utilité » des dépenses. Le grand emprunt et la réforme de la taxe professionnelle sont supposés créer des « chocs de compétitivité ». La stratégie est de « préparer l'avenir », d'investir pour que la croissance potentielle du pays regagne le 0,5 point que la crise lui a fait perdre (la faisant retomber de 1,7 % environ à 1,2 %).
On objectera que les réformes bien conduites auraient déjà dû apporter ce 0,5 point de compétitivité. Pourquoi ne pas les avoir achevées ? Et surtout que l'état des comptes est tel que même un surcroît de croissance n'empêchera plus la dette de s'alourdir. La rigueur va s'imposer durement et le plus tôt fera le moins mal. « Cette politique a toujours échoué », se défend Nicolas Sarkozy. On comprend surtout qu'il va repousser, au-delà du raisonnable, l'entrée dans la réalité honnie d'un bonapartisme sans moyens.
Eric Le Boucher.
dimanche 25 octobre 2009
La chronique d'Eric Le Boucher
Attention, Nicolas Sarkozy, dans certaines circonstances, peut se transformer en un redoutable EURYBIADE.
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