lundi 23 avril 2012
La fuite des capitaux hors de France a déjà commencé
Et cela n’est rien en comparaison de l’exil du capital humain auquel nous nous préparons.
Un phénomène est
passé inaperçu depuis août 2011: la lente fuite des capitaux français
vers l’étranger. La crise bancaire de l’été dernier a donné le signal
d’une course extrêmement défavorable pour l’économie française :
l’aversion sourde mais grandissante des acteurs économiques pour notre
pays.
Plusieurs signaux faibles sont
régulièrement émis sur ce sujet, sans que l’opinion publique n’en ait
acquis une conscience claire ni ne les interprète simplement.
Dans un monde où la circulation des capitaux est le lot commun, après
tout, plus rien n’attire vraiment l’attention dès lors qu’il s’agit
d’une sphère où la notion de nationalité a perdu son sens.
Pourtant, le 17 avril, Bloomberg a publié un article au titre évocateur : «La France pourrait-elle quitter l’euro? Certains épargnants pensent que oui». L’article est un tantinet racoleur et malhonnête, car il mélange des notions assez différentes.
En
fait, Bloomberg pointe du doigt le fait que, depuis le mois d’août
2011, la banque de France a déboursé près de 90 milliards d’euros auprès
des banques nationales allemandes et hollandaises, qui sont autant de
liquidités en moins sur le marché français. Pour être schématique, les
sommes colossales que la Banque centrale européenne a déversées sur le
marché bancaire depuis la crise de l’été dernier ont principalement
servi à acquitter des factures au profit des banques allemandes et
hollandaises.
Cette mécanique est prévue par les traités. Les
banques nationales, dans l’eurosystème, ont en effet pour fonction
d’assurer les transferts monétaires entre pays de l’Union dans le cadre
des échanges intra-communautaires. Pour être précis, elles assurent les règlements des paiements scripturaux internationaux ou transfrontaliers.
Dans
un contexte où notre déficit extérieur est abyssal, le phénomène
s’explique aisément: la banque de France transfère plus de liquidités
vers ses voisins qu’elle n’en reçoit d’eux, puisque nous importons
beaucoup plus que nous n’exportons.
Le
problème est que, jusqu’en août 2011, le phénomène inverse se
produisait. La France était bénéficiaire nette des flux de capitaux
provenant de ses voisins, dans une Europe où l’Irlande, l’Italie et dans
une certaine mesure l’Espagne, perdaient chaque jour une part de leurs
liquidités.
Depuis août 2011, la France a
rejoint le bataillon des contributeurs, Italie et Espagne en tête, dont
les banques centrales inondent les marchés hollandais et allemands de
liquidités prêtées à bas prix par la banque centrale européenne.
Simplement pour équilibrer la balance commerciale.
Voici la France financièrement réduite au rang de ses voisins méditerranéens, de plus en plus dépossédée de ses avoirs.
Selon Bloomberg, il faut y voir le signe d’une tentation pour beaucoup de Français de quitter l’euro. Objectivement,
l’explication est fumeuse, mais elle nous renseigne utilement sur les
paris que les financiers américains font aujourd’hui quant à l’avenir de
la monnaie unique, et quant à la capacité de la France à y tenir un
rôle. Les marchés ont acquis la conviction que l’euro était en
phase terminale et que la France pourrait bien être celle qui lui
donnerait le coup de grâce
Signe des temps, le 13 avril, les Echos publiaient un article sur l’assurance-vie au Luxembourg.
Cette sorte de publi-reportage expliquait patiemment pourquoi le moment
était venu de placer son argent sur des comptes au Luxembourg, au lieu
de gaspiller son épargne sur des contrats français. Petit à petit, la
conviction se fait donc jour que les capitaux ont tout intérêt à quitter
la France.
Encore cela n’est-il rien en comparaison de l’exil du capital humain auquel nous nous préparons.
Déjà, tant de matière grise française émigre vers les pays anglo-saxons
pour échapper aux pesanteurs aristocratiques de notre société. Un jeune
de talent, qui ne sort pas d’une grande école, n’a aucun intérêt
objectif à rester en France.
Ce mal français-là, est bien plus grave que le mal financier.
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