Au classement de la compétitivité établi par le Forum économique de Davos, la France se trouve à une médiocre 23ème place. L'analyse détaillée montre que c’est l’État qui plombe notre compétitivité.
jeudi 26 septembre 2013
Compétitivité : la France continue à décliner
En fonction du calendrier, nous avons donné priorité la semaine dernière aux élections allemandes. Cela ne nous a pas permis de commenter à chaud la publication, le 4 septembre, du classement annuel de la compétitivité établi par le Forum économique de Davos, Depuis des années, la France recule et elle se trouve désormais à une médiocre 23ème place. Cependant une analyse plus détaillée montre que c’est dans certains domaines, comme le marché du travail ou le poids des prélèvements obligatoires, que nous obtenons des notes catastrophiques. On peut sans doute polémiquer sur la fiabilité de ces indicateurs, mais l’essentiel demeure : chez nous c’est l’État qui plombe notre compétitivité.
Mesure de la compétitivité ou fantasmes de chefs d’entreprise ?
On peut ne pas aimer le Forum de Davos, avec son coté bling bling, mondain et médiatique, où ce qui importe est d’y être vu. Aucune solution concrète n’en est jamais sorti. Toutefois, lorsqu’on s’éloigne de cette écume médiatique, certaines analyses ne manquent pas de pertinence. C’est le cas de l’indice de compétitivité et d’innovation publié chaque année par le Forum économique mondial, qui permet un classement des pays. L’indice est le fruit d’enquêtes quantitatives et qualitatives, prenant en compte l’analyse des acteurs économiques de chaque pays, à commencer par les chefs d’entreprises (13 000 sont interrogés), mais aussi de nombreuses données chiffrées.
On peut discuter de tel ou tel aspect technique, mais il faut avoir des lunettes idéologiques, en forme de lutte des classes, comme le fait dans Le Monde un « économiste, membre du conseil scientifique d’ATTAC », le 10 septembre, pour chercher à démontrer que ce classement reflèterait avant tout les « fantasmes » des chefs d’entreprise et non la réalité. Serait-on plus proche de la réalité en interrogeant sur le sujet les syndicats, CGT en tête ? Faudrait-il prendre l’opinion des « enrayeurs » au sens de Bastiat, c’est-à-dire de ceux qui plombent notre compétitivité ? Sauf à s’enfermer dans une vision marxiste de lutte des classes, sauf à condamner « l’exploitation par le grand capital », on admettra que les chefs d’entreprise ont quelque pertinence à parler de la compétitivité de leurs entreprises.
Le classement global des 148 pays est déjà intéressant en soi. On trouve en numéro 1 la Suisse, puis Singapour, la Finlande, l’Allemagne, les États-Unis, la Suède, Hong-Kong, les Pays-Bas, le Japon et le Royaume-Uni. Voilà pour le « top ten ». Viennent ensuite la Norvège, Taïwan, le Qatar, le Canada, le Danemark, l’Autriche, la Belgique, La Nouvelle-Zélande, les Émirats Arabes Unis et l’Arabie Saoudite. En 21ème place, l’Australie, suivie du Luxembourg et enfin en 23ème rang la France. Nous sommes donc distancés non seulement par de nombreux pays développés, mais aussi par un certain nombre de pays émergents. Et nous sommes talonnés désormais par la Chine, au 29ème rang.
L’analyse dynamique est également intéressante : depuis des années, la France ne cesse de reculer. En 2013, à nouveau, nous avons perdu deux places, puisque nous étions 21ème en 2012, tandis que d’autres pays, dont l’Allemagne, progressent et creusent l’écart avec nous. En deux ans, nous avons perdu 5 places et nous étions 15ème en 2010 !
Pourtant, si l’on entre dans le détail on est frappé par le contraste entre les divers indicateurs, qui sont au nombre de 100. Il y a des domaines où, objectivement, nous nous en sortons bien. Nous sommes 4e en matière d’infrastructures (on pourrait certes s’interroger sur leur coût), 5e pour les écoles de commerce et de gestion (en général privées, alors que nous ne sommes que 24ème pour l’ensemble de l’enseignement supérieur, qui est largement public). Les entreprises nous placent au 17ème rang pour leur capacité à adopter les nouvelles technologies, ou au 16ème pour leur capacité d‘innovation et au 17ème pour leur maturité technologique. Dans sa hargne contre les entreprises, le représentant d’ATTAC n’y voit que le résultat de l’autosatisfaction des entrepreneurs.
Ce qui va mal : impôts et réglementations
Par contraste, nos résultats sont catastrophiques dans certains domaines. C’est le cas du marché du travail, pour lequel nous ne sommes que 117ème en matière de flexibilité. Pire encore, nous voilà 135ème pour les relations conflictuelles entre entrepreneurs et salariés, et même 144ème (sur 148 !) pour les règles trop strictes encadrant les licenciements. Nous n’avons cessé de dire ici même que le problème majeur de l’emploi en France venait du fait que le marché du travail n’était plus un véritable marché. En voici une nouvelle confirmation. Comme le remarque le rapport, « la compétitivité de la France serait renforcée en injectant davantage de flexibilité dans son marché du travail ».
Nous sommes également très mal placés en matière d’imposition et de prélèvements obligatoires. Nous voilà 137ème pour une fiscalité défavorable à l’investissement privé, 135ème pour la dette publique, 134ème pour le taux d’imposition en pourcentage des profits, 127ème pour les incitations fiscales à travailler et 134ème pour les prélèvements obligatoires. Ajoutons une 130ème place pour le poids global des réglementations, et une 137ème pour les règlementations liées au fait d’entreprendre. Nous avons donc le cocktail parfait pour l’échec : fiscalisation à outrance et régulation omniprésente. Et ce n’est pas avec « le pacte de compétitivité » que l’on rompra avec cette situation.
Se désintoxiquer de l’État
Bien entendu, c’est cela que le représentant d’ATTAC qualifie de « fantasmes des patrons », et de tous ceux qui rêvent d’une France plus compétitive avec moins de taxes, moins de charges, moins de réglementations. Serait-ce à dire qu’on devient plus compétitif en augmentant les prélèvements et en paralysant les entreprises par une réglementation accrue ? « L’économiste » d’ATTAC qui s’exprime dans Le Monde n’est pas homme à se démonter et trouve argument dans le soutien que la Commission Européenne apporte au patronat français, puisqu’elle a indiqué que « les salaires ont augmenté rapidement et pesé sur les prix et la rentabilité des entreprises (…). Les rigidités du marché du travail français ont également contribué à l’évolution du coût du travail et ont pu limiter le potentiel d’adaptation de l’économie et les gains de productivité ». Les entrepreneurs et les dirigeants européens, même combat : l’ultralibéralisme. Le Monde ne se grandit pas en publiant de telles fantaisies.
Si l’on redevient sérieux, on observera que l’analyse de Davos qui incrimine les prélèvements et les réglementations de l’État français rejoint un ensemble d’autres analyses. Le classement d’Ernst & Young sur l’attractivité des grands pays pour les investissements allait dans le même sens dès le mois de juin, soulignant le risque de décrochage de la France. De même les indices de liberté économique publiés par Heritage Foundation ou le Fraser Institute sont encore plus sévères pour la France, puisque l’État ne cesse de rogner les libertés économiques.
Le déclin français est-il inéluctable ? La France est droguée aux impôts et à la réglementation publique. La France est malade de son État. Ce n’est pas nouveau, mais il est temps d’entamer une sérieuse cure de désintoxication.
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