Le mauvais score de Nicolas Sarkozy dans les sondages, l’élimination de DSK, l’échec de Nicolas Hulot, le retrait de Jean-Louis Borloo : les circonstances avaient tant joué en sa faveur que François Hollande n’avait pas eu à prendre beaucoup de risques pour gagner la primaire et monter dans les sondages.
Le danger, pour tout candidat, serait d’être élu faute de mieux et non pas pour ce qu’il promet et représente. Il ne suffit pas de gagner une présidentielle, il faut durer. Pour François Hollande, dont c’était hier la vraie entrée en campagne, l’enjeu était celui-là : montrer qu’il n’est pas le personnage flou et mou dont l’accusait Martine Aubry. Pas le porteur de projet vide, dont l’affublait Ségolène Royal. Pas la girouette que les couacs à répétition, grossis par la loupe sarkozyste, semblaient montrer. Il lui fallait prouver que sa gentillesse n’est pas une faiblesse déguisée.
Concurrencé par François Bayrou sur le terrain de la gouvernance, asticoté par un Jean-Luc Mélenchon qui s’érige en dépositaire de la vraie gauche, suspecté par les écologistes de faire peu de cas de l’environnement, il lui fallait borner son terrain électoral de repères visibles. Le niveau auquel il a situé son propos va sans doute rendre la tâche de ses compétiteurs plus rude. Et le débat plus passionnant.
Jean-Luc Mélenchon aura plus de mal à exploiter sa présumée indulgence envers la finance : c’est sur ce thème que François Hollande a été le plus sévère, à travers la fiscalité, la réforme des banques, la fin des stocks options.
François Bayrou aura plus de mal à cultiver l’exclusivité d’une autre gouvernance : le candidat socialiste promet une présidence participative et plus modeste, des pouvoirs partagés, une justice indépendante, une France plus décentralisée.
Sur le terrain international
Nicolas Sarkozy, dont la candidature ne pourra pas attendre éternellement, et même Marine Le Pen, devront l’affronter sur leur terrain favori après la promesse que la République rattrapera les caïds et les fraudeurs. Après son engagement à retrouver l’équilibre budgétaire avant la fin du mandat. Après les hymnes à la nation entonnés à maintes reprises.
Tous trouvaient le candidat socialiste trop franco-français, trop provincial ? Le voici qui s’avance sur le terrain international en Afghanistan, au Proche-Orient, en Europe bien sûr, promettant de renégocier le traité annoncé le 9 décembre, de renforcer la Banque centrale, de se battre pour la relance.
Sur la forme, enfin, François Hollande, par nature discret sur lui-même, soigne son portrait et expose l’histoire d’un homme volontaire, constant et convaincu. Il a tenté – réussi ? – de suggérer une image du président qu’il pourrait être.
Sur le papier, tout semble parfait. Cette construction ne vaut évidemment que si elle n’est pas démentie dès demain par des dérapages qui traduiraient des incohérences, des insincérités, des impossibilités à tenir tant de promesses. Elle ne vaut que si le chiffrage du projet ne déclenche pas la menace d’une nouvelle dégradation de la note française et un envol des taux d’intérêts. Elle ne vaut que s’il réussissait, une fois élu, à convaincre de sa capacité à associer les forces sociales et politiques au-delà de la gauche.
Autant de grain à moudre durant les trois mois, exactement, qui nous séparent du premier tour.
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