Il faut, bien sûr, être indulgent. Des erreurs, qui n’en commet pas ? De gauche comme de droite, tous les gouvernements se sont illustrés par des bévues plus ou moins grossières ou plus ou moins ridicules.
Et, pour la politique budgétaire, le couperet a été aussi violent. Afin d’abaisser à marche forcée dès cette année les déficits publics sous la barre des 3 % de la richesse nationale, Bercy a multiplié les mesures d’économie, au risque d’étouffer un pays déjà au bord de la récession.
Il y a eu ensuite le « choc de compétitivité ». Là encore, le gouvernement a pratiqué la politique économique du coucou, en mettant en oeuvre une réforme dont Nicolas Sarkozy s’était fait le champion et que le candidat François Hollande avait vivement critiquée. Et, sans le moindre scrupule, les socialistes ont même annoncé qu’ils useraient de la TVA pour financer la réforme – TVA qu’ils ont toujours vouée dans le passé aux gémonies.
Cap à droite toujours, avec la modernisation du marché du travail. Même si la négociation entre les partenaires sociaux n’a pas encore abouti, l’inspiration de cette autre réforme est transparente : elle trouve sa source dans les pamphlets ultralibéraux concoctés par l’OCDE et le FMI qui depuis des lustres font campagne pour une flexibilité accrue en faveur des entreprises. Et puis, au bilan économique de cette année 2012, il faut encore inscrire une cascade de reniements. Il y a eu ainsi le manquement à la parole donnée aux ouvriers sidérurgistes de Florange, qui ont été aussi maltraités par la gauche que ceux de Gandrange l’avaient été sous le quinquennat précédent.
Autre promesse bafouée – et de quelle manière : alors que François Hollande avait promis de faire la guerre à la finance et en conséquence de séparer les activités de banque de dépôt et de banque d’investissement, la loi bancaire, qui vient d’être dévoilée, tourne quasiment le dos à ce projet. Et on pourrait poursuivre longtemps cette triste litanie des réformes de droite conduite par un gouvernement de gauche. En mentionnant le maintien des scandaleux avantages consentis aux plus grandes fortunes, au travers de systèmes de défiscalisation dans les DOM-TOM ou pour le cinéma (Sofica)… Du coup, à suivre toutes ces palinodies de la politique économique socialiste, on se rend compte que l’indulgence, en fait, n’est pas de mise. La stupide impréparation qui a conduit à la censure de la taxe à 75 % ne serait qu’une péripétie, n’entachant qu’à peine une politique économique cohérente et réformatrice, on serait enclin à ne pas y attacher d’importance.
Mais, dans le cas présent, il en va différemment. Cette taxe à 75 %, sortie à la va-vite par François Hollande en pleine campagne présidentielle pour draguer les voix de la gauche de la gauche, n’était pas en cohérence avec la politique économique qui est aujourd’hui la sienne. C’était la seule mesure un tantinet de gauche, même si elle était très mal construite et n’avait en vérité rien à voir avec la « révolution fiscale » promise ces dernières années par les socialistes.
Alors, que cette réforme soit maintenant censurée semble logique : de la part des socialistes, cela ressemble presque à un acte manqué. Ils rêvaient de se délester d’une promesse inconsidérée ; le Conseil constitutionnel les y a aidés ! Si François Hollande était honnête, il ne devrait donc pas cacher sa satisfaction, car, même si ce n’est pas de son fait, la politique économique qu’il impulse a enfin trouvé sa cohérence.
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