Les prix de certaines marques de cigarettes diminuent cette semaine, dans le but de vaincre le commerce illégal et transfrontalier. Roselyne Bachelot se dit ''scandalisée'' et se prépare à contre-attaquer en augmentant les taxes, ce qui pourrait bien avoir tout l'effet contraire
Depuis lundi, et selon un arrêté paru au Journal Officiel, les prix de certaines marques de cigarettes (AFP) ont baissé. Les paquets de Rothmans, Lucky Strike (groupe British American Tobacco) sont passés de 5,50 euros à 5,30 euros, tandis que des paquets de tabac à rouler Drum (groupe britannique Imperial Tobacco) sont passés à 6,65 euros au lieu de 7 euros. Et si cela arrange bien les fumeurs, cette décision est loin de satisfaire la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot.
Roselyne Bachelot, outrée
En novembre, les prix du tabac avaient augmenté de 6%. Pour justifier les prix extravagants des paquets de cigarettes, l'Etat français discourt sur une ''action de mobilisation pour la santé publique'', visant à dissuader les plus jeunes de commencer à fumer. L'initiative des industriels, British American Tobacco et Imperial Tobacco, est donc perçue comme une véritable provocation au sein du ministère de la Santé et des associations anti-tabac. Selon Roselyne Bachelot, qui s'est dite ''absolument scandalisée'', ''c'est une initiative délibérée des industriels du tabac pour attirer de nouveaux fumeurs, tout spécialement des jeunes et des femmes''. Difficile à nier pour les deux compagnies. ''Le tabac à rouler pour lequel la baisse est la plus forte, est largement consommé par les plus jeunes qui ont l'impression de faire un geste écologique en roulant leurs cigarettes. S'y ajoute l'avantage économique, étant donné leur budget restreint. Il est donc très net que l'on cherche à inciter les jeunes à fumer'', déplore Joseph Osman, directeur de l'Office français de prévention du tabagisme (OFPT). En réaction, la ministre de la Santé a affirmé qu'elle allait proposer ''une augmentation des taxes pour remettre les cigarettes à un prix dissuasif''. Cette augmentation ''peut uniquement se prendre en loi de Finance'', a-t-elle précisé, c'est-à-dire à l'automne prochain.
Erreur stratégique
En 2003-2004, lors de l'augmentation de 40 % des taxes sur les paquets de cigarettes, les buralistes étaient 31.500. Aujourd'hui, ils ne sont plus que 28.000. La raison ? Ce n'est pas que l'envolée des prix ait freiné le taux de fumeurs ni même le nombre de jeunes commençant à fumer, c'est simplement que les concernés partent se fournir en dehors des frontières de l'Hexagone, le plus souvent en Espagne, où la cartouche de Lucky Strike coûte 38,50 euros, contre 53 euros en France. Une concurrence de taille, doublée de l'apparition de cigarettes low-cost ces deux dernières années, et de la future apposition d'images chocs sur les paquets, justifie Yves Trevilly, le porte-parole du groupe British American Tobacco. Mais cette baisse des prix n'a rien de sagace d'après les buralistes. ''Tout ce que British American Tobacco aura réussi à faire, c'est que les taxes augmentent. Pour garder leurs marges, les fabricants vont devoir augmenter les prix. Cette baisse est donc une erreur stratégique qui va coûter cher à tout le secteur'', déplore Jean-Luc Renaud de la Confédération des buralistes. La filiale française Japan Tobacco International souligne qu' "augmenter les taxes sur le tabac provoquerait une accélération du développement du commerce illégal et des achats dans les pays limitrophes".
Mauvaise stratégie encore une fois, pour la ministre qui avait commandé, en septembre dernier, plusieurs millions de vaccins en trop pour vaincre l'épidémie de grippe A. Yves Trévilly juge la réaction de la ministre ''un peu surjouée'', car la demande de baisse des prix des paquets de cigarettes avait été déposée il y a déjà quatre mois.
mercredi 7 juillet 2010
CIGARETTES – La taxe brûlée par les deux bouts
Lauriane Rialhe
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