vendredi 23 novembre 2012
Le juge et le président
Le juge et le président
Pour la deuxième fois en France, un ancien chef de l’Etat est
convoqué chez un juge pour y décortiquer ses finances. Scène
inimaginable il y a peu: naguère, on attendait d’abord des hommes
politiques qu’ils fassent preuve d’efficacité. Etaient-ils un peu trop
malins, on haussait les sourcils, mais cela n’allait guère plus loin.
L’élu était un être à part, comme si la cocarde tricolore faisait office
de bouclier imperméable aux éclaboussures. Le pouvoir était gage de
majesté et souvent d’intouchabilité.
Aujourd’hui, du haut en bas
de l’échelle républicaine, l’élu est amené à rendre des comptes, au
propre comme au figuré. Avant de gouverner les autres, il est prié de se
gouverner lui-même. Les fonds secrets qui se promenaient en liberté
dans les ministères, les enveloppes pleines de billets qui payaient en
liquide des dépenses singulières n’ont (en principe) plus droit de cité.
La République donne la main à la judiciarisation galopante. Sa devise
s’est élargie: «Liberté, Egalité, Fraternité, Traçabilité».
L’éventuelle
mise en examen d’un élu fait partie des risques politiques; c’est une
probabilité statistique dans une carrière électorale.
Même le
placement d’un ancien président comme «témoin assisté» n’est plus un
coup de tonnerre. On grince ou on lève les yeux au ciel, mais on ne s’en
émeut plus: on l’ajoute aux autres pierres qui jonchent le jardin de la
démocratie représentative.
Mais si la puissance judiciaire peut
faire jeu égal avec le pouvoir politique, elle ne pourra pas éluder
éternellement la question du tempo de ses actes, si lents, si décalés
par rapport aux autres calendriers – on l’a vu le 6 novembre avec la
mise en examen de Martine Aubry dans un dossier lié à l’amiante
industrielle, près de trente ans après les faits! Si sanction il doit y
avoir, elle ne doit pas survenir à contretemps, comme une incongruité.
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