mardi 19 avril 2011
L'Europe des populistes
C'est désormais une tendance lourde. Elle se confirme à presque chaque élection depuis deux ans. La vague populiste grandit en Europe au rythme de la crise. Après les Pays-Bas, la Hongrie, la Suède, le Danemark, la Suisse... c'est au tour de la Finlande d'être touchée. En multipliant son score électoral par cinq, le parti des « vrais Finlandais » rejoint un club de moins en moins fermé et de plus en plus bruyant.
De pays à pays, des distinctions seraient nécessaires pour décrire ce phénomène qui mêle tout à la fois sanction de la classe politique, rejet de la mondialisation, peur des conséquences sociales de la crise. Mais ces mouvements ont tous en commun au moins deux ennemis : l'Europe et l'étranger. Le premier, l'Europe, étant bien sûr, aux yeux de ces « vrais populistes », responsable de la prétendue invasion du second, l'étranger.
En période de crise économique, ces mécanismes de réaction n'ont rien de très surprenant. Les exemples fourmillent dans le passé. À tel point que l'esprit court aisément au souvenir des années 1930, avec la peur, aussi mal dissimulée que sans doute exagérée, de voir le film se répéter.
Il est vrai que cet échafaudage en perpétuelle construction qu'est l'Union européenne y met du sien, beaucoup même, pour s'attirer les foudres des nouveaux tribuns nationalistes. Sur trois sujets majeurs, à savoir la défense de la monnaie unique, l'intervention en Libye et la gestion de la question migratoire, l'Europe est divisée.
La partie de ping-pong que Paris et Rome jouent depuis quelques jours sur le dos des migrants tunisiens en fournit un nouvel exemple. S'il ne s'agissait pas d'êtres humains, il y aurait quelque chose de cocasse. Les deux pays ne discutent pas, ensemble, des moyens de gérer les répercussions de la révolution tunisienne et du conflit libyen, mais tentent de se « refiler » le problème.
Pour quelles raisons ? Essentiellement, des motifs électoralistes. Cantonale, régionale, législative ou présidentielle, qu'importe le scrutin. À Londres, Rome, Paris ou Berlin, il s'agit, surtout, de ne pas froisser l'électeur dont dépend la survie politique du gouvernement. Non pas celle de Catherine Ashton, mais des gouvernements qui l'ont nommée. Même la Belgique, incapable de former un gouvernement, retrouve du nerf pour menacer de fermer ses frontières.
Si la peur a changé de camp à Tunis ou au Caire, en Europe, elle gagne du terrain. En dépit de son PIB, le premier au monde. De son système de protection sociale, si enviable. De son cadre juridique, si riche en garanties pour les droits de la personne. Ces évidences sont devenues presque invisibles dans le débat public, et c'est là un premier succès du populisme. On a plus peur à Helsinki qu'à Carthage.
Or, la question migratoire est un enjeu considérable. International par nature. Aucun pays européen ne peut régler seul un phénomène d'une telle dimension. En matière d'immigration, l'angélisme et le populisme sont les meilleurs moyens de ne pas résoudre la question. Résoudre, c'est-à-dire réguler, ce qui impose des contrôles mais exige aussi d'investir politiquement, économiquement, sur l'autre rive de la Méditerranée. Le plan Marshall ne fut pas une oeuvre de charité, mais un investissement économique pour les États-Unis, alliant pacification et développement. Un projet, en somme. Pas un repli.
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