Ce vendredi noir a-t-il été celui du coup de grâce pour sa réélection? Dans un sondage LH2/Yahoo dévoilé dimanche soir, Sarkozy semble en tout cas marquer le pas. Dans cette étude réalisée au moment de l'annonce de la dégradation de la note française, il perd 2,5 points d'intentions de vote au premier tour à 23,5%, loin derrière François Hollande (30%, -1,5 point). Seule Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon semblent tirer profit de la nouvelle: la présidente du FN progresse de 3,5 points en un mois pour atteindre 17% d'intentions de vote quand le patron du Front de gauche atteint 8,5% (+2 points). François Bayrou, lui, reste stable à 14% (+1 point).
La stratégie du kamikaze
Après avoir comblé petit à petit son retard sur Hollande ces dernières semaines, le chef de l'Etat va-t-il à nouveau plonger dans les sondages, et voir resurgir le spectre d'une élimination dès le premier tour par Marine Le Pen? En tout cas, jamais président sortant n'aura été en position aussi défavorable à trois mois du premier tour. Pour l'emporter le 6 mai prochain, il faudrait qu'il mette fin à la malédiction du chômage, toujours fatal aux gouvernements sortants quand l’emploi s’effondre, et qu'il devienne le premier président réélu hors cohabitation. Il faudrait aussi qu'il parvienne à garder son poste dans une Europe où les sortants sont balayés à chaque élection. Le défi paraît impossible à relever et.... « ça l'excite », sourit un visiteur du soir. « Il se dit "personne ne l'a jamais fait. Alors si je le fais..." ».Pour y parvenir, Sarkozy a opté pour la stratégie du kamikaze : tout oser, même les mesures les plus impopulaires. Pour faire oublier son bilan, et avec l'espoir, ténu, que les Français préféreront finalement un président réformateur à un Hollande « dilué, rondouillard, radical-socialiste et peu adapté à la période », selon l'expression d'un ministre. « Sarkozy est condamné à prendre tous les risques dans cette élection », confirme un membre du gouvernement. « Il estime qu'il n'a rien à perdre, et c'est une vraie force », assure un autre. « Sur beaucoup de sujets, il va décoiffer », prévient un visiteur régulier.
La contre-attaque devrait débuter mercredi avec le « sommet de crise » convoqué à l'Elysée avec les représentants des syndicats et du patronat. « Je dirai la vérité aux partenaires sociaux », a averti dimanche le chef de l'Etat. TVA sociale et enterrement définitif des 35 heures : les dossiers sur la table sont des sujets qui fâchent. Sarkozy ira ensuite les « vendre » lui-même aux Français « à la fin du mois ».
« Pousser Hollande dans les cordes... »
À entendre François Fillon, la hausse annoncée de la TVA sur les produits importés ne devrait pas s'accompagner d'un coup de pouce sur les fiches de paie des Français, au risque d'amputer encore davantage leur pouvoir d'achat. « Notre responsabilité, c'est de baisser le coût du travail pour mettre un coup d'arrêt aux délocalisations, a plaidé le Premier ministre dans le Journal du Dimanche. C'est la bonne santé de l'économie et donc de nos entreprises qui permettra d'augmenter les salaires ». « S'il n'y a pas un geste qui est fait sur les cotisations des salariés, je ne sais pas expliquer cette mesure », s'inquiète pourtant un ministre, à l'image de beaucoup de parlementaires UMP.Pour pousser ces réformes et installer l'image d'un président aux manettes jusqu'au bout, Sarkozy devrait aussi bousculer les usages en prolongeant la session parlementaire au-delà de la fin février, campagne présidentielle ou pas. Lui-même devrait entrer dans la bataille le plus tard possible, la seule véritable date butoir étant le 16 mars, date limite pour le dépôt des 500 parrainages au Conseil constitutionnel. « Six semaines de campagne, ça suffit largement », assure un ministre.
D'ici là, les troupes UMP sont chargées de pousser le candidat PS François Hollande dans ses retranchements. Il s'agit de l'empêcher de mener « une campagne à la Rajoy (le nouveau chef du gouvernement espagnol, tombeur du socialiste Zapatero en novembre, NDLR) : "je ne dis rien et je passe en surfant sur le rejet du pouvoir et la crise" », décrypte un ministre. « Le travail de la cellule riposte, c'est d'obliger Hollande à sortir du bois, de le pousser dans les cordes pour qu'il mette les choses sur la table ». En attendant la faute.
Paradoxalement, « la crise est à la fois une faiblesse et un atout pour Sarkozy », souligne un de ses conseillers. Certes, elle pourrait bien le faire tomber. Mais « s'il n'y avait pas la crise, il serait déjà battu ».
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