Sur les cartes du Proche-Orient, ce n'est qu'un minuscule lambeau de terre, aux confins de l'Égypte. Plus d'un million cinq cent mille Palestiniens y vivent reclus, doublement punis par le blocus israélien et les méthodes très musclées du Hamas. Cet espace, c'est la bande de Gaza. Symbole de l'impasse générale dans laquelle le processus de paix a sombré depuis dix ans.
Dans les prochains jours, les ministres espagnol, français et italien des Affaires étrangères se rendront à Gaza. Leur mission officielle, qui a reçu le soutien de leurs homologues allemand et britannique, sera de vérifier l'allègement du blocus promis par Israël. C'est une occasion à ne pas manquer pour l'Europe si elle veut vraiment reprendre pied diplomatiquement sur ce dossier laissé à la dérive.
Depuis son offensive meurtrière contre le territoire palestinien, fin 2008, Israël n'a cessé de voir s'accentuer son isolement sur la scène internationale. Jamais, depuis plusieurs décennies, le soutien américain n'avait été aussi conditionnel. En Europe, même les gouvernements les plus proches d'Israël, comme l'actuel gouvernement italien, ne trouvent plus les mots pour soutenir un pays, certes menacé, mais aussi enfermé dans une logique de plus en plus indéfendable.
Le raid israélien contre la flottille internationale venue rompre le blocus naval de Gaza aura, de ce point de vue, été emblématique. La logique de l'enfermement sécuritaire est tellement prégnante, dans l'actuel gouvernement israélien, que le sens politique de cet événement semble lui avoir échappé. Car, si la flottille était un piège, il ne fallait pas tomber dedans. Si ce n'était pas le cas, la cause humanitaire, universellement évidente face à un blocus si démesuré, n'en est que plus légitime.
L'allié turc s'éloigne
Or, en tuant neuf Turcs, le 31 mai, lors de cet assaut, Israël vient de s'aliéner l'un de ses rares alliés dans la région. Sous la bénédiction américaine, l'axe militaire et stratégique Ankara-Tel Aviv a longtemps bénéficié de l'emprise du camp laïc au sommet de l'État turc pour asseoir un cadre stable. Ce n'est plus le cas. Les nouvelles ambitions diplomatiques de la Turquie, qui caresse son image de puissance régionale et redouble d'activité auprès des capitales arabes, ne coïncident plus avec celles d'Israël.
En un mois, la Turquie a ainsi multiplié les signes de rupture en rappelant son ambassadeur et en fermant son espace aérien aux avions militaires israéliens qui ont besoin d'un allié dans la région pour s'entraîner. Ces gestes vont laisser des traces et pourraient même affecter les relations commerciales entre les deux pays, jusqu'ici très intenses dans les domaines civils et militaires. Cette détérioration des relations turco-israéliennes inquiète Washington, qui compte sur l'appui stratégique de la Turquie, notamment dans le dossier irakien.
Dans un tel contexte, le sort de Gaza condense bien des enjeux. C'est d'abord une urgence humanitaire. Certes, elle est habilement exploitée par la diplomatie turque, mais il revient aux alliés d'Israël d'expliquer au gouvernement Netanyahou une évidence. En isolant un territoire aussi faible, c'est l'isolement et la faiblesse de sa propre position qu'Israël étale au grand jour.
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