L'axe franco-allemand n'est pas une péripétie politicienne. C'est une nécessité historique. Attention de ne pas le détruire !
François Hollande affiche à l'égard de l'Allemagne
une certaine désinvolture. Au-delà des divergences qui peuvent exister
entre Paris et Berlin, le président de la République ne semble pas avoir
pleinement pris la mesure de l'enjeu fondamental que constitue la
relation franco-allemande. Lors du dîner "informel", mercredi 23 mai,
des chefs d'État et de gouvernement visant à préparer le sommet européen
du 28 juin, François Hollande s'est montré plutôt distant à l'égard d'Angela Merkel.
Là où ses prédécesseurs ne manquaient pas une occasion de démontrer la
proximité - voire la complicité - entre les deux pays, le nouveau chef
de l'État prend soin de relativiser l'importance de l'axe
franco-allemand. Comme si c'était une péripétie ! Comme si des solutions
alternatives existaient !
L'affaire n'est pas nouvelle : chaque nouveau président rêve d'un "ménage à trois", généralement avec l'Angleterre.
"On va voir si l'herbe est plus verte à côté avant de revenir vers le
pâturage rhénan", observe un diplomate familier du dossier. Rien n'est
en effet possible en Europe
sans le moteur franco-allemand. "Plus on est nombreux, plus celui-ci
doit être puissant", constate notre diplomate. L'engin fonctionne selon
le principe des moteurs à explosion : les crises périodiques déclenchent
ensuite une impulsion.
Vouloir isoler Merkel : une grosse erreur
Encore faut-il savoir gérer ces crises, ménager les susceptibilités, sauver les apparences, ne jamais accréditer l'idée que les rapports entre Paris et Berlin sont en train de se déliter. La prestation de François Hollande laisse, sur ce point, à désirer. Sur le fond : pourquoi avoir exigé, avant de devenir plus flou, une renégociation du pacte budgétaire (TSCG - traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'union économique et monétaire) dont on sait pertinemment qu'elle est inacceptable ? Le pacte a déjà été validé par plusieurs États et, pour entrer en vigueur, il suffit que 12 pays sur 17 de la zone euro le ratifient. Et pourquoi ressortir la vieille lune des eurobonds dont Berlin ne veut à aucun prix?Sur la forme : Hollande est à peine poli avec Angela Merkel et donne l'impression de vouloir l'isoler. Il feint d'ignorer que la chancelière n'est pas dans une position politique facile. Elle dirige une coalition, ce qui est toujours compliqué. Elle a dû batailler pour faire admettre à son opinion publique la nécessité d'aider la Grèce, pays qui a fait de la gabegie une méthode de comptabilité publique. Elle doit composer avec le Bundestag (chambre basse) et le Bundesrat (la chambre haute). Dans cette dernière, qui représente les Länder, l'opposition est majoritaire. Elle est sous le contrôle de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe qui veille comme le lait sur le feu à tout transfert de souveraineté vers l'UE. Angela Merkel ne peut pas faire tout ce qu'elle veut et surtout pas faire admettre aux Allemands qu'il faut payer plus...
Petits calculs
François Hollande aurait tort de spéculer sur une victoire des sociaux-démocrates aux prochaines élections. D'abord parce que celles-ci sont encore loin, en principe en 2013, et qu'il y a le feu dans la maison Europe. Ensuite parce qu'Angela Merkel est loin d'être battue d'avance. Enfin parce que c'est le SPD de Gerhard Schröder qui a mis en place les réformes (recul de l'âge de la retraite, flexibilité du marché du travail, diminution de la durée d'indemnisation du chômage) dont le Parti socialiste en France ne veut pas entendre parler.L' axe franco-allemand ne ressort pas de la politique politicienne, de petits calculs à court terme, des manoeuvres à courte vue. Depuis le traité de l'Élysée de 1963, la réconciliation entre les deux peuples voulue par de Gaulle et Adenauer, il s'agit d'une communauté de destin dictée par la géographie et l'histoire.
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