TOUT EST DIT

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vendredi 9 mars 2012

Pourquoi certains créanciers de la Grèce pourraient préférer une faillite du pays au plan de sauvetage européen

Les créanciers de la dette grecque doivent décider ce jeudi s'ils acceptent de renoncer à leur mise de départ en échange de créances garanties par l'Union Européenne. Un arrangement moins alléchant qu'un défaut de paiement du pays.

C'est le jour J pour la Grèce... Son avenir financier est désormais entre les mains des créanciers privés détenteurs de sa dette. Ils devront au plus tard ce soir à 21 heures se prononcer sur un élément clé pour le sauvetage du pays : l'effacement de 105 milliards d'euros de dette sur un montant total de 355 milliards d'euros.

Concrètement, les gouvernements européens ont demandé au secteur privé de renoncer à 53,5 % de ses créances grecques en échange de nouvelles obligations à très long terme et d’obligations du FESF (Fonds européen de stabilité financière) pour les 46,5 % restants, avec une part de garantie européenne.

Quels sont les détenteurs de la dette grecque ?

Rappelons quels sont à ce jour les possesseurs des 355 milliards d'euros de la dette grecque :
  • environ 155 milliards d'euros sont détenus par le “secteur public international”, et ne seront pas décotés ;
  • environ 200 milliards d'euros sont détenus par des investisseurs privés, à qui on propose une décote.
 
Ces 200 milliards d'euros détenus par des privés se décomposent ainsi :
  • 50 milliards d'euros pour des banques et des assureurs internationaux ;
  • 80 milliards d'euros pour les banques et fonds de pensions grecs ;
  • 70 milliards d'euros pour des fonds d’investissements internationaux.

 

Quels sont les impacts de la restructuration de la dette ?

En réalité, ces nouvelles obligations proposées aux créanciers privés ont un taux si faible que cela revient pour eux à une perte finale d’environ 70 % (et non 50% comme tout le monde semble le laisser entendre).
 La vérité est que le ballon d’oxygène pour la Grèce est fort limité. En effet, dans un premier temps, la participation est censée être « volontaire ». On peut donc estimer que 100 % des banques grecques et 90 % des banques internationales participeront - car les gouvernements ont "tordu le bras" de leurs banques.
 

Certains détenteurs privés de la dette grecque n'ont aucun intérêt à accepter le plan de sauvetage européen

La question porte donc sur les 70 milliards d'euros détenus par des fonds d’investissements. Les fonds d'investissement ont en fait racheté ces derniers mois cette dette sur le marché secondaire à des banques bien heureuses de s’en débarrasser, même avec des pertes. Beaucoup de ces fonds font le pari suivant : ils ne se porteront pas volontaires, et du coup, la Grèce, utilisant les fonds européens, les remboursera à 100 %.  En fait, la plupart possèdent des CDS (contrats d'assurance) grecs, qui les protègeront en cas de défaut.
 
Ces derniers investisseurs n’ont donc aucun intérêt à être volontaires - ils ont même un fort intérêt au défaut grec... 40 % de participation serait donc un bon résultat, ce qui ferait autour de 77% de participation totale, soit une réduction colossale de 105 milliards d'euros.


L'objectif de la Grèce...

Le but de la Grèce est d'atteindre au moins 66 % de participation totale. En dessous, elle a déclaré qu'elle ne lancerait pas l'opération d'échange - on rentrerait alors dans un défaut brutal.
 
Au delà de 75 % de participation, elle a déclaré qu'elle pourrait appliquer des clauses d'actions collectives, ce qui revient à dire qu'elle forcera les non-volontaires à appliquer, et décottera donc 100 % de sa dette.
 
Nous avons vu que le taux de 75 % semble atteignable sous les hypothèses retenues. Toutefois, des rumeurs font état d'une participation à ce jour de 40 à 50 % de créanciers privés favorables à un effacement volontaire partiel de la dette.
 
Nous connaîtrons dans la nuit le résultat final de l'opération.

Tout ça pour ça...

Malheureusement, l'opération ne soldera pas par un effacement final de 105 Md€.
 
En effet, la participation des banques grecques entraînera leur faillite. Au moment de la restructuration, l’Union européenne va donc re-prêter de l’argent pour recapitaliser ces banques : environ 40 milliards d'euros de dette nouvelle, plus 23 milliards d'euros de prêts nouveaux du FESF pour aider le pays.
 
On aboutirait ainsi à un effacement de 42 milliards d'euros (= - 105 + 40 + 23), auquel il faut rajouter les 20 milliards d'euros de déficit public 2012.
 
Le bilan de toute cette opération sera au final un allègement de la dette d'environ 20 milliards d'euros au 31 décembre 2012, ne faisant passer le ration Dette / PIB que de 161 % à 159 % - le pays étant en plus en récession... En revanche, la part des prêts publics internationaux (et donc du risque) passera en un an de 155 à 242 milliards d'euros…


Attention au véritable montant des contrats d'assurance !

Ainsi, si la participation atteint 75 %, la Grèce obligera les non-volontaires à participer.

Dès lors, il y aura un vrai défaut qui déclenchera les fameux CDS. On essaie de faire croire que les montants sont limités - on parle de 3 milliards d'euros en net - mais le souci est qu’il convient de ne pas perdre les montants bruts, qui semblent avoisiner les 50 milliards d'euros et qui ne se compenseront peut-être pas facilement entre banques mises en difficulté....
 
Comme souvent - marchés boursiers, produits dérivés, bilans bancaires, bilan BCE (Banque centrale européenne), engagements hors-bilan -, l’opacité règne en maître, ce qui n’est jamais la meilleure façon de sortir d'une situation dangereuse…

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