TOUT EST DIT

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dimanche 6 janvier 2013

Xavier Niel peut se battre contre Google mais pas tuer toute la presse en ligne au passage


Selon une source proche du dossier, le dispositif de blocage des publicités sur Internet, installé par défaut depuis jeudi par l'opérateur Free, devrait être désamorcé "dans les jours qui viennent". Il s'agissait pour Free d'un moyen de pression pour amener Google à partager une partie de ses revenus.

Depuis le 2 janvier, les abonnés à l'offre Free ADSL bénéficient d'une option qui bloque les publicités directement depuis leur box. Ce dispositif devrait être désamorcé dans les prochains jours selon une source proche du dossier a-t-on appris ce samedi. Ce système, pensé par Free pour faire pression sur le géant Google alors que les deux sociétés sont en plein conflit sur le financement de la bande passante, ne risque-t-il pas de faire de gros dégâts collatéraux sur les structures financées par la publicité ?

Jean-Baptiste Fontana : De nombreux sites internet, et notamment ceux de la presse en ligne, ont mis en place un contrat moral avec leurs lecteurs : Vous disposez d'une information qui a une valeur, on ne vous la fait pas payer car ce sont les annonceurs qui la payent pour vous.
 
A partir de là, si le lecteur ou le FAI en tant qu'intermédiaire casse ce contrat, forcément tout le système s'écroule. On en revient à la question de base des modèles économiques de la presse : qui paye l'information ?
 
Deezer en est un bon exemple : c'est gratuit avec de la publicité ou en payant en service premium sans publicité, et dans tous les cas, les artistes sont rémunérés.
 
Je considère qu'utiliser un système de blocage des publicités sans rétribuer les éditeurs s'apparente tout simplement à du piratage. C'est exactement la même chose que de télécharger un film ou une musique sans payer.
Ce fou qui se prend pour Steve Jobs
 
Ce peut être aussi le point de départ d'une réflexion avec le public et les FAI. Si on va au bout de la logique de Free, l'idée serait de proposer un abonnement internet premium avec l'option "sans publicité" payante qui permettrait de rétribuer les éditeurs. Mais ça soulève de nombreuses questions, comme la dépendance des éditeurs vis à vis des FAI et surtout de la neutralité du net.
 
Dans tous les cas, bloquer la publicité sauvagement, c'est la mort assurée d'une bonne partie des sites d'information. Le législateur doit donc se saisir de ce dossier.
 

Certains affirment qu'une telle mesure porte atteinte à la "neutralité du web" ? Partagez-vous ce constat ?

Bien sûr. Au nom de quoi un FAI a t'il le droit de modifier le contenu des pages consultées par les internautes sans leur consentement ?
Apparemment ce filtrage ne concerne pas toutes les régies. C'est déjà une source de suspicion. Peut être que demain, un FAI contactera des régies pour désactiver le filtrage en échange d'une commission.
 
Là c'est la publicité, mais une brèche est ouverte. C'est au citoyen, et lui seul, de décider ce qu'il souhaite ou pas consulter. La société civile doit s'approprier ce débat de fond sur la liberté et la neutralité du web. Chacun doit être responsable bien sûr, mais ce n'est certainement pas aux fournisseurs d'accès de décider ce qui est bon ou pas pour le citoyen. La prochaine étape ce sera quoi ? Des censures éditoriales, politiques, idéologiques, communautaire

Une réglementation de la publicité intrusive ne serait-elle pas préférable à un blocage automatique des contenus publicitaires ?

Un grand travail de pédagogie doit être fait avec le public, mais aussi du coté des annonceurs. Avec le public d'abord, pour qu'il accepte que l'information a un coût et qu'il faut bien la payer de manière directe ou indirecte.
 
Du coté des publicitaires également, il est important de fixer des règles de bonne conduite.Il y a trop d'abus sur les réseaux sociaux autour des données personnelles. C'est opaque, et trop souvent, sous prétexte de jeux ou d'applications faussement gratuites, les utilisateurs cèdent à leur insu leurs données personnelles. La publicité comportementale pose elle aussi de sérieuses questions sur le tracking permanent et excessif des internautes.
 
Maintenant, c'est aussi aux annonceurs de faire le choix de campagnes de qualité. On a aujourd'hui des formats très intéressants, tantôt créatifs, ludiques ou esthétiques qui permettent de mettre en avant l'annonceur autrement que par des popups et interstitiels intrusifs.
 
De la même manière que pour la question des adblockers, si les professionnels n'arrivent pas à fixer eux-mêmes les règles, alors que le législateur intervienne.

La ministre de l'Economie numérique, Fleur Pellerin, devra arbitrer lundi le conflit entre les différents acteurs. Que peut-on attendre de cette réunion ? Un compromis est-il envisageable ?

Un compromis à court terme certainement. Il est probable que Free revienne sur le blocage par défaut, tout en maintenant le service de manière optionnelle, c'est à priori le souhait de la ministre. Après tout, Xavier Niel a parfaitement réussi son coup marketing vis à vis du public et marqué des points face à Google dans leur bras de fer.

La presse en ligne est une victime collatérale n'avait vraiment pas besoin de ça pour débuter 2013.

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