mercredi 18 avril 2012
La gauche, l'euro et la préférence française pour le chômage
Les
erreurs de la gauche n’ont pas été seulement sectorielles ; elles ont
touché aussi l’économie dans son ensemble. C’est le cas de la politique
du franc fort, puis de l’euro fort, inaugurée par le gouvernement
Bérégovoy en 1992.
Les socialistes français ont
toujours été favorables à l’Europe : Monnet, Mollet, Pineau, qui
figurent parmi les Pères de l’Europe étaient de sensibilité socialiste.
Au moins autant que de la démocratie chrétienne, l’Europe de Bruxelles
procède de l’impulsion social-démocrate. Inscrit dans cet héritage,
Jacques Delors négocia l’Acte unique européen, en 1986, qui a ordonné
l’uniformisation de toutes les normes de toutes sortes, techniques ou
professionnelles de l’Europe, pour fonder le marché, non plus commun,
mais unique, acte ratifié par la droite en 1987.
Rien
que de naturel, dès lors, à ce que François Mitterrand signe le traité
de Maastricht prévoyant la mise en place d’une monnaie commune
européenne. Non sans mérite, il le soumit à référendum le 21
septembre 1992 et le traité ne fut approuvé que de justesse (51,04 %).
On se souvient que la rumeur de sa maladie, répandue à dessein, et la
compassion qu’elle suscita fit basculer in extremis le vote en faveur du oui.
Ce
qui est en cause ici, ce n’est pas le projet de monnaie unique en tant
que tel mais les conditions dans lesquelles il a été mis en place.
Pour
préparer l’adoption de la monnaie unique par la France, le Premier
ministre socialiste Bérégovoy décida, en 1992, sous l’influence de
Jean-Claude Trichet, déjà en campagne auprès des Allemands pour devenir
le gouverneur de la future Banque centrale européenne, qu’il fallait
faire du franc une monnaie aussi forte que le mark. Il faut s’entendre
sur ce que signifie forte. Cet adjectif peut signifier la monnaie d’un
pays où la hausse des prix est strictement contrôlée. Mais il peut
signifier aussi une monnaie qui, selon les critères habituellement
employés en la matière : parité des pouvoirs d’achat, des prix de
revient, équilibre des échanges extérieurs, est évaluée haut,
éventuellement au-dessus de ce qu’elle devrait l’être. Cette
surévaluation contribue certes à restreindre l’inflation mais freine la
croissance et donc augmente le chômage. Augmentant le chômage, elle fait
obstacle à la hausse des salaires.
C’est le choix
qui a été fait en 1992. Il a eu des effets d’autant plus négatifs que
l’Allemagne, ayant absorbé sur le principe d’1 mark Est = 1 mark Ouest
l’énorme masse monétaire est-allemande, haussa considérablement ses taux
d’intérêt pour empêcher l’inflation ; la France se sentant obligée de
suivre, étrangla sa croissance. D’une certaine manière, elle partagea
avec l’Allemagne, à son détriment, le poids de la réunification.
Ce
choix fut confirmé en 1999, au moment de la conversion du franc en
euro. Plus le taux de change de la monnaie est élevé, plus sa
compétitivité se trouve handicapée. Alors que la plupart des pays
s’efforcèrent de rentrer dans l’euro au plus bas taux pour être plus
compétitifs, la France, désireuse d’égaler l’Allemagne, accepta une
parité peu favorable à l’emploi et aux exportations. Avant
l’entrée dans la zone euro, la France avait un taux de croissance
supérieur à la moyenne européenne, il est devenu inférieur après.
La
racine de ce que beaucoup appellent la "préférence française pour le
chômage" se trouve là. Certes, ni entre 1993 et 1997, ni après 2002, la
droite ne remit en cause cette politique, il était néanmoins important
de noter que les décisions capitales ont été prises alors que la gauche
se trouvait au pouvoir. Ces décisions furent fatales au niveau de vie populaire. Les
trois millions de chômeurs plus ou moins permanents que compte notre
pays peuvent dire merci au parti socialiste, principal responsable de
leur situation de précarité.
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