Brigitte Bardot est sortie de sa réserve, hier, pour un « coup de gueule », dont son entourage souligne qu’il touche à la « politique générale », dépassant la cause des animaux. Peu suspecte d’être une figure de gauche, la vedette de « Babette s’en va-t-en guerre » et du « Mépris » lance au chef de l’État que son « passage laisse une trace d’une négativité et d’une médiocrité inquiétantes ». L’irruption de Mme Bardot dans le débat politique est, au climat de 2010, ce que l’annulation des tiercés fut à celui de mai 1968 : un indicateur que les choses empirent.
Depuis que Nicolas Sarkozy est nommément cité dans une accusation, jusque-là médiatique, de financement illégal de sa campagne électorale de 2007 — illégal aussi bien pour son montant que pour son cheminement secret -, on pense au scandale du Watergate. Non à cause du détail commun des écoutes dans ces deux affaires, différentes par leur objet, mais parce que l’Élysée est désormais touché de plein fouet, comme le fut la Maison Blanche en 1974. Ce précédent montre qu’une tactique de simples dénégations suffira aussi peu que le rappel au principe de la présomption d’innocence à écarter les soupçons. Accuser l’opposition d’exploiter le climat scandaleux pour mettre en échec les projets du gouvernement — ce que, naturellement, elle fait — ne démontre pas davantage qu’elle fabrique de toutes pièces des affaires sans fondement. Or, aussi bien pour son autorité dans le pays que pour son image au dehors, le sommet de l’État ne peut rester noyé dans les brumes de l’équivoque. S’il est sûr de ses actes, il est fondé à mener une contre-attaque qui démontrerait une machination hypothétique, tant il est vrai que les témoignages qui se multiplient ne sont pas paroles d’Évangile, et souvent de deuxième main.
Avec le Watergate, Richard Nixon était devenu « tricky Dick » (Ric le tricheur). L’enjeu, pour Nicolas Sarkozy, est de montrer qu’il n’est pas « tricky Nick ». Si, au contraire, les faits devaient enrichir le dossier des convergences entre le chef de l’État et certaines puissances d’argent, il y aurait un prix politique à payer. Le précédent président de la République fédérale d’Allemagne, Horst Köhler, s’est retiré pour moins que cela. Il est vrai que sa fonction est surtout honorifique. Le mot vient d’« honneur ».
André Schlecht
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